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05/08/2021 | FRANCE | N°20DA01977

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3ème chambre, 05 août 2021, 20DA01977


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le syndicat autonome des sapeurs-pompiers professionnels et des personnels administratifs, techniques et spécialisés du Pas-de-Calais a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler la décision du 10 décembre 2017 par laquelle le président du conseil d'administration du service départemental d'incendie et de secours du Pas-de-Calais a refusé d'abroger l'article 8 du paragraphe B de l'annexe 16 au règlement intérieur du service départemental d'incendie et de secours du Pas-de-Calais et de lui enjoi

ndre d'abroger cet article dans un délai d'un mois à compter du jugement ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le syndicat autonome des sapeurs-pompiers professionnels et des personnels administratifs, techniques et spécialisés du Pas-de-Calais a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler la décision du 10 décembre 2017 par laquelle le président du conseil d'administration du service départemental d'incendie et de secours du Pas-de-Calais a refusé d'abroger l'article 8 du paragraphe B de l'annexe 16 au règlement intérieur du service départemental d'incendie et de secours du Pas-de-Calais et de lui enjoindre d'abroger cet article dans un délai d'un mois à compter du jugement à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard.

Par un jugement n° 1801411 du 16 octobre 2020, le tribunal administratif de Lille a annulé cette décision, a enjoint au service départemental d'incendie et de secours du Pas-de-Calais, dans un délai de trois mois à compter de la notification du jugement, d'abroger l'article 8 du paragraphe B de l'annexe 16 de son règlement intérieur, a mis à la charge du service départemental d'incendie et de secours une somme 1 500 euros à verser au syndicat autonome des sapeurs-pompiers professionnels et des personnels administratifs, techniques et spécialisés du Pas-de-Calais au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et a rejeté le surplus des conclusions.

Procédure devant la cour :

I. Par une requête et un mémoire, enregistrés les 15 décembre 2020 et 18 mars 2021, sous le n° 20DA01977, le service départemental d'incendie et de secours du Pas-de-Calais, représenté par Me Elodie Poput, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de rejeter la demande présentée par le syndicat autonome des sapeurs-pompiers professionnels et des personnels administratifs, techniques et spécialisés du Pas-de-Calais devant le tribunal administratif ;

3°) de mettre à la charge du syndicat autonome des sapeurs-pompiers professionnels et des personnels administratifs, techniques et spécialisés du Pas-de-Calais la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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II. Par une requête, enregistrée les 15 décembre 2020, sous le n° 20DA01978, le service départemental d'incendie et de secours du Pas-de-Calais, représenté par Me Elodie Poput, demande à la cour de surseoir à l'exécution du jugement du 16 octobre 2020.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 84-63 du 26 janvier 1984 ;

- le décret n° 85-1250 du 26 novembre 1985 ;

- le décret n°2000-815 du 25 août 2000 ;

- le décret n°2001-623 du 12 juillet 2001 ;

- le décret n° 2001-1382 du 31 décembre 2001 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme B... A..., présidente-rapporteure,

- les conclusions de M. Hervé Cassara, rapporteur public,

- les observations de Me Elodie Poput, représentant le service départemental d'incendie et de secours du Pas-de-Calais et de M. Delhomez, président du syndicat autonome des sapeurs-pompiers professionnels et des personnels administratifs, techniques et spécialisés du Pas-de-Calais.

Une note en délibéré présentée par Me Poput pour le service départemental d'incendie et de secours du Pas-de-Calais a été enregistrée le 15 juillet 2021.

Une note en délibéré présentée par Me Euvrard pour le syndicat autonome des sapeurs-pompiers professionnels et des personnels administratifs, techniques et spécialisés du Pas-de-Calais a été enregistrée le 15 juillet 2021.

Considérant ce qui suit :

1. Par une délibération du 16 décembre 2016, le service départemental d'incendie et de secours du Pas-de-Calais a adopté son nouveau règlement intérieur. Par lettre du 21 septembre 2017, le syndicat autonome des sapeurs-pompiers professionnels et des personnels administratifs, techniques et spécialisés du Pas-de-Calais a demandé l'abrogation des dispositions de l'article 8 du paragraphe B, relatif aux jours de fractionnement, de l'annexe 16 au règlement intérieur portant instruction permanente relative au temps de travail. Par une décision du 10 décembre 2017, le président du conseil d'administration du service départemental d'incendie et de secours du Pas-de-Calais a rejeté cette demande. Le service départemental d'incendie et de secours du Pas-de-Calais relève appel du jugement du 16 octobre 2020 par lequel le tribunal administratif de Lille a annulé cette décision du 10 décembre 2017 et lui a enjoint d'abroger l'article 8 du paragraphe B de l'annexe 16 du règlement intérieur.

Sur la jonction :

2. Les requêtes visées ci-dessus sont dirigées contre le même jugement. Il y a lieu de les joindre pour qu'il y soit statué par un même arrêt.

Sur la régularité du jugement attaqué :

3. Il ressort du jugement attaqué que les premiers juges ont rappelé les conditions d'obtention d'un jour de fractionnement pour les fonctionnaires territoriaux, soit la demande de cinq à sept jours de congés, en dehors de la période du 1er mai au 31 octobre, sur les vingt-cinq congés annuels dont ils disposent en théorie pour obtenir un jour de fractionnement. Après avoir énoncé le régime des congés applicables aux sapeurs-pompiers du service départemental d'incendie et de secours du Pas-de-Calais, ils ont calculé proportionnellement le nombre de congés que devaient poser les sapeurs-pompiers qui bénéficient selon leur cycle de travail, soit de quatorze jours de congés annuels soit de dix-neuf jours. Ils ont ce faisant suffisamment motivé leur jugement sur ce point. Ils ont pu également en conséquence estimer que le jour de fractionnement, fixé à une valeur de sept unités de temps de travail (UTT), et ce, quel que soit le cycle alors que certains agents sont astreints à 12 unités de temps de travail voire à 16,8 unités de temps de travail, était illégal. Par suite, contrairement à ce que soutient le service départemental d'incendie et de secours du Pas-de-Calais, le jugement n'est pas insuffisamment motivé. Le moyen doit être écarté.

4. Si le service départemental d'incendie et de secours du Pas-de-Calais soutient que le jugement attaqué serait entaché d'une contradiction de motifs, un tel moyen affecte son bien-fondé et non sa régularité. Par suite, ce moyen doit être écarté.

Sur le bien-fondé du jugement :

En ce qui concerne le nombre de jours de congés annuels à prendre pour bénéficier d'un jour de fractionnement :

5. Aux termes de l'article 1er du décret du 25 août 2000 susvisé : " La durée du travail effectif est fixée à trente-cinq heures par semaine dans les services et établissements publics administratifs de l'Etat ainsi que dans les établissements publics locaux d'enseignement. / Le décompte du temps de travail est réalisé sur la base d'une durée annuelle de travail effectif de 1 607 heures maximum, sans préjudice des heures supplémentaires susceptibles d'être effectuées (...) ". Aux termes de l'article 1er du décret du 12 juillet 2001 : " Les règles relatives à la définition, à la durée et à l'aménagement du temps de travail applicables aux agents des collectivités territoriales et des établissements publics en relevant sont déterminées dans les conditions prévues par le décret du 25 août 2000 (...) ".

6. Aux termes de l'article 1er du décret du 26 novembre 1985 relatif aux congés annuels des fonctionnaires territoriaux, dans sa version applicable à la décision attaquée : " Tout fonctionnaire territorial en activité a droit, dans les conditions et sous les réserves précisées aux articles ci-après, pour une année de service accompli du 1er janvier au 31 décembre, à un congé annuel d'une durée égale à cinq fois ses obligations hebdomadaires de service. Cette durée est appréciée en nombre de jours effectivement ouvrés. / (...). / Un jour de congé supplémentaire est attribué au fonctionnaire dont le nombre de jours de congé pris en dehors de la période du 1er mai au 31 octobre est de cinq, six ou sept jours ; il est attribué un deuxième jour de congé supplémentaire lorsque ce nombre est au moins égal à huit jours. ". Aux termes de l'article 1er du décret du 31 décembre 2001 relatif au temps de travail des sapeurs-pompiers professionnels : " La durée de travail effectif des sapeurs-pompiers professionnels (...) comprend : / 1. Le temps passé en intervention ; / 2. Les périodes de garde consacrées au rassemblement qui intègre les temps d'habillage et déshabillage, à la tenue des registres, à l'entraînement physique, au maintien des acquis professionnels, à des manœuvres de la garde, à l'entretien des locaux, des matériels et des agrès ainsi qu'à des tâches administratives et techniques, aux pauses destinées à la prise de repas ; / 3. Le service hors rang, les périodes consacrées aux actions de formation (...), et les services de sécurité ou de représentation ".

7. En vertu des dispositions de l'instruction permanente relative au temps de travail adoptée par le service départemental d'incendie et de secours du Pas-de-Calais, les sapeurs-pompiers professionnels sont soumis à des cycles de travail constitués, notamment, de gardes de douze heures, pondérés à douze unités de temps de travail ou de gardes mixtes de douze heures et de vingt-quatre heures, pondérées à 16,8 unités de temps de travail pour tenir compte de la moindre intensité du travail fourni pendant les périodes d'inaction. Les obligations de service annuelles sont fixées à 1 584 unités de temps de travail. Les congés annuels sont fixés à 236 unités de temps de travail, lesquels représentent dix-neuf jours de congés annuels pour les agents effectuant des gardes de douze heures et quatorze jours pour les agents astreints à un cycle de travail mixte. L'article 8 du paragraphe B de l'instruction permanente dispose que les agents bénéficiant des droits en congés annuels de quatorze et de dix-neuf jours doivent poser, au minimum, respectivement quatre et cinq jours de congés annuels en dehors de la période du 1er mai au 31 octobre pour bénéficier d'un jour de fractionnement.

8. Il résulte des dispositions combinées des articles 1er du décret du 25 août 2000, du décret du 12 juillet 2001 et du décret du 26 novembre 1985 précitées que pour bénéficier d'un jour de congé annuel supplémentaire au titre du fractionnement, les fonctionnaires territoriaux doivent poser cinq jours de congés en dehors de la période du 1er mai au 31 octobre, sur un total de cinq fois leurs obligations hebdomadaires de service, soit sur un total de vingt-cinq jours de congés annuels. Pour les agents astreints aux gardes mixtes, qui bénéficient de quatorze jours de congés annuels, la quotité équivalente à 5/25ème est de 2,8 jours, arrondis à 3 jours. Pour les agents astreints aux gardes de douze heures, qui bénéficient de dix-neuf jours de congés annuels, la quotité ouvrant droit à un jour de fractionnement, équivalente à 5/25ème est de 3,8 jours, arrondis à quatre jours. Pour contester cette équivalence, le service départemental d'incendie et de secours ne peut utilement soutenir que les 236 heures d'unités de temps de travail de congés annuels correspondent en réalité à trente-quatre jours de congés annuels, dès lors que les jours de repos imposés entre leurs gardes ne sauraient constituer des congés annuels au sens de l'article 1er du décret du 26 novembre 1985. Dans ces conditions, le service départemental d'incendie et de secours du Pas-de-Calais n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif a estimé que la fixation d'un minimum de quatre jours et cinq jours de congés annuels à poser en dehors de la période du 1er mai au 31 octobre pour les agents astreints respectivement à un cycle de travail de 16,8 unités de temps de travail ou de douze unités de temps de travail, était entachée d'illégalité et lui a enjoint d'abroger cette disposition.

9. Si le tribunal administratif a commis une erreur en inversant le nombre de jours congés annuels octroyés aux agents astreints aux gardes mixtes et ceux astreints aux gardes de douze heures, en calculant ainsi un nombre erroné de congés annuels à poser pour bénéficier d'un jour de congé dit de fractionnement, cette erreur matérielle, rectifiée au point précédent par la cour, n'a pas eu d'influence sur le jugement du tribunal administratif .

En ce qui concerne la valeur du jour de fractionnement :

10. Il résulte de l'article 8 du paragraphe B de l'instruction permanente relative au temps de travail que le jour de fractionnement accordé aux sapeurs-pompiers est décompté pour sept unités de temps de travail et est soustrait au volume horaire annuel.

11. Il résulte des dispositions de l'article 1er du décret du 26 novembre 1985 que les jours de congés supplémentaires, dit jours de fractionnement, doivent être assimilés à des jours légaux de congés. Il ressort des pièces du dossier que les sapeurs-pompiers bénéficient de 236 heures de congés soit quatorze jours pour les agents astreint à un cycle mixte de garde équivalent à 16,8 heures, et dix-neuf jours pour les agents astreint à un cycle de garde de douze heures. Dans ces conditions, le service départemental d'incendie et de secours ne pouvait légalement fixer, sans tenir compte des cycles de travail, le congé de fractionnement à une valeur unique de sept unités de temps de travail. Contrairement à ce que soutient le service départemental d'incendie et de secours, un tel décompte n'a pas pour effet de conduire à une rupture d'égalité dès lors que les agents sont déjà soumis à des cycles de travail différents pour lesquels ils ne bénéficient pas du même nombre de congés annuels. Par suite, le service départemental d'incendie et de secours du Pas-de-Calais n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué le tribunal administratif a estimé que la fixation du congé de fractionnement à sept unités de temps de travail pour l'ensemble des agents était illégale et qu'il y avait lieu en conséquence d'abroger également cette disposition.

12. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède que le service départemental d'incendie et de secours du Pas-de-Calais n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a annulé sa décision du 10 décembre 2017 et lui a enjoint, dans un délai de trois mois à compter de la notification du jugement, d'abroger l'article 8 du paragraphe B de l'annexe 16 de son règlement intérieur.

Sur la requête n° 20DA01978 :

13. La cour statuant par le présent arrêt sur les conclusions de la requête tendant à l'annulation du jugement attaqué, les conclusions de la requête n° 20DA01978 tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution de ce jugement sont privées d'objet. Il n'y a pas lieu, par suite, d'y statuer.

Sur les frais liés à l'instance :

14. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge du syndicat autonome des sapeurs-pompiers professionnels et des personnels administratifs, techniques et spécialisés du Pas-de-Calais, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que le service départemental d'incendie et de secours du Pas-de-Calais demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce et sur le fondement de ces mêmes dispositions, de mettre à la charge du service départemental d'incendie et de secours du Pas-de-Calais une somme de 1 500 euros à verser au syndicat autonome des sapeurs-pompiers professionnels et des personnels administratifs, techniques et spécialisés du Pas-de-Calais au même titre.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête n° 20DA01977 du service départemental d'incendie et de secours du Pas-de-Calais est rejetée.

Article 2 : Le service départemental d'incendie et de secours du Pas-de-Calais versera au syndicat autonome des sapeurs-pompiers professionnels et des personnels administratifs, techniques et spécialisés du Pas-de-Calais la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative

Article 3 : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête n°20DA01978 tendant au sursis à l'exécution du jugement.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au service départemental d'incendie et de secours Pas-de-Calais et au syndicat autonome des sapeurs-pompiers professionnels et des personnels administratifs, techniques et spécialisés du Pas-de-Calais.

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N°s20DA01977, 20DA01978

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N°"Numéro"


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 20DA01977
Date de la décision : 05/08/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-05-04-03 Fonctionnaires et agents publics. - Positions. - Congés. - Congés annuels.


Composition du Tribunal
Président : Mme Borot
Rapporteur ?: Mme Ghislaine Borot
Rapporteur public ?: M. Cassara
Avocat(s) : BAZIN et CAZELLES AVOCATS ASSOCIES;EUVRARD;BAZIN et CAZELLES AVOCATS ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2021-08-05;20da01977 ?
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