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30/09/2021 | FRANCE | N°20DA01445

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 4ème chambre, 30 septembre 2021, 20DA01445


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif d'Amiens, d'une part, d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 17 février 2020 par lequel la préfète de la Somme a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination, d'autre part, d'enjoindre à la préfète de la Somme de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " ou, à défaut, de procéder au rée

xamen de sa situation, dans le délai d'un mois à compter de la date de notification d...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif d'Amiens, d'une part, d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 17 février 2020 par lequel la préfète de la Somme a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination, d'autre part, d'enjoindre à la préfète de la Somme de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " ou, à défaut, de procéder au réexamen de sa situation, dans le délai d'un mois à compter de la date de notification du jugement à intervenir.

Par un jugement n° 2000890 du 3 juillet 2020, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 11 septembre 2020, M. A..., représenté par Me Tourbier, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 17 février 2020 de la préfète de la Somme ;

3°) d'enjoindre à la préfète de la Somme, dans un délai d'un mois à compter de la date de notification de l'arrêt à intervenir, de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " ou, à défaut, de procéder au réexamen de sa situation ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 1 500 euros au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Jean-François Papin, premier conseiller, a été entendu, au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. B... A..., ressortissant nigérian né le 13 octobre 1972 à Benin City (Nigeria), est entré en France, selon ses déclarations, le 28 mars 2002. Ayant sollicité le 27 mars 2014 du préfet la Somme, après des démarches infructueuses effectuées en 2012 dans le département des Côtes-d'Armor, son admission au séjour en faisant état de difficultés de santé, il s'est vu délivrer, à compter du mois d'avril 2014, une autorisation provisoire de séjour qui a été régulièrement renouvelée jusqu'au 13 avril 2015. M. A... s'est toutefois vu opposer, par un arrêté du 6 juillet 2015, un premier refus de séjour, mais son autorisation provisoire de séjour a cependant été renouvelée jusqu'au 15 avril 2016. L'intéressé ayant demandé de nouveau la délivrance d'un titre de séjour pour raisons de santé le 23 février 2016, le préfet de la Somme a refusé de faire droit à sa demande, par un arrêté du 14 juin 2017, et a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français. M. A..., qui s'est alors maintenu irrégulièrement sur le territoire français, a été interpellé et a de nouveau fait l'objet, le 4 février 2019, d'une obligation de quitter le territoire français. L'intéressé a cependant formé, le 9 avril 2019, une nouvelle demande d'admission au séjour pour raisons de santé. Par un arrêté du 17 février 2020, la préfète de la Somme a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office. M. A... relève appel du jugement du 3 juillet 2020 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation, pour excès de pouvoir, de l'arrêté du 17 février 2020 de la préfète de la Somme, d'autre part, à ce qu'il soit enjoint à cette autorité de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " ou, à défaut, de procéder au réexamen de sa situation.

2. Aux termes de l'article L. 313-11, alors en vigueur, du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : / (...) / 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée. (...) / (...) / 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La condition prévue à l'article L. 313-2 n'est pas exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. Sous réserve de l'accord de l'étranger et dans le respect des règles de déontologie médicale, les médecins de l'office peuvent demander aux professionnels de santé qui en disposent les informations médicales nécessaires à l'accomplissement de cette mission. Les médecins de l'office accomplissent cette mission dans le respect des orientations générales fixées par le ministre chargé de la santé. Si le collège de médecins estime dans son avis que les conditions précitées sont réunies, l'autorité administrative ne peut refuser la délivrance du titre de séjour que par une décision spécialement motivée. (...) ".

3. Pour refuser de délivrer à M. A... la carte de séjour temporaire qu'il sollicitait afin de pouvoir continuer à se soigner en France, la préfète de la Somme a forgé son appréciation au vu d'un avis émis le 30 septembre 2019 par le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, qui, après avoir examiné l'intéressé, a estimé que l'état de santé de celui-ci rendait nécessaire une prise en charge médicale dont le défaut ne devrait toutefois pas entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qu'au vu des éléments communiqués au collège, l'état de santé de M. A... lui permettait de voyager sans risque vers son pays d'origine. Il ressort des motifs de l'arrêté contesté que la préfète de la Somme, après avoir examiné les éléments produits par M. A..., s'est approprié cette appréciation du collège de médecins.

4. Il ressort des pièces du dossier, en particulier de certificats médicaux établis le 7 octobre 2015 et le 5 juillet 2017 par le psychiatre qui prend en charge M. A..., que ce dernier est suivi par ce praticien pour un état anxio-dépressif majeur et sévère traité par l'administration d'un antidépresseur, d'un stabilisateur de l'humeur, ainsi que par des sédatifs et anxiolytiques. Toutefois, ces certificats, par lesquels ce praticien ne se prononce aucunement sur les conséquences susceptibles de résulter pour M. A... d'une interruption du traitement ainsi prescrit, ne sont pas, à eux seuls, de nature à remettre en cause l'appréciation de la préfète de la Somme selon laquelle un défaut de prise en charge médicale de la pathologie dont est atteint M. A... ne devrait pas entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité. Dès lors, le moyen tiré de l'erreur d'appréciation commise sur ce point par la préfète de la Somme au regard des dispositions précitées du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.

5. Si M. A... soutient que la préfète de la Somme a retenu à tort qu'il pourrait accéder effectivement à un traitement approprié à son état de santé en cas de retour dans son pays d'origine, il résulte de ce qui a été dit au point 3, que la préfète de la Somme ne s'est aucunement prononcée sur le point de savoir si l'intéressé pourrait avoir accès à un traitement approprié à son état de santé dans le pays dont il est originaire, mais a fondé le refus de séjour sur les motifs qu'un défaut de prise en charge médicale de la pathologie dont il est atteint ne devrait pas entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qu'au vu des éléments d'information communiqués par l'intéressé, celui-ci peut voyager à destination de son pays d'origine sans risque pour sa santé. Il suit de là que ce moyen doit être écarté comme inopérant.

6. Il ressort des motifs de l'arrêté contesté que la préfète de la Somme y a indiqué, en outre, que M. A... avait fait l'objet, respectivement le 22 novembre 2006 et le 20 juin 2013, de condamnations pénales à raison, d'une part, de faits de blanchiment aggravé commis en 2005 et 2006, d'autre part, de faits d'escroquerie commis en 2012 et 2013. Si la préfète a, pour fonder la décision de refus de séjour prononcé à l'égard de M. A..., tiré de ces éléments que sa présence constituait une menace pour l'ordre public, il résulte de ce qui a été dit aux points 3 à 5 que le motif tiré de ce que l'état de santé de l'intéressé ne rendait pas nécessaire son maintien sur le territoire français était de nature à justifier légalement la décision de refus de séjour et qu'il était, par lui-même, suffisant. Ainsi, il ne ressort pas des pièces du dossier, d'une part, que la préfète de la Somme aurait pris une décision différente en faisant abstraction du motif tiré de la menace pour l'ordre public que représenterait la présence de M. A... sur le territoire français, d'autre part et quelle que soit l'appréciation portée par la commission départementale du titre de séjour, qui ne liait pas l'autorité préfectorale, que la prise en compte d'une telle menace aurait constitué une considération prépondérante dans l'appréciation, par cette autorité, de la situation de M. A.... Il suit de là que le moyen tiré de l'erreur de fait qui entacherait ce motif surabondant doit être écarté comme inopérant.

7. Il ressort des pièces du dossier que M. A... est célibataire, sans enfant, et qu'il n'a fait état d'aucune relation particulière qu'il aurait tissée depuis son arrivée sur le territoire français. S'il soutient qu'entré en France le 28 mars 2002, il résidait habituellement depuis près de vingt ans à la date d'édiction de l'arrêté contesté, la durée de sa présence en France, à la supposer même établie par les pièces versées au dossier, n'a été rendue possible que par le maintien irrégulier de l'intéressé sur le territoire français, d'une part, durant dix années, de 2002 à 2012, alors qu'il n'avait pas sollicité la délivrance d'un titre de séjour, d'autre part, à compter du 14 juin 2017, en dépit de deux obligations de quitter le territoire français. En outre, l'intéressé n'établit pas être dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine, dans lequel il a habituellement vécu jusqu'à l'âge de trente ans. Dans ces conditions, eu égard aux conditions, en majeure partie irrégulières, du séjour de M. A... en France et malgré l'ancienneté, à la supposer établie, de ce séjour, la décision refusant de l'admettre au séjour n'a pas été prise en méconnaissance des dispositions précitées du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

8. Enfin, dans les circonstances de l'espèce, la préfète de la Somme, en refusant de faire bénéficier M. A... d'une admission exceptionnelle au séjour, sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation.

9. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, les conclusions de M. A... à fin d'injonction ainsi que celles présentées par son conseil sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique doivent être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A..., au ministre de l'intérieur et à Me Tourbier.

Copie en sera transmise à la préfète de la Somme.

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No 20DA01445


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 20DA01445
Date de la décision : 30/09/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. Heu
Rapporteur ?: M. Jean-François Papin
Rapporteur public ?: M. Arruebo-Mannier
Avocat(s) : AARPI QUENNEHEN - TOURBIER

Origine de la décision
Date de l'import : 12/10/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2021-09-30;20da01445 ?
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