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03/06/2021 | FRANCE | N°19DA00255-19DA00256

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 4ème chambre, 03 juin 2021, 19DA00255-19DA00256


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le groupement d'intérêt économique (GIE) Sea Bulk a demandé au tribunal administratif de Lille de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des suppléments de cotisation foncière des entreprises et de taxes additionnelles mis à sa charge au titre des années 2012 et 2013, à hauteur de la somme totale de 526 092 euros.

Par un jugement n° 1504314 du 19 janvier 2018, le tribunal administratif de Lille a, avant de statuer sur la demande du GIE Sea Bulk, ordonné un supplément d'instruction afin

que l'administration produise des éléments de nature à apprécier la valeur locativ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le groupement d'intérêt économique (GIE) Sea Bulk a demandé au tribunal administratif de Lille de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des suppléments de cotisation foncière des entreprises et de taxes additionnelles mis à sa charge au titre des années 2012 et 2013, à hauteur de la somme totale de 526 092 euros.

Par un jugement n° 1504314 du 19 janvier 2018, le tribunal administratif de Lille a, avant de statuer sur la demande du GIE Sea Bulk, ordonné un supplément d'instruction afin que l'administration produise des éléments de nature à apprécier la valeur locative réelle, par comparaison ou par voie d'appréciation directe, des installations à raison desquelles le GIE Sea Bulk a été assujetti à la cotisation foncière des entreprises et aux taxes additionnelles au titre des années 2012 et 2013. Par un second jugement du 31 décembre 2018, le tribunal a prononcé la réduction des bases d'imposition, la décharge partielle, dans la mesure de cette réduction, des impositions en litige et a mis à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Procédure devant la cour :

I. Par une requête enregistrée sous le n° 19DA00255 le 31 janvier 2019 et des mémoires enregistrés le 10 juillet 2019 et le 10 mai 2021, le ministre de l'action et des comptes publics demande à la cour :

1°) d'annuler les jugements du 19 janvier 2018 et du 31 décembre 2018 du tribunal administratif de Lille ;

2°) de remettre à la charge du GIE Sea Bulk les suppléments d'imposition dont il a été déchargé par le jugement du 31 décembre 2018 ;

3°) d'ordonner le remboursement de la somme de 1 500 euros mise à la charge de l'Etat au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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II. Par une requête enregistrée sous le n° 19DA00256 le 31 janvier 2019 et des mémoires enregistrés le 10 juillet 2019 et le 10 mai 2021, le ministre de l'action et des comptes publics demande à la cour :

1°) d'annuler les jugements du 19 janvier 2018 et du 31 décembre 2018 du tribunal administratif de Lille ;

2°) de remettre à la charge du GIE Sea Bulk les suppléments d'imposition dont il a été déchargé par le jugement du 31 décembre 2018 ;

3°) d'ordonner le remboursement de la somme de 1 500 euros mise à la charge de l'Etat au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code des ports maritimes ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Binand, président-assesseur,

- et les conclusions de M. Arruebo-Mannier, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Le groupement d'intérêt économique (GIE) Sea Bulk est l'opérateur de manutention portuaire de pondéreux au terminal Quai Ouest du grand port maritime de Dunkerque. Pour exercer cette activité, qui consiste dans le déchargement et le chargement de navires et de wagonnets transportant du charbon et minerai, ainsi que dans le stockage, à cette fin, de ces matériaux, il dispose d'installations, qui sont soit sa propriété, soit mises à disposition gratuitement par le grand port maritime de Dunkerque dans le cadre d'une convention d'exploitation conclue le 19 juillet 2001, soit louées auprès d'une société tierce. A l'issue d'une vérification de comptabilité, l'administration a estimé que la valeur locative de ces installations et équipements devait être calculée selon la méthode comptable du prix de revient applicable aux établissements industriels et a, en conséquence, assigné au GIE Sea Bulk des suppléments de cotisation foncière des entreprises au titre des années 2012 et 2013 qui ont été mis en recouvrement le 30 novembre 2014, pour un montant total de 526 092 euros. Après le rejet de la réclamation qu'il a présentée à l'encontre de ces redressements, le GIE Sea Bulk a saisi le tribunal administratif de Lille d'une demande tendant à la décharge de ces suppléments d'imposition. Par un premier jugement du 19 janvier 2018, le tribunal administratif de Lille, après avoir écarté l'applicabilité de la méthode comptable qui avait été mise en oeuvre par l'administration, a ordonné un supplément d'instruction afin que l'administration produise des éléments permettant d'apprécier la valeur locative réelle des installations à raison desquelles le GIE Sea Bulk était assujetti à la cotisation foncière des entreprises, en faisant application de la méthode de comparaison ou par voie d'appréciation directe. Au vu des éléments produits par l'administration, le tribunal, par un second jugement du 31 décembre 2018, a prononcé la réduction des bases d'imposition et la décharge partielle, dans la mesure de cette réduction, des impositions en litige et a mis à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Par deux requêtes, le ministre de l'action et des comptes publics relève appel de ces jugements.

2. Les requêtes du ministre de l'action et des comptes publics sont relatives à la même imposition et concernent le même contribuable. En conséquence, il y a lieu de les joindre pour statuer par un même arrêt.

Sur le motif retenu par les premiers juges pour déterminer la méthode d'évaluation de la valeur locative des installations en cause :

3. Aux termes de l'article 1500 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable: " Les bâtiments et terrains industriels sont évalués : / - 1° selon les règles fixées à l'article 1499 lorsqu'ils figurent à l'actif du bilan de leur propriétaire ou de leur exploitant, et que celui-ci est soumis aux obligations définies à l'article 53 A ; / - 2° selon les règles fixées à l'article 1498 lorsque les conditions prévues au 1° ne sont pas satisfaites. ". Aux termes de l'article 53 A de ce code : " Sous réserve des dispositions de l'article 302 septies A bis, les contribuables, autres que ceux soumis au régime défini à l'article 50-0, sont tenus de souscrire chaque année, dans les conditions et délais prévus aux articles 172 et 175, une déclaration permettant de déterminer et de contrôler le résultat imposable de l'année ou de l'exercice précédent. / (...) ".

4. Le GIE Sea Bulk, pour soutenir que le grand port maritime de Dunkerque n'était pas soumis aux obligations définies à l'article 53 A du code général des impôts, s'est prévalu de l'interprétation administrative figurant aux paragraphes 240 et suivants du BOI-IS-CHAMP-30-60 selon laquelle les ports autonomes, par décision ministérielle, sont exonérés de l'impôt sur les sociétés en ce qui concerne les immeubles et services nécessaires à l'exploitation des ports ou qui dépendent directement de cette exploitation.

5. Toutefois, eu égard aux différences substantielles entre les grands ports maritimes créés par la loi n° 2008-660 du 4 juillet 2008 et les ports autonomes, l'exonération prévue par cette instruction ne saurait être regardée comme applicable aux grands ports maritimes. Par suite, le tribunal ne pouvait, en tout état de cause, se fonder sur l'interprétation de la loi fiscale exprimée par cette instruction pour accueillir le moyen tiré par le GIE Sea Bulk de ce que les dispositions de l'article 1500 du code général des impôts faisaient obstacle à ce que l'administration applique aux biens dont le grand port maritime de Dunkerque lui avait donné la jouissance, la méthode comptable prévue à l'article 1499 de ce même code.

6. Toutefois, il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par le GIE Sea Bulk, tant devant le tribunal administratif de Lille que devant elle.

Sur le bien-fondé de l'imposition :

En ce qui concerne la méthode d'évaluation de la valeur locative des installations :

7. Aux termes de l'article 1499 du code général des impôts : " La valeur locative des immobilisations industrielles passibles de la taxe foncière sur les propriétés bâties est déterminée en appliquant au prix de revient de leurs différents éléments, revalorisé à l'aide des coefficients qui avaient été prévus pour la révision des bilans, des taux d'intérêt fixés par décret en Conseil d'État. / (...) ". Revêtent un caractère industriel, au sens de cet article, les établissements dont l'activité nécessite d'importants moyens techniques, non seulement lorsque cette activité consiste dans la fabrication ou la transformation de biens corporels mobiliers, mais aussi lorsque, pour les besoins d'une autre activité, le rôle des installations techniques, matériels et outillages mis en oeuvre est prépondérant.

8. D'une part, il résulte de l'instruction que pour exercer son activité de manutention et de stockage, qui ne présente pas le caractère d'une activité industrielle par nature, le GIE Sea Bulk dispose notamment de matériels et outillages, mis à sa disposition par le grand port maritime de Dunkerque, consistant en des portiques de déchargement de 50 tonnes, des bennes à charbon et à minerai, des parcs de stockage, des transporteurs, une tour de chargement de wagons, des bâtiments à usage d'atelier et de stockage, des rampes de pulvérisation et de rabattage de poussière et un dispositif d'arrosage. Ces installations et équipements utilisés par le GIE Sea Bulk, dont la valeur est de l'ordre de 2 800 000 euros, comme il l'indique dans ses écritures, présentent un caractère important. Eu égard à leurs conditions d'utilisation, et alors même que la valeur des immobilisations des équipements ne représenterait qu'un quart de la valeur du foncier, ces matériels et installations techniques jouent un rôle prépondérant dans l'activité exercée dans l'établissement. Par suite, c'est à bon droit que l'administration a estimé que les immobilisations en litige revêtaient un caractère industriel.

9. D'autre part, il résulte des dispositions de l'article 1500 du code général des impôts, citées au point 3, que, dès lors que le propriétaire ou l'exploitant de bâtiments et de terrains industriels passibles de la taxe foncière sur les propriétés bâties est soumis aux obligations déclaratives définies à l'article 53 A du même code et que ces immobilisations industrielles figurent à l'actif de son bilan, la valeur locative de ces immobilisations est établie selon les règles fixées à l'article 1499 du code. En outre, dans l'hypothèse où l'absence d'inscription des immobilisations industrielles à l'actif du bilan du propriétaire ou de l'exploitant procède d'une méconnaissance, par celui-ci, de ses obligations comptables, l'administration fiscale est fondée, après avoir, conformément au principe général des droits de la défense, mis le redevable de la taxe foncière à même de présenter ses observations, à corriger de cette omission les éléments déclarés en application des dispositions de l'article 53 A du code général des impôts, puis à établir la cotisation foncière des entreprises selon les règles fixées à l'article 1499 du code.

10. Le GIE Sea Bulk, qui ne conteste pas être soumis aux obligations de l'article 53 A du code général des impôts, soutient que, compte tenu de la portée des stipulations de la convention conclue le 19 juillet 2001 avec le port autonome de Dunkerque, qui ne lui confère que la jouissance des installations mises à disposition, ces installations ont pu, par une exacte application des règles comptables, ne pas être inscrites à son actif. Il ajoute que le grand port maritime, tenu à cette obligation en qualité de propriétaire, n'est pas soumis aux obligations définies à l'article 53 A du code général des impôts, de sorte que la valeur locative des bâtiments industriels mis à sa disposition par le grand port maritime de Dunkerque ne peut, en vertu du 2° de l'article 1500 de ce code, être évaluée par l'application de la méthode comptable prévue à l'article 1499.

11. Aux termes du premier alinéa de l'article 165 de l'annexe IV du code général des impôts : " 1. Nonobstant toutes dispositions contraires, les établissements publics ayant un caractère industriel ou commercial sont passibles de tous les impôts et taxes assimilées applicables aux entreprises privées similaires. ". En vertu de l'article R. 113-12 puis de l'article R. 103-4 du code des ports maritimes, le fonctionnement comptable du port autonome puis du grand port maritime de Dunkerque était assuré, pendant les exercices comptables en cause, dans les conditions prévues pour les établissements publics à caractère industriel et commercial. Dès lors, le grand port maritime de Dunkerque était, à ce titre, soumis aux obligations de l'article 53 A du code général des impôts. Par ailleurs, il n'est pas contesté que les biens mis à disposition du GIE Sea Bulk, qui présentent un caractère industriel ainsi qu'il a été dit, ont été inscrits à l'actif du grand port maritime de Dunkerque. Il s'ensuit que, à supposer même que ces immobilisations n'avaient pas à être inscrites au bilan du GIE Sea Bulk, leur valeur locative doit, en vertu du 1° de l'article 1500 du code général des impôts, être évaluée selon les règles fixées à l'article 1499 de ce code. Pour l'application de ces dispositions, la remise à titre gratuit de ces immobilisations par le port autonome de Dunkerque au grand port maritime de Dunkerque, à la création de celui-ci, n'a pas eu pour effet d'annuler leur valeur à inscrire au bilan, dès lors qu'il résulte des dispositions du b du 1. de l'article 38 quinquies de l'annexe III au code général des impôts, auxquelles renvoie l'article 324 AE de cette même annexe, que, contrairement à ce que soutient l'intimé, la valeur d'inscription au bilan des immobilisations acquises à titre gratuit par un établissement industriel s'entend de leur valeur vénale et non de leur coût d'acquisition par ce dernier.

En ce qui concerne les bases d'imposition :

12. D'une part, aux termes de l'article 1447 du code général des impôts : " I. - La cotisation foncière des entreprises est due chaque année par les personnes physiques ou morales, les sociétés non dotées de la personnalité morale ou les fiduciaires pour leur activité exercée en vertu d'un contrat de fiducie qui exercent à titre habituel une activité professionnelle non salariée. / (...) ". Aux termes de l'article 1467 du même code : " La cotisation foncière des entreprises a pour base la valeur locative des biens passibles d'une taxe foncière situés en France, à l'exclusion des biens exonérés de taxe foncière sur les propriétés bâties en vertu des 11° et 12° de l'article 1382, dont le redevable a disposé pour les besoins de son activité professionnelle pendant la période de référence définie aux articles 1467 A et 1478, à l'exception de ceux qui ont été détruits ou cédés au cours de la même période. / Toutefois, ne sont pas compris dans la base d'imposition à la cotisation foncière des entreprises : / 1° Les biens destinés à la fourniture et à la distribution de l'eau lorsqu'ils sont utilisés pour l'irrigation pour les neuf dixièmes au moins de leur capacité ; / (...) ".

13. D'autre part, l'article 1380 du code général des impôts dispose : " La taxe foncière est établie annuellement sur les propriétés bâties sises en France à l'exception de celles qui en sont expressément exonérées par les dispositions du présent code ". Selon l'article 1381 du même code : " Sont également soumis à la taxe foncière sur les propriétés bâties : / 1° Les installations destinées à abriter des personnes ou des biens ou à stocker des produits ainsi que les ouvrages en maçonnerie présentant le caractère de véritables constructions tels que, notamment, les cheminées d'usine, les réfrigérants atmosphériques, les formes de radoub, les ouvrages servant de support aux moyens matériels d'exploitation ; / 2° Les ouvrages d'art et les voies de communication ; / (...) ". Selon l'article 1382 du code général des impôts : " Sont exonérés de la taxe foncière sur les propriétés bâties : / (...) / 11° Les outillages et autres installations et moyens matériels d'exploitation des établissements industriels à l'exclusion de ceux visés aux 1° et 2° de l'article 1381 ; / (...) ". Aux termes du premier alinéa de l'article 1495 de ce code : " Chaque propriété ou fraction de propriété est appréciée d'après sa consistance, son affectation, sa situation et son état, à la date de l'évaluation ". Enfin, aux termes du II de l'article 324 B de l'annexe III au même code : " Pour l'appréciation de la consistance il est tenu compte de tous les travaux équipements ou éléments d'équipement existant au jour de l'évaluation ".

14. Pour apprécier, en application de l'article 1495 du code général des impôts et de l'article 324 B de son annexe III, la consistance des propriétés qui entrent, en vertu de ses articles 1380 et 1381, dans le champ de la taxe foncière sur les propriétés bâties, il est tenu compte, non seulement de tous les éléments d'assiette mentionnés par ces deux derniers articles, mais également des biens faisant corps avec eux. Sont toutefois exonérés de cette taxe, en application du 11° de l'article 1382 du même code, ceux de ces biens qui font partie des outillages, autres installations et moyens matériels d'exploitation d'un établissement industriel, c'est-à-dire ceux de ces biens qui relèvent d'un établissement qualifié d'industriel au sens de l'article 1499, qui sont spécifiquement adaptés aux activités susceptibles d'être exercées dans un tel établissement et qui ne sont pas au nombre des éléments mentionnés aux 1° et 2° de l'article 1381.

15. Sous réserve des cas où la loi attribue la charge de la preuve au contribuable, il appartient au juge de l'impôt, au vu de l'instruction et compte tenu, le cas échéant, de l'abstention d'une des parties à produire les éléments qu'elle est seule en mesure d'apporter et qui ne sauraient être réclamés qu'à elle-même, d'apprécier si la situation du contribuable entre dans le champ de l'assujettissement à l'impôt ou, le cas échéant, s'il remplit les conditions légales d'une exonération.

S'agissant des biens d'équipements spécialisés :

16. D'une part, eu égard au descriptif des prestations mentionnées sur les factures produites au dossier par le GIE Sea Bulk, les travaux d'aménagement de terre-pleins sur enrochement destinés à renforcer le sol sur lequel sont entreposés les matériaux pondéreux ainsi que les voies d'accès aménagées pour assurer la desserte des installations par camion ou wagonnets sur rails constituent, respectivement, des ouvrages maçonnés, au surplus de stockage de produits, et des voies de communication, mentionnés au 1° et au 2 de l'article 1381 du code général des impôts cité au point 13. Il ne résulte pas de l'instruction, au vu des factures, extraits de bilans et tableaux de synthèse, produits par l'intimé, qui ne permettent pas d'apprécier les caractéristiques physiques du parc à raclure, des installations de drainage et de la lagune d'épuration dont l'administration a intégré la valeur locative dans la base d'assujettissement à la cotisation foncière des entreprises, que ces installations ne seraient pas au nombre des éléments mentionnés par ces mêmes dispositions, ainsi que le ministre le fait valoir. Il en est de même des stations de refoulement ainsi que des canalisations d'assainissement qui font corps avec elles, et qui, d'ailleurs, sont pour certaines maçonnées. Il n'est pas démontré, en tout état de cause, que ces canalisations d'évacuation seraient spécifiquement adaptées aux activités susceptibles d'être exercées dans un établissement industriel.

17. D'autre part, il ne résulte pas de l'instruction, au vu des mêmes éléments produits par l'intimé, que les travaux relatifs aux installations d'éclairage extérieur et d'alimentation électrique, qui consistent essentiellement en la pose de fourreaux, fournitures de câble et d'appareils de commande électrique, ni davantage les équipements destinés à humidifier les pondéreux par arrosage pour éviter la dispersion de poussières, seraient spécifiquement adaptés aux activités susceptibles d'être exercées dans un établissement industriel, quand bien même ils concourent à celle-ci.

18. Dès lors, les aménagements mentionnés aux points précédents ne sont pas exonérés de la cotisation foncière des entreprises.

S'agissant des dépenses d'irrigation :

19 Il résulte de l'instruction que les installations, mentionnées au point 17, destinées à l'humidification par arrosage du charbon et du minerai pour éviter la dispersion de poussières, ne sont pas utilisées à des fins d'irrigation au sens du 1° de l'article 1467 du code général des impôts. Par suite, contrairement à ce que soutient le GIE Sea Bulk, ces installations entrent dans les bases d'imposition à la cotisation foncière des entreprises.

20. Il résulte de tout ce qui précède que le ministre de l'action et des comptes publics est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement du 19 janvier 2018, le tribunal administratif de Lille a ordonné un supplément d'instruction afin de déterminer la valeur locative des installations par méthode de comparaison ou d'appréciation directe, dès lors qu'aucune de ces méthodes ne trouvait à s'appliquer, et que c'est également à tort que, par le jugement du 31 décembre 2018, le tribunal a déterminé les bases d'imposition à la cotisation foncière des entreprises sans faire application de l'article 1499 du code général des impôts et a, par voie de conséquence, mis à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros. Par suite, il y a lieu d'annuler ces jugements, de remettre à la charge du GIE Sea Bulk les suppléments de cotisation foncière des entreprises dont il a été déchargé et de rejeter les conclusions présentées par celui-ci devant le tribunal administratif de Lille. En revanche, les conclusions du ministre de l'action et des comptes publics tendant à ce que la cour ordonne la restitution de la somme de 1 500 euros mise à la charge de l'Etat sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, en exécution du jugement du 31 décembre 2018, doivent être rejetées dès lors que le ministre détient le pouvoir d'émettre un ordre de recouvrement à l'effet d'en obtenir le reversement. Enfin, l'Etat ne pouvant être regardé comme la partie perdante, les conclusions présentées par le GIE Sea Bulk sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du 19 janvier 2018 et le jugement du 31 décembre 2018 du tribunal administratif de Lille sont annulés.

Article 2 : Les suppléments de cotisation foncière des entreprises et des taxes additionnelles dont le GIE Sea Bulk a été déchargé au titre des années 2012 et 2013 sont remis à sa charge.

Article 3 : Les conclusions de la demande du GIE Sea Bulk devant le tribunal administratif de Lille et ses conclusions devant la cour sont rejetées.

Article 4 : Les conclusions du ministre de l'action et des comptes publics tendant au reversement de la somme de 1 500 euros mise à la charge de l'Etat par le jugement du 31 décembre 2018 au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'économie, des finances et de la relance et au groupement d'intérêt économique Sea Bulk.

Copie en sera transmise à l'administrateur général des finances publiques chargé de la direction spécialisée de contrôle fiscal Nord.

8

N°s19DA00255, 19DA00256


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 19DA00255-19DA00256
Date de la décision : 03/06/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-03-045-03-01 Contributions et taxes. Impositions locales ainsi que taxes assimilées et redevances.


Composition du Tribunal
Président : M. Heu
Rapporteur ?: M. Christophe Binand
Rapporteur public ?: M. Arruebo-Mannier
Avocat(s) : CABINET FIDAL ; CABINET FIDAL ; CABINET FIDAL

Origine de la décision
Date de l'import : 15/06/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2021-06-03;19da00255.19da00256 ?
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