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08/10/2020 | FRANCE | N°18DA01167

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3ème chambre, 08 octobre 2020, 18DA01167


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La commune de Roubaix a demandé au tribunal administratif de Lille de condamner la société Balcia Insurance SE à lui verser la somme de 694 588 euros toutes taxes comprises, assortie des intérêts au taux légal, capitalisés.

Par un jugement n° 1506584 du 3 avril 2018, le tribunal administratif de Lille a condamné la société Balcia Insurance SE à verser la somme de 375 461,46 euros à la commune de Roubaix.

Procédure devant la cour :

Par une requête et deux mémoires, enregistrés

le 7 juin 2018, le 28 mai 2019 et le 27 mars 2020, la société Balcia Insurance SE, représentée par...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La commune de Roubaix a demandé au tribunal administratif de Lille de condamner la société Balcia Insurance SE à lui verser la somme de 694 588 euros toutes taxes comprises, assortie des intérêts au taux légal, capitalisés.

Par un jugement n° 1506584 du 3 avril 2018, le tribunal administratif de Lille a condamné la société Balcia Insurance SE à verser la somme de 375 461,46 euros à la commune de Roubaix.

Procédure devant la cour :

Par une requête et deux mémoires, enregistrés le 7 juin 2018, le 28 mai 2019 et le 27 mars 2020, la société Balcia Insurance SE, représentée par Me D... B..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de rejeter les demandes de la commune de Roubaix ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Roubaix la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'action sociale et des familles ;

- le code des assurances ;

- l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Denis Perrin, premier conseiller,

- les conclusions de M. Hervé Cassara, rapporteur public,

- et les observations de Me D... B... pour la société Balcia Insurance SE et de Me A... C... pour la commune de Roubaix.

Considérant ce qui suit :

1. La commune de Roubaix a souscrit à compter du 1er janvier 2014, un contrat d'assurance : " dommages aux biens et risques annexes " auprès de la société BTA Insurance Company, à laquelle s'est substituée la société Balcia Insurance SE. Le centre social des trois ponts, bâtiment communal, a fait l'objet de deux incendies successifs le 17 avril 2014 puis le 1er mai 2014. La commune a déclaré ces sinistres à son assureur, respectivement les 18 avril et 6 mai 2014. En raison d'un désaccord sur l'indemnisation des dommages et notamment sur la franchise, la commune de Roubaix a saisi le tribunal administratif de Lille de conclusions indemnitaires. La société Balcia Insurance SE relève appel du jugement du 3 avril 2018 par lequel ce tribunal l'a condamnée à verser la somme de 375 461,46 euros à la commune de Roubaix.

Sur l'application d'une franchise :

2. Le contrat souscrit par la commune de Roubaix couvre " l'ensemble des bâtiments et biens dont la collectivité est propriétaire, locataire et/ou occupante à quelque titre que ce soit " et pour " toutes activités de la collectivité ". Le point 1 du titre B de ce contrat prévoit que les événements couverts concernent notamment " incendie-chute de la foudre-explosion ". Aux termes du point 3.1 du même titre de ce contrat : " Nonobstant toute autre clause, il est convenu que les franchises appliquées sont les suivantes : Sur tous les risques autres que ceux-ci-après : 20 000 euros / (...) / incendie criminel, vandalisme, EMVT, attentat : 400 000 euros. / Franchise : 20% du montant des dommages en cas d'incendie-explosion, attentat, vandalisme, minimum 50 000 euros pour les gymnases, salles des fêtes, centres médico-sociaux, écoles, crèches, haltes garderies et les bâtiments inoccupés ou occupés illégalement " et aux termes du point 3.2 dudit contrat : " Les franchises s'appliquent par événement, ... ".

3. En l'espèce, la société Balcia Insurance SE soutient, en se fondant sur les conclusions de l'expert qu'elle a missionné, que, compte tenu de la franchise de 400 000 euros, aucune indemnisation n'est due pour le premier incident et que l'indemnisation due pour le second doit être réduite du montant de cette franchise. Toutefois, la combinaison des dispositions précitées implique que, pour certains types de bâtiments, la franchise de 400 000 euros ne s'applique pas et que dans ce cas, il s'agit d'une franchise de 20% du montant des dommages avec un montant minimum de 50 000 euros. Si l'assureur entend soutenir que cette dérogation ne s'applique pas aux incendies criminels tels que ceux de l'espèce, les conditions particulières doivent être interprétées, compte tenu des autres mentions précitées du contrat, en ce sens que la franchise proportionnelle s'applique à tous les types d'incendie pour certains types de bâtiments, le terme " incendie-explosion " ne pouvant se limiter aux incendies avec explosion. Au surplus, les sinistres qui ont été qualifiés pénalement de dégradations de biens, peuvent aussi être considérés comme des actes de vandalisme, qui sont également couverts par la franchise proportionnelle. Le deuxième sinistre a d'ailleurs été déclaré sous cette dénomination par la commune de Roubaix.

4. Par ailleurs, la société Balcia Insurance SE soutient que le bâtiment n'était pas un centre médico-social, et que par suite, la franchise proportionnelle ne s'appliquait pas. Si cette société précise que la distinction entre les centres sociaux et les centres médico-sociaux a toute sa portée en matière d'assurance, un centre médico-social étant moins sujet à risque qu'un centre social en raison de son encadrement médicalisé, le contrat ne comprend aucune définition de ces catégories de bâtiments et de ceux auxquels s'applique la franchise proportionnelle. Chacune de ces catégories doit donc être comprise comme définie de manière générique. L'article L. 312-1 du code de l'action sociale et des familles, dont se prévaut la société Balcia Insurance SE ne permet pas plus de donner une portée utile à cette définition puisqu'il se borne à faire référence aux " établissements et services sociaux et médico-sociaux " sans différencier ces deux catégories, ni donner les caractéristiques de chacune. Par ailleurs, le bâtiment sinistré est mentionné dans l'annexe au contrat qui prenait effet à compter du 1er janvier 2014, quelques mois avant le sinistre comme " centre social-protection maternelle et infantile ". Or le point 2.15 du titre C des clauses particulières du contrat dispense la collectivité de déclarer un changement dans la construction ou l'affectation d'un bâtiment et l'article 2.14 du même titre prévoit que l'assureur reconnaît " avoir une connaissance suffisante des risques et renonce à se prévaloir de toute déclaration supplémentaire, tant sur l'état que sur les modifications que la collectivité peut apporter aux bâtiments ou à leur affectation ". La commune fait également valoir que des actions de prévention santé ont lieu au sein du centre, ce qui suffit à considérer que des activités médicales au sens du code de la santé publique s'y exerçaient. Compte tenu de l'ensemble de ces éléments, la société Balcia Insurance SE n'est pas fondée à soutenir que le centre social des trois ponts ne relèverait pas de la catégorie des centres médico-sociaux auxquelles s'applique la franchise proportionnelle. Par suite, la société Balcia Insurance SE n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Lille, qui n'a pas inversé la charge de la preuve en la matière, prenant en compte les arguments et les pièces des deux parties, a exclu l'application d'une franchise de 400 000 euros pour chacun des deux sinistres ayant affecté le centre social des trois ponts.

Sur la prise en compte de la taxe sur la valeur ajoutée dans l'indemnisation :

5. Aux termes du point 2.11 du titre C des conditions particulières du contrat d'assurance : " le remboursement des sinistres se fera taxe sur la valeur ajoutée comprise, l'intervention du fonds de compensation de la taxe sur la valeur ajoutée n'étant pas considérée comme un remboursement de taxe sur la valeur ajoutée ". Le point 2.1 du titre B prévoit, par ailleurs, que les garanties sont " à concurrence du montant des dommages, honoraires d'architecte compris. ". Enfin, l'article 13 des conditions générales, auxquelles les conditions particulières ne dérogent pas, prévoit que les dommages aux bâtiments sont évalués " d'après leur valeur au prix de reconstruction, au jour du sinistre, vétusté déduite, honoraires d'architecte compris ".

6. En l'espèce, il résulte de l'instruction que l'expert de la compagnie d'assurance a fixé le montant des dommages selon les principes indiqués au point 5. La commune de Roubaix avait donc droit à une indemnisation toutes taxes comprises, ainsi que l'a jugé le tribunal administratif. Si la société Balcia Insurance SE soutient que l'absence de reconstruction du centre social entraîne un enrichissement de la collectivité puisque celle-ci n'a ainsi pas payé de taxe sur la valeur ajoutée, cette circonstance ne suffit pas à démontrer que l'indemnisation fixée par les premiers juges dépasse " le montant de la valeur de la chose assurée au moment du sinistre " ainsi que le proscrit l'article L. 121-1 du code des assurances dont se prévaut l'assureur. Au surplus, l'enrichissement sans cause de la commune n'est pas démontré, celle-ci étant libre d'utiliser l'indemnisation au titre de garantie d'assurance et ayant d'une part, engagé des frais pour le fonctionnement des activités hébergées antérieurement dans le centre social des trois ponts durant sa fermeture suite aux incendies et d'autre part, finalement construit un centre social à un autre endroit en substitution du bâtiment endommagé.

7. Il résulte de tout ce qui précède que la société Balcia Insurance SE n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille l'a condamnée à verser à la commune de Roubaix la somme de 375 461,46 euros. Par suite, sa requête doit être rejetée, y compris ses conclusions au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il y a lieu en revanche, dans les circonstances de l'espèce de mettre à la charge de cette société la somme de 1 500 euros à verser à la commune de Roubaix, sur le fondement des mêmes dispositions

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la société Balcia Insurance SE est rejetée.

Article 2 : La société Balcia Insurance SE versera, à la commune de Roubaix, une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société Balcia Insurance SE et à la commune de Roubaix.

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N°18DA01167

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N°"Numéro"


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 18DA01167
Date de la décision : 08/10/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Assurance et prévoyance - Contrats d'assurance.

Marchés et contrats administratifs - Exécution financière du contrat - Rémunération du co-contractant.


Composition du Tribunal
Président : Mme Borot
Rapporteur ?: M. Denis Perrin
Rapporteur public ?: M. Cassara
Avocat(s) : SELARL HENRI ABECASSIS

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2020-10-08;18da01167 ?
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