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04/03/2021 | FRANCE | N°18DA02287

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 4ème chambre, 04 mars 2021, 18DA02287


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société par actions simplifiée (SAS) Les Rives de l'Omignon a demandé au tribunal administratif d'Amiens de prononcer la décharge et la restitution des rappels de taxe sur les salaires qu'elle a versés au titre des années 2011 à 2013, à hauteur de la somme de 54 985 euros, majorée de l'intérêt moratoire à compter du 10 juillet 2015.

Par un jugement n° 1602652 du 11 septembre 2018, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requ

te et des mémoires, enregistrés le 15 novembre 2018, le 14 août 2019 et le 4 août 2020, la SAS L...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société par actions simplifiée (SAS) Les Rives de l'Omignon a demandé au tribunal administratif d'Amiens de prononcer la décharge et la restitution des rappels de taxe sur les salaires qu'elle a versés au titre des années 2011 à 2013, à hauteur de la somme de 54 985 euros, majorée de l'intérêt moratoire à compter du 10 juillet 2015.

Par un jugement n° 1602652 du 11 septembre 2018, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés le 15 novembre 2018, le 14 août 2019 et le 4 août 2020, la SAS Les Rives de l'Omignon, représentée par Me A..., demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de prononcer la décharge et la restitution des rappels de taxe sur les salaires qu'elle a versés au titre des années 2011 à 2013, à hauteur de la somme de 54 985 euros, majorée de l'intérêt moratoire à compter du 10 juillet 2015 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi que les dépens de l'instance.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de commerce ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de la sécurité sociale ;

- la loi n° 2020-1379 du 14 novembre 2020 ;

- le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Binand, président-assesseur,

- les conclusions de M. Arruebo-Mannier, rapporteur public,

- les observations de Me B..., pour la SAS Les Rives de l'Omignon.

Considérant ce qui suit :

1. La société par actions simplifiée (SAS) Les Rives de l'Omignon, qui est une société de holding intervenant dans la gestion de ses filiales en leur rendant des prestations de services, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur les exercices clos de 2011 à 2014. A l'issue de cette vérification de comptabilité, l'administration, par une proposition de rectification du 11 décembre 2014 pour l'année 2011 et une proposition de rectification du 17 février 2015 pour les années 2012 et 2013, a remis en cause l'absence d'assujettissement à la taxe sur les salaires des rémunérations servies par la société Les Rives de l'Omignon à son président au titre de ces trois années. Ces rectifications ont été mise en recouvrement le 15 juin 2015, à hauteur d'un montant total de 54 985 euros, en droits, intérêt de retard et majoration de 10 % fondée sur le manquement de la société à ses obligations déclaratives. La SAS Les Rives de l'Omignon relève appel du jugement du 11 septembre 2018 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à la décharge de ces suppléments d'imposition et à la restitution des sommes qu'elle a versées à ce titre.

2. Aux termes du 1 de l'article 231 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable au litige, les employeurs doivent payer une taxe sur les salaires " lorsqu'ils ne sont pas assujettis à la taxe sur la valeur ajoutée ou ne l'ont pas été sur 90 % au moins de leur chiffre d'affaires au titre de l'année civile précédant celle du paiement desdites rémunérations. ". Aux termes du même article : " L'assiette de la taxe due par ces personnes ou organismes est constituée par une partie des rémunérations versées, déterminée en appliquant à l'ensemble de ces rémunérations le rapport existant, au titre de cette même année, entre le chiffre d'affaires qui n'a pas été passible de la taxe sur la valeur ajoutée et le chiffre d'affaires total. Le chiffre d'affaires qui n'a pas été assujetti à la taxe sur la valeur ajoutée en totalité ou sur 90 p. 100 au moins de son montant, ainsi que le chiffre d'affaires total mentionné au dénominateur du rapport s'entendent du total des recettes et autres produits, y compris ceux correspondant à des opérations qui n'entrent pas dans le champ d'application de la taxe sur la valeur ajoutée. Le chiffre d'affaires qui n'a pas été passible de la taxe sur la valeur ajoutée mentionné au numérateur du rapport s'entend du total des recettes et autres produits qui n'ont pas ouvert droit à déduction de la taxe sur la valeur ajoutée. / (...)".

3. Pour assujettir la SAS Les Rives de l'Omignon à la taxe sur les salaires au titre des années 2011 à 2013, l'administration s'est fondée, ainsi que cela résulte des motifs énoncés dans les deux propositions de rectification qu'elle lui a adressées, sur ce que moins de 90 % du chiffre d'affaires que la société avait réalisé au cours de chacune des années civiles précédentes avait été soumis à la taxe sur la valeur ajoutée. Il résulte de ces mêmes documents que, contrairement à ce que soutient la société appelante, l'administration a tiré des parts de chiffre d'affaires, non soumises à la taxe sur la valeur ajoutée, constatées pour chacune de ces années civiles de références, qu'elle a indiquées ainsi que leurs bases de calcul, à savoir 68 % pour l'année civile 2010, 62 % pour l'année civile 2011 et 56 % pour l'année civile 2012, le rapport d'assujettissement appliqué au montant des rémunérations versées par la société à son président, afin de liquider la taxe sur les salaires dont la société était redevable au titre des années redressées.

Sur les bases d'assujettissement à la taxe sur les salaires :

4. En premier lieu, d'une part, il résulte des travaux parlementaires de l'article 10 de la loi du 30 décembre 2000 de finances pour 2001, dont sont issues les dispositions de l'article 231 du code général des impôts applicables en 2011 et 2012, qu'en alignant l'assiette de la taxe sur les salaires sur celle des cotisations de sécurité sociale, le législateur a entendu y inclure les rémunérations des dirigeants de sociétés visés à l'article L. 311-3 du code de la sécurité sociale et notamment celles des présidents des sociétés par actions simplifiées visées, contrairement à ce qu'ont indiqué les premiers juges, au 23° et non au 12° de cet article. D'autre part, il résulte des travaux parlementaires de l'article 13 de la loi du 17 décembre 2012 de financement de la sécurité sociale pour 2013, dont est issu l'article 231 du code général des impôts applicable aux rémunérations servies dès le 1er janvier 2013, que le législateur a entendu rendre l'assiette de la taxe sur les salaires identique à celle de la contribution sociale généralisée, sous réserve des seules exceptions mentionnées à la première phrase du 1 de cet article 231. En vertu des dispositions combinées de cet article et de l'article L. 131-2 du code de la sécurité sociale, sont inclus dans l'assiette de la taxe sur les salaires les revenus d'activité des personnes mentionnées à l'article L. 311-3 du code de la sécurité sociale. Ce dernier article mentionne notamment, les présidents des sociétés par actions simplifiées. Par suite, contrairement à ce que soutient la société appelante, son président, sans avoir la qualité de salarié au sens du droit du travail, est au nombre des personnes dont les rémunérations étaient soumises, au titre des trois années considérées, à la taxe sur les salaires en vertu de l'article 231 du code général des impôts.

5. En second lieu, d'une part, lorsque les activités d'une entreprise sont, pour l'exercice de ses droits à déduction de la taxe sur la valeur ajoutée, réparties en plusieurs secteurs distincts au sens de l'article 209 de l'annexe II au code général des impôts, la taxe sur les salaires doit être déterminée par secteur, en appliquant aux rémunérations des salariés affectés spécifiquement à chaque secteur le rapport d'assujettissement propre à ce secteur. Toutefois, la taxe sur les salaires des personnels concurremment affectés à plusieurs secteurs doit être établie en appliquant à leurs rémunérations le rapport existant pour l'entreprise dans son ensemble entre le chiffre d'affaires qui n'a pas été passible de la taxe sur la valeur ajoutée et le chiffre d'affaires total.

6. D'autre part, le président d'une société par actions simplifiée dispose, en vertu de l'article L. 227-6 du code de commerce, des pouvoirs les plus étendus dans la direction de la société. S'agissant d'une société holding, ces pouvoirs s'étendent en principe au secteur financier, même si le suivi des activités est sous-traité à des tiers ou confié à des salariés spécialement affectés à ce secteur et si le nombre des opérations relevant de ce secteur est très faible. Toutefois, s'il résulte des éléments produits par l'entreprise que certains de ses dirigeants n'ont pas d'attribution dans le secteur financier, notamment lorsque, compte tenu de l'organisation adoptée, l'un d'entre eux est dépourvu de tout contrôle et responsabilité en la matière, la rémunération de ce dirigeant doit être regardée comme relevant entièrement des secteurs passibles de la taxe sur la valeur ajoutée et, par suite, comme placée hors du champ de la taxe sur les salaires.

7. Il résulte des principes rappelés aux trois points précédents que la société requérante, qui n'établit ni même allègue que son président n'avait pas d'attribution dans le secteur financier, n'est pas fondée à soutenir que les rémunérations versées à ce dernier en contrepartie de son mandat social, seraient, en tout ou partie, hors du champ de la taxe sur les salaires. Dès lors, c'est à bon droit que l'administration a assujetti ces rémunérations à la taxe sur les salaires au titre des années 2011 à 2013.

Sur la détermination du rapport d'assujettissement à la taxe sur les salaires :

8. Il résulte des dispositions de l'article 231, dont la rédaction est issue du I de l'article 18 de la loi du 30 décembre 1993 de finances rectificative pour 1993 qui a eu pour objet de dissocier le rapport d'assujettissement à la taxe sur les salaires du rapport, dit " prorata " de taxe sur la valeur ajoutée, alors prévu à l'article 212 de l'annexe II au code général des impôts, que l'assiette de la taxe sur les salaires due par les assujettis partiels à la taxe sur la valeur ajoutée s'obtient en appliquant au montant total des rémunérations, le rapport existant entre le chiffre d'affaires qui n'a pas été passible de la taxe sur la valeur ajoutée et le chiffre d'affaires total. Ce rapport est déterminé en faisant figurer, au numérateur, le chiffre d'affaires qui n'a pas ouvert droit à déduction de la taxe sur la valeur ajoutée, constitué des recettes correspondant à des opérations exonérées ou situées hors du champ d'application de cette taxe, et, au dénominateur, la totalité des recettes, c'est-à-dire celles correspondant à des opérations imposables ou exonérées ou situées hors du champ d'application de la taxe sur la valeur ajoutée.

9. Si, comme la société appelante le fait valoir, la Cour de justice de l'Union européenne a jugé, dans son arrêt du 16 juillet 2015 Larentia + Minerva (C-108/14 et C-109/14), que la taxe sur la valeur ajoutée grevant des biens et services dont les coûts font partie des frais généraux d'une société holding qui, s'immisçant dans la gestion de ses filiales, exerce, à ce titre, une activité économique doit, en principe, être déduite intégralement, il ressort d'une jurisprudence constante de cette même Cour que n'étant pas la contrepartie d'une activité économique, la perception de dividendes n'entre pas, elle-même, dans le champ d'application de la taxe sur la valeur ajoutée, même dans l'hypothèse où la société holding qui perçoit les dividendes s'immisce dans la gestion de ses filiales en leur fournissant des prestations de services soumises à cette taxe. Il suit de là que les dividendes doivent, pour l'application des dispositions de l'article 231 du code général des impôts, être compris au numérateur du rapport prévu à cet article.

10. Par suite, c'est à bon droit que l'administration a déterminé le montant de la taxe sur les salaires due par la SAS Les Rives de l'Omignon en faisant application, à la totalité de la rémunération du président de cette société, du rapport d'assujettissement déterminé au point précédent pour chacune des années considérées.

11. Enfin, en se bornant à faire valoir que " la taxe n'est pas due comme prévue par le législateur " et que " le résultat fiscal est bien différent du résultat comptable ", la SAS Les Rives de l'Omignon ne met pas la cour à même d'apprécier le bien-fondé des moyens qu'elle entendrait alors soulever pour critiquer le principe, l'assiette, ou le quantum de l'imposition en litige. Elle ne peut davantage utilement se prévaloir, à cette fin, de ce qu'elle a payé ce supplément d'imposition à la suite de sa mise en recouvrement.

12. Il résulte de tout ce qui précède que la SAS Les Rives de l'Omignon n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à la décharge et à la restitution des rappels de taxe sur les salaires qui lui ont été assignés au titre des années 2011 à 2013. Il s'ensuit que sa requête doit être rejetée en toutes ses conclusions, y compris celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi, en tout état de cause, que ses conclusions relatives aux dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la SAS Les Rives de l'Omignon est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société par actions simplifiée Les Rives de l'Omignon et au ministre délégué chargé des comptes publics.

Copie en sera transmise à l'administrateur général des finances publiques chargé de la direction spécialisée de contrôle fiscal Nord.

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N°18DA02287


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 18DA02287
Date de la décision : 04/03/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-05-01 Contributions et taxes. Impôts assis sur les salaires ou les honoraires versés. Versement forfaitaire de 5 p. 100 sur les salaires et taxe sur les salaires.


Composition du Tribunal
Président : M. Heu
Rapporteur ?: M. Christophe Binand
Rapporteur public ?: M. Arruebo-Mannier
Avocat(s) : HANSER ET CONCEPTS

Origine de la décision
Date de l'import : 16/03/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2021-03-04;18da02287 ?
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