La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

23/11/2021 | FRANCE | N°20DA01944

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 1ère chambre, 23 novembre 2021, 20DA01944


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SCEA Mahette, le GFR F..., la SCEA du Domaine, la SCI le Vieux Château, la SCI les Communs du Vieux Château, la SCEA Mancheron, l'EARL l'Ecurie de l'Etrier d'Or, Mme R... F..., Mme Q... F..., Mme A... F..., M. G... F..., M. M... F..., M. I... F..., Mme N... C..., Mme H... C..., M. D... B..., M. L... E... et M. O... P... ont demandé au tribunal administratif d'Amiens, d'une part, d'annuler la délibération du 9 juillet 2019 par laquelle le conseil municipal de la Chapelle-en-Serval a approuvé le plan local d

'urbanisme de la commune, en tant qu'il crée une zone Ace, qu'il per...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SCEA Mahette, le GFR F..., la SCEA du Domaine, la SCI le Vieux Château, la SCI les Communs du Vieux Château, la SCEA Mancheron, l'EARL l'Ecurie de l'Etrier d'Or, Mme R... F..., Mme Q... F..., Mme A... F..., M. G... F..., M. M... F..., M. I... F..., Mme N... C..., Mme H... C..., M. D... B..., M. L... E... et M. O... P... ont demandé au tribunal administratif d'Amiens, d'une part, d'annuler la délibération du 9 juillet 2019 par laquelle le conseil municipal de la Chapelle-en-Serval a approuvé le plan local d'urbanisme de la commune, en tant qu'il crée une zone Ace, qu'il permet en zone A, Ace et N la réalisation d'une déviation et crée à cet effet l'emplacement réservé n° 6, qu'il classe en zone N une partie du centre équestre et des parcelles d'assiette de leur activité piscicole et agro-touristique, qu'il classe en espace boisé classé les parcelles cadastrées AH n° 105 et AE n° 145, qu'il classe en " élément protégé du paysage " la pépinière située sur la parcelle cadastrée OE n° 873 et en tant qu'il crée l'emplacement réservé n° 4 et, d'autre part, d'enjoindre à la commune de La Chapelle-en-Serval de modifier le règlement de la zone N et éventuellement le plan de zonage du plan local d'urbanisme pour y autoriser tous aménagements et constructions liés aux activités du centre équestre et à l'activité de pisciculture et d'agrotourisme qu'ils gèrent.

Par un jugement n°1903031 du 29 septembre 2020, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 7 décembre 2020, et un mémoire, enregistré le 2 août 2021, la SCEA Mahette, le GFR F..., la SCEA du Domaine, la SCI le Vieux Château, la SCI les Communs du Vieux Château, l'EARL l'Ecurie de l'Etrier d'Or, Mme R... T... veuve F..., Mme Q... F... veuve C..., Mme A... F... épouse K..., M. G... F..., M. M... F..., M. I... F..., Mme N... C... épouse S..., Mme H... C... épouse J..., M. L... E... et M. O... P..., représentés par Me Annelies Sam-Simenot, demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler la délibération du 9 juillet 2019 par laquelle le conseil municipal de la Chapelle-en-Serval a approuvé son plan local d'urbanisme, en tant qu'il crée des zones Ace, qu'il permet en zone A, Ace et N la réalisation d'une déviation et crée à cet effet l'emplacement réservé n° 6 et enfin qu'il classe en zone N une partie du centre équestre et des parcelles d'assiette de leur activité piscicole et agro-touristique ;

3°) de mettre à la charge de la commune de La Chapelle-en-Serval une somme de 8 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- le jugement attaqué est insuffisamment motivé, est entaché d'une contrariété de motifs et a omis d'examiner les moyens tirés de l'illégalité des articles A 2.1 et N 2.1 du règlement ;

- la délibération attaquée est entachée d'un vice de procédure à défaut de versement de l'avis émis par le parc naturel régional dans le dossier soumis à enquête publique ;

- elle est entachée d'un vice de procédure en raison des modifications apportées avant et au cours de l'enquête publique au règlement sans procéder aux consultations requises ;

- elle méconnaît les articles L. 151-4 et R. 151-3 du code de l'urbanisme en raison des insuffisances du rapport de présentation qui ne justifie pas l'élargissement du bio-corridor et qui ne comporte pas d'évaluation environnementale suffisante ;

- elle méconnaît l'article L. 153-21 du code de l'urbanisme en raison des modifications apportées après tenue de l'enquête publique ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation en ce qu'elle crée un bio-corridor surdimensionné ;

- elle méconnaît l'article L. 151-8 du code de l'urbanisme en ce que le règlement n'est pas cohérent avec le projet d'aménagement et de développement durables ;

- elle méconnaît l'article R. 151-24 du code de l'urbanisme, n'étant pas cohérente avec le projet d'aménagement et de développement durables ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation, d'une erreur de fait et d'un détournement de pouvoir, en ce qu'elle crée une zone N dans la parcelle où est situé leur exploitation équestre.

Par des mémoires en défense enregistrés les 12 avril et 28 septembre 2021, la commune de La Chapelle-en-Serval, représentée par Me Philippe Peynet, conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge des appelants la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que les moyens contenus dans la requête ne sont pas fondés.

Par un courrier du 19 octobre 2021, les parties ont été, d'une part, informées que la cour est susceptible d'accueillir le moyen tiré de l'insuffisance du rapport de présentation sur la définition des impacts environnementaux de la création de l'emplacement réservé n° 6 et sur les mesures à envisager pour éviter, réduire et compenser ces impacts et, d'autre part, invitées à présenter leurs observations sur les modalités et le délai utiles pour la régularisation de ce vice.

Par un mémoire enregistré le 21 octobre 2021, les appelants ont présenté des observations en réponse au courrier du 19 octobre 2021.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'environnement ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Stéphane Eustache, premier conseiller,

- les conclusions de M. Aurélien Gloux-Saliou, rapporteur public,

- et les observations de Me Annelies Sam-Simenot représentant la SCEA Mahette et autres, et de Me Hanna Alibay représentant la commune de Chapelle en Serval.

Considérant ce qui suit :

1. Par une délibération du 9 juillet 2019, la commune de La Chapelle-en-Serval a approuvé son plan local d'urbanisme. La société civile d'exploitation agricole (SCEA) Mahette, le groupement foncier rural (GFR) F..., la SCEA du Domaine, la société civile immobilière (SCI) le Vieux Château, la SCI les Communs du Vieux Château, la SCEA Mancheron, l'entreprise agricole à responsabilité limitée (EARL) l'Ecurie de l'Etrier d'Or, Mme R... F..., Mme Q... F..., Mme A... F..., M. G... F..., M. M... F..., M. I... F..., Mme N... C..., Mme H... C..., M. D... B..., M. L... E... et M. O... P... ont demandé l'annulation partielle de cette délibération au tribunal administratif d'Amiens, qui a rejeté leur demande par un jugement du 29 septembre 2020.

2. Les mêmes personnes, à l'exception de la SCEA Mancheron et de M. D... B..., relèvent appel de ce jugement, en demandant l'annulation de cette délibération en tant qu'elle crée des zones Ace, qu'elle permet en zone A, Ace et N la réalisation d'une déviation et crée à cet effet l'emplacement réservé n° 6 et enfin qu'elle classe en zone N une partie du centre équestre et des parcelles d'assiette de leur activité piscicole et agro-touristique.

Sur la régularité du jugement attaqué :

3. Il résulte des motifs mêmes du jugement attaqué que le tribunal administratif a expressément répondu aux moyens contenus dans les mémoires produits par les requérants. En particulier, le tribunal administratif, qui n'était pas tenu de répondre à tous les arguments avancés par les parties, a examiné, par des motifs exempts de contradiction, les moyens tirés de l'insuffisance du rapport de présentation, notamment quant à la création d'une zone agricole incluant un corridor écologique, ainsi que les moyens tirés d'une erreur manifeste d'appréciation relatifs à la délimitation de cette zone et à la création d'un emplacement réservé pour la réalisation d'une déviation routière rendue possible par les articles A 2.1 et N 2.1 du règlement du plan litigieux. Par suite, les appelants ne sont pas fondés à soutenir que le jugement attaqué serait entaché d'irrégularité.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

En ce qui concerne le dossier soumis à enquête publique :

4. D'une part, en vertu des articles L. 132-7 et L. 153-16 du code de l'urbanisme, les organismes de gestion des parcs naturels régionaux sont associés à l'élaboration des plans locaux d'urbanisme et, à ce titre, sont consultés sur les projets de plan arrêtés par l'organe délibérant de l'établissement public de coopération intercommunale ou le conseil municipal. Aux termes de l'article R. 153-4 du même code, ils " donnent un avis dans les limites de leurs compétences propres, au plus tard trois mois après transmission du projet de plan. / A défaut de réponse dans ce délai, ces avis sont réputés favorables ". Aux termes de l'article R. 153-8 du même code : " Le dossier soumis à l'enquête publique est composé des pièces mentionnées à l'article R. 123-8 du code de l'environnement et comprend, en annexe, les différents avis recueillis dans le cadre de la procédure ".

5. D'autre part, aux termes de l'article L. 333-3 du code de l'environnement : " I. L'aménagement et la gestion des parcs naturels régionaux sont confiés à un syndicat mixte au sens du titre II du livre VII de la cinquième partie du code général des collectivités territoriales (...) ". Aux termes de l'article L. 5721-2 du code général des collectivités territoriales : " Un syndicat mixte peut être constitué par accord entre (...) des établissements publics de coopération intercommunale, des communes, (...) et d'autres établissements publics, en vue d'œuvres ou de services présentant une utilité pour chacune de ces personnes morales. / (...) / Le président du syndicat mixte est élu par le comité syndical ou, si les statuts le prévoient, par le bureau qu'il a constitué ".

6. Il ressort des pièces du dossier que le projet de plan local d'urbanisme arrêté par le conseil municipal de La Chapelle-en-Serval, qui prévoyait notamment la création d'une zone Ace visant à protéger des corridors écologiques, a été transmis les 24 et 30 juillet 2018 au syndicat mixte chargé de l'aménagement et de la gestion du parc naturel Oise-Pays de France, dont cette commune est membre. Il ne ressort pas des pièces du dossier que le syndicat mixte ait émis un avis avant l'expiration du délai de trois mois fixé par les dispositions précitées de l'article R. 153-4 du code de l'urbanisme. Dès lors, en application de ces dispositions, le syndicat mixte doit être regardé comme ayant émis un avis favorable sur le projet à la date d'expiration de ce délai.

7. Si, postérieurement à cette date, un chargé de mission de ce syndicat a proposé au maire de La Chapelle-en-Serval, au cours d'une réunion préparatoire organisée le 14 novembre 2018 en présence d'habitants de cette commune, de modifier le zonage Ace afin d'y permettre la construction de bâtiments sous réserve de ne pas remettre en cause les fonctionnalités écologiques, cette simple proposition, dont il ne ressort pas des pièces du dossier qu'elle émanait directement ou indirectement d'un des organes décisionnels du syndicat mixte chargé de l'aménagement et de la gestion du parc naturel Oise-Pays de France, ne saurait être regardée comme un avis de ce syndicat devant se substituer à l'avis favorable qu'il avait précédemment émis.

8. Dès lors, les appelants ne sont pas fondés à soutenir que le projet soumis à enquête publique, qui ne comportait pas le procès-verbal de cette réunion du 14 novembre 2018, aurait été lacunaire au regard des prescriptions de l'article R. 153-8 du code de l'urbanisme. Par suite, le moyen invoqué à ce titre doit être écarté.

En ce qui concerne les modifications apportées au projet arrêté par le conseil municipal :

9. En vertu des articles L. 153-14 et L. 153-19 du code de l'urbanisme, le projet de plan local d'urbanisme arrêté par le conseil municipal est soumis à enquête publique conformément au chapitre III du titre II du livre Ier du code de l'environnement par le maire. Par ailleurs, aux termes de l'article L. 153-21 du code de l'urbanisme : " A l'issue de l'enquête, le plan local d'urbanisme, éventuellement modifié pour tenir compte des avis qui ont été joints au dossier, des observations du public et du rapport du commissaire ou de la commission d'enquête, est approuvé par : / (...) / 2° Le conseil municipal dans le cas prévu au 2° de l'article L. 153-8 ".

10. En premier lieu, si le maire de La Chapelle-en-Serval a émis au cours de l'enquête publique un avis favorable à la demande du département tendant à créer une déviation routière entre les routes départementales 1017 et 924a, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'il aurait soumis à la consultation du public un autre projet que celui arrêté par le conseil municipal.

11. En second lieu, il est constant qu'après l'enquête publique et avant l'approbation du projet par le conseil municipal, ont été ajoutées dans le règlement des dispositions autorisant dans des zones A et N " la réalisation de la déviation de La Chapelle-en-Serval, RD 1017 -RD 924a, incluant toutes opérations d'affouillement et d'exhaussement qui y seront liées " et, à cet effet, la création d'un emplacement réservé n° 6 et le reclassement en zone N des parcelles qui supportent certains bâtiments du centre équestre dénommé L'Ecurie de l'Etrier d'Or.

12. Il résulte des dispositions précitées du code l'urbanisme que le projet de plan ne peut subir de modifications, entre la date de sa soumission à l'enquête publique et celle de son approbation, qu'à la double condition que ces modifications ne remettent pas en cause l'économie générale du projet et qu'elles procèdent de l'enquête. Doivent être regardées comme procédant de l'enquête publique les modifications apportées destinées à tenir compte des réserves et recommandations du commissaire enquêteur ou de la commission d'enquête, des observations du public et des avis émis par les autorités, collectivités et instances consultées et joints au dossier de l'enquête.

13. Il ressort d'abord des pièces du dossier que les dispositions qui ont ainsi été ajoutées répondent à l'avis exprimé par le département de l'Oise de sorte que les appelants ne sont pas fondés à soutenir qu'elles ne procédaient pas de l'enquête publique.

14. Il ressort ensuite des pièces du dossier que la création de l'emplacement réservé n° 6, dont la superficie est de 125 370 m² et représente ainsi environ 1,5 % du territoire de la commune, a permis de satisfaire l'orientation n°2 du plan d'objectif et de développement durables du projet, qui visait, y compris dans sa rédaction soumise à enquête publique, à apaiser la circulation en centre bourg et à désengorger la rue de Paris qui le traverse, en précisant que " la commune soutient vigoureusement la réalisation de la voie de contournement (déviation) de La Chapelle-en-Serval par l'est du bourg ".

15. En outre, si les articles A 2 et N 2 du règlement permettent, par des dispositions ajoutées après l'enquête publique, la création en zones agricoles et naturelles de " la déviation de la Chapelle-en-Serval, RD 1017 - RD 924a, incluant toutes opérations d'affouillement et d'exhaussements qui y sont liées " sans faire mention d'un emplacement réservé, il ressort du plan local d'urbanisme pris globalement que ces articles n'autorisent la réalisation de cette déviation qu'à l'intérieur de l'emplacement réservé n° 6 qui, comme l'indique l'annexe n° 1 du plan, est dédié à la " déviation de la Chapelle-en-Serval RD 1017 - RD 924a " et s'étend dans des zones agricoles et naturelles sur une superficie de " 125 370 m² " selon un tracé déterminé avec une précision suffisante par une carte jointe à la même annexe.

16. Enfin, si une partie de la parcelle qui supporte les écuries du centre équestre mentionné ci-dessus a été reclassée en zone N après l'enquête publique, il ressort des pièces du dossier que ce reclassement tire les conséquences de la création de l'emplacement réservé n° 6 et n'a pas bouleversé, par son objet et par sa superficie, la cohérence ou la consistance des zonages du projet.

17. Dans ces conditions, les appelants ne sont pas fondés à soutenir que les modifications apportées au projet après l'enquête publique et avant son approbation par le conseil municipal auraient modifié son économie générale.

18. Il résulte de ce qui précède que les appelants ne sont pas fondés à soutenir que la délibération attaquée méconnaîtrait les dispositions précitées des articles L. 153-14, L. 153-19 et L. 153-20 du code de l'urbanisme ni, par suite, qu'elle aurait été prise à l'issue d'une procédure irrégulière en l'absence d'une nouvelle consultation de l'autorité environnementale et du syndicat mixte chargé de l'aménagement et de la gestion du parc naturel régional Oise-Pays de France. Dès lors, ces moyens doivent être écartés.

En ce qui concerne le rapport de présentation :

19. Aux termes de l'article L. 151-4 du code de l'urbanisme : " Le rapport de présentation explique les choix retenus pour établir le projet d'aménagement et de développement durables, les orientations d'aménagement et de programmation et le règlement. / Il s'appuie sur un diagnostic établi au regard des prévisions économiques et démographiques et des besoins répertoriés en matière de développement économique, de surfaces et de développement agricoles, de développement forestier, d'aménagement de l'espace, d'environnement, notamment en matière de biodiversité, d'équilibre social de l'habitat, de transports, de commerce, d'équipements et de services. (...) ".

20. Aux termes de l'article R. 151-1 du code de l'urbanisme dans sa rédaction applicable au présent litige : " Pour l'application de l'article L. 151-4, le rapport de présentation : / 1° Expose les principales conclusions du diagnostic sur lequel il s'appuie ainsi que, le cas échéant, les analyses des résultats de l'application du plan prévues par les articles L. 153-27 à L. 153-30 et comporte, en annexe, les études et les évaluations dont elles sont issues ; / (...) / 3° Analyse l'état initial de l'environnement, expose la manière dont le plan prend en compte le souci de la préservation et de la mise en valeur de l'environnement ainsi que les effets et incidences attendus de sa mise en œuvre sur celui-ci ". Aux termes de l'article R. 151-2 du même code : " Le rapport de présentation comporte les justifications de : / (...) / 4° La délimitation des zones prévues par l'article L. 151-9 (...) ".

21. Aux termes de l'article R. 151-3 du code de l'urbanisme : " Au titre de l'évaluation environnementale lorsqu'elle est requise, le rapport de présentation : / (...) / 2° Analyse les perspectives d'évolution de l'état initial de l'environnement en exposant, notamment, les caractéristiques des zones susceptibles d'être touchées de manière notable par la mise en œuvre du plan ; / 3° Expose les conséquences éventuelles de l'adoption du plan sur la protection des zones revêtant une importance particulière pour l'environnement, en particulier l'évaluation des incidences Natura 2000 mentionnée à l'article L. 414-4 du code de l'environnement ; / (...) / 5° Présente les mesures envisagées pour éviter, réduire et, si possible, compenser, s'il y a lieu, les conséquences dommageables de la mise en œuvre du plan sur l'environnement ; / (...) / Le rapport de présentation au titre de l'évaluation environnementale est proportionné à l'importance du plan local d'urbanisme, aux effets de sa mise en œuvre ainsi qu'aux enjeux environnementaux de la zone considérée (...) ".

22. S'agissant des corridors écologiques, le rapport de présentation les identifie d'une manière suffisamment précise, notamment grâce à plusieurs éléments cartographiques établis à l'échelle du département de l'Oise, de la commune de La Chapelle-en-Serval et de son site urbain, alors même qu'il ne mentionne pas les résultats d'une étude réalisée par l'association multidisciplinaire des biologistes de l'environnement, dont la commune relève d'ailleurs, sans être sérieusement contredite, qu'elle ne concerne pas spécifiquement son territoire. En outre, le rapport de présentation justifie la délimitation des deux zones Ace par le positionnement de ces corridors écologiques et la nécessité de prévoir, pour les préserver, une bande de 300 mètres de part et d'autre des axes identifiés.

23. S'agissant du classement en zone N d'une partie des parcelles où sont implantés certains bâtiments du centre équestre de l'Ecurie de l'Etrier d'Or, le rapport de présentation le justifie par la nécessité de prévoir un " large traitement paysager " près du tronçon de la déviation routière qui sera réalisé aux abords du bourg au sein de l'emplacement réservé n° 6 et qui entraînera le déplacement du centre équestre au nord de la commune.

24. S'agissant de l'emplacement réservé n° 6, il ressort des pièces du dossier qu'il empiète partiellement sur la zone naturelle d'intérêt écologique, faunistique et floristique de type I du " Bois de Morrière " ainsi que sur le site classé des " Forêts d'Ermenonville, de Pontarmé, de Haute Pommeraie, clairière et butte Saint-Christophe ". Il ressort en outre des pièces du dossier que cet emplacement réservé est localisé dans le site inscrit de la vallée de la Nonette et à proximité d'une zone humide.

25. Au titre de l'évaluation environnementale, le rapport de présentation a relevé que la réalisation d'une voie de contournement au sein de l'emplacement réservé n° 6 " risque d'impacter fortement le paysage actuel " et " pourrait impacter la zone humide recensée lors des études préalables ". Eu égard aux enjeux environnementaux des espaces impactés et à l'état d'avancement du projet de déviation routière à la date de la délibération litigieuse, le rapport de présentation doit être regardé comme ayant ainsi analysé de manière suffisamment précise les conséquences prévisibles de l'emplacement réservé n° 6 sur l'environnement.

26. Toutefois, le rapport de présentation n'a pas présenté les mesures qui peuvent être envisagées pour éviter, réduire et si possible compenser les conséquences dommageables sur l'environnement de la mise en œuvre de cet emplacement réservé, se bornant à renvoyer aux études qui seront ultérieurement menées pour la construction de la voie de contournement. Si la commune fait valoir qu'elle n'était pas en mesure de déterminer de telles mesures en l'absence de projet définitif de déviation routière, il ressort des termes mêmes du rapport de présentation qu'à la date de la délibération litigieuse, " le tracé de la voie de contournement a tout juste été validé " et que ses conséquences environnementales prévisibles avaient pu être identifiées.

27. Dans ces conditions, même si ce projet de déviation routière n'était pas arrêté de manière définitive à la date de la délibération litigieuse et alors même qu'une fois réalisé, il pourrait nécessiter une adaptation du plan local d'urbanisme, la commune de La Chapelle-en-Serval ne se trouvait pas en l'espèce dans l'incapacité d'exposer, de manière proportionnée à l'importance du projet, aux effets de sa mise en œuvre ainsi qu'aux enjeux environnementaux des espaces naturels concernés, toute mesure d'évitement, de réduction voire de compensation.

28. Par suite, les appelants ne sont fondés à soutenir que le rapport de présentation contrevient aux prescriptions de l'article R. 151-3 du code de l'environnement qu'en tant qu'il ne présente pas les mesures qui peuvent être envisagées pour éviter, réduire ou compenser les conséquences dommageables sur l'environnement de l'emplacement réservé n° 6.

En ce qui concerne la cohérence du règlement avec le plan d'aménagement et de développement durables :

29. Aux termes de l'article L. 151-8 du code de l'urbanisme : " Le règlement fixe, en cohérence avec le projet d'aménagement et de développement durables, les règles générales et les servitudes d'utilisation des sols permettant d'atteindre les objectifs mentionnés aux articles L. 101-1 à L. 101-3 ".

30. Pour apprécier la cohérence ainsi exigée au sein du plan local d'urbanisme entre le règlement et le projet d'aménagement et de développement durables, il appartient au juge administratif de rechercher, dans le cadre d'une analyse globale le conduisant à se placer à l'échelle du territoire couvert par le document d'urbanisme, si le règlement ne contrarie pas les orientations générales et objectifs que les auteurs du document ont définis dans le projet d'aménagement et de développement durables, compte tenu de leur degré de précision. Par suite, l'inadéquation d'une disposition du règlement du plan local d'urbanisme à une orientation ou un objectif du projet d'aménagement et de développement durables ne suffit pas nécessairement, compte tenu de l'existence d'autres orientations ou objectifs au sein de ce projet, à caractériser une incohérence entre ce règlement et ce projet.

31. En l'espèce, si le projet d'aménagement et de développement durables vise à soutenir et à développer les activités agricoles et équestres, il a également pour objectif de " valoriser le cadre (...) naturel et environnemental " et, à ce titre, de préserver les corridors écologiques qui ont été recensés sur le territoire communal. Pour mettre en œuvre et concilier ces objectifs, le règlement a classé en zone Ace les espaces agricoles où ont été identifiés des corridors écologiques, en y autorisant les " constructions et installations à vocation agricole ou dont la vocation est liée et nécessaire à la diversification de l'activité agricole à condition d'être compatibles avec les sensibilités écologiques du secteur et de ne pas altérer le fonctionnement des continuités écologiques " et, notamment, à condition que leur emprise au sol soit limitée à 50 m² et leur hauteur à 3 mètres.

32. Dans ces conditions, les appelants ne sont pas fondés à soutenir que le règlement ne serait pas cohérent avec les objectifs fixés par le projet d'aménagement et de développements durables. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées de l'article L. 151-8 du code de l'urbanisme doit être écarté.

En ce qui concerne la définition des zones Ace, N et A :

33. S'agissant des zones Ace, il ressort des pièces du dossier que le projet les délimite en y incluant des corridors écologiques qui ont été identifiés selon une cartographie précise et étayée, ainsi que, de part et d'autre de ceux-ci, une bande de 300 mètres. La commune fait valoir, sans être sérieusement contredite, que cette délimitation est justifiée par l'objectif de permettre aux différentes espèces d'animaux sauvages de se déplacer librement dans ces zones agricoles et de préserver ainsi les fonctionnalités écologiques des corridors qui s'y trouvent. Il ressort également du rapport de présentation qu'au sein de la zone Ace située au nord de la commune, cette bande a été réduite en certains endroits afin de permettre la relocalisation du centre équestre de l'Ecurie de l'Etier d'Or à la suite de la création de la déviation routière.

34. En outre, à la demande des propriétaires concernés et de la chambre d'agriculture, les règles de constructibilité au sein des zones Ace ont été assouplies dans le règlement litigieux afin de concilier les objectifs de développement des activités agricoles et de préservation des corridors écologiques, en y permettant les " constructions et installations à vocation agricole ou dont la vocation est liée et nécessaire à la diversification de l'activité agricole à condition d'être compatibles avec les sensibilités écologiques du secteur et de ne pas altérer le fonctionnement des continuités écologiques ". Il ne ressort d'ailleurs pas des pièces du dossier que les prescriptions des articles A 2 et A 10.2 du règlement, qui limitent en zones Ace l'emprise des constructions à 50 m² et leur hauteur à 3 mètres, feraient obstacle au développement des activités de cueillette évoquées par les appelants.

35. Par suite, les appelants ne sont pas fondés à soutenir que la délimitation des zones Ace serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation. Dès lors, ce moyen doit être écarté.

36. S'agissant du classement en zone N des parcelles où sont implantés certains bâtiments du centre équestre, aux termes de l'article L. 151-9 du code de l'urbanisme : " Le règlement délimite les zones urbaines ou à urbaniser et les zones naturelles ou agricoles et forestières à protéger. / Il peut préciser l'affectation des sols selon les usages principaux qui peuvent en être faits ou la nature des activités qui peuvent y être exercées et également prévoir l'interdiction de construire. / Il peut définir, en fonction des situations locales, les règles concernant la destination et la nature des constructions autorisées ".

37. Aux termes de l'article R. 151-24 du même code : " Les zones naturelles et forestières sont dites " zones N ". Peuvent être classés en zone naturelle et forestière, les secteurs de la commune, équipés ou non, à protéger en raison : / 1° Soit de la qualité des sites, milieux et espaces naturels, des paysages et de leur intérêt, notamment du point de vue esthétique, historique ou écologique ; / 2° Soit de l'existence d'une exploitation forestière ; / 3° Soit de leur caractère d'espaces naturels ; / 4° Soit de la nécessité de préserver ou restaurer les ressources naturelles ; / 5° Soit de la nécessité de prévenir les risques notamment d'expansion des crues ".

38. Il appartient aux auteurs d'un plan local d'urbanisme de déterminer le parti d'aménagement à retenir pour le territoire concerné par le plan, en tenant compte de la situation existante et des perspectives d'avenir, et de fixer en conséquence le zonage et les possibilités de construction. Ils peuvent être amenés, à cet effet, à classer en zone naturelle, pour les motifs énoncés à l'article R. 151-9, un secteur qu'ils entendent soustraire, pour l'avenir, à l'urbanisation. Leur appréciation sur ces différents points ne peut être censurée par le juge administratif qu'au cas où elle serait entachée d'une erreur manifeste ou fondée sur des faits matériellement inexacts.

39. En l'espèce, si la parcelle où est implanté le centre équestre de l'Ecurie de l'Etrier d'Or a été classée pour partie en zone UA et pour partie en zone N, il ressort des pièces du dossier que ce classement permet, d'une part, de maintenir une zone urbanisée le long de la rue du Vieux Château qui longe ce centre et, d'autre part, de permettre un traitement paysager autour du tronçon de la déviation routière qui est situé aux abords du bourg. Contrairement à ce que soutiennent les appelants, pour inclure dans cette zone N une partie des parcelles où se trouve un bâtiment faisant usage d'écuries, les auteurs du plan local d'urbanisme ont pu tenir compte des transformations dans l'affectation des sols qui résulteront de la réalisation de la déviation routière, en cohérence avec le parti d'aménagement ayant justifié la création de l'emplacement réservé n° 6 et d'une zone Ace au nord de la commune destinée à accueillir le nouveau centre équestre.

40. Dans ces conditions, les appelants ne sont pas fondés à soutenir que le classement en zone N de ces parcelles serait entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ou serait constitutif d'un détournement de pouvoir. Dès lors, ces moyens doivent être écartés.

41. S'agissant de la création d'une déviation routière en zones naturelle et agricole, pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 15, les appelants ne sont pas fondés à soutenir, sous réserve des éléments nouveaux que révélerait la régularisation prévue au point 43, que les articles A 2 et N 2 du règlement seraient entachés d'une erreur manifeste d'appréciation. Dès lors, ce moyen doit être écarté.

Sur la régularisation de la délibération attaquée :

42. Aux termes de l'article L. 600-9 du code de l'urbanisme : " Si le juge administratif, saisi de conclusions dirigées contre (...) un plan local d'urbanisme (...), estime, après avoir constaté que les autres moyens ne sont pas fondés, qu'une illégalité entachant l'élaboration ou la révision de cet acte est susceptible d'être régularisée, il peut, après avoir invité les parties à présenter leurs observations, surseoir à statuer jusqu'à l'expiration du délai qu'il fixe pour cette régularisation et pendant lequel le document d'urbanisme reste applicable, sous les réserves suivantes : / (...) / 2° En cas d'illégalité pour vice de forme ou de procédure, le sursis à statuer ne peut être prononcé que si l'illégalité a eu lieu, pour (...) les plans locaux d'urbanisme, après le débat sur les orientations du projet d'aménagement et de développement durables. / Si la régularisation intervient dans le délai fixé, elle est notifiée au juge, qui statue après avoir invité les parties à présenter leurs observations ".

43. Le vice de forme relevé aux point 26 à 28 est susceptible d'être régularisé par une délibération modificative du conseil municipal de La Chapelle-en-Serval, prise au vu d'un rapport de présentation complété, comportant l'exposé des mesures qui peuvent être envisagées, en fonction notamment du degré d'avancement du projet de contournement routier, afin d'éviter, réduire ou de compenser les conséquences dommageables sur l'environnement de l'emplacement réservé n°6. Dès lors que la création de cet emplacement réservé procède de l'enquête publique et ne bouleverse pas l'économie générale du projet de plan local d'urbanisme, la commune ne sera pas tenue d'organiser une nouvelle enquête publique, ni de soumettre à des mesures de publicité particulières le rapport de présentation ainsi complété.

44. Il appartiendra au conseil municipal d'adopter cette délibération modificative dans un délai de six mois à compter de la notification du présent arrêt. Jusqu'à l'expiration de ce délai, il y a lieu de surseoir à statuer sur les conclusions de la requête.

DÉCIDE :

Article 1er : Il est sursis à statuer sur les conclusions des parties jusqu'à l'expiration du délai de six mois fixé au point 44.

Article 2 : Tous droits et moyens des parties sur lesquels il n'est pas expressément statué par le présent arrêt sont réservés jusqu'à la fin de l'instance.

Article 3 : La requête sera notifiée à la SCEA Mahette, qui a été désignée dans les conditions prévues par le dernier alinéa de l'article R. 751-3 du code de justice administrative, et à la commune de La Chapelle-en-Serval.

Copie en sera transmise, pour information, au préfet de l'Oise.

N°20DA01944 4


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 20DA01944
Date de la décision : 23/11/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-01-01-02-02-16-01 Urbanisme et aménagement du territoire. - Plans d'aménagement et d'urbanisme. - Plans d`occupation des sols (POS) et plans locaux d’urbanisme (PLU). - Application des règles fixées par les POS ou les PLU. - Règles de fond. - Règles applicables aux secteurs spéciaux. - Emplacements réservés.


Composition du Tribunal
Président : M. Heinis
Rapporteur ?: M. Stéphane Eustache
Rapporteur public ?: M. Gloux-Saliou
Avocat(s) : 2BA Avocats

Origine de la décision
Date de l'import : 18/01/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2021-11-23;20da01944 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award