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17/12/2020 | FRANCE | N°19DA02830

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 4ème chambre, 17 décembre 2020, 19DA02830


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D... B... C... a demandé au tribunal administratif d'Amiens, d'une part, d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 19 juillet 2019 par lequel le préfet de l'Oise a refusé de renouveler son titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de quatre-vingt-dix jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourrait être reconduite d'office, d'autre part, d'enjoindre, sous astreinte, au préfet de l'Oise de renouveler son titre de séjour.

Par un jugem

ent n° 1902739 du 22 novembre 2019, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté ce...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D... B... C... a demandé au tribunal administratif d'Amiens, d'une part, d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 19 juillet 2019 par lequel le préfet de l'Oise a refusé de renouveler son titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de quatre-vingt-dix jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourrait être reconduite d'office, d'autre part, d'enjoindre, sous astreinte, au préfet de l'Oise de renouveler son titre de séjour.

Par un jugement n° 1902739 du 22 novembre 2019, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 30 décembre 2019, Mme B... C..., représentée par Me A..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 19 juillet 2019 du préfet de l'Oise ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Oise, à titre principal, de renouveler son titre de séjour, dans un délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard, à titre subsidiaire, de procéder à un nouvel examen de sa situation, dans un délai d'un mois à compter de la date de notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, et de lui délivrer, dans cette attente, une autorisation provisoire de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- la loi n° 2020-1379 du 14 novembre 2020 autorisant la prorogation de l'état d'urgence sanitaire ;

- le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Jean-François Papin, premier conseiller, a été entendu, au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme B... C..., ressortissante du Cap-Vert née le 14 novembre 1962, est entrée en France le 1er février 2007, selon ses déclarations. Ayant rencontré des difficultés de santé, elle a obtenu, le 30 janvier 2015, une carte de séjour temporaire, qui a été renouvelée jusqu'au 29 décembre 2018, afin de se soigner en France. Par un arrêté du 19 juillet 2019, le préfet de l'Oise a refusé de renouveler ce titre, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de quatre-vingt-dix jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourrait être reconduite d'office. Mme B... C... relève appel du jugement du 22 novembre 2019 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à l'annulation, pour excès de pouvoir, de cet arrêté et à ce qu'il soit enjoint, sous astreinte, au préfet de l'Oise de lui délivrer le titre sollicité ou, à défaut, de procéder à un nouvel examen de sa situation après l'avoir mise en possession d'une autorisation provisoire de séjour.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : / (...) / 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. (...) La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. (...) ".

3. Il ressort des pièces du dossier que le préfet de l'Oise, pour refuser d'accorder à Mme B... C... le renouvellement de la carte de séjour temporaire qui lui avait été précédemment délivrée pour raisons médicales, s'est fondé, notamment, sur un avis émis le 4 juin 2019 par le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. Il ressort des mentions de cet avis, versé au dossier par le préfet de l'Oise, que le collège de médecins a estimé que, si l'état de santé de Mme B... C... continuait de rendre nécessaire une prise en charge médicale et si le défaut de celle-ci pourrait entraîner pour l'intéressée des conséquences d'une exceptionnelle gravité, l'intéressée, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont elle est originaire, peut effectivement y bénéficier d'un traitement approprié à son état de santé.

4. Il ressort des pièces du dossier et, notamment, d'un certificat médical établi le 30 janvier 2020 par un médecin exerçant au groupe hospitalier public du Sud de l'Oise, que Mme B... C... a développé, en avril 2013, un cancer du sein droit ayant rendu nécessaire une mammectomie totale et une hormonothérapie, ainsi que la pose d'une prothèse mammaire. A la date à laquelle le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration s'est prononcé sur la situation de l'intéressée, Mme B... C... continuait de faire l'objet d'une surveillance médicale régulière afin de prévenir les risques de récidive. Or, il ressort des pièces du dossier qu'une récidive du cancer mammaire au niveau de deux ganglions axillaires droits a été mise en évidence, dans le cadre de cette surveillance, en juin 2019, et que cette situation a rendu nécessaire une nouvelle intervention chirurgicale pratiquée sur Mme B... C... le 6 septembre 2019, comme le confirment les pièces médicales qu'elle verse au dossier, ainsi que la mise en place d'une cure de chimiothérapie hormonale et d'une surveillance renforcée.

5. Il ne ressort pas des pièces du dossier, et il n'est d'ailleurs pas allégué par l'autorité préfectorale, que le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration aurait eu connaissance, à la date à laquelle il a émis son avis, de l'évolution récente de l'état de santé de Mme B... C..., telle qu'elle a été décrite au point 4, ni, par suite, que le collège de médecins aurait tenu compte, pour estimer que l'intéressée pouvait bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine, non seulement des capacités du système de santé de ce pays à proposer des protocoles de surveillance aux patientes devant faire l'objet d'un suivi postopératoire afin de prévenir une récidive du cancer du sein, mais aussi de la possibilité pour Mme B... C..., eu égard à l'offre de soins oncologiques existant dans son pays, de bénéficier d'une prise en charge appropriée par le système hospitalier, en chirurgie et en chimiothérapie, compte tenu de l'évolution défavorable de son état de santé. Par suite, pour refuser de renouveler le titre de séjour de Mme B... C..., le préfet de l'Oise doit être tenu comme s'étant mépris dans l'appréciation de la situation qui était celle de l'intéressée, et dont il n'est pas établi qu'il en aurait eu connaissance à la date à laquelle il s'est prononcé, au regard des dispositions précitées du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Il suit de là que la décision de refus de séjour doit, pour ce motif, être annulée et qu'il doit en être de même, par voie de conséquence, des autres décisions contenues dans l'arrêté du 19 juillet 2019 du préfet de l'Oise.

6. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que Mme B... C... est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 19 juillet 2019 du préfet de l'Oise.

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

7. Le présent arrêt, qui annule le refus de renouvellement du titre de séjour de Mme B... C... au motif qu'il est entaché d'une erreur d'appréciation, implique nécessairement, sous réserve d'un changement des circonstances de droit ou de fait, que le renouvellement de son titre de séjour soit accordé à l'intéressée. Par suite, il y a lieu d'enjoindre au préfet de l'Oise, sous réserve que des circonstances de droit ou de fait nouvelles n'y fassent pas obstacle, de procéder à ce renouvellement, dans le délai de deux mois à compter de la date de notification du présent arrêt. En revanche, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'assortir cette injonction d'une astreinte.

Sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

8. D'une part, Mme B... C..., pour le compte de qui les conclusions relatives à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être réputées avoir été présentées, n'allègue pas avoir exposé de frais autres que ceux pris en charge par l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle totale qui lui a été allouée. D'autre part, l'avocate de Mme B... C... n'a pas demandé, en invoquant l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, que lui soit versée par l'Etat la somme correspondant aux frais exposés qu'elle aurait réclamée à sa cliente si celle-ci n'avait bénéficié d'une aide juridictionnelle totale. Dans ces conditions, les conclusions de Mme B... C... tendant à ce que soit mise à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1902739 du 22 novembre 2019 du tribunal administratif d'Amiens et l'arrêté du 19 juillet 2019 du préfet de l'Oise sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet de l'Oise, sous réserve que des circonstances de droit ou de fait nouvelles n'y fassent pas obstacle, d'accorder à Mme B... C..., dans le délai de deux mois à compter de la date de notification du présent arrêt, le renouvellement de la carte de séjour temporaire qui lui avait été précédemment délivrée pour raisons de santé.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête et de la demande présentée par Mme B... C... devant le tribunal administratif d'Amiens est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D... B... C..., à Me A... , au ministre de l'intérieur et au préfet de l'Oise.

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N°19DA02830


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 19DA02830
Date de la décision : 17/12/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. Heu
Rapporteur ?: M. Jean-François Papin
Rapporteur public ?: M. Arruebo-Mannier
Avocat(s) : DOGAN

Origine de la décision
Date de l'import : 09/01/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2020-12-17;19da02830 ?
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