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14/10/2021 | FRANCE | N°19DA01606

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 4ème chambre, 14 octobre 2021, 19DA01606


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme A... B... ont demandé au tribunal administratif d'Amiens de prononcer la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle ils ont été assujettis au titre de l'année 2013.

Par un jugement n° 1702562 du 16 mai 2019, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 13 juillet 2019 et le 29 octobre 2019, M. B..., représenté par Me Dongmo Guimfak, demande à la cour :



1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de prononcer la décharge de l'imposition en litige ;

3°) de m...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme A... B... ont demandé au tribunal administratif d'Amiens de prononcer la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle ils ont été assujettis au titre de l'année 2013.

Par un jugement n° 1702562 du 16 mai 2019, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 13 juillet 2019 et le 29 octobre 2019, M. B..., représenté par Me Dongmo Guimfak, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de prononcer la décharge de l'imposition en litige ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ainsi que les dépens de l'instance au titre de l'article R. 761-1 de ce code.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Jean-François Papin, premier conseiller,

- et les conclusions de M. Jean-Philippe Arruebo-Mannier, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M. A... B... exerce, à titre libéral, la profession de gynécologue-obstétricien dans les locaux du centre hospitalier de Beauvais, qui l'emploie par ailleurs à titre salarié. M. B... a opté, au titre de son activité libérale, pour le régime de la déclaration contrôlée et a porté en déduction de son bénéfice non commercial, au titre de l'année 2013, une somme de 7 327 euros comme correspondant à diverses dépenses, dont 6 526 euros de frais de véhicule, exposées par lui pour les besoins de l'exercice de cette activité. Cette activité a fait l'objet d'une vérification de comptabilité, portant sur la période allant du 1er janvier 2012 au 31 décembre 2013. A l'issue du contrôle, le service vérificateur, qui avait été amené à constater l'absence de présentation d'une comptabilité et à en dresser procès-verbal le 13 avril 2015, a estimé qu'il y avait lieu de limiter à 972 euros les dépenses de véhicule admises en déduction au titre de l'année 2013, cette somme tenant compte du total des loyers d'un véhicule pris par M. B... en crédit-bail, qui se sont élevés à 3 888 euros, et d'une quote-part d'utilisation de ce véhicule pour les besoins de l'activité libérale de l'intéressé que le service a fixée à 25 %. L'administration a fait connaître à M. B... sa position sur ce point, ainsi que sur d'autres dépenses non admises en déduction en tant que charges de l'activité libérale, par une proposition de rectification qu'elle lui a adressée le 8 juillet 2015. M. B... a présenté des observations, accompagnées de justificatifs, qui ont conduit l'administration à admettre, en outre, en déduction, s'agissant des dépenses de véhicule, les sommes de 288 euros et 27 euros au titre, respectivement, de dépenses d'assurance et de carburant. La commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires, saisie du différend à la demande de M. B..., a émis, à l'issue de sa séance du 17 novembre 2016, un avis favorable au maintien des rectifications. La cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu en résultant pour le foyer fiscal de M. B... au titre de l'année 2013 a été mise en recouvrement le 31 janvier 2017, pour un montant de 9 260 euros. Leur réclamation ayant été rejetée, M. et Mme B... ont porté le litige devant le tribunal administratif d'Amiens en lui demandant de prononcer la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle ils ont ainsi été assujettis au titre de l'année 2013. M. B... relève appel du jugement du 16 mai 2019 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a rejeté cette demande.

2. D'une part, en vertu des dispositions du 1. de l'article 93 du code général des impôts, qui sont applicables aux activités générant des bénéfices non commerciaux, le bénéfice à retenir dans les bases de l'impôt sur le revenu est constitué par l'excédent des recettes totales sur les dépenses nécessitées par l'exercice de la profession.

3. D'autre part, aux termes de l'article 99 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable au présent litige : " Les contribuables soumis obligatoirement au régime de la déclaration contrôlée ou qui désirent être imposés d'après ce régime sont tenus d'avoir un livre-journal servi au jour le jour et présentant le détail de leurs recettes et de leurs dépenses professionnelles. / (...) ". En outre, en vertu de l'article L. 192 du livre des procédures fiscales, la charge de la preuve incombe au contribuable lorsque la comptabilité comporte de graves irrégularités et que l'imposition a été établie conformément à l'avis de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires.

4. Il est constant que, comme le fait valoir le ministre, M. B... n'a pu présenter à la vérificatrice, au cours du contrôle dont a fait l'objet son activité libérale, le livre-journal servi au jour le jour et présentant le détail des recettes et dépenses professionnelles, dont les dispositions précitées de l'article 99 du code général des impôts imposent la tenue aux contribuables ayant opté, comme M. B..., pour le régime de la déclaration contrôlée. La double circonstance que l'intéressé était adhérent à une association de gestion agréée et que le centre hospitalier de Beauvais, qui percevait les recettes de son activité libérale, était à même d'en fournir le détail, n'était pas de nature à le dispenser de cette obligation. Par suite, ainsi que le soutient le ministre, à qui il incombe de prouver le caractère irrégulier de la comptabilité que M. B... a présentée à la vérificatrice, le fait que cette comptabilité ne comportait pas de livre-journal est de nature à établir qu'elle était entachée de graves irrégularités en affectant le caractère probant. Dans ces conditions et dès lors que, ainsi qu'il a été dit au point 1, l'imposition en litige a été établie conformément à l'avis de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires, M. B... supporte, en application des dispositions, rappelées au point 3, de l'article L. 192 du livre des procédures fiscales, la charge de la preuve. Il lui incombe, dès lors, de justifier de la réalité et du caractère inhérent à l'exercice de son activité libérale, des dépenses qu'il a entendu porter en déduction de ses bénéfices non commerciaux.

5. M. B... soutient que les contrats qui le lient aux patientes dont il assure le suivi de la grossesse dans le cadre de son activité libérale lui imposent de pratiquer lui-même les accouchements. Il précise qu'il a, dans ce cadre, pratiqué 168 accouchements au cours de l'année 2013 et que ces actes ont, le plus souvent, eu lieu hors de ses heures habituelles de présence dans les locaux du centre hospitalier de Beauvais, ce qui l'a contraint à devoir s'y rendre d'urgence, parfois à plusieurs reprises, en voiture, depuis son domicile, distant d'environ un kilomètre par la route. Toutefois, les relevés d'activité que M. B... a produits à l'instruction ne corroborent pas ses allégations quant au nombre d'accouchements qu'il aurait pratiqués en 2013 dans le cadre de son activité libérale et ne précisent pas davantage les dates et heures auxquels les actes auxquels ils font référence et qui sont au demeurant de nature diverse, ont été effectués, de sorte qu'il s'avère impossible de déterminer si ces actes, à supposer qu'il s'agisse d'accouchements, ont pu ou non avoir lieu alors que M. B... était déjà présent dans l'établissement. Ainsi, par les seules pièces qu'il produit, M. B... ne peut être regardé comme apportant la preuve, qui lui incombe, de la réalité des frais de déplacement qu'il allègue avoir exposés pour se rendre au centre hospitalier de Beauvais afin d'assurer des accouchements dans le cadre de l'exercice de son activité libérale.

6. M. B... soutient, par ailleurs, s'être déplacé à de nombreuses reprises au cours de l'année 2013 pour se rendre à des actions de formation, ainsi qu'à des congrès ou réunions professionnelles. Il ajoute être dans l'obligation de se former régulièrement afin de pouvoir conserver l'accréditation ainsi que l'agrément l'autorisant à poursuivre son activité libérale et de pouvoir continuer à être couvert par son assureur, cette obligation de formation continue étant, selon lui, moindre en ce qui concerne les praticiens hospitaliers salariés, qui effectuent un moins grand nombre d'actes et sont couverts par la police d'assurance de l'établissement. Toutefois, à l'exception d'un déplacement à Paris pour un congrès, dont l'administration a admis les frais correspondants en charges, M. B... ne justifie pas, par les seuls documents qu'il produit, de la réalité des déplacements qu'il aurait pu effectuer pour se rendre à des réunions ou congrès professionnels ou encore à des actions de formation. En effet, l'attestation établie, le 21 août 2017, par un membre du bureau du groupement régional des gynécologues-obstétriciens de Picardie, selon laquelle M. B... a régulièrement participé, en 2013, aux assemblées générales et aux réunions de formation organisées par cette association dans différents centres hospitaliers de la région, ne comporte aucune précision quant aux dates et lieux auxquels se sont tenus les événements auxquels elle fait référence. Si M. B... produit, en outre, une invitation et un bulletin de réponse concernant l'un de ces événements, organisé du 4 au 6 octobre 2013 par cette association, ces documents ne suffisent pas, à eux seuls, à justifier d'une participation effective de l'intéressé à ces journées. Il en est de même du formulaire d'inscription, souscrit par M. B..., à une action de formation organisée par le réseau périnatal de Picardie, laquelle d'ailleurs ne précise ni la date ni le lieu de cette action. En outre, le seul fait que M. B... ait obtenu, le 27 mars 2013, le renouvellement de son accréditation dans le cadre du contrôle de la qualité de la pratique professionnelle des médecins exerçant en établissement de santé ne peut suffire à justifier de sa participation effective à des formations au cours de cette même année. Enfin, si M. B... a produit des relevés détaillés et nominatifs de télépéage établis au cours de l'année 2013 par la société gestionnaire des autoroutes du Nord et de l'Est de la France, ces relevés ne sont de nature ni à permettre d'identifier le véhicule utilisé par l'intéressé lors des franchissements de barrière de péage auxquels ils se rapportent, ni à établir que les déplacements correspondants auraient été effectués pour des motifs inhérents à l'exercice, par l'intéressé, de son activité libérale. Ainsi, par les seules pièces qu'il produit, M. B... ne peut être regardé comme apportant la preuve, qui lui incombe, du caractère déductible en charges des frais de déplacement qu'il allègue avoir exposés pour se rendre à des formations, à des congrès ou à des réunions professionnelles.

7. S'il est vraisemblable que, pour les besoins de la gestion de son activité libérale, M. B... ait été amené à se déplacer pour effectuer des démarches administratives ou auprès de sa banque, de La Poste ou de divers organismes à Beauvais ou à Amiens, il n'en justifie pas par les seuls documents qu'il produit, à savoir la copie d'un chèque libellé à l'ordre du Trésor public et accompagné d'une note manuscrite faisant référence à une relance téléphonique de sa part, ainsi que la copie d'une lettre de relance qu'il aurait rédigée sur un papier à l'en-tête du centre hospitalier de Beauvais et qui a vraisemblablement été expédiée avec le courrier de l'établissement, sans qu'il ait été nécessaire que l'intéressé se déplace pour assurer son envoi. Ainsi, par les seules pièces qu'il produit, M. B... ne peut être regardé comme apportant la preuve, qui lui incombe, du caractère déductible des dépenses de véhicule et autres frais qu'il allègue avoir exposés pour les besoins de la gestion de son activité libérale.

8. Dans ces conditions et en l'absence de présentation, par M. B..., des documents comptables qu'il était tenu de détenir dans le cadre de son activité libérale, l'administration, qui a admis en déduction, outre la dépense de carburant de 27 euros se rapportant au congrès de Paris, mentionné au point 6, une somme de 288 euros au titre des frais d'assurance du véhicule pris par le contribuable en crédit-bail, était fondée à estimer qu'il serait tenu suffisamment compte de l'utilisation de ce véhicule pour les besoins de cette activité libérale en estimant que celle-ci représentait 25 % de son utilisation totale. A cet égard, le seul fait que M. B... et son épouse aient été chacun propriétaire, au cours de l'année d'imposition en litige, d'un véhicule leur permettant d'effectuer des trajets personnels ne suffit pas à établir que, dans une situation dans laquelle M. B... exerçait aussi une activité salariée au sein du centre hospitalier de Beauvais, ce véhicule aurait été exclusivement utilisé, comme il l'allègue, pour les besoins de son activité libérale et, par ailleurs, pour se rendre en vacances loin de Beauvais. Ainsi, c'est à bon droit que l'administration, outre les deux sommes mentionnées précédemment, dont elle avait admis la déduction, a estimé qu'il y avait, dès lors, lieu d'admettre en déduction une part de 25 % des loyers du crédit-bail versés au titre de l'année d'imposition en litige et qu'aucun des autres éléments avancés par M. B... n'était de nature à justifier une déduction supplémentaire au titre des dépenses de véhicule et des frais divers liés à la gestion de son activité libérale.

9. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande. Les conclusions qu'il présente au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent, par voie de conséquence, être rejetées. Il doit en être de même, en tout état de cause, de ses conclusions afférentes à la charge des dépens, prévue à l'article R. 761-1 de ce code.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.

Copie en sera transmise à l'administrateur général des finances publiques chargé de la direction spécialisée de contrôle fiscal Nord.

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N°19DA01606


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 19DA01606
Date de la décision : 14/10/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Contributions et taxes - Impôts sur les revenus et bénéfices - Règles générales - Impôt sur le revenu - Détermination du revenu imposable - Charges déductibles du revenu global.

Contributions et taxes - Impôts sur les revenus et bénéfices - Revenus et bénéfices imposables - règles particulières - Bénéfices non commerciaux - Détermination du bénéfice imposable.


Composition du Tribunal
Président : M. Heu
Rapporteur ?: M. Jean-François Papin
Rapporteur public ?: M. Arruebo-Mannier
Avocat(s) : DONGMO GUIMFAK

Origine de la décision
Date de l'import : 26/10/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2021-10-14;19da01606 ?
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