Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. D... B... a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 1er octobre 2019 par lequel le préfet de la Seine-Maritime a rejeté sa demande de titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être renvoyé à l'expiration de ce délai, d'enjoindre au préfet de la Seine-Maritime de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ", dans un délai d'un mois à compter de la notification du jugement à intervenir et sous astreinte de 100 euros par jour de retard ; à titre subsidiaire, d'enjoindre au préfet de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans l'attente du réexamen de sa situation, dans un délai de huit jours à compter de la notification du jugement à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard et de mettre à la charge de l'Etat au bénéfice de la SELARL Eden avocats la somme de 1 500 euros en application de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; à défaut, de mettre cette somme à son propre bénéfice en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Par un jugement n°1904554 du 5 mars 2020, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 16 mars 2020, M. D... B..., représenté par Me C..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 1er octobre 2019 par lequel le préfet de la Seine-Maritime a rejeté sa demande de titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être renvoyé à l'expiration de ce délai ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Seine-Maritime de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ", dans un délai d'un mois à compter de la notification du jugement à intervenir et sous astreinte de 100 euros par jour de retard ; à titre subsidiaire, d'enjoindre au préfet de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans l'attente du réexamen de sa situation, dans un délai de huit jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de lui accorder le bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire ;
5°) de mettre à la charge de l'Etat, au bénéfice de Me C..., son conseil, la somme de 1 500 euros en application de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; à titre subsidiaire, de mettre cette somme à son propre bénéfice, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour des ressortissants algériens et de leurs familles ;
- code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative .
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Le rapport de M. Marc Lavail Dellaporta, président-assesseur, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., ressortissant algérien, déclare être entré sur le territoire français en 2001 et s'y être maintenu depuis lors. Il a fait l'objet d'arrêtés portant refus de séjour et obligation de quitter le territoire les 21 juin 2007, 26 mai 2012 et 17 juin 2016, les deux derniers ayant été assortis d'interdictions de retour sur le territoire d'une durée de deux ans. Le 10 janvier 2019, il a présenté une demande de titre de séjour sur le fondement du 1° de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968. Il relève appel du jugement du 5 mars 2020 par lequel le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 1er octobre 2019 par lequel le préfet de la Seine-Maritime a rejeté sa demande de délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office.
Sur la demande d'admission provisoire à l'aide juridictionnelle :
2. Le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ayant été accordé à M. B... par une décision du 2 juillet 2020, ses conclusions tendant au bénéfice de l'aide juridictionnelle à titre provisoire sont devenues sans objet.
Sur les moyens communs aux décisions en litige :
3. Les décisions en litige comportent l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement et qui permettent à M. B... de les discuter et au juge de les contrôler. Elles sont donc suffisamment motivées au regard des exigences de l'article L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation doit être écarté.
4. Il ne ressort pas non plus des pièces du dossier et des motifs qui fondent les décisions en litige que le préfet de la Seine-Maritime se serait abstenu de procéder à l'examen sérieux et approfondi de la situation personnelle de M. B....
Sur le refus de titre de séjour :
5. Aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 : " Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : / 1. Au ressortissant algérien, qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans ou plus de quinze ans si, au cours de cette période, il a séjourné en qualité d'étudiant ".
6. Par les pièces qu'il a produites aussi bien en appel qu'en première instance, M. B... ne justifie pas du caractère habituel de sa présence sur le territoire Français depuis plus de dix ans. Ainsi, M. B... verse, pour l'année 2013, des avis de dépôt de lettre recommandée, trois avis de réception de lettre recommandée, dont deux sont à son nom patronymique, deux promesses d'embauche datées des 10 janvier et 25 février 2013, des courriers de son avocate et un avis d'imposition pour un montant de zéro euro. Ces pièces, bien que de nature diverse comme il le relève, ne démontrent pas pour autant la réalité de sa présence effective sur le territoire national et sont au demeurant étrangères à la satisfaction des besoins de la vie courante, notamment en matière d'hébergement ou d'accès aux soins médicaux. Si M. B... verse aussi la copie d'un bon de commande du 24 décembre 2013, à son nom, mentionnant des achats emportés sur place, en tout état de cause, ce document dont le caractère probant n'est pas certain, n'atteste pas, à lui seul, du caractère habituel de sa présence en France cette année-là. Au titre de l'année 2016, seuls un récépissé de demande de titre de séjour daté du 20 janvier 2016 et revêtu de sa signature, un courrier de sa banque daté du 19 avril 2016 faisant état d'un rendez-vous prévu le 21 avril suivant et le contrat d'ouverture de livret A signé par lui le 27 avril 2016 pourraient être regardés comme établissant sa présence en France à ces dates, mais ils n'établissent pas pour autant le caractère stable et non ponctuel d'une telle présence durant l'ensemble de l'année. Il en est de même pour l'année 2017, s'agissant des relevés bancaires datés des 20 février et 20 avril, faisant état de retraits d'argent les 6, 9 et 10 février et 30 mars, 31 mars et 1er avril, du bordereau de dépôt de chèque du 15 mars 2017 et d'une ordonnance médicale du 20 octobre 2017, les autres pièces produites, dont le courrier de M E... affirmant sans aucun élément de justification ou précision circonstanciée avoir " hébergé M. B... l'année 2012 et 2017 ", étant dépourvues de caractère probant s'agissant de démontrer sa présence effective en France. La production de simples bordereaux de remise de chèques, en date des 15 mars 2017 et 10 août 2017 n'établit pas non plus sa présence habituelle effective sur le sol français. Il en est de même, pour l'année 2018, s'agissant de la facture postale du 2 janvier 2018 et du document bancaire de " situation au 16 octobre 2018 " revêtu de sa signature, à supposer ces documents suffisamment probants. Enfin, la circonstance que le premier juge a relevé que M. B... n'avait pas justifié de l'exécution d'une mesure d'éloignement prise à son encontre en 2016, après avoir noté que celui-ci ne prouvait pas avoir résidé de manière habituelle en France en 2016, n'est nullement contradictoire comme l'affirme M. B.... Dès lors, la décision contestée du préfet de la Seine-Maritime ne méconnaît pas les stipulations du 1° de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968.
7. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
8. M. B... ne justifie pas de l'ancienneté de sa résidence habituelle sur le territoire français depuis plus de dix ans, ainsi qu'il a été exposé au point 4. S'il affirme avoir vécu au moins plusieurs mois chez sa cousine et sa famille, il ne l'établit nullement par des documents probants. M. B..., qui ne justifie pas de l'intensité et de la stabilité particulière de liens qu'il aurait pu nouer en France à titre privé et familial, est célibataire et sans enfant et il ne ressort pas non plus des pièces du dossier qu'il serait dépourvu d'attaches dans son pays d'origine. Il a en outre déjà fait l'objet de trois précédentes mesures d'éloignement en 2007, 2012 et 2016, qu'il n'a pas exécutées. La production de promesses d'embauche, dont celle émanant du Garage Auto Pro 77, lequel indique pouvoir l'embaucher dès qu'il sera en possession d'un titre de séjour ne suffit pas davantage à caractériser une insertion professionnelle particulière, alors d'ailleurs que cette promesse d'embauche ne précise nullement le nom de son signataire et ne comporte aucun élément permettant d'attester de sa véracité. Bien plus, comme le relève en défense le préfet, la société Auto Pro 77 apparaît comme étant en clôture d'activité pour insuffisance d'actifs, depuis le 2 septembre 2019. Dès lors, les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations précitées et de l'erreur manifeste d'appréciation dont serait entachée la décision en litige doivent être écartés.
Sur l'obligation de quitter le territoire français :
9. Il résulte de ce qui a été dit aux points 2 à 7 que le refus de séjour n'est pas illégal. Par suite, M. B... n'est pas fondé à exciper de son illégalité pour demander l'annulation de l'obligation de quitter le territoire français.
10. Les moyens tirés de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste d'appréciation dont serait entachée la décision en litige doivent être écartés pour les motifs exposés aux points 4 à 7.
Sur la décision fixant le pays de renvoi :
11.Il résulte de ce qui a été dit aux points 8 à 10 que l'obligation de quitter le territoire français n'est pas illégale. Par suite, M. B... n'est pas fondé à exciper de son illégalité pour demander l'annulation de la décision fixant le pays de renvoi.
12. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement du 5 mars 2020, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande. Les conclusions qu'il présente au titre de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991pour son conseil et à titre subsidiaire, de mettre cette somme à son propre bénéfice en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent, par voie de conséquence, être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M.D... B..., au ministre de l'intérieur et à Me A... C....
Copie sera en sera transmise pour information au préfet de la Seine-Maritime.
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N°20DA00494