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10/07/2020 | FRANCE | N°19DA01440

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 1ère chambre, 10 juillet 2020, 19DA01440


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler les décisions du 2 août 2018 par lesquelles le préfet de l'Eure a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours, et a fixé le pays de destination, d'annuler la décision par laquelle son passeport a été retenu et d'enjoindre au préfet de l'Eure de lui délivrer une carte de séjour temporaire mention " vie privée et familiale " ou, à titre subsidiaire, de lui déli

vrer une autorisation provisoire de séjour et réexaminer sa situation, dans le déla...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler les décisions du 2 août 2018 par lesquelles le préfet de l'Eure a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours, et a fixé le pays de destination, d'annuler la décision par laquelle son passeport a été retenu et d'enjoindre au préfet de l'Eure de lui délivrer une carte de séjour temporaire mention " vie privée et familiale " ou, à titre subsidiaire, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour et réexaminer sa situation, dans le délai d'un mois à compter du jugement à intervenir et sous astreinte de 155 euros par jour de retard

Par un jugement n° 1804631 du 28 février 2019, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 22 juin 2019, M. D..., représenté par Me B... A..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 2 août 2018 ainsi que la décision de retenir son passeport ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Eure de lui délivrer un titre de séjour vie privé et familiale " étranger malade " ou, à défaut, une autorisation provisoire de séjour, et de procéder à un nouvel examen de sa situation dans le délai d'un mois, sous astreinte de 155 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la directive 2008/115/CE du 16 décembre 2008 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif modifiée par les ordonnances n° 2020-405 du 8 avril 2020, n° 2020-427 du 15 avril 2020 et n° 2020-558 du 13 mai 2020 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Jean-Pierre Bouchut, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. D..., ressortissant géorgien, né le 6 juin 1993 et entré en France selon ses déclarations le 1er juin 2015, a sollicité son admission au séjour le 18 septembre 2017 sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en qualité d'étranger malade. Il relève appel du jugement du 28 février 2019 par lequel le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté préfectoral du 2 août 2018 rejetant sa demande de titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans le délai d'un mois et fixant le pays de destination ainsi que de la décision de rétention de son passeport.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Il ressort des pièces du dossier, et notamment des certificats médicaux établis par un psychiatre des hôpitaux et un praticien hospitalier, que l'appelant, atteint d'une certaine déficience intellectuelle, souffre de difficultés d'adaptation, de troubles de sommeil et d'angoisse, ainsi que de troubles de la mémoire et qu'il rencontre des difficultés importantes d'intégration dans la vie ordinaire. Il est entouré en France de sa cousine, de nationalité française, qui l'héberge chez elle et qui veille notamment à sa prise de médicaments en raison de ses troubles de la mémoire, ainsi que de sa tante, également de nationalité française, toutes deux subvenant à ses besoins. Il ressort également des pièces du dossier que son père et sa grand-mère, qui résidaient en Géorgie, sont décédés, que lui-même, sa cousine et sa tante ne savent pas où se trouve sa mère qui l'aurait abandonné en 2006 et que, selon les témoignages de proches, il ne dispose d'aucune autre attache familiale en Géorgie. Il ressort enfin des pièces du dossier que l'intéressé ne peut s'insérer socialement que de manière limitée. Dans les conditions particulières de l'espèce, la décision de refus de titre de séjour est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de M. D....

3. Dès lors, il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que M. D... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande d'annulation de la décision du 2 août 2018 lui refusant un titre de séjour et, par voie de conséquence, des décisions portant obligation de quitter le territoire français, fixant le pays de destination et de rétention du passeport. Il y a lieu, par suite, d'annuler ce jugement et ces décisions.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

4. Eu égard aux motifs de la présente décision, l'exécution de celle-ci implique la délivrance à M. D... d'une carte temporaire de séjour. Dès lors, il y a lieu d'enjoindre au préfet de l'Eure de délivrer à M. D... une carte de séjour temporaire " vie privée et familiale " dans un délai de trois mois à compter de la notification de la présente décision, sans qu'il soit nécessaire de prononcer une astreinte.

Sur les frais liés au litige :

5. M. D... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale. Par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me A..., avocat de M. D..., renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me A... de la somme de 800 euros.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du 28 février 2019 du tribunal administratif de Rouen est annulé.

Article 2 : Les décisions en date du 2 août 2018 par lesquelles le préfet a refusé de délivrer un titre de séjour à M. D..., l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination ainsi que la décision de rétention du passeport sont annulées.

Article 3 : Il est enjoint au préfet de l'Eure de délivrer à M. D... une carte de séjour temporaire " vie privée et familiale " dans un délai de trois mois à compter de la notification de la présente décision.

Article 4 : L'Etat versera à Me A... une somme de 800 euros en application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que Me A... renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.

Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête de M. D... est rejeté.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... D..., au préfet de l'Eure, au ministre de l'intérieur et à Me B... A....

N°19DA01440 4


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 19DA01440
Date de la décision : 10/07/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme Rollet-Perraud
Rapporteur ?: M. Jean-Pierre Bouchut
Rapporteur public ?: M. Minet
Avocat(s) : CABINET DAVID BOYLE

Origine de la décision
Date de l'import : 28/07/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2020-07-10;19da01440 ?
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