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27/05/2021 | FRANCE | N°19DA00325

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3ème chambre, 27 mai 2021, 19DA00325


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... G... a demandé au tribunal administratif de Rouen, par deux requêtes distinctes, d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 29 avril 2016 par laquelle le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social a autorisé son licenciement pour motif économique.

Par un jugement commun n° 1602205-1602208 du 13 décembre 2018, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires, enr

egistrés le 11 février 2019, le 4 octobre 2019, le 8 janvier 2021 et le 16 avril 2021 ainsi ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... G... a demandé au tribunal administratif de Rouen, par deux requêtes distinctes, d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 29 avril 2016 par laquelle le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social a autorisé son licenciement pour motif économique.

Par un jugement commun n° 1602205-1602208 du 13 décembre 2018, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés le 11 février 2019, le 4 octobre 2019, le 8 janvier 2021 et le 16 avril 2021 ainsi qu'un mémoire enregistré le 6 mai 2021 et non communiqué, M. G..., représenté par Me B... E..., demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler la décision du 29 avril 2016 par laquelle le ministre chargé du travail a autorisé son licenciement ;

3°) de refuser d'autoriser son licenciement ;

4°) de mettre à la charge solidaire de Me C... en qualité de mandataire liquidateur de l'association Institut consulaire de formation, de la chambre de commerce et d'industrie Seine Mer Normandie et de l'Etat, la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code du travail :

- le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Denis Perrin, premier conseiller,

- et les conclusions de M. Hervé Cassara, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. L'association Institut consulaire de formation- Société industrielle d'Elbeuf formation gérait un centre de formation pour apprentis et proposait des activités de formation professionnelle à Elbeuf. Cette association a saisi, le 6 juillet 2015, l'inspecteur du travail d'une demande d'autorisation de licenciement pour motif économique de M. A... G... qui était délégué du personnel titulaire. Ce dernier avait été recruté depuis le 2 juillet 2003 d'abord comme formateur vacataire puis à compter du 5 juillet 2013 en contrat à durée indéterminée exerçant en dernier lieu les fonctions de formateur bureautique. L'inspecteur du travail territorialement compétent a refusé ce licenciement économique par décision du 31 août 2015. Saisi d'un recours hiérarchique par l'employeur, le ministre chargé du travail a retiré le rejet implicite du recours hiérarchique, retiré la décision de l'inspecteur du travail et autorisé le licenciement par décision du 29 avril 2016. M. G... relève appel du jugement du 13 décembre 2018 par lequel le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande d'annulation pour excès de pouvoir de cette décision. Parallèlement, l'association a cessé ses activités en avril 2016 et par jugement du 2 mars 2017, le tribunal de grande instance de Rouen a ouvert une procédure de liquidation judiciaire de l'association Institut consulaire de formation- Société industrielle d'Elbeuf formation et a désigné Me C... comme liquidateur judiciaire.

2. M. G... soulève pour la première fois en appel le moyen tiré de ce que la signataire de la demande d'autorisation de licenciement, Mme F..., n'avait pas qualité pour agir au nom de l'association. Il appartient à l'administration, saisie d'une demande d'autorisation de licenciement d'un salarié protégé, de vérifier que cette demande est présentée par l'employeur de ce salarié ou par une personne ayant qualité pour agir en son nom. Un tel moyen a donc trait à la procédure interne au sein de l'entreprise et non à la procédure devant l'inspecteur du travail. Il constitue ainsi, contrairement à ce que soutient le liquidateur amiable, un moyen de légalité interne de la décision prise par l'inspecteur du travail. Or, en première instance, M. G... n'avait soulevé que des moyens ayant trait à la légalité interne. Par suite, le moyen tiré du défaut de qualité pour agir de Mme F..., qui se rattache à la même cause juridique que les moyens invoqués devant le tribunal administratif, est recevable.

3. Dans le cas où l'employeur est une personne morale, en l'occurrence, une association régie par la loi du 1er juillet 1901, la demande d'autorisation de licenciement doit être présentée par la personne qui est désignée à cet effet par les statuts ou par les textes pris pour leur application. Aux termes de l'article 9 des statuts de l'association Institut consulaire de formation-Société industrielle d'Elbeuf formation, reconnue d'utilité publique par décret du 23 janvier 1864 : " Le président représente l'association dans tous les actes de la vie civile. Il ordonne les dépenses. Il peut donner délégation dans les conditions qui sont fixées par le règlement intérieur " et aux termes de l'article 23 des mêmes statuts : " Le règlement intérieur préparé par le conseil d'administration et adopté par l'assemblée générale est adressé à la préfecture du département. Il ne peut entrer en vigueur qu'après approbation du ministre de l'intérieur. ".

4. En l'espèce, la demande d'autorisation de licenciement a été signée pour ordre du président sans que soient mentionnées la qualité et le nom du signataire. Si le liquidateur en défense soutient que ce courrier était signé par Mme D... F..., manager de proximité, il n'établit pas que celle-ci disposait d'une délégation de pouvoir du président, délivrée dans les conditions prévues par les statuts de l'association. Il n'est pas démontré que la délégation de pouvoir du président à Mme F... en date du 30 avril 2015, produite pour la première fois en appel par la ministre du travail, ait été établie dans les conditions rappelées au point 3. En tout état de cause, cette délégation mentionne qu'elle porte sur " les aspects organisationnels " permettant " le bon fonctionnement administratif de l'établissement ". Elle recense ensuite les domaines couverts, notamment " toute mesure pratique d'organisation et de fonctionnement " et " dans le cadre de la stricte application des contrats de travail en cours, tout document relatif à la gestion administrative des ressources humaines de l'association ". Cette délégation ne permettait donc pas à Mme F... de demander l'autorisation de licenciement de M. G..., démarche ayant pour objet la rupture du contrat de travail. Si le liquidateur soutient encore que la signature pour ordre signifiait que ce courrier était émis par le président, ce courrier donnait à l'inspecteur du travail les coordonnées de Mme F..., démontrant ainsi son pouvoir dans la conduite de cette procédure. Par ailleurs et ainsi qu'il a été rappelé au point 2, une demande d'autorisation de licenciement ne peut émaner que de l'employeur en personne ou d'une personne ayant qualité pour agir en son nom. Il n'est pas démontré en l'espèce que la signataire de la demande d'autorisation de licenciement de M. G... disposait effectivement d'une telle qualité. Par suite, M. G... est fondé à soutenir que le ministre chargé du travail ne pouvait ainsi autoriser son licenciement. Le jugement du tribunal de Rouen du 13 décembre 2018 et la décision ministérielle du 29 avril 2016 doivent donc être annulés, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens soulevés par M. G....

5. M. G... demande à la cour de refuser d'autoriser son licenciement. Il n'appartient pas à la juridiction administrative de se substituer dans ses pouvoirs de décision à l'administration, comme le fait valoir en défense le liquidateur de l'association. Par suite, ces conclusions ne peuvent qu'être rejetées comme irrecevables.

6. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de M. G..., qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que Me C..., en qualité de représentant de l'association Institut consulaire de formation demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Les conclusions au même titre de M. G... dirigées contre la chambre de commerce et d'industrie Seine Mer Normandie, doivent également être rejetées, cet établissement n'étant pas partie à la présente instance. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce de faire droit aux conclusions au même titre dirigées contre Me C... en tant que représentant de l'association Institut consulaire de formation-Société industrielle d'Elbeuf Formation. Il y a lieu, en revanche, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par M. G... et non compris dans les dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Rouen du 13 décembre 2018 est annulé.

Article 2 : La décision du ministre chargé du travail du 29 avril 2016 autorisant le licenciement de M. G... est annulé.

Article 3 : L'Etat versera à M. G..., la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Me B... E... pour M. A... G..., à Me I... J... pour l'association Institut consulaire de France, représentée par son liquidateur judiciaire, Me H... C... et à la ministre du travail, de l'emploi et de l'insertion.

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N°19DA00325

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N°"Numéro"


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 19DA00325
Date de la décision : 27/05/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

66-07-01-02 Travail et emploi. Licenciements. Autorisation administrative - Salariés protégés. Procédure préalable à l'autorisation administrative.


Composition du Tribunal
Président : Mme Borot
Rapporteur ?: M. Denis Perrin
Rapporteur public ?: M. Cassara
Avocat(s) : SCP EMO AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 29/06/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2021-05-27;19da00325 ?
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