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05/11/2020 | FRANCE | N°18DA02673

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 4ème chambre, 05 novembre 2020, 18DA02673


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société à responsabilité limitée (SARL) Luxant Security Grand Ouest a demandé au tribunal administratif de Lille de prononcer la décharge de la majoration pour manquement délibéré d'un montant de 74 348 euros dont a été assorti le rappel de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période comprise entre le 1er janvier 2011 et le 31 décembre 2011.

Par un jugement n° 1605930 du 26 octobre 2018, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande.

Procédure devan

t la cour :

Par une requête enregistrée le 29 décembre 2018, l'entreprise unipersonnelle à r...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société à responsabilité limitée (SARL) Luxant Security Grand Ouest a demandé au tribunal administratif de Lille de prononcer la décharge de la majoration pour manquement délibéré d'un montant de 74 348 euros dont a été assorti le rappel de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période comprise entre le 1er janvier 2011 et le 31 décembre 2011.

Par un jugement n° 1605930 du 26 octobre 2018, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 29 décembre 2018, l'entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée (EURL) Luxant Group, venue aux droits de la SARL Luxant Security Grand Ouest, représentée par Me A..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de prononcer la décharge de la majoration pour manquement délibéré d'un montant de 74 348 euros dont a été assorti le rappel de taxe sur la valeur ajoutée mis à la charge de la SARL Luxant Security Grand Ouest au titre de la période comprise entre le 1er janvier 2011 et le 31 décembre 2011 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Binand, président-assesseur,

- et les conclusions de M. Arruebo-Mannier, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. La société à responsabilité (SARL) Luxant Security Grand Ouest a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur la période comprise entre le 1er janvier 2011 et le 31 décembre 2013. A l'issue des opérations de contrôle, l'administration a mis à la charge de cette société des rappels de taxe sur la valeur ajoutée assortis de pénalités. Par un jugement du 26 octobre 2018, dont l'entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée (EURL) Luxant Group, venant aux droits de la SARL Luxant Security Grand Ouest, relève appel, le tribunal administratif de Lille a rejeté la demande de cette société tendant à la décharge de la majoration pour manquement délibéré d'un montant de 74 348 euros dont a été assorti le rappel de taxe sur la valeur ajoutée qui lui est réclamé au titre de la période comprise entre le 1er janvier 2011 et le 31 décembre 2011.

2. En premier lieu, la société requérante soutient que les premiers juges ont insuffisamment motivé le jugement attaqué en ne mentionnant pas qu'il incombe à l'administration d'apporter la preuve du caractère délibéré des manquements reprochés au contribuable pour la mise en oeuvre des dispositions de l'article 1729 du code général des impôts. Toutefois, au point 3 de ce jugement le tribunal a, tout d'abord, exposé de manière détaillée les éléments sur lesquels l'administration s'est fondée pour infliger la majoration de 40 % prévue par ces dispositions ainsi que les motifs pour lesquels il y avait lieu d'écarter les arguments avancés en sens contraire par le contribuable. Les premiers juges ont, dans un second temps, indiqué que l'administration, en faisant état de ces éléments qui révélaient un manquement systématique et répété de la société à ses obligations déclaratives, établissait le caractère intentionnel des manquements reprochés. Ainsi, par cette rédaction, dont il ressort clairement que la charge de la preuve du caractère délibéré des manquements reprochés à la société incombe à l'administration, le tribunal a suffisamment explicité les règles de dévolution de la preuve dont il a fait application, qui correspondent d'ailleurs à celles dont la demanderesse se prévalait expressément. Il s'ensuit que le jugement attaqué n'est entaché d'aucune irrégularité à ce titre.

3. En deuxième lieu, il résulte de la motivation des propositions de rectification reçues par la société Luxant Security Grand Ouest que l'administration a retenu des éléments de fait propres à la situation de cette société pour relever le caractère intentionnel des manquements aux obligations déclaratives sur lesquels elle s'est fondée pour faire application des majorations contestées. Ainsi, le vérificateur a relevé la minoration systématique par cette société de la base assujettie à la taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période redressée, la connaissance de cette minoration au regard des éléments comptables dont la société disposait, la réitération de ces manquements déjà constatés lors d'un précédent contrôle, leur importance au regard du chiffre d'affaires et, enfin, la nature des dépenses au titre desquelles la société a pratiqué à tort une déduction de la taxe. Dès lors, le moyen tiré de ce que l'administration a méconnu les dispositions du a. de l'article 1729 du code général des impôts en infligeant la pénalité pour manquement délibéré qu'elles prévoient sans prendre en considération les circonstances propres à la société, manque en fait et doit être écarté.

4. En troisième lieu, la circonstance que le contribuable s'est acquitté spontanément des droits précédemment éludés n'exclut pas l'absence de bonne foi. En outre, les dispositions de l'article 1729 du code général des impôts n'opèrent aucune distinction selon que les inexactitudes, omissions ou insuffisances d'une déclaration sont corrigées à l'initiative du contribuable ou à la suite d'un contrôle. En conséquence, la société requérante ne peut utilement se prévaloir des versements de taxe qui ont été effectués avant l'envoi de l'avis de vérification de comptabilité mais après la période au titre de laquelle la taxe était exigible, pour soutenir qu'il ne pouvait être fait application par l'administration de la pénalité prévue au a. de l'article 1729 du code général des impôts.

5. En quatrième lieu, l'intérêt de retard institué par les dispositions de l'article 1727 du code général des impôts vise essentiellement à réparer les préjudices de toute nature subis par l'Etat à raison du non-respect par les contribuables de leurs obligations de déclarer et payer l'impôt aux dates légales et ne revêt pas la nature d'une sanction, dès lors que son niveau n'est pas devenu manifestement excessif au regard du taux moyen pratiqué par les prêteurs privés pour un découvert non négocié. Au contraire, la majoration de 40 % prévue par les dispositions du a. de l'article 1729 du code général des impôts présente le caractère d'une sanction qui, visant à assurer l'égalité devant les charges publiques, à améliorer la prévention et à renforcer la répression des insuffisances volontaires de déclaration de base d'imposition ou des éléments servant à la liquidation de l'impôt, n'est pas manifestement disproportionnée. Il s'ensuit que l'EURL Luxant Group n'est pas fondée à soutenir que l'administration, en assortissant les rappels de droit non seulement de l'intérêt de retard mais aussi de la majoration pour manquement délibéré de 40 %, a sanctionnée doublement la SARL Luxant Security Grand Ouest pour les mêmes faits ou a infligé à celle-ci une sanction disproportionnée aux buts que le législateur a poursuivis en instituant cette sanction. Elle ne peut davantage se prévaloir utilement des conséquences préjudiciables à la poursuite même de son activité que le montant des pénalités mises à sa charge emporterait et dont, au demeurant, elle ne justifie pas.

6. En cinquième et dernier lieu, pour établir le caractère intentionnel du manquement de la SARL Luxant Security Grand Ouest à ses obligations déclaratives, l'administration a retenu que cette société avait, d'une part, minoré son chiffre d'affaires à hauteur de 37 % de la base imposable en 2011, d'autre part, majoré ses droits à déduction alors qu'elle ne pouvait ignorer les règles d'exigibilité et de déductibilité de la taxe sur la valeur ajoutée qui lui avaient été rappelées lors d'un précédent contrôle, qu'elle ne portait pas dans ses écritures comptables la liquidation mensuelle de ses déclarations de taxe sur la valeur ajoutée et qu'elle s'était contentée de fournir au vérificateur un cadrage effectué, pour chaque exercice, en avril de l'année suivante, sans présenter aucun document de travail à l'appui de ses déclarations. Ainsi, en faisant état du caractère systématique des insuffisances déclaratives, réitérées durant plusieurs années, quand bien même les minorations concernant l'année 2011 ont été spontanément régularisées par la SARL Luxant Security Grand Ouest avant le début des opérations de contrôle, l'administration doit être regardée comme établissant le caractère délibéré des manquements relevés. C'est dès lors à bon droit, ainsi que les premiers juges l'ont relevé, que la pénalité de 40 % prévue par les dispositions du a. de l'article 1729 du code général des impôts a été appliquée.

7. Il résulte de tout ce qui précède que l'EURL Luxant Group n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté la demande de la SARL Luxant Security Grand Ouest tendant à la décharge des majorations qui lui ont été assignées sur le fondement des dispositions du a. de l'article 1729 du code général des impôts. Par suite, sa requête doit être rejetée en toutes ses conclusions, y compris celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de l'EURL Luxant Group est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à l'entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée Luxant Group et au ministre délégué chargé des comptes publics.

Copie en sera transmise à l'administrateur général des finances publiques chargé de la direction spécialisée de contrôle fiscal Nord.

2

N°18DA02673


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 18DA02673
Date de la décision : 05/11/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-01-04-03 Contributions et taxes. Généralités. Amendes, pénalités, majorations. Pénalités pour manquement délibéré (ou mauvaise foi).


Composition du Tribunal
Président : M. Heu
Rapporteur ?: M. Christophe Binand
Rapporteur public ?: M. Arruebo-Mannier
Avocat(s) : CABINET ERIC GARDIN et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 20/11/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2020-11-05;18da02673 ?
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