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21/10/2021 | FRANCE | N°20DA01886

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3ème chambre, 21 octobre 2021, 20DA01886


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le syndicat national des enseignants et artistes (SNEA-UNSA) a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler la délibération du 10 décembre 2018 du conseil municipal de Roncq adoptant le règlement intérieur de l'école municipale de musique et de mettre à la charge de ladite commune la somme de 2 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1900499 du 27 octobre 2020, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande. >
Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire complémentaire, enreg...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le syndicat national des enseignants et artistes (SNEA-UNSA) a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler la délibération du 10 décembre 2018 du conseil municipal de Roncq adoptant le règlement intérieur de l'école municipale de musique et de mettre à la charge de ladite commune la somme de 2 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1900499 du 27 octobre 2020, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés les 27 novembre 2020 et 11 décembre 2020, le syndicat national des enseignants et artistes (SNEA-UNSA), représenté par Me Chéneau, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler la délibération du 10 décembre 2018 du conseil municipal de Roncq adoptant le règlement intérieur de l'école municipale de musique ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Roncq la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

- le décret n° 85-1250 du 26 novembre 1985 ;

- le décret n° 91-857 du 2 septembre 1991 ;

- le décret n° 2012-437 du 29 mars 2012 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Nil Carpentier-Daubresse, premier conseiller,

- les conclusions de M. Hervé Cassara, rapporteur public,

- et les observations de Me Boutignon pour la commune de Roncq.

Considérant ce qui suit :

1. Par une délibération du 10 décembre 2018, le conseil municipal de la commune de Roncq a adopté le règlement intérieur relatif à l'organisation des congés annuels et exceptionnels des personnels enseignants de l'école municipale de musique de la commune. Le syndicat national des enseignants et artistes relève appel du jugement du 27 octobre 2020 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté, comme irrecevable, sa demande tendant à l'annulation de cette délibération.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Les fonctionnaires et les associations ou syndicats qui défendent leurs intérêts collectifs n'ont pas qualité pour attaquer les dispositions se rapportant à l'organisation ou à l'exécution du service, sauf dans la mesure où ces dispositions porteraient atteinte à leurs droits et prérogatives ou affecteraient leurs conditions d'emploi et de travail.

3. Il ressort des pièces du dossier que le conseil municipal de Roncq a, par la délibération du 10 décembre 2018 en litige, adopté le règlement intérieur relatif à l'organisation des congés annuels et exceptionnels de l'école municipale de musique dont l'objet est, ainsi que le prévoit son article 1er, de " préciser l'organisation des prises de congés annuels et exceptionnels par le personnel enseignant de l'école municipale de musique ". Toutefois, alors qu'il est constant que l'usage en vigueur conduisait à ce que les personnels enseignants de l'école municipale de musique ne fassent pas expressément de demande de congés et bénéficient des congés lors de toutes les périodes de vacances scolaires, la délibération contestée prévoit, en ses articles 5 et 6, que les six semaines de congés qui leur sont allouées devront être prises parmi les semaines de vacances scolaires ou, à titre exceptionnel, durant les périodes scolaires et définit la procédure à suivre notamment via le recours à un logiciel dédié. Le règlement intérieur de l'école municipale de musique en litige mentionne également, en son article 5, que le temps de présence du personnel enseignant pendant les vacances scolaires doit être consacré à la mise en œuvre du projet pédagogique de l'établissement. Si la commune de Roncq fait valoir que son conseil municipal a, par la délibération du 25 juin 2018, approuvé la nouvelle tarification applicable à compter du 27 août 2018 à l'école municipale de musique, laquelle prévoit en particulier la mise en place d'activités ponctuelles pendant les vacances scolaires, cette délibération a pour objet de fixer, à destination des usagers, les tarifs applicables et non de préciser les modalités d'organisation du service public à l'endroit des fonctionnaires qui l'exécutent. Dans ces conditions, la délibération contestée, qui porte sur l'organisation du service public, doit être regardée comme affectant les conditions d'emploi et de travail des personnels enseignants de l'école municipale de musique de la commune de Roncq dont le syndicat appelant défend les intérêts collectifs. Ainsi, c'est à tort que les premiers juges ont estimé que ce dernier ne justifiait pas d'une qualité lui donnant intérêt pour agir contre la délibération du 10 décembre 2018. Il en résulte que le syndicat national des enseignants et artistes est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté, comme irrecevable, sa demande et à en demander l'annulation.

4. Il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par le syndicat national des enseignants et artistes devant le tribunal administratif de Lille.

Sur les conclusions à fin d'annulation de la délibération du 10 décembre 2018 :

5. En premier lieu, aux termes de l'article 1er du décret du 26 novembre 1985 relatif aux congés annuels des fonctionnaires territoriaux : " Tout fonctionnaire territorial en activité a droit, dans les conditions et sous les réserves précisées aux articles ci-après, pour une année de service accompli du 1er janvier au 31 décembre, à un congé annuel d'une durée égale à cinq fois ses obligations hebdomadaires de service. Cette durée est appréciée en nombre de jours effectivement ouvrés. " Aux termes de l'article 3 de ce même décret : " Le calendrier des congés définis aux articles 1er et 2 est fixé, par l'autorité territoriale, après consultation des fonctionnaires intéressés, compte tenu des fractionnements et échelonnements de congés que l'intérêt du service peut rendre nécessaires. / Les fonctionnaires chargés de famille bénéficient d'une priorité pour le choix des périodes de congés annuels. " Par ailleurs, aux termes de l'article L. 2121-29 du code général des collectivités territoriales : " Le conseil municipal règle par ses délibérations les affaires de la commune. ".

6. Si le syndicat national des enseignants et artistes soutient que seul le maire était compétent, en vertu de l'article 3 du décret du 26 novembre 1985 relatif aux congés annuels des fonctionnaires territoriaux, pour édicter les dispositions en litige, il résulte de cet article qu'il porte sur la définition par l'autorité territoriale du calendrier des congés et non sur l'organisation du service public. En outre, il appartient bien au conseil municipal, sur le fondement de l'article L. 2121-29 précité du code général des collectivités territoriales, de fixer les mesures générales d'organisation du service public communal et, en particulier, celles portant sur les modalités de prises de congés par le personnel enseignant d'une école municipale de musique. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence dont serait entachée la délibération contestée doit être écarté.

7. En deuxième lieu, aux termes de l'article 2 du décret du 2 septembre 1991 portant statut particulier du cadre d'emplois des professeurs territoriaux d'enseignement artistique : " Les professeurs d'enseignement artistique exercent leurs fonctions, selon les formations qu'ils ont reçues, dans les spécialités suivantes : 1° Musique ; 2° Danse ; 3° Art dramatique ; 4° Arts plastiques. / Les spécialités Musique, Danse et arts plastiques comprennent différentes disciplines. / Pour les spécialités Musique, Danse et Art dramatique, ils exercent leurs fonctions dans les conservatoires à rayonnement régional, départemental, communal ou intercommunal classés par l'Etat. / Pour la spécialité Arts plastiques, ils exercent leurs fonctions dans les écoles régionales ou municipales des beaux-arts habilitées par l'Etat à dispenser tout ou partie de l'enseignement conduisant à un diplôme d'Etat ou diplôme agréé par l'Etat. / Les professeurs d'enseignement artistique assurent un enseignement hebdomadaire de seize heures. / Les professeurs d'enseignement artistique sont placés, pour l'exercice de leurs fonctions, sous l'autorité du directeur de l'établissement d'enseignement artistique. / Ils assurent la direction pédagogique et administrative des conservatoires à rayonnement communal ou intercommunal et, par dérogation aux dispositions du deuxième alinéa, des établissements d'enseignement de la musique, de la danse et de l'art dramatique non classés et des écoles d'arts plastiques qui ne sont pas habilitées à dispenser tout ou partie de l'enseignement conduisant à un diplôme d'Etat ou à un diplôme agréé par l'Etat. " Aux termes de l'article 3 du décret du 29 mars 2012 portant statut particulier du cadre d'emplois des assistants territoriaux d'enseignement artistique : " I. ' Les membres du cadre d'emplois des assistants territoriaux d'enseignement artistique exercent leurs fonctions, selon les formations qu'ils ont reçues, dans les spécialités suivantes : 1° Musique ; 2° Art dramatique ; 3° Arts plastiques. 4° Danse : seuls les agents titulaires de l'un des diplômes mentionnés aux articles L. 362-1, L. 362-1-1, L. 362-2 et L. 362-4 du code de l'éducation peuvent exercer leurs fonctions dans cette spécialité. / Les spécialités musique et danse comprennent différentes disciplines. / Les membres du cadre d'emplois des assistants territoriaux d'enseignement artistique sont astreints à un régime d'obligation de service hebdomadaire de vingt heures. / Ils sont placés, pour l'exercice de leurs fonctions, sous l'autorité du fonctionnaire chargé de la direction de l'établissement dans lequel ils exercent leurs fonctions. / II. ' Les titulaires du grade d'assistant d'enseignement artistique sont chargés, dans leur spécialité, d'assister les enseignants des disciplines artistiques. Ils peuvent notamment être chargés de l'accompagnement instrumental des classes. / III. ' Les titulaires des grades d'assistant d'enseignement artistique principal de 2e classe et d'assistant d'enseignement artistique principal de 1re classe sont chargés, dans leur spécialité, de tâches d'enseignement dans les conservatoires à rayonnement régional, départemental, communal ou intercommunal classés, les établissements d'enseignement de la musique, de la danse et de l'art dramatique non classés ainsi que dans les écoles d'arts plastiques non habilitées à dispenser un enseignement sanctionné par un diplôme national ou par un diplôme agréé par l'Etat. / Ils sont également chargés d'apporter une assistance technique ou pédagogique aux professeurs de musique, de danse, d'arts plastiques ou d'art dramatique. / Ils peuvent notamment être chargés des missions prévues à l'article L. 911-6 du code de l'éducation. ".

8. Il ne ressort pas de la délibération en litige qu'elle impliquerait, contrairement à ce que soutient le syndicat national des enseignants et artistes, que les activités devant se dérouler pendant les vacances scolaires auraient nécessairement lieu à l'extérieur de l'école municipale de musique. Au demeurant, il n'est pas contesté, ainsi que le fait valoir la commune de Roncq, que celles qui ont eu lieu lors des vacances de la Toussaint de l'année 2018 se sont déroulées dans les locaux de l'école de musique. Par ailleurs, si le syndicat appelant soutient que les activités réalisées durant les vacances scolaires ne constitueraient pas des enseignements au sens de l'article 2 du décret du 2 septembre 1991 portant statut particulier du cadre d'emplois des professeurs territoriaux d'enseignement artistique et de l'article 3 du décret du 29 mars 2012 portant statut particulier du cadre d'emplois des assistants territoriaux d'enseignement artistique, il n'apporte pas d'éléments de nature à l'établir. Il ressort, au contraire, des pièces du dossier, notamment du compte-rendu du comité technique du 21 novembre 2018, qu'il a été demandé aux enseignants de faire eux-mêmes des propositions pédagogiques pour définir le contenu des enseignements dispensés au cours de cette période. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance par la délibération attaquée des dispositions règlementaires précitées applicables au statut des professeurs territoriaux d'enseignement artistique et des assistants territoriaux d'enseignement artistique doit être écarté.

9. En troisième lieu, aux termes de l'article 88 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale : " L'assemblée délibérante de chaque collectivité territoriale ou le conseil d'administration d'un établissement public local fixe les régimes indemnitaires dans la limite de ceux dont bénéficient les différents services de l'Etat et peut décider, après avis du comité technique, d'instituer une prime d'intéressement tenant compte de la performance collective des services selon les modalités et dans les limites définies par décret en Conseil d'Etat. (...) ".

10. Si le syndicat national des enseignants et artistes se prévaut de la méconnaissance du principe de parité avec la fonction publique de l'Etat, il résulte des dispositions de l'article 88 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale que celui-ci ne porte que sur les régimes indemnitaires applicables aux fonctionnaires territoriaux et non sur la durée des congés qui leur est octroyée. En tout état de cause, les dispositions invoquées par le syndicat appelant notamment du décret du 6 octobre 1950 fixant les taux de rémunération des heures supplémentaires d'enseignement effectuées par des personnels enseignants des établissements d'enseignement du second degré et de l'arrêté du 29 juillet 2016 relatif au certificat d'aptitude aux fonctions de professeur de musique ne portent pas sur la définition d'une durée de congés. Par suite, le moyen tiré de l'erreur de droit dont serait entachée la délibération en litige doit être écarté.

11. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la seconde fin de non-recevoir opposée par la commune de Roncq, que le syndicat national des enseignants et artistes n'est pas fondé à demander l'annulation de la délibération du 10 décembre 2018 par laquelle le conseil municipal de la commune de Roncq a adopté le règlement intérieur relatif à l'organisation des congés annuels et exceptionnels des personnels enseignants de l'école municipale de musique de la commune.

Sur les conclusions présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

12. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Roncq, qui n'est pas la partie perdante, la somme que le syndicat national des enseignants et artistes demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. En revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du syndicat national des enseignants et artistes le versement de la somme de 1 000 euros à la commune de Roncq au titre de ces mêmes dispositions.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Lille en date du 27 octobre 2020 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par le syndicat national des enseignants et artistes devant le tribunal administratif de Lille ainsi que le surplus de ses conclusions présentées devant la cour sont rejetés.

Article 3 : Le syndicat national des enseignants et artistes versera la somme de 1 000 euros à la commune de Roncq au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au syndicat national des enseignants et artistes et à la commune de Roncq.

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N°20DA01886

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N°"Numéro"


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 20DA01886
Date de la décision : 21/10/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-13-01-02-03 Fonctionnaires et agents publics. - Contentieux de la fonction publique. - Contentieux de l'annulation. - Introduction de l'instance. - Intérêt pour agir.


Composition du Tribunal
Président : Mme Borot
Rapporteur ?: M. Nil Carpentier-Daubresse
Rapporteur public ?: M. Cassara
Avocat(s) : SCP CHENEAU et PUYBASSET

Origine de la décision
Date de l'import : 07/12/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2021-10-21;20da01886 ?
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