La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

16/03/2021 | FRANCE | N°19DA02077

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 1ère chambre, 16 mars 2021, 19DA02077


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... D... a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler l'arrêté du 21 février 2017 par lequel la préfète de la Seine-Maritime l'a mise en demeure de mettre fin à la mise à disposition, en tant que logement destiné à un usage locatif, d'un local lui appartenant situé 10 rue Bouquet à Rouen, ensemble la décision du 6 juillet 2017 qui a rejeté son recours gracieux.

Par un jugement n° 1702458 du 4 juillet 2019, le tribunal administratif de Rouen a rejeté cette demande.

Proc

dure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 4 septembre 2019, et un mémoire en...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... D... a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler l'arrêté du 21 février 2017 par lequel la préfète de la Seine-Maritime l'a mise en demeure de mettre fin à la mise à disposition, en tant que logement destiné à un usage locatif, d'un local lui appartenant situé 10 rue Bouquet à Rouen, ensemble la décision du 6 juillet 2017 qui a rejeté son recours gracieux.

Par un jugement n° 1702458 du 4 juillet 2019, le tribunal administratif de Rouen a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 4 septembre 2019, et un mémoire en réplique, enregistré le 20 novembre 2020, Mme D..., représentée par Me B... A..., demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures :

1°) avant dire droit, de désigner un expert judiciaire aux fins de procéder à l'analyse des caractéristiques du logement en litige ;

2°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Rouen ;

3°) d'annuler l'arrêté du 21 février 2017 et la décision du 6 juillet 2017 ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la construction et de l'habitation ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de la santé publique ;

- l'ordonnance n° 2020-1144 du 16 septembre 2020, notamment son article 19 ;

- la loi n° 2020-1379 du 14 novembre 2020 autorisant la prorogation de l'état d'urgence sanitaire ;

- le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Hélène Busidan, premier conseiller,

- les conclusions de M. Aurélien Gloux-Saliou, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

Sur l'objet du litige :

1. Mme D... est propriétaire d'un studio d'environ 32 m², situé 10 rue Bouquet à Rouen, qu'elle propose à la location depuis plusieurs années. A la suite du signalement effectué par son dernier locataire, le service communal d'hygiène et de la santé de la commune de Rouen a diligenté plusieurs visites de ce local de septembre à décembre 2016 et établi, le 14 février 2017, un rapport qui a proposé à la préfète de la Seine-Maritime de déclarer le local inhabitable par nature en application de l'article L. 1331-22 du code de la santé publique.

2. Par un arrêté du 21 février 2017, notifié le 15 mars 2017, la préfète a mis en demeure Mme D... de mettre fin à la mise à disposition de ce local en tant que logement destiné à la location. L'intéressée relève appel du jugement du 4 juillet 2019 par lequel le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 21 février 2017 et de la décision expresse du 6 juillet 2017 qui a rejeté son recours gracieux.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

3. Aux termes de l'article L. 1331-22 du code de la santé publique, applicable à la date de l'arrêté et toujours applicable à la date du présent arrêt en application de l'article 19 de l'ordonnance n° 2020-1144 du 16 septembre 2020 relative à l'harmonisation et à la simplification des polices des immeubles, locaux et installations s'agissant d'un arrêté notifié avant le 1er janvier 2021 : " Les caves, sous-sols, combles, pièces dépourvues d'ouverture sur l'extérieur et autres locaux par nature impropres à l'habitation ne peuvent être mis à disposition aux fins d'habitation, à titre gratuit ou onéreux. Le représentant de l'Etat dans le département met en demeure la personne qui a mis les locaux à disposition de faire cesser cette situation dans un délai qu'il fixe. (...) ".

4. Le recours en annulation formé contre une telle mise en demeure du préfet est un recours de pleine juridiction. Il appartient par suite au juge saisi d'un tel recours de se prononcer sur le caractère impropre à l'habitation des locaux en cause en tenant compte de la situation existant à la date à laquelle il statue.

5. En premier lieu, il résulte de l'instruction que le studio en litige, qui est composé d'une pièce à vivre avec un coin cuisine et d'un cabinet de toilette comprenant une douche, un WC et un lavabo, présente une hauteur sous plafond moyenne de 2,40 mètres sans jamais être inférieure à 2,15 mètres dans la cabine de douche.

6. En deuxième lieu, bien que situé dans le prolongement des caves de l'ancien hôtel particulier de la fin du XIXème siècle où il se trouve et enterré à une profondeur qui varie de 1,47 mètre à 1,68 mètre selon les documents versés au dossier, soit sur plus de 50 % de sa hauteur, le logement, desservi par une " cour anglaise ", qui est longue de 3 mètres et large de 1,1 mètre, située en contrebas de la cour intérieure de l'immeuble, est dégagé sur la quasi-totalité de sa façade est.

7. Le studio en cause bénéficie d'une porte d'entrée vitrée et de deux fenêtres d'une hauteur normale donnant directement sur cette " cour anglaise ", ce qui permet l'entrée de la lumière naturelle dans le logement et le renouvellement de l'air. Une telle configuration ne permet pas de qualifier le local en litige de sous-sol.

8. Si l'éclairage naturel du studio varie à l'évidence selon les saisons et les heures de la journée, il n'apparaît pas, au vu des expertises versées au dossier par l'appelante qui ont été réalisées en avril 2017 et juin 2018 par des architectes experts auprès de diverses juridictions, qu'il obligerait l'occupant du local à garder en permanence un éclairage artificiel dans la pièce, comme l'a indiqué le service communal d'hygiène après les visites qu'il a effectuées en automne et en hiver.

9. En troisième lieu, les expertises produites par Mme D..., qui ont relevé que les murs étaient sains et dépourvus de moisissures ou de craquelures, ne corroborent pas le caractère structurel du taux d'humidité de 100 % sur une hauteur de 50 centimètres minimum des murs de la pièce principale mesuré par le service communal, qui a pu être produit par un défaut d'aération auquel des dispositifs de ventilation appropriés peuvent remédier.

10. Dans ces conditions, si la salubrité du studio peut sans doute être améliorée par des travaux adéquats qu'il demeure possible à l'administration d'exiger, le logement en litige ne peut pas être regardé comme étant par nature impropre à l'habitation.

11. Dès lors, la préfète de la Seine-Maritime ne pouvait pas mettre en demeure la requérante de cesser la mise à disposition de son studio aux fins d'habitation sur le fondement de l'article L. 1331-22 du code de la santé publique.

12. Par suite, et sans qu'il soit besoin d'ordonner une expertise judiciaire ni d'examiner les autres moyens de la requête y compris celui de l'irrégularité du jugement, Mme D... est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté du 21 février 2017 et de la décision du 6 juillet 2017 qui a rejeté son recours gracieux.

Sur les frais exposés et non compris dans les dépens :

13. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement à Mme D... d'une somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du 4 juillet 2019 du tribunal administratif de Rouen, l'arrêté du 21 février 2017 de la préfète de la Seine-Maritime et la décision du 6 juillet 2017 rejetant le recours gracieux formé contre cet arrêté sont annulés.

Article 2 : L'Etat versera à Mme D... une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Me B... A... pour Mme C... D... et au ministre des solidarités et de la santé.

Copie en sera transmise, pour information, au préfet de la Seine-Maritime.

N°19DA02077 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 19DA02077
Date de la décision : 16/03/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. Heinis
Rapporteur ?: Mme Hélène Busidan
Rapporteur public ?: M. Gloux-Saliou
Avocat(s) : SUXE

Origine de la décision
Date de l'import : 20/04/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2021-03-16;19da02077 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award