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09/07/2020 | FRANCE | N°19DA02112

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3ème chambre, 09 juillet 2020, 19DA02112


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... A... a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 27 novembre 2017 par lequel le maire de la commune de Mont-Saint-Aignan a refusé de reconnaître comme imputable au service, l'accident dont elle a été victime, d'enjoindre à la commune de Mont-Saint-Aignan de régulariser sa situation et de reconnaître l'accident de service comme imputable au service, dans un délai d'un mois à compter de la notification du jugement à intervenir, sous astreinte de 1

000 euros par jour de retard et de mettre à la charge de la commune de Mont-...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... A... a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 27 novembre 2017 par lequel le maire de la commune de Mont-Saint-Aignan a refusé de reconnaître comme imputable au service, l'accident dont elle a été victime, d'enjoindre à la commune de Mont-Saint-Aignan de régulariser sa situation et de reconnaître l'accident de service comme imputable au service, dans un délai d'un mois à compter de la notification du jugement à intervenir, sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard et de mettre à la charge de la commune de Mont-Saint-Aignan, la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1800059 du 16 juillet 2019 le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande et les conclusions présentées par la commune de Mont-Saint-Aignan au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires enregistrés les 9 septembre 2019, 5 février 2020 et 18 février 2020, Mme C... A..., représentée par Me B..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler l'arrêté du 27 novembre 2017 par lequel le maire de la commune de Mont-Saint-Aignan a refusé de reconnaître comme imputable au service l'accident de service dont elle a été victime ;

3°) d'enjoindre à la commune de Mont-Saint-Aignan de régulariser sa situation et de reconnaître l'accident de service comme imputable au service, dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de la commune de Mont-Saint-Aignan la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

5°) de condamner la commune de Mont-Saint-Aignan aux entiers dépens.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 modifiée ;

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 modifiée ;

- le décret n° 87-602 du 30 juillet 1984 ;

- le décret n° 86-442 du 14 mars 1986 ;

- l'arrêté du 4 août 2004 relatif aux commissions de réforme des agents de la fonction publique territoriale et de la fonction publique hospitalière ;

- l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Marc Lavail Dellaporta, président assesseur ;

- et les conclusions de M. Hervé Cassara, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Mme A..., rédactrice principale de 1ère classe titulaire, qui exerçait les fonctions d'assistante de direction au sein du cabinet du maire de la commune de Mont-Saint-Aignan à temps non complet, à hauteur de 80%, a été victime d'une crise d'angoisse, à l'origine d'un malaise sur son lieu de travail, le 6 juin 2017, qu'elle a déclaré le lendemain en tant qu'accident de service. La commission de réforme n'a pas émis d'avis favorable, ni défavorable à la reconnaissance d'un accident de service, en raison d'un partage égal des votes, lors de sa séance du 14 septembre 2017. Par un arrêté du 1er septembre 2017, le maire a accordé à l'intéressée le bénéfice d'un demi-traitement à compter du 23 août 2017, puis, par un arrêté du 21 septembre 2017, il a refusé de reconnaître l'accident du 6 juin 2017 comme imputable au service et a estimé que les arrêts et soins à compter du 6 juin 2017 devaient être pris en charge au titre de la maladie ordinaire. Le 23 octobre 2017, Mme A... a présenté un recours gracieux contre ce dernier arrêté. Par un arrêté du 27 novembre 2017, le maire a retiré son arrêté du 21 septembre 2017 pour reprendre la même décision de refus d'imputabilité au service de l'accident en question. Par un jugement du 16 juillet 2019 le tribunal administratif de Rouen a rejeté les conclusions de Mme A... tendant à l'annulation de cet arrêté et à ce qu'il soit enjoint, à la commune, de reconnaître cet accident comme imputable au service. Mme A... relève appel de ce jugement.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Aux termes de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983, dans sa rédaction issue de l'ordonnance du 19 janvier 2017 entrée en vigueur le 21 janvier 2017 : " (...) / II.- Est présumé imputable au service tout accident survenu à un fonctionnaire, quelle qu'en soit la cause, dans le temps et le lieu du service, dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice par le fonctionnaire de ses fonctions ou d'une activité qui en constitue le prolongement normal, en l'absence de faute personnelle ou de toute autre circonstance particulière détachant l'accident du service. ". Un accident survenu sur le lieu et dans le temps du service, dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice par un fonctionnaire de ses fonctions ou d'une activité qui en constitue le prolongement normal présente ainsi, en l'absence de faute personnelle ou de toute autre circonstance particulière détachant cet évènement du service, le caractère d'un accident de service.

3. Toutefois, contrairement à ce qu'a jugé le tribunal administratif de Rouen, qui s'est au demeurant à tort référé au point 7 de son jugement à un alinéa de l'article 21 bis de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires qui concerne les maladies professionnelles et non les accidents de service, alors qu'est en cause en l'espèce un accident de service, les dispositions nouvelles de l'article 21 bis précité, issues de l'ordonnance n° 2017-53 du 19 janvier 2017 portant diverses dispositions relatives au compte personnel d'activité, à la formation et à la santé et la sécurité au travail dans la fonction publique, sont, en ce qui concerne les accidents de service, applicables au présent litige. A cet égard, la loi nouvelle, en l'absence de disposition spécifique, entre en vigueur le lendemain de sa publication et ce n'est que si l'application de la loi nouvelle est rendue impossible par l'absence de mesures réglementaires d'application que cette entrée en vigueur est reportée à celle de l'entrée en vigueur des mesures réglementaires d'application. Il n'était dès lors pas impossible pour l'administration d'appliquer tout à la fois la définition du II de l'article 21 bis précités et les règles procédurales et modalités d'octroi du congé prévues par les anciennes dispositions réglementaires alors en vigueur, et en particulier celles du décret n° 87-602 du 30 juillet 1987 pris pour l'application de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale et concernant l'organisation des comités médicaux, les conditions d'aptitude physique et le régime des congés de maladie des fonctionnaires territoriaux, en attendant l'entrée en vigueur du décret n° 2019-301 du 10 avril 2019 relatif au congé pour invalidité temporaire imputable au service dans la fonction publique territoriale.

4. Il ressort des pièces du dossier et notamment du compte-rendu d'intervention des services d'urgence, du témoignage de l'un de ses collègues, des termes du rapport d'expertise du docteur Dulieu ainsi que des propres déclarations de Mme A..., qu'elle s'était déjà plainte, dès le mois de janvier 2017, de son état de santé auprès de sa hiérarchie, en raison de sa charge de travail et qu'elle a, pour ce motif, rencontré le médecin de prévention dès le 10 janvier 2017. Elle a demandé à le revoir le 4 mai 2017 et il a alors constaté dans son rapport : " agent en souffrance psychologique. Une étude de ses conditions de travail semble nécessaire (...) ". La directrice générale des services s'est ensuite saisie de la question en indiquant, par un courrier du 17 mai 2017 à Mme A..., qu'elle en avait parlé à plusieurs reprises au maire et au directeur du cabinet et que des propositions de réorganisation du travail lui seraient adressées, en vue de la rentrée de septembre 2017. Le malaise dont a été victime Mme A... le 6 juin 2017 s'inscrit ainsi dans le cadre d'un mal-être dont les premières manifestations tangibles remontent au mois de janvier 2017, soit environ cinq mois avant ce malaise, aucun élément déclencheur soudain ne pouvant l'expliquer. Le docteur Dulieu, qui a examiné Mme A... le 22 juin 2017 à la demande la commune, conclut aussi clairement en ce sens en précisant : " il ne s'agit (...) pas d'un accident mais de l'aboutissement du mal-être au travail ressenti par l'agent ", pour en conclure que " les arrêts et soins à compter du 06/06/2017 ne relèvent pas d'une prise en charge au titre d'un accident de service ". Le malaise de Mme A..., qui ne constitue donc pas un élément déclencheur soudain d'un mal-être ou d'un syndrome anxio-dépressif, s'inscrit dans un processus de souffrance psychologique diffus, déjà en cours depuis plusieurs mois, dont il n'est qu'une manifestation parmi d'autres. Dans ces conditions, lorsque ce malaise est intervenu, cette souffrance psychologique était déjà bien identifiée, tant par Mme A... elle-même que par sa hiérarchie et par le médecin de prévention. Le malaise de Mme A... survenu le 6 juin 2017 ne constitue pas, dès lors, un événement soudain survenu à une date certaine, dont résulterait l'état anxio-dépressif de l'appelante. Pour le reste, à supposer même, par ailleurs, que le processus de souffrance psychologique au long cours dont est affecté Mme A... et dont la réalité médicale n'est pas niée, puisse être qualifié de maladie imputable au service comme elle le soutient, une demande de prise en charge d'une telle maladie n'a pas été soumise au maire par l'appelante. L'arrêté du 27 novembre 2017 en litige, par lequel le maire de la commune de Mont-Saint-Aignan a rejeté la demande de Mme A... de reconnaissance de l'imputabilité au service de l'accident survenu le 6 juin 2017, n'est dès lors pas entaché d'une erreur de droit et d'une erreur d'appréciation, ainsi que l'a jugé à bon droit le tribunal administratif de Rouen.

5. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement du 16 juillet 2019, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

6. L'exécution du présent arrêt n'implique aucune mesure d'exécution. Par suite, les conclusions de Mme A... à fin d'injonction sous astreinte doivent être rejetées.

Sur les frais liés à l'instance :

7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Mont-Saint-Aignan, qui n'est pas la partie perdante, une somme à verser à Mme A... au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme A... le versement, à la commune de Mont-Saint-Aignan, d'une somme au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. La présente instance n'ayant entraîné aucuns dépens, les conclusions présentées par Mme A... au titre de l'article R. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la commune de Mont-Saint-Aignan tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... A... et à la commune de Mont-Saint-Aignan.

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N°19DA02112


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 19DA02112
Date de la décision : 09/07/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-07-10-01 Fonctionnaires et agents publics. Statuts, droits, obligations et garanties. Garanties et avantages divers. Protection en cas d'accident de service.


Composition du Tribunal
Président : M. Albertini
Rapporteur ?: M. Marc Lavail Dellaporta
Rapporteur public ?: M. Cassara
Avocat(s) : SCP CHERRIER BODINEAU

Origine de la décision
Date de l'import : 14/08/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2020-07-09;19da02112 ?
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