Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société Almerys a demandé au tribunal administratif d'Amiens d'annuler l'opposition à tiers détenteur n° 13521404231 émise le 6 juin 2016 à son encontre par la trésorerie de Creil Municipale pour obtenir le paiement de la somme de 3 625,92 euros, ramenée à 3 525,06 euros à la suite d'une mainlevée partielle accordée le 6 juillet 2016, ensemble la décision implicite de rejet de son recours gracieux.
Par une ordonnance n° 1700315 du 20 août 2019, le président de la 2ème chambre du tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée 24 octobre 2019, la SAS Almerys, représentée par la SCP Teillot et associés, demande à la cour :
1°) d'annuler cette ordonnance ;
2°) de renvoyer l'affaire devant le tribunal administratif d'Amiens pour qu'il y soit statué.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des collectivités territoriales ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme B... A..., présidente de chambre,
- et les conclusions de Mme Anne-Marie Leguin, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. La société Almerys, qui assure la gestion du tiers payant prévu par les contrats d'assurance complémentaire santé de certaines compagnies d'assurance et organismes mutualistes, relève appel de l'ordonnance par laquelle le président de la 2ème chambre du tribunal administratif d'Amiens a rejeté comme irrecevable sa demande tendant à l'annulation de l'opposition à tiers détenteur émise le 6 juin 2016 par la trésorerie de Creil Municipale pour un montant de 3 525,06 euros correspondant à des dépenses exposées par le groupe hospitalier public du sud de l'Oise restant à la charge des assurés sociaux.
Sur la régularité de l'ordonnance :
2. Aux termes de l'article L. 1617-5 du code général des collectivités territoriales alors applicable : " Les dispositions du présent article s'appliquent également aux établissements publics de santé. 1° En l'absence de contestation, le titre de recettes individuel ou collectif émis par la collectivité territoriale ou l'établissement public local permet l'exécution forcée d'office contre le débiteur. / (...) 2° L'action dont dispose le débiteur d'une créance assise et liquidée par une collectivité territoriale ou un établissement public local pour contester directement devant la juridiction compétente le bien-fondé de ladite créance se prescrit dans le délai de deux mois suivant la réception du titre exécutoire ou, à défaut, du premier acte procédant de ce titre ou de la notification d'un acte de poursuite. / (...) 7° Le recouvrement par les comptables publics compétents des titres rendus exécutoires dans les conditions prévues au présent article peut être assuré par voie d'opposition à tiers détenteur adressée aux personnes physiques ou morales qui détiennent des fonds pour le compte de redevables, qui ont une dette envers lui ou qui lui versent une rémunération. / (...) Les contestations relatives à l'opposition sont introduites et instruites dans les conditions fixées aux 1° et 2° du présent article ". Aux termes de l'article L. 110-1 du code des relations entre le public et l'administration : " Sont considérées comme des demandes au sens du présent chapitre les demandes et les réclamations, y compris les recours gracieux ou hiérarchiques, adressées aux autorités administratives ". Aux termes de l'article L. 112-3 du même code : " Toute demande adressée à l'administration fait l'objet d'un accusé de réception. (...) Les modalités d'application du présent article sont fixées par décret en Conseil d'Etat. ". Aux termes de l'article R. 112-5 du même code : " L'accusé de réception prévu par l'article L. 112-3 comporte les mentions suivantes : 1° La date de réception de la demande et la date à laquelle, à défaut d'une décision expresse, celle-ci sera réputée acceptée ou rejetée (...) Il indique si la demande est susceptible de donner lieu à une décision implicite de rejet ou à une décision implicite d'acceptation. Dans le premier cas, l'accusé de réception mentionne les délais et les voies de recours à l'encontre de la décision. (...) ". Aux termes de L. 112-6 du même code : " Les délais de recours ne sont pas opposables à l'auteur d'une demande lorsque l'accusé de réception ne lui a pas été transmis ou ne comporte pas les indications exigées par la réglementation. Le défaut de délivrance d'un accusé de réception n'emporte pas l'inopposabilité des délais de recours à l'encontre de l'auteur de la demande lorsqu'une décision expresse lui a été régulièrement notifiée avant l'expiration du délai au terme duquel est susceptible de naître une décision implicite. ".
3. Aux termes de l'article R. 421-5 du code de justice administrative : " Les délais de recours contre une décision administrative ne sont opposables qu'à la condition d'avoir été mentionnés, ainsi que les voies de recours, dans la notification de la décision. ".
4. Il résulte de ces dispositions que le recours formé contre un titre exécutoire émis par un établissement public de santé pour assurer le recouvrement des créances qu'il détient à l'encontre de ses usagers, y compris par voie d'opposition à tiers détenteur, doit être présenté, à peine de forclusion, dans un délai de deux mois à compter de la notification régulière de cette décision. Un recours administratif, qu'il soit gracieux ou hiérarchique, s'il est introduit dans le délai du recours contentieux, interrompt ce délai. Les délais de recours contre une telle décision ne sont opposables qu'à la condition d'avoir été mentionnés, soit dans sa notification si la décision est expresse, soit dans l'accusé de réception de la demande l'ayant fait naître si elle est implicite. Il en va ainsi, y compris lorsque la décision, prise à la suite de l'exercice d'un recours hiérarchique ou gracieux qui n'est pas un préalable obligatoire au recours contentieux, ne se substitue pas à la décision qui a fait l'objet de ce recours.
5. En l'espèce, il ne résulte pas de l'instruction qu'antérieurement à l'opposition à tiers détenteur, le groupe hospitalier public du sud de l'Oise aurait notifié régulièrement à la société requérante les titres exécutoires concernant les créances en litige. Il n'est pas davantage établi par les pièces produites par le centre hospitalier que la société Almerys aurait eu connaissance de ces créances plus d'un an avant la notification de l'opposition à tiers détenteur en date du 6 juin 2016, soit le délai raisonnable en l'espèce pour la contester. Cette décision mentionne qu'en cas de litige, il y a lieu, pour la société, de saisir les juridictions administrative ou judiciaire dans les conditions fixées à l'article L. 1617-5 1° et 2° du code général des collectivités territoriales. Une telle mention, alors même que l'intégralité de l'article précité est ensuite reproduite, n'indique pas précisément la juridiction compétente. Ainsi, faute d'avoir indiqué de manière non équivoque, la juridiction compétente pour connaître d'un recours contentieux, dans la notification de la décision expresse du 6 juin 2016, et d'avoir adressé un accusé de réception de la demande ayant fait naître le rejet implicite du recours gracieux formé le 29 juin 2016 par la société Almerys comportant cette même information, le délai prévu par les dispositions précitées de l'article L. 1617-5 du code général des collectivités territoriales n'a pu commencer à courir. En conséquence, la requête de la société Almerys, enregistrée au greffe du tribunal administratif d'Amiens le 13 février 2017, introduite dans un délai raisonnable, n'était pas tardive. Par suite, la société Almerys est fondée à soutenir que c'est à tort que le président de la 2ème chambre du tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa requête comme irrecevable.
6. La société Almerys n'a pas repris devant la cour ses conclusions sur le fond. Ainsi, il y a lieu de la renvoyer devant le tribunal administratif d'Amiens pour y être à nouveau statué sur sa demande.
Sur les frais liés à l'instance :
7. La société Almerys n'est pas partie perdante dans la présente instance. Par conséquent, les conclusions présentées à son encontre par le groupe hospitalier public du sud de l'Oise sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : L'ordonnance n° 1700315 du 20 août 2019 du président de la 2ème chambre du tribunal administratif d'Amiens est annulée.
Article 2 : L'affaire est renvoyée devant le tribunal administratif d'Amiens.
Article 3 : Les conclusions du groupe hospitalier public du sud de l'Oise présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la SAS Almerys, au groupe hospitalier public du sud de l'Oise et à la trésorerie de Creil Municipale.
N°19DA02380 2