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08/04/2021 | FRANCE | N°19DA01811

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3ème chambre, 08 avril 2021, 19DA01811


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... A... a demandé au tribunal administratif de Rouen, par une demande enregistrée sous le n° 1702519, d'annuler, d'une part, la décision par laquelle le ministre de l'intérieur a implicitement rejeté son recours administratif préalable contre la décision du 1er décembre 2016 arrêtant le tableau d'avancement au grade de maréchal des logis-chef spécialité " système informatique et communication " au titre de l'année 2017, d'autre part, la décision par laquelle le ministre de l'intérieur a implic

itement rejeté sa demande indemnitaire préalable du 18 juillet 2017 et la décis...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... A... a demandé au tribunal administratif de Rouen, par une demande enregistrée sous le n° 1702519, d'annuler, d'une part, la décision par laquelle le ministre de l'intérieur a implicitement rejeté son recours administratif préalable contre la décision du 1er décembre 2016 arrêtant le tableau d'avancement au grade de maréchal des logis-chef spécialité " système informatique et communication " au titre de l'année 2017, d'autre part, la décision par laquelle le ministre de l'intérieur a implicitement rejeté sa demande indemnitaire préalable du 18 juillet 2017 et la décision implicite par laquelle le ministre de l'intérieur a rejeté le recours exercé le 26 octobre 2017 à l'encontre de la décision précédente, de condamner l'Etat à lui verser la somme de 70 000 euros en réparation de ses préjudices, assortie des intérêts à compter de sa demande et d'enjoindre au ministre de l'intérieur de l'inscrire au tableau d'avancement de 2017 au grade de maréchal des logis-chef et de procéder à la reconstitution de sa carrière, sans délai, sous astreinte de 500 euros par jour de retard.

M. D... A... a demandé au tribunal administratif de Rouen, dans une seconde demande enregistrée sous le n° 1801474, de condamner l'Etat à lui verser la somme de 70 000 euros en réparation du préjudice qu'il a subi du fait du refus du ministre de l'intérieur de l'inscrire au tableau d'avancement de grade au titre de l'année 2017, assortie des intérêts à compter du jour de sa demande, d'annuler la décision implicite par laquelle le ministre de l'intérieur a rejeté sa demande indemnitaire préalable du 18 juillet 2017 et la décision implicite par laquelle le ministre de l'intérieur a rejeté le recours exercé le 26 octobre 2017 à l'encontre de la décision précédente et d'enjoindre au ministre de l'intérieur de l'inscrire au tableau d'avancement de 2017 au grade de maréchal des logis-chef et de procéder à la reconstitution de sa carrière, sans délai, sous astreinte de 500 euros par jour de retard.

Par un jugement n° 1702519,1801474 du 29 mai 2019, le tribunal administratif de Rouen, après avoir joint ces deux demandes, les a rejetées.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 31 juillet 2019 et 20 janvier 2021, M. D... A..., représenté par Me B... C..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler la décision implicite du ministre de l'intérieur rejetant son recours administratif préalable obligatoire dirigé contre la décision du 1er décembre 2016 portant tableau d'avancement au grade de maréchal de logis chef spécialité " système d'information et de communication " au titre de l'année 2017, sur lequel il n'a pas été inscrit ;

3°) d'annuler la décision implicite du ministre de l'intérieur rejetant son recours administratif préalable obligatoire dirigé contre la décision implicite de rejet née du silence gardé sur sa demande d'indemnisation des préjudices subis en raison de cette non inscription ;

4°) d'enjoindre au ministre de l'intérieur de l'inscrire au tableau d'avancement ;

5°) d'enjoindre au ministre de l'intérieur de reconstituer sa carrière, outre les arriérés de solde en découlant, dans un délai de trois mois à compter de l'arrêt, sous astreinte de 500 euros par jour de retard ;

6°) de condamner l'Etat à lui verser la somme globale de 213 000 euros en réparation de son entier préjudice, assortis des intérêts de droit à compter de sa demande ;

7°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 9 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la défense ;

- le décret n°2008-952 du 12 septembre 2008 ;

- le décret n°2020-1406 du 18 novembre 2020 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Ghislaine Borot, présidente-rapporteure,

- les conclusions de M. Hervé Cassara, rapporteur public,

- les observations de Me B... C..., représentant M. A....

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., sous-officier de gendarmerie, a contesté devant la commission des recours des militaires la décision du 1er décembre 2016 du ministre de l'intérieur arrêtant le tableau d'avancement au grade de maréchal des logis-chef spécialité " système informatique et communication " au titre de l'année 2017, au motif que son nom n'y figurait pas. Une décision implicite de rejet est née du silence gardé par le ministre de l'intérieur sur ce recours préalable obligatoire. M. A... a également saisi la commission des recours des militaires d'une demande dirigée contre la décision implicite de rejet née du silence gardé par le ministre de l'intérieur sur sa demande préalable tendant à être indemnisé des préjudices résultant de l'absence d'avancement au titre des années 2013 à 2017. Une seconde décision implicite de rejet est née du silence gardé par le ministre de l'intérieur sur ce recours. Par deux demandes distinctes, M. A... a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler la décision implicite par laquelle le ministre de l'intérieur a rejeté son recours administratif préalable obligatoire dirigé contre le tableau d'avancement au grade de maréchal des logis-chef spécialité " système informatique et communication " au titre de l'année 2017 et de condamner l'Etat à l'indemniser de ses différents préjudices. M. A... relève appel du jugement du 29 mai 2019 par lequel le tribunal administratif de Rouen a rejeté ses demandes.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Il ressort des motifs du jugement et notamment du point 4, que les premiers juges, qui n'étaient pas tenus de répondre à l'ensemble des arguments, ont suffisamment motivé leur réponse au moyen tiré de ce que le ministre de l'intérieur aurait commis une erreur manifeste d'appréciation en refusant d'inscrire M. A... sur le tableau d'avancement au grade de maréchal des logis chef spécialité " système informatique et communication ". Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation du jugement doit être écarté.

3. Il ressort des pièces du dossier de première instance que M. A... s'était borné à évoquer que trois de ses camarades promus en 2017 devaient selon lui probablement avoir une moyenne de notation inférieure à la sienne. Le ministre lui opposait un mérite supérieur des autres candidats, en détaillant notamment les mérites du personnel inscrit en dernière position du tableau. Dans ces conditions, le tribunal administratif a pu estimer disposer d'éléments suffisants, sans qu'il fût besoin d'ordonner une mesure d'instruction, pour statuer sur le bien-fondé des conclusions de la demande de M. A... tendant à l'annulation de la décision implicite du ministre de l'intérieur rejetant son recours administratif préalable obligatoire dirigé contre la décision du 1er décembre 2016 portant tableau d'avancement au grade de maréchal de logis-chef spécialité " système d'information et de communication " au titre de l'année 2017 et pour se prononcer sur les moyens présentés au soutien de ces conclusions. Par suite, le moyen tiré de ce que les premiers juges auraient méconnu leur office en s'abstenant à tort de faire usage de leurs pouvoirs d'instruction doit être écarté.

Sur le bien-fondé du jugement :

En ce qui concerne les conclusions d'annulation :

4. Aux termes de l'article L. 4136-1 du code de la défense : " (...) / L'avancement de grade a lieu soit au choix, soit au choix et à l'ancienneté, soit à l'ancienneté (...) ". Aux termes de l'article L. 4136-3 du même code : " Nul ne peut être promu au choix à un grade (...) s'il n'est inscrit sur un tableau d'avancement établi, au moins une fois par an, par corps. Une commission (...) présente (...) tous les éléments d'appréciation nécessaires, notamment l'ordre de préférence et les notations données aux candidats par leurs supérieurs hiérarchiques. (...) Les statuts particuliers précisent les conditions d'application du présent article ". Aux termes de l'article 23 du décret du 12 septembre 2008 portant statut particulier du corps des sous-officiers de gendarmerie : " Les promotions au grade supérieur ont lieu exclusivement au choix. ". Aux termes de l'article 24 du même décret : " I. - Peuvent être promus au grade de maréchal des logis-chef les sous-officiers de carrière du grade de gendarme : / 1° Soit comptant au moins quatre ans d'ancienneté à ce grade et titulaires, au 1er janvier de l'année de promotion, d'un titre professionnel fixé, par branche ou spécialité, par arrêté du ministre de l'intérieur ; / 2° Soit comptant au moins quinze ans d'ancienneté de service. ".

5. Le juge de l'excès de pouvoir, saisi d'un recours tendant à l'annulation d'un arrêté portant inscription au tableau d'avancement et nomination dans un grade supérieur, ne peut se borner, dans le cadre de son contrôle restreint, à apprécier la valeur professionnelle d'un candidat écarté, et doit analyser les mérites comparés de cet agent et de ceux des autres agents candidats à ce même grade.

6. Il ressort des pièces du dossier que M. A... s'est déclaré volontaire le 30 juin 2016 à l'avancement au grade de maréchal des logis-chef spécialité " système d'information et de communication ". Il est constant qu'il remplissait les conditions pour pouvoir être promu à ce grade fixées par les dispositions, citées au point 4, du décret du 12 septembre 2008 portant statut particulier du corps des sous-officiers de gendarmerie, compte tenu de son ancienneté et du fait qu'il détient depuis juin 2014 le diplôme technique des systèmes d'information et de communication, titre professionnel exigé pour cette spécialité. M. A... prétend que rien ne justifie sa non inscription au tableau d'avancement compte tenu de son ancienneté, de sa qualification d'officier de police judiciaire et de son diplôme technique. Il fait valoir que l'un de ses camarades inscrit en 31ème position, n'a eu son diplôme technique qu'en 2016 et qu'il ne détenait aucune responsabilité particulière alors que lui-même exerçait des fonctions d'encadrement et de direction de chantier. Toutefois, le ministre de l'intérieur fait valoir que les candidats promus étaient plus méritants et plus qualifiés que M. A.... En particulier, la manière de servir et la progression du sous-officier promu au 31ème rang attestaient d'un fort potentiel et de points forts tels que le dynamisme, la volonté, la maîtrise de soi et l'équilibre, une faculté d'adaptation et de rapidité d'exécution. De tels points forts n'ont jamais été relevés en ce qui concerne M. A..., même dans sa notation au titre de l'année 2016. S'agissant du dernier promu au tableau d'avancement, le ministre avance les qualités prépondérantes de ce dernier pour accéder à un grade supérieur tels que le goût des responsabilités ou encore la capacité à gérer les priorités. Il ne ressort pas donc des pièces du dossier que la valeur professionnelle de M. A... serait supérieure à celle des agents ayant obtenu la promotion. Si le requérant allègue également que le tableau d'avancement serait sensiblement identique au classement de fin de stage des sous-officiers ayant obtenu le diplôme technique des systèmes d'information et de communication, cette circonstance, à la supposer même établie, n'est pas en soi de nature à démontrer que le tableau d'avancement n'aurait pas été établi en fonction des mérites des agents. Il ressort par ailleurs des notations de l'intéressé entre 2012 et 2015, que les supérieurs hiérarchiques successifs de M. A... n'ont pas estimé qu'il avait les capacités à occuper immédiatement un emploi supérieur et que s'agissant de la réussite dans l'emploi, l'item " réussit normalement " lui a été majoritairement attribué au cours de ces quatre années. La circonstance que sa notation au titre de l'année 2015 ait été partiellement révisée par une décision du 4 avril 2017, soit postérieurement au tableau d'avancement pris le 1er décembre 2016, ne saurait suffire à remettre en cause l'appréciation des mérites de M. A... portée par l'administration, la révision consistant uniquement à revenir sur un manque de disponibilité indiqué à tort dans sa notation. Ce n'est qu'au titre de la notation 2016, qui fait effectivement état d'un changement d'état d'esprit et d'un réel engagement dans l'emploi, que son supérieur hiérarchique a pour la première fois indiqué qu'il pouvait accéder immédiatement à un emploi supérieur et qu'il était " parfaitement à l'aise " dans son emploi. Hormis celle de 2016, ses précédentes notations ont fait notamment état d'un isolement de l'agent au sein du groupe, d'un nécessaire recentrage de l'intéressé sur son emploi afin de retrouver la confiance de sa hiérarchie et de ses pairs ou de carences à l'écrit. M. A... a d'ailleurs fait l'objet au cours de l'année 2014 de deux sanctions disciplinaires, une mesure d'arrêt de trente jours pour avoir utilisé en 2013 un procès-verbal falsifié au profit de son beau-frère dans le cadre d'une immatriculation de véhicule et un blâme du ministre pour avoir profité en 2011 sans alerter sa hiérarchie de vêtements contrefaits, objets d'une saisine et avoir cherché à s'en débarrasser. L'administration pouvait notamment en tenir compte pour apprécier la manière de servir de l'intéressé. Par suite, le moyen tiré de que la décision implicite de rejet de son recours préalable obligatoire dirigé contre la décision arrêtant le tableau d'avancement au titre de l'année 2017 au grade de maréchal des logis chef spécialité " système d'information et de communication " serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation doit être écarté.

7. Il ne ressort pas des pièces du dossier que la non-inscription de M. A... au tableau d'avancement au grade de maréchal des logis-chef pour l'année 2017, serait une sanction déguisée. Il n'apporte en particulier aucun élément de nature à étayer ses allégations selon lesquelles deux supérieurs hiérarchiques lui auraient affirmé qu'il ne pourrait accéder au grade supérieur qu'à compter de l'année 2024.

8. Il ne ressort pas davantage des pièces du dossier, compte tenu de ce qui a été exposé au point 6, que le refus d'inscrire M. A... au tableau d'avancement serait uniquement fondé sur les sanctions disciplinaires dont il a fait l'objet au cours de l'année 2014. Par suite, le détournement de pouvoir allégué n'est pas établi.

9. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède que la décision implicite du ministre de l'intérieur rejetant son recours administratif préalable obligatoire dirigé contre la décision du 1erdécembre 2016 portant tableau d'avancement au grade de maréchal de logis chef spécialité " système d'information et de communication " au titre de l'année 2017, sur lequel il n'a pas été inscrit, n'est entachée d'aucune illégalité.

En ce qui concerne les conclusions indemnitaires :

S'agissant de l'illégalité fautive de la décision implicite de rejet du ministre rejetant son recours administratif préalable obligatoire contre le tableau d'avancement au grade de maréchal de logis chef spécialité " système d'information et de communication " :

10. Il résulte de ce qui a été dit précédemment qu'en l'absence d'illégalité fautive de la décision contestée, la responsabilité de l'Etat ne saurait être engagée. Par suite, les conclusions indemnitaires présentées sur le fondement de cette faute doivent être rejetées.

S'agissant du refus d'avancement à compter de 2013 :

11. M. A... soutient qu'il aurait dû être promu maréchal des logis-chef dès 2013 compte tenu de son ancienneté et de sa qualification d'officier de police judiciaire obtenu en février 2012. Il fait état notamment de sa bonne notation en 2011 et 2012 et de la perception d'une prime au mérite durant trois ans entre 2009 et 2011. Alors qu'il ne critique pas les mérites des candidats ayant été promus au tableau d'avancement au titre des années 2013, 2014, 2015 et 2016, il ne résulte pas de l'instruction que l'administration aurait commis une erreur manifeste d'appréciation compte tenu des notations du requérant et en dépit du fait qu'il aurait perçu une prime au mérite de 2009 à 2011. Aucune de ses notations entre 2010 et 2011 ne fait état d'une capacité à occuper un emploi supérieur. Le détournement de pouvoir allégué n'est pas non plus établi. Par suite, M. A... n'est pas fondé à soutenir que l'administration aurait commis une faute en refusant de le promouvoir entre 2013 et 2016 au grade de maréchal des logis-chef. Ses conclusions indemnitaires présentées sur le fondement de cette faute doivent dès lors également être rejetées.

12. Il résulte de l'ensemble ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a rejeté ses demandes. Par voie de conséquence, ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Me B... C... pour M. D... A... et au ministre de l'intérieur.

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N°19DA01811

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N°"Numéro"


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 19DA01811
Date de la décision : 08/04/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

36-06-02-01-01 Fonctionnaires et agents publics. Notation et avancement. Avancement. Avancement de grade. Tableaux d'avancement.


Composition du Tribunal
Président : Mme Borot
Rapporteur ?: Mme Ghislaine Borot
Rapporteur public ?: M. Cassara
Avocat(s) : MAUMONT MOUMNI AVOCATS ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 20/04/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2021-04-08;19da01811 ?
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