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01/07/2021 | FRANCE | N°19DA01460

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 4ème chambre, 01 juillet 2021, 19DA01460


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme B... A... C... ont demandé au tribunal administratif de Lille de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2012 et 2013, pour un montant de 19 884 euros, en conséquence de la remise en cause de la nature de charges déductibles de leurs revenus fonciers de dépenses consistant en l'aménagement de quatre logements dans un immeuble, situé à Dunkerque, appartenant à Mme A... C....<

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Par un jugement n° 1605185 du 25 avril 2019, le tribunal administratif de Lil...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme B... A... C... ont demandé au tribunal administratif de Lille de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2012 et 2013, pour un montant de 19 884 euros, en conséquence de la remise en cause de la nature de charges déductibles de leurs revenus fonciers de dépenses consistant en l'aménagement de quatre logements dans un immeuble, situé à Dunkerque, appartenant à Mme A... C....

Par un jugement n° 1605185 du 25 avril 2019, le tribunal administratif de Lille a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 25 juin 2019, M. et Mme A... C..., représentés par Me Le Cam, demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2012 et 2013, pour un montant de 19 884 euros, et au titre des années 2014 à 2016, pour un montant de 54 855 euros ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Jean-François Papin, premier conseiller,

- et les conclusions de M. Jean-Philippe Arruebo-Mannier, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M. et Mme B... A... C... ont porté en déduction de leurs revenus fonciers, sur la déclaration de revenus qu'ils ont souscrite au titre de l'année 2012, une somme de 190 459 euros correspondant à des dépenses de travaux d'aménagement exposées par eux dans un immeuble, situé à Dunkerque, appartenant à Mme A... C.... A l'issue d'un contrôle sur pièces, l'administration a estimé devoir remettre en cause le caractère de charge déductible des revenus fonciers de l'année 2012 de ces dépenses, en estimant qu'elles correspondaient à la réalisation de travaux de reconstruction. En outre, l'administration a estimé que cette rectification, opérée au titre des revenus fonciers de l'année 2012, devait entraîner l'annulation du déficit d'un montant de 159 752 euros reporté au titre de l'année 2013. Elle a fait connaître, sur ces deux points, sa position à M. et Mme A... C... par une proposition de rectification qu'elle leur a adressée le 2 avril 2015. Ce document les informait, par ailleurs, de ce qu'une autre rectification était envisagée en ce qui concerne la réintégration, assortie de l'intérêt de retard et de la majoration de 10 % prévue à l'article 1758 A du code général des impôts, d'une pension alimentaire portée, par M. et Mme A... C..., en déduction de leurs revenus imposables de l'année 2012. Les cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux résultant, au titre des années 2012 et 2013, de ces rehaussements ont été maintenus malgré les observations formulées par les contribuables et ont été mises en recouvrement le 30 septembre 2015, pour un montant total de 21 883 euros. Leur réclamation ayant été rejetée, M. et Mme A... C... ont porté le litige devant le tribunal administratif de Lille, en lui demandant de prononcer, à concurrence d'un montant de 19 884 euros, la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2012 et 2013, en conséquence de la remise en cause de la nature de charges déductibles de leurs revenus fonciers des dépenses d'aménagement exposées sur l'immeuble appartenant à Mme A... C... à Dunkerque. M. et Mme A... C... relèvent appel du jugement du 25 avril 2019 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté cette demande, et demandent également à la cour de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2014 à 2016, pour un montant de 54 855 euros.

Sur les cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux établies au titre des années 2014 à 2016 :

2. Par la requête dont ils ont saisi la cour, M. et Mme A... C... concluent non seulement à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2012 et 2013, à hauteur d'un montant de 19 884 euros, mais aussi à la décharge des suppléments d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux mis à leur charge au titre des années 2014 à 2016, pour un montant de 54 855 euros. Or, ainsi que le fait observer le ministre, les premiers juges ne se sont pas prononcés, par le jugement du 25 avril 2019 dont M. et Mme A... C... relèvent appel, sur le litige afférent aux années 2014 à 2016, celui-ci ayant fait l'objet d'une autre demande qui demeure pendante à ce jour devant le tribunal administratif, mais sur celui relatif aux années 2012 et 2013. Il suit de là que les conclusions de la requête de M. et Mme A... C... tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux établies au titre des années 2014 à 2016 sont, dans le cadre de cette instance, nouvelles en appel et, par suite, irrecevables. La fin de non-recevoir qui leur est opposée par le ministre doit donc être accueillie.

Sur les cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux établies au titre des années 2012 et 2013 :

3. En vertu de l'article 28 du code général des impôts, le revenu net foncier est égal à la différence entre le montant du revenu brut et le total des charges de la propriété. Aux termes de l'article 31 de ce code, dans sa rédaction applicable au présent litige : " I. Les charges de la propriété déductibles pour la détermination du revenu net comprennent : / 1° Pour les propriétés urbaines : / a) Les dépenses de réparation et d'entretien effectivement supportées par le propriétaire ; / (...) / b) Les dépenses d'amélioration afférentes aux locaux d'habitation, à l'exclusion des frais correspondant à des travaux de construction, de reconstruction ou d'agrandissement (...). ". Enfin, en vertu du 3° du I de l'article 156 du même code, le revenu net foncier est établi sous déduction des déficits fonciers constatés pour une année, lesquels peuvent s'imputer sur les revenus fonciers des dix années suivantes.

4. Doivent être regardés comme des travaux de construction ou de reconstruction, au sens de ces dispositions, les travaux comportant la création de nouveaux locaux d'habitation, notamment dans des locaux auparavant affectés à un autre usage, sauf si ces locaux étaient destinés originellement à l'habitation et n'ont pas fait l'objet de travaux modifiant leur conception, leur aménagement et leurs équipements en vue de leur ôter cette destination. Doivent également être regardés, pour l'application de ces dispositions, comme des travaux de construction ou de reconstruction les travaux ayant pour effet d'apporter une modification importante au gros œuvre de locaux existants ou les travaux d'aménagement interne qui, par leur importance, équivalent à une reconstruction. Il appartient au contribuable qui entend déduire de ses revenus bruts fonciers le montant de dépenses qu'il estime correspondre à des travaux d'amélioration, au sens des dispositions, précitées, du 1° du I de l'article 31 du code général des impôts, d'un immeuble lui appartenant d'apporter tous éléments de nature à établir, dans leur principe comme dans leur montant, leur caractère déductible en tant que charges de la propriété.

5. Pour remettre en cause la déductibilité de la somme totale de 190 459 euros que M. et Mme A... C... avaient portée en déduction de leurs revenus fonciers de l'année 2012, comme correspondant à des dépenses de travaux d'amélioration exposées par eux afin d'aménager, dans les étages d'un immeuble, appartenant à Mme A... C..., situé 18 rue Albert Sauvage à Dunkerque, quatre appartements à usage d'habitation, l'administration a estimé que ces dépenses se rapportaient, au sens et pour l'application des dispositions précitées du 1° du I de l'article 31 du code général des impôts, à l'exécution de travaux de reconstruction, dès lors qu'ils avaient notamment, selon le service, eu pour effet de changer la destination des parties de l'immeuble sur lesquels ils portaient, lesquelles étaient précédemment affectées dans leur intégralité à un usage professionnel, puisqu'elles étaient soient utilisées pour les besoins de l'activité d'enseignement de la danse, exercée par Mme A... C... dans la salle occupant l'essentiel du rez-de-chaussée de l'immeuble, soient inutilisées.

6. Pour démontrer que les travaux d'aménagement en cause étaient, par nature, déductibles de leurs revenus fonciers, M. et Mme A... C... soutiennent que ces travaux ont porté sur des parties d'immeuble qui avaient été initialement conçues, aménagées et équipées pour un usage d'habitation. Ils font observer que le précédent propriétaire est d'ailleurs né dans l'immeuble, comme en témoigne son acte de naissance, qu'ils versent à l'instruction. Ils ajoutent que les éditions de 1931 et de 1961 du recueil Ravet-Anceau y font mention d'habitants et que l'un des actes de vente portant sur cet immeuble, établi en 1946, précise que la propriété trouve son origine dans la division d'une " belle maison d'habitation " et de ses dépendances.

7. Toutefois, ainsi que le fait valoir le ministre, d'une part, l'adresse de l'immeuble a connu plusieurs modifications au cours de son histoire, puisqu'elle était intitulée " 16 rue Saint Bernard " dans plusieurs actes notariés établis, en ce qui concerne cet immeuble, de l'année 1908 à l'année 1917, qu'elle est devenue ensuite " 16 rue Albert Sauvage ", ainsi qu'en témoigne l'acte de vente de 1946 dont se prévalent les appelants, puis, enfin, " 18 rue Albert Sauvage ", telle que cette dernière adresse ressort d'une attestation immobilière établie en 1969. Ainsi, si l'acte de naissance du précédent propriétaire mentionne que celui-ci est né, le 25 décembre 1938, 16 rue Albert Sauvage à Dunkerque, il ne peut être tenu pour certain que cette adresse correspondait alors à l'immeuble en cause, ce que l'attestation établie par l'intéressé, confirmant qu'il est né au " 16 rue Albert Sauvage à Dunkerque (devenu ensuite le n°18) " et précisant qu'il s'agissait du domicile de ses parents et grands-parents à l'époque, ne peut suffire à établir. En effet, cette attestation ne coïncide pas avec les mentions de l'acte de vente établi en 1946, ni avec celles des autres actes notariés, versés à l'instruction par le ministre, établis la même année. Ainsi, si ces actes identifient l'immeuble en cause, tel qu'acquis par les grands-parents de l'auteur de l'attestation, comme " sis 16 rue Albert Sauvage ", ils s'accordent pour désigner cet immeuble comme affecté à un usage d'entrepôt, laquelle affectation est d'ailleurs reprise dans l'attestation immobilière mentionnée précédemment, publiée le 11 septembre 1969 à la conservation des hypothèques de Dunkerque. Les actes notariés établis le 16 août 1946 et les 23 et 25 septembre 1946 font également état, en ce qui concerne l'origine de la propriété, d'un immeuble commercial, désigné comme " de vastes magasins " et d'un immeuble d'habitation, désigné comme " une belle maison d'habitation ", respectivement situés 16 et 18 rue Saint Bernard à Dunkerque, mais précisent que seul l'immeuble commercial, qui avait fait l'objet de l'inscription d'une sûreté le 12 mai 1908 afin de garantir le paiement du prix auquel il avait été adjugé, le 1er mai 1908, aux enchères publiques, a ensuite été cédé, le 28 juin 1917, au prédécesseur des grands-parents de l'auteur de l'attestation produite par M. et Mme A... C... devant la cour.

8. D'autre part, aucune des pièces produites par les appelants, ni aucun des actes mentionnés au point précédent, ne précisent l'existence de locaux à usage d'habitation au sein de l'immeuble en cause, qu'ils s'accordent tous à désigner comme affecté à un usage professionnel, sans autre précision. A cet égard, les photographies produites par M. et Mme A... C..., qui ne présentent que des couloirs, des escaliers et des parties peu représentatives de pièces situées dans les étages de l'immeuble en cause et qui ne permettent pas d'identifier l'aménagement, ni l'équipement de ces locaux, ne peuvent suffire à établir que ces pièces auraient pu, en tout ou partie, être affectées à un usage d'habitation, quand bien même certains murs sont garnis de papier peint. Enfin, les allégations de M. et Mme A... C... en ce qui concerne l'affectation, antérieure aux travaux qu'ils y ont fait entreprendre, de tout ou partie des étages de leur immeuble à un usage d'habitation sont démenties par les déclarations cadastrales successivement souscrites, y compris par eux-mêmes, en ce qui concerne cet immeuble, qui font toutes mention de locaux à usage professionnel, plus précisément de magasin, d'entrepôt et, en dernier lieu, de salle de danse.

9. Eu égard à ce qui a été dit aux points 7 et 8, M. et Mme A... C... ne peuvent être regardés comme apportant la preuve, qui leur incombe, de ce que les dépenses qu'ils ont entendu déduire de leurs revenus fonciers de l'année 2012 se rapportent, comme ils le soutiennent, à des travaux d'amélioration de locaux déjà affectés à un usage d'habitation et non à des travaux destinés à modifier l'affectation de ces locaux, assimilables à une reconstruction. Le ministre fait d'ailleurs valoir, sans être sérieusement contredit, que les travaux en cause ont en partie porté sur le rez-de-chaussée de l'immeuble, jusqu'alors exclusivement affecté à un usage professionnel, afin d'y aménager des parties communes destinées à l'usage des futurs locataires des étages. Dans ces conditions et en admettant même que ces travaux n'auraient pas notablement affecté le gros-œuvre de l'immeuble, l'administration était fondée à remettre en cause la déductibilité des dépenses correspondantes des revenus fonciers bruts perçus par les intéressés au titre de l'année 2012 et à en tirer les conséquences en ce qui concerne le déficit reportable sur l'année 2013.

10. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme A... C... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté leur demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2012 et 2013, pour un montant de 19 884 euros, et qu'ils ne sont pas recevables, dans le cadre du présent litige, à demander la décharge des suppléments d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux mis à leur charge au titre des années 2014 à 2016, pour un montant de 54 855 euros. Par voie de conséquence, les conclusions qu'ils présentent sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. et Mme A... C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme B... A... C... et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.

Copie en sera transmise à l'administrateur général des finances publiques chargé de la direction spécialisée de contrôle fiscal Nord.

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N°19DA01460


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 19DA01460
Date de la décision : 01/07/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-02-02-02 Contributions et taxes. - Impôts sur les revenus et bénéfices. - Revenus et bénéfices imposables - règles particulières. - Revenus fonciers.


Composition du Tribunal
Président : M. Heu
Rapporteur ?: M. Jean-François Papin
Rapporteur public ?: M. Arruebo-Mannier
Avocat(s) : SOCIETE D'AVOCATS FIDAL

Origine de la décision
Date de l'import : 26/10/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2021-07-01;19da01460 ?
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