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09/02/2021 | FRANCE | N°19DA02285

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 1ère chambre, 09 février 2021, 19DA02285


Vu la procédure suivante :

Procédure antérieure :

M. E... F... a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler l'arrêté du préfet du Nord du 28 août 2019 portant obligation de quitter le territoire français sans délai, fixation du pays de renvoi et interdiction de retour en France pendant un an.

Par un jugement n° 1907513 du 5 septembre 2019, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Lille a annulé cet arrêté, enjoint au préfet de réexaminer la situation de l'intéressé en délivrant une autorisation provisoire de sé

jour et condamné l'Etat à verser une somme au titre des frais exposés et non compris dan...

Vu la procédure suivante :

Procédure antérieure :

M. E... F... a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler l'arrêté du préfet du Nord du 28 août 2019 portant obligation de quitter le territoire français sans délai, fixation du pays de renvoi et interdiction de retour en France pendant un an.

Par un jugement n° 1907513 du 5 septembre 2019, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Lille a annulé cet arrêté, enjoint au préfet de réexaminer la situation de l'intéressé en délivrant une autorisation provisoire de séjour et condamné l'Etat à verser une somme au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 6 octobre 2019, le préfet du Nord, représenté par Me A... C..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de rejeter la demande présentée devant le tribunal administratif.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 2020-1379 du 14 novembre 2020 autorisant la prorogation de l'état d'urgence sanitaire ;

- le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Marc Heinis, président de chambre, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

Sur les conclusions à fin d'annulation :

En ce qui concerne le moyen d'annulation retenu par le tribunal administratif :

1. D'une part, M. F..., né en 1994 au Maroc de parents diplomates et de nationalité congolaise, a déclaré avoir vécu en Libye de 1995 à 2011. Il est célibataire sans enfant et sans profession. A la date de l'arrêté, sa mère résidait en République Démocratique du Congo.

2. D'autre part, si M. F... est entré en France avec un visa long séjour en octobre 2011 et a bénéficié d'un titre de séjour " étudiant " de janvier 2012 à janvier 2016, il n'a obtenu aucun diplôme universitaire, n'a pas demandé le renouvellement de ce titre, s'est maintenu irrégulièrement en France, soit depuis trois ans et sept mois à la date de l'arrêté, et a été interpellé à la gare de Lille Flandres le 27 août 2019.

3. Dans ces conditions, même si M. F... a été scolarisé en France de 2008 à 2010, même s'il a obtenu un baccalauréat technologique, même s'il a été inscrit en BTS Professions immobilières en 2017/2018 et même si sa tante résidait à Orléans, l'arrêté n'a pas porté une atteinte disproportionnée à la vie privée et familiale garantie par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

4. Il résulte de ce qui précède que le requérant est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, la magistrate désignée a estimé que l'arrêté avait violé l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

En ce qui concerne les autres moyens d'annulation invoqués par M. F... :

S'agissant de la procédure :

5. Il ressort des pièces du dossier que M. F..., lors de son audition par la police avant l'édiction de l'arrêté, a pu présenter des observations circonstanciées sur sa situation. En tout état de cause, il n'invoque aucune information de nature à affecter le sens des décisions qu'il n'aurait pas pu communiquer. Les articles 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne et L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration n'ont ainsi pas été violés.

S'agissant de la compétence :

6. L'auteur de l'arrêté, adjoint à la cheffe du bureau de la lutte contre l'immigration irrégulière, bénéficiait d'une délégation de signature, suffisamment précise, sur le fondement de l'article 43 du décret n° 2004-374 du 29 avril 2004 et d'un arrêté préfectoral du 5 juillet 2019 publié au recueil des actes administratifs de la préfecture et accessible sur internet.

S'agissant de la forme et de l'examen particulier de la situation :

7. Conformément aux articles L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration et L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, l'arrêté a énoncé les motifs de droit et de fait qui ont fondé ses différentes décisions. Il ressort de cette motivation que l'auteur de l'arrêté a procédé, pour toutes ses décisions, à un examen particulier de l'ensemble des éléments alors portés à sa connaissance.

S'agissant de l'absence de délai de départ volontaire :

8. M. F... s'est maintenu en France plus d'un mois après l'expiration de son titre de séjour sans en avoir demandé le renouvellement. Lors de son audition par la police le 27 août 2019, il a indiqué résider chez son cousin à Marseille mais n'a fourni aucun justificatif et n'a pas pu préciser le numéro de téléphone de son hébergeant. Dans ces conditions et même en l'absence de menace pour l'ordre public, l'arrêté n'était pas entaché d'erreur de fait et n'a pas violé l'article L. 511-1, II du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

S'agissant de la fixation du pays de renvoi :

9. M. F... n'a fourni aucun élément établissant l'existence d'un risque en cas de retour dans le pays dont il a la nationalité. Le moyen tiré de la violation des articles 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit donc être écarté.

S'agissant de l'interdiction de retour en France :

10. Dans les circonstances rappelées aux points 1 à 3, l'interdiction de retour en France limitée à un an n'a pas fait une inexacte application de l'article L. 511-1, III du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et n'a pas violé l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

S'agissant de la notification de l'arrêté :

11. La circonstance que l'arrêté n'aurait pas été notifié à l'intéressé dans une langue qu'il comprend n'est pas de nature à démontrer son illégalité.

12. Il résulte de tout ce qui précède que le requérant est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, la magistrate désignée a annulé l'arrêté du 28 août 2019.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

13. Le présent arrêt n'implique aucune mesure d'exécution pour l'application des articles L. 911-1 et suivants du code de justice administrative.

Sur les frais exposés et non compris dans les dépens :

14. Les conclusions présentées par le requérant, partie perdante, sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du 5 septembre 2019 est annulé.

Article 2 : Les conclusions présentées par M. F... en première instance sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Me B... D... pour M. E... F... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera transmise, pour information, au préfet du Nord.

N°19DA02285 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 19DA02285
Date de la décision : 09/02/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335 Étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. Heinis
Rapporteur ?: M. Marc Heinis
Rapporteur public ?: M. Gloux-Saliou
Avocat(s) : SELARL CLAISSE et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 16/03/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2021-02-09;19da02285 ?
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