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26/01/2021 | FRANCE | N°19DA01826

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 1ère chambre, 26 janvier 2021, 19DA01826


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... a demandé au tribunal administratif d'Amiens d'annuler la décision du 3 mai 2018 par laquelle le ministre de l'intérieur a émis un avis défavorable à sa demande d'autorisation d'organiser et d'exploiter une activité de jeux et de pronostics sportifs.

Par un jugement n° 1802576 du 4 juin 2019, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 1er août 2019, Mme B..., représentée par Me A... D..., demande

à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 3...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... a demandé au tribunal administratif d'Amiens d'annuler la décision du 3 mai 2018 par laquelle le ministre de l'intérieur a émis un avis défavorable à sa demande d'autorisation d'organiser et d'exploiter une activité de jeux et de pronostics sportifs.

Par un jugement n° 1802576 du 4 juin 2019, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 1er août 2019, Mme B..., représentée par Me A... D..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 3 mai 2018 du ministre de l'intérieur ;

3°) d'enjoindre au ministre de l'intérieur de réexaminer sa demande ou d'émettre un avis favorable à cette demande ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 2020-1379 du 14 novembre 2020 ;

- le décret n° 78-1067 du 9 novembre 1978 ;

- le décret n° 85-390 du 1er avril 1985 ;

- le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Jean-Pierre Bouchut, premier conseiller,

- et les conclusions de M. Aurélien Gloux-Saliou, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Mme B... et son époux ont acquis le 1er mars 2018 un fonds de commerce de bar, tabac, presse, brasserie et loterie situé à Creil. Pour être autorisée à poursuivre l'activité liée à l'exploitation de jeux de loterie et de jeux de pronostics sportifs, Mme B... a saisi le ministre de l'intérieur. Mme B... relève appel du jugement du 4 juin 2019 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'avis défavorable rendu le 1er mars 2018 par le ministre de l'intérieur.

2. Aux termes de l'article 18-1 du décret du 9 novembre 1978 susvisé : " Lorsque la société La Française des jeux autorise des personnes privées à exploiter des postes d'enregistrement de jeux de loterie, son autorisation est accordée après avis conforme du ministre de l'intérieur émis en considération des enjeux d'ordre public, de sécurité publique et de protection de la santé et des mineurs, mentionnés à l'article 1er de la loi n° 2010-476 du 12 mai 2010 relative à l'ouverture à la concurrence et à la régulation du secteur des jeux d'argent et de hasard en ligne. / L'avis du ministre de l'intérieur est réputé favorable s'il n'est pas notifié à la société dans le délai de deux mois à compter de l'accusé de réception par le ministre du dossier complet nécessaire à l'instruction de la demande. / Le ministre notifie l'avis défavorable à La Française des jeux et à la personne qui a demandé l'autorisation. Cette personne peut en demander les motifs au ministre ". Aux termes de l'article 19-1 du décret du 1er avril 1985 susvisé : " I. - Lorsque la société La Française des jeux autorise des personnes privées à exploiter des postes de jeux de pronostics sportifs, son autorisation est accordée après avis conforme du ministre de l'intérieur émis en considération des enjeux d'ordre public, de sécurité publique et de protection de la santé et des mineurs, mentionnés à l'article 1er de la loi n° 2010-476 du 12 mai 2010 relative à l'ouverture à la concurrence et à la régulation du secteur des jeux d'argent et de hasard en ligne. / L'avis du ministre de l'intérieur est réputé favorable s'il n'est pas notifié à la société dans le délai de deux mois à compter de l'accusé de réception par le ministre du dossier complet nécessaire à l'instruction de la demande. / Le ministre notifie l'avis défavorable à La Française des jeux et à la personne qui a demandé l'autorisation. Cette personne peut en demander les motifs au ministre. (...) ".

3. Il résulte de ces dispositions que l'avis rendu par le ministre de l'intérieur n'a pas à être motivé. Dès lors, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de l'avis en litige doit être écarté, l'intéressée ayant en outre obtenu la communication des éléments factuels venant au soutien de l'avis attaqué à la suite de son recours gracieux.

4. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier, et notamment de l'entretien mené avec Mme B... lors de l'enquête administrative dans les locaux de l'antenne de police judiciaire de Creil, que celle-ci s'est présentée en compagnie de son époux, M. F... C..., qu'elle a précisé n'avoir aucune expérience professionnelle dans le domaine d'activité en cause et qu'elle n'a pas su répondre aux questions relatives au montage financier et juridique de l'activité de jeux auxquelles seul son époux a réagi. Le rapport de police en conclut qu'elle " semble assumer de manière purement fictive les fonctions de gérance " du fonds de commerce de bar, tabac et brasserie, ce qui n'est pas contesté par l'intéressée. Il ressort également de l'acte de cession du fonds de commerce du 1er mars 2018 que celui-ci a été acquis au profit des deux époux et que la SCI B..., composée des deux conjoints, propriétaire de l'immeuble dans lequel s'exerce l'activité commerciale, a pour gérant M. C.... Par suite, le ministre n'a pas commis d'erreur de fait ni d'erreur de droit en fondant son avis, au regard des enjeux d'ordre public et de sécurité publique, sur la situation globale de Mme B... et de son époux, gérant de fait.

5. En deuxième lieu, il ressort des pièces du dossier que le prix d'acquisition, par les époux, du fonds de commerce s'élève à 130 000 euros et que le prix des marchandises est fixé à 18 774,86 euros. Mme B... et son époux ont déclaré, lors de leur entretien dans les locaux de l'antenne de police judiciaire de Creil, que cette acquisition était financée par une somme de 11 000 euros issue de la vente d'un véhicule, par un prêt à la consommation de 26 650 euros et un emprunt d'un montant de 23 000 euros auprès d'un ami. Si l'appelante soutient en appel qu'un prêt d'une banque portugaise conclu le 16 février 2018 à hauteur de 104 000 euros a concouru au financement de cette acquisition, elle n'en a fait état ni devant les services de police ni lors de son recours gracieux devant le ministre, ni d'ailleurs devant les premiers juges, le total de l'ensemble de ces financements excédant la somme nécessaire à l'acquisition du fonds de commerce et du prix des marchandises en stock. Dans ces conditions, le ministre n'a pas commis d'erreur d'appréciation quant au défaut de transparence de l'origine des fonds destinés à cette acquisition.

6. Enfin, le ministre s'est également fondé sur le fait que le prêt à la consommation a été utilisé à une fin autre que celle qui était prévue dans le contrat de prêt. Toutefois cette circonstance n'est pas constitutive, à elle seule, d'une infraction au sens de l'article 314-1 du code pénal qui définit l'abus de confiance. Par ailleurs, les antécédents judiciaires de M. C... qui sont anciens et n'ont donné lieu, au vu des pièces du dossier, à aucune condamnation pénale et ceux reprochés à Mme B... qui sont mineurs, ne sont pas de nature à fonder un avis défavorable à l'exploitation de ces jeux de hasard. Enfin, l'obligation de souscription d'une déclaration de prêt devant être adressée par le débiteur ou le créancier au service des impôts dont il dépend en même temps que la déclaration de ses revenus, cette obligation n'avait pas été méconnue, à la date du 1er mars 2018 à laquelle le ministre a rendu son avis, dès lors que les sommes de 11 000 euros et de 12 000 euros ont été versées respectivement les 5 et 6 janvier 2018 et que la reconnaissance de dette a été établie par M. C... le 5 janvier 2018.

7. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que le ministre de l'intérieur aurait rendu le même avis défavorable, au regard des enjeux d'ordre public et de sécurité publique, s'il ne s'était fondé que sur le caractère fictif de la gestion de l'établissement par Mme B..., et notamment de l'activité d'exploitation de ces jeux de hasard, et sur l'insuffisance de transparence de l'origine des fonds finançant les acquisitions.

8. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les fins de non-recevoir opposées en défense, que Mme B... n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement du 4 juin 2019, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'avis défavorable rendu le 1er mars 2018 par le ministre de l'intérieur. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Me A... D... pour Mme E... B... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera transmise pour information au préfet de l'Oise.

N°19DA01826 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 19DA01826
Date de la décision : 26/01/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

49-05 Police. Polices spéciales.


Composition du Tribunal
Président : Mme Rollet-Perraud
Rapporteur ?: M. Jean-Pierre Bouchut
Rapporteur public ?: M. Gloux-Saliou
Avocat(s) : NAUCHE

Origine de la décision
Date de l'import : 16/03/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2021-01-26;19da01826 ?
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