Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. C... B... a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 27 septembre 2019 par lequel le préfet du Pas-de-Calais a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination de cette mesure d'éloignement.
Par un jugement n° 1909097 du 11 juin 2020, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés les 10 juillet et 15 juillet 2020, M. B..., représenté par Me A... D..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 27 septembre 2019 ;
3°) d'enjoindre au préfet du Pas-de-Calais de lui délivrer une carte de séjour temporaire dans un délai de quinze jours à compter de la notification de la décision à intervenir sous astreinte de 150 euros par jour de retard, ou à défaut, de procéder au réexamen de sa situation et de lui délivrer, dans l'attente, une autorisation provisoire de séjour sous astreinte de 150€ par jour de retard à compter de la notification de la décision à intervenir ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le décret n° 2020-1403 du 18 novembre 2020 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Ghislaine Borot, présidente de chambre, a été entendu au cours de l'audience.
Considérant ce qui suit :
1. M. C... B... est un ressortissant turc né le 6 mars 1981 à Cemisgezek (Turquie). Par arrêté du 27 septembre 2019, le préfet du Pas-de-Calais a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire dans le délai trente jours et a fixé le pays de destination. M. B... relève appel du jugement du 11 juin 2020 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur les moyens communs aux différentes décisions :
2. L'arrêté du 27 septembre 2019 qui n'avait pas à faire état de tous les éléments caractérisant la situation personnelle et familiale de M. B..., rappelle notamment ses conditions d'entrée sur le territoire français ainsi que sa situation familiale et professionnelle. Il vise les dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dont il fait application. Il comporte ainsi les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement et est par suite, suffisamment motivé. Par ailleurs, eu égard à la teneur de cet arrêté, le moyen tiré d'un défaut d'examen sérieux de la situation de M. B... doit également être écarté. En outre, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet aurait omis de faire usage de son pouvoir discrétionnaire de régularisation et se serait estimé en situation de compétence liée en refusant la délivrance d'un titre de séjour puis en décidant de l'obliger à quitter le territoire.
Sur la décision de refus de titre de séjour :
3. En premier lieu, aux termes de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Une carte de séjour temporaire, d'une durée maximale d'un an, autorisant l'exercice d'une activité professionnelle est délivrée à l'étranger : / 1° Pour l'exercice d'une activité salariée sous contrat de travail à durée indéterminée, dans les conditions prévues à l'article L. 5221-2 du code du travail. Elle porte la mention " salarié ". ". Aux termes de l'article L. 313-2 du même code : " Sous réserve des engagements internationaux de la France et des exceptions prévues par les dispositions législatives du présent code, la première délivrance de la carte de séjour temporaire et celle de la carte de séjour pluriannuelle mentionnée aux articles L. 313-20, L. 313-21, L. 313-23, L. 313-24, L. 313-27 et L. 313-29 sont subordonnées à la production par l'étranger du visa de long séjour mentionné aux 1° ou 2° de l'article L. 311-1. ".
4. Suite à l'annulation d'un premier refus de séjour, une autorisation provisoire de séjour autorisant le travail a été remise à M. B... pendant la durée du réexamen de sa demande de titre de séjour. Mais il est constant qu'il ne dispose pas d'un visa de long séjour et la délivrance d'une cette autorisation de travail ne saurait équivaloir à un tel visa. Dès lors, le préfet du Pas-de-Calais était fondé à lui opposer ce défaut de visa pour lui refuser la délivrance d'un titre par application de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Le moyen tiré d'une erreur de droit et d'appréciation dans l'application de cet article doit être écarté.
5. En deuxième lieu, M. B... produit des récépissés de dépôts de demandes d'asile, des ordonnances, des attestations d'admission à l'aide médicale d'Etat et des quittances de loyers qui permettent de considérer qu'il a établi sa résidence habituelle en France depuis son arrivée en 2013. Il fait valoir qu'il a été embauché immédiatement après l'obtention de son autorisation de travail et qu'il donne entière satisfaction à son employeur. Il souligne que son frère et sa soeur résident régulièrement en France. Toutefois, M. B..., arrivé à l'âge de trente-deux ans, est célibataire et sans enfant à charge. En l'espèce, la décision attaquée n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise. Le moyen tiré de la violation des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit donc être écarté. Pour les mêmes raisons, la décision attaquée n'est pas entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle.
6. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée aux 1° et 2° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 313-2 ".
7. Eu égard à ce qui a été dit au point 4, le préfet n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation en estimant que M. B... ne justifiait pas de circonstances exceptionnelles ou de motifs humanitaires au sens de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile
8. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour est entachée d'illégalité. Les conclusions dirigées contre cette décision doivent être rejetées.
Sur la décision d'obligation de quitter le territoire français :
9. En premier lieu, M. B..., réitère, comme en première instance, son argument tiré l'incompétence de l'auteur de cette décision. Il ne se prévaut, devant la cour, d'aucun élément de fait ou de droit nouveau par rapport à l'argumentation développée devant le tribunal administratif de Lille et à laquelle celui-ci a précisément répondu. En conséquence, il y a lieu d'écarter le moyen tiré de ce que la décision est entachée d'incompétence de son auteur par adoption des motifs pertinents retenus par les premiers juges.
10. En second lieu, compte tenu de ce qui a été dit au point 7, M. B... n'est pas fondé à soutenir que la décision l'obligeant à quitter le territoire français est dépourvue de base légale à raison de l'illégalité de la décision lui refusant un titre de séjour.
11. En troisième lieu, les moyens tirés de ce que la décision l'obligeant à quitter le territoire français serait entachée d'une erreur de fait et qu'elle méconnaîtrait les dispositions de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne sont pas assortis des précisions suffisantes pour permettre au juge d'en apprécier le bien-fondé.
12. En quatrième lieu, les moyens tirés de la violation de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de ce que la décision attaquée est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressé doivent être écartés pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 4.
13. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que la décision l'obligeant à quitter le territoire français est entachée d'illégalité. Les conclusions dirigées contre cette décision doivent être rejetées.
Sur la décision fixant le pays de destination de la mesure d'éloignement :
14. En premier lieu, il résulte de ce qui a été dit au point 8 que la décision fixant le pays de destination n'est pas entachée d'incompétence de son auteur.
15. En deuxième lieu, compte tenu de ce qui a été dit au point 12, M. B... n'est pas fondé à soutenir que la décision fixant le pays de destination est dépourvue de base légale à raison de l'illégalité de la décision l'obligeant à quitter le territoire français.
16. En troisième lieu, aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ". M. B... indique que son éloignement à destination de la Turquie l'exposerait à des traitements inhumains et dégradants en raison de son appartenance à la minorité kurde, mais il n'apporte pas d'éléments probants au soutien de ses allégations alors qu'au demeurant sa demande d'asile a été rejetée et que ce rejet a été confirmé par la cour nationale du droit d'asile. Par suite, les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne des droits de l'homme et de sauvegarde des libertés fondamentales et de ce que la décision attaquée serait entachée d'une erreur dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle doivent être écartés.
17. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêté du 27 septembre 2019. Par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction sous astreinte et celles présentées sur le fondement de L. 761-1 du code de justice administrative doivent être également rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Me D... pour M. C... B... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera transmise au préfet du Pas-de-Calais.
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N°20DA00986