Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme E... A... C... a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler l'arrêté du maire d'Hénin-Beaumont du 18 avril 2018 portant exclusion temporaire de fonctions pour une durée de quatre mois.
Par un jugement n° 1809661 du 19 juin 2020, le tribunal administratif de Lille a annulé cet arrêté.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 8 juillet 2021, la commune d'Hénin-Beaumont, représentée par Me Laurent Frölich, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) de prononcer un non-lieu à statuer sur les conclusions d'annulation de Mme A... C... dirigées contre cet arrêté ;
3°) subsidiairement, de rejeter la demande présentée par Mme A... C... devant le tribunal administratif de Lille ;
4°) de mettre à la charge de Mme A... C... la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;
- le décret n° 89-677 du 18 septembre 1989 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme D... B..., présidente-rapporteure,
- les conclusions de M. Hervé Cassara, rapporteur public,
- et les observations de Me Erwan Sellier, représentant la commune d'Hénin-Beaumont.
Considérant ce qui suit :
1. Mme A... C..., adjointe administrative territoriale de 2ème classe titulaire, est employée par la commune d'Hénin-Beaumont, au sein de la direction de l'aménagement et du territoire. Par un arrêté du 18 avril 2018, le maire d'Hénin-Beaumont lui a infligé une sanction d'exclusion temporaire de ses fonctions pour une durée de quatre mois. La commune d'Hénin-Beaumont relève appel du jugement du 19 juin 2020 par lequel le tribunal administratif de Lille a annulé cet arrêté du 18 avril 2018.
Sur l'irrecevabilité des écritures de Mme A... C... :
2. Aux termes de l'article R. 431-11 du code de justice administrative : " Les requêtes et les mémoires doivent, à peine d'irrecevabilité, être présentés soit par un avocat, soit par un avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation ". L'article R. 811-7 du même code dispose par ailleurs que " (...) lorsque la notification de la décision soumise à la cour administrative d'appel ne comporte pas la mention prévue au deuxième alinéa de l'article R. 751-5, le requérant est invité par la cour à régulariser sa requête ". L'article R. 751-5 de ce même code dispose que : " (...) Lorsque la décision rendue relève de la cour administrative d'appel et, sauf lorsqu'une disposition particulière a prévu une dispense de ministère d'avocat en appel, la notification mentionne que l'appel ne peut être présenté que par l'un des mandataires mentionnés à l'article R. 431-2. (...) ".
3. Il ressort des pièces du dossier que Mme A... C... a été informée dans la notification du jugement du tribunal administratif de Lille du 22 juin 2020 de l'obligation de constituer avocat en appel. Elle a produit un mémoire en réplique le 7 juillet 2021, accompagné de nombreuses pièces, sans que celui-ci soit présenté par un avocat. Par courrier du greffe du 7 juillet 2021, elle a été mise en demeure de régulariser ses productions en constituant avocat. Dès lors, en l'absence de régularisation, ce mémoire est irrecevable. Par suite, il y a lieu de l'écarter des débats.
Sur la régularité du jugement attaqué :
4. Un recours pour excès de pouvoir dirigé contre un acte administratif n'a d'autre objet que d'en faire prononcer l'annulation avec effet rétroactif. Si, avant que le juge n'ait statué, l'acte attaqué est rapporté par l'autorité compétente et si le retrait ainsi opéré acquiert un caractère définitif faute d'être critiqué dans le délai du recours contentieux, il emporte alors disparition rétroactive de l'ordonnancement juridique de l'acte contesté, ce qui conduit à ce qu'il n'y ait lieu pour le juge de la légalité de statuer sur le mérite du pourvoi dont il était saisi. Il en va ainsi, quand bien même l'acte rapporté aurait reçu exécution. Dans le cas où l'administration se borne à procéder à l'abrogation de l'acte attaqué, cette circonstance prive d'objet le pourvoi formé à son encontre, à la double condition que cet acte n'ait reçu aucune exécution pendant la période où il était en vigueur et que la décision procédant à son abrogation soit devenue définitive.
5. Il ressort du dossier de première instance que par un mémoire enregistré le 3 juin 2020, postérieurement à la clôture d'instruction intervenue le 14 octobre 2019, la commune d'Hénin-Beaumont a porté à la connaissance des premiers juges un arrêté du 2 octobre 2019 par lequel le maire a abrogé l'arrêté du 18 avril 2018 portant exclusion temporaire de fonctions de Mme A... C... pour une durée de quatre mois, et non retiré comme il le prétend. Cette abrogation ne privait pas d'objet les conclusions d'annulations présentées par Mme A... C... dès lors que l'arrêté du 18 avril 2018 avait reçu exécution. Dans ces conditions, les premiers juges n'étaient pas tenus de rouvrir l'instruction pour prononcer un non-lieu à statuer sur les conclusions de la requête de Mme A... C.... Le moyen tiré de l'irrégularité du jugement soulevé par la commune d'Hénin-Beaumont doit, par suite, être écarté.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
6. Aux termes de l'article 29 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires : " Toute faute commise par un fonctionnaire dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions l'expose à une sanction disciplinaire (...) ". Aux termes de l'article 89 de la loi du 26 janvier 1984 : " Les sanctions disciplinaires sont réparties en quatre groupes : Premier groupe : l'avertissement ; le blâme ; l'exclusion temporaire de fonctions pour une durée maximale de trois jours ; Deuxième groupe : l'abaissement d'échelon ; l'exclusion temporaire de fonctions pour une durée de quatre à quinze jours ; Troisième groupe : la rétrogradation ; l'exclusion temporaire de fonctions pour une durée de seize jours à deux ans ; (...) ".
7. Il appartient au juge de l'excès de pouvoir, saisi de moyens en ce sens, de rechercher si les faits reprochés à un agent public ayant fait l'objet d'une sanction disciplinaire constituent des fautes de nature à justifier une sanction et si la sanction retenue est proportionnée à la gravité de ces fautes.
8. Il ressort des pièces du dossier que le 30 janvier 2017, Mme A... C... a adopté une attitude nonchalante et provocatrice en passant une partie de la journée dans le bureau d'un collègue en s'installant notamment les pieds sur une chaise et en ne rejoignant pas le sien pour y travailler, en dépit des injonctions que lui a adressées son supérieur hiérarchique. Elle a perturbé le travail de ses collègues. Elle a par la suite tenu des propos incohérents et menaçants ayant nécessité l'intervention des sapeurs-pompiers en présence de la police.
9. L'état mental d'un agent peut faire obstacle à ce qu'il puisse être regardé comme responsable de ses actes au moment des faits et puisse faire l'objet d'une sanction disciplinaire. Il ressort des éléments médicaux versés au dossier et notamment du compte-rendu médical du 20 février 2017 du praticien hospitalier du centre hospitalier d'Arras et du compte-rendu d'expertise médicale du 1er mars 2018, que Mme A... C... a été victime d'un épisode psychotique aigu lors de la journée du 30 janvier 2017, qu'elle n'a d'ailleurs aucun souvenir de son comportement ce jour-là et qu'elle a été hospitalisée sous contrainte durant trois semaines, du 30 janvier 2017 jusqu'au 20 février 2017. Elle avait d'ailleurs déjà fait par le passé l'objet d'une précédente hospitalisation pour la même pathologie. Toutefois, en l'état des pièces du dossier, ces éléments ne permettent pas de considérer que l'état de Mme A... C... était tel que son discernement était alors aboli et qu'elle était irresponsable de ses actes. Dans ces conditions, les faits qui lui sont reprochés étant matériellement établis, ils sont constitutifs d'une faute de nature à justifier une sanction.
10. Toutefois, compte tenu de l'état de santé de Mme A... C..., décrit au point précédent, de nature à altérer son discernement et, alors que l'intéressée n'a jamais fait l'objet de sanction disciplinaire, le maire d'Hénin-Beaumont a commis une erreur d'appréciation en lui infligeant la sanction d'exclusion de fonctions, appartenant au 3ème groupe.
11. Il résulte de ce qui précède que la commune d'Hénin-Beaumont n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a annulé son arrêté du 18 avril 2018. Les conclusions présentées par la commune de Hénin-Beaumont au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent, par voie de conséquence, être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la commune d'Hénin-Beaumont est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la commune d'Hénin-Beaumont et à Mme E... A... C....
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N°20DA00964
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