Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. F... A... B... et Mme E... A... B..., son épouse, ont demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler le titre exécutoire émis à leur encontre le 30 mai 2016 par le conservatoire à rayonnement régional de musique de Rouen pour avoir paiement de la somme de 352 euros représentant les frais de scolarité de leur fille en classe à horaires aménagés au titre de l'année 2015/2016.
Par un jugement n° 1602541 du 19 décembre 2017, le tribunal administratif de Rouen a annulé ce titre exécutoire, rejeté l'appel en garantie formé par la commune de Rouen contre l'Etat et mis à la charge de la commune de Rouen le versement de la somme de 1 200 euros à M. et Mme A... B... sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 27 février 2018, la commune de Rouen, représentée par Me D..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) de rejeter la demande de M. et Mme A... B... ;
3°) à titre subsidiaire, d'appeler en garantie l'Etat, sur le fondement de l'article L. 211-8 du code de l'éducation, à supporter les frais de scolarité mis en recouvrement par le titre exécutoire du 30 mai 2016 ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'éducation ;
- l'arrêté du 31 juillet 2002 relatif aux classes à horaires aménagés pour les enseignements artistiques renforcés destinés aux élèves des écoles et des collèges ;
- le décret n° 2020-1404 du 18 novembre 2020 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Binand, président-assesseur,
- les conclusions de M. Arruebo-Mannier, rapporteur public,
- et les observations de Me C..., représentant la commune de Rouen.
Considérant ce qui suit :
1. La commune de Rouen relève appel du jugement du 19 décembre 2017 par lequel le tribunal administratif de Rouen, d'une part, a annulé le titre exécutoire d'un montant de 352 euros émis à l'encontre M. et Mme A... B..., le 30 mai 2016, à raison des frais de scolarité de leur fille inscrite pour l'année 2015/2016 auprès du conservatoire à rayonnement régional de Rouen dans le cadre d'une classe à horaires aménagés d'enseignement musical renforcé au sein de l'école Michelet, d'autre part, a rejeté l'appel en garantie formé par la commune contre l'Etat pour obtenir le paiement de ces frais, enfin, a mis à la charge de la commune le versement d'une somme de 1 200 euros à M. et Mme A... B... sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. En premier lieu, la commune de Rouen fait valoir que le rapporteur public n'a pas exposé, dans les conclusions qu'il a prononcées au cours de l'audience publique, son opinion sur le sort qu'il convenait de réserver à l'appel en garantie qu'elle avait présenté à l'encontre de l'Etat. Toutefois, cette circonstance, à la supposer établie, n'est pas, par elle-même, de nature à entacher le jugement attaqué d'une irrégularité, alors, par ailleurs, qu'il n'est pas allégué que la commune de Rouen n'aurait pas été mise à même de connaître, avant l'audience, le sens des conclusions du rapporteur public sur cette demande, en méconnaissance des prescriptions de l'article R. 711-3 du code de justice administrative.
3. En second lieu, il résulte des motifs du point 6 du jugement attaqué que, pour rejeter l'appel en garantie présenté par la commune de Rouen, les premiers juges ont indiqué que celle-ci ne précisait pas le fondement légal d'une telle action. Par cette rédaction, les premiers juges ont apporté une réponse suffisamment motivée aux conclusions d'appel en garantie dont ils étaient saisis par la commune de Rouen. Par suite, celle-ci n'est pas fondée à soutenir que le jugement attaqué est entaché d'une irrégularité à ce titre.
Sur le motif d'annulation retenu par les premiers juges :
4. Pour annuler le titre de recettes émis à l'encontre de M. et de Mme A... B..., le tribunal administratif s'est fondé sur ce que l'obligation de payer les frais de scolarité de leur fille était privée de fondement légal du fait de l'illégalité de la délibération du 6 juillet 2015 du conseil municipal de la commune de Rouen fixant la tarification de l'enseignement musical dispensé par le conservatoire à rayonnement régional dans le cadre des classes à horaires aménagés.
5. Aux termes de l'article L. 132-1 du code de l'éducation, dans sa rédaction applicable : " L'enseignement public dispensé dans les écoles maternelles et les classes enfantines et pendant la période d'obligation scolaire définie à l'article L. 131-1 est gratuit. ". Aux termes de l'article L. 312-6 de ce code : " Des enseignements artistiques obligatoires sont dispensés dans les écoles élémentaires et les collèges (...). / Ces enseignements comportent au moins un enseignement de la musique et un enseignement des arts plastiques. Ils ont pour objet une initiation à l'histoire des arts et aux pratiques artistiques. / (...) ". Enfin, l'article 1er de l'arrêté du 31 juillet 2002 relatif aux classes à horaires aménagés pour les enseignements artistiques renforcés destinés aux élèves des écoles et des collèges dispose : " Des classes à horaires aménagés peuvent être organisées dans les écoles élémentaires et les collèges afin de permettre aux élèves de recevoir, dans le cadre des horaires et programmes scolaires, un enseignement artistique renforcé. / (...) / Cet enseignement est dispensé avec le concours des conservatoires nationaux de régions, écoles nationales de musique et de danse, écoles municipales agréées gérés par les collectivités territoriales, ainsi que des institutions ou associations ayant passé une convention nationale avec le ministère chargé de la culture. (...) ".
6. Ainsi que les premiers juges l'ont relevé à juste titre, il résulte des dispositions précitées du code de l'éducation et de l'article 1er de l'arrêté du 31 juillet 2002 que l'enseignement artistique renforcé dont bénéficient les élèves inscrits en classe à horaires aménagés constituent un enseignement organisé et assuré dans le cadre de la scolarité obligatoire de ces élèves. Dès lors, alors même qu'il est dispensé avec le concours des conservatoires ou de certaines écoles de musique gérés par les collectivités territoriales et que ces dernières n'ont pas l'obligation de fournir une telle formation, cet enseignement artistique renforcé doit respecter le principe de gratuité. Par suite, la commune de Rouen n'a pu, sans méconnaître ce principe, instituer, par la délibération de son conseil municipal en date du 6 juillet 2015, des droits de scolarité au bénéfice du conservatoire à rayonnement régional de Rouen pour les élèves inscrits en classes à horaires aménagés, ni, en conséquence, mettre à la charge de M. et Mme A... B..., par le titre exécutoire contesté, la somme de 352 euros au titre de la scolarité suivie par leur fille durant l'année 2015/2016 dans la classe à horaires aménagés relevant de l'école Michelet.
Sur l'appel en garantie :
7. Ni le présent arrêt ni le jugement attaqué ne prononcent de condamnation à l'encontre de la commune de Rouen, Dès lors, en tout état de cause, l'appel en garantie présenté par la commune de Rouen à l'encontre de l'Etat, en première instance comme en appel, ne peut qu'être rejeté.
8. Il résulte de tout ce qui précède que la commune de Rouen n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement du 19 décembre 2017, le tribunal administratif de Rouen a annulé le titre exécutoire émis le 30 mai 2016 et a rejeté son appel en garantie contre l'Etat. Par suite, la requête de la commune de Rouen doit être rejetée en toutes ses conclusions, y compris celles aux fins d'appel en garantie réitérées en cause d'appel ainsi que celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. En revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune de Rouen le versement d'une somme de 1 500 euros à M. et Mme A... B..., sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la commune de Rouen est rejetée.
Article 2 : La commune de Rouen versera une somme de 1 500 euros à M. et Mme A... B... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Rouen, à M. F... A... B... et Mme E... A... B... et au ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports.
N°18DA00435 2