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09/07/2020 | FRANCE | N°18DA00717

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3ème chambre, 09 juillet 2020, 18DA00717


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme F... A..., épouse E..., a demandé au tribunal administratif de Lille, par une première requête, d'annuler la décision du 24 novembre 2014 par laquelle l'Institut national de la propriété industrielle l'a licenciée pour inaptitude totale et définitive et de mettre en œuvre une procédure de conciliation. Par une seconde requête, elle a également demandé à ce tribunal, d'annuler la décision du 6 février 2015 par laquelle l'Institut national de la propriété industrielle a rejeté sa demande de s

aisine du comité médical supérieur et la décision du 1er juin 2015 par laquelle il...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme F... A..., épouse E..., a demandé au tribunal administratif de Lille, par une première requête, d'annuler la décision du 24 novembre 2014 par laquelle l'Institut national de la propriété industrielle l'a licenciée pour inaptitude totale et définitive et de mettre en œuvre une procédure de conciliation. Par une seconde requête, elle a également demandé à ce tribunal, d'annuler la décision du 6 février 2015 par laquelle l'Institut national de la propriété industrielle a rejeté sa demande de saisine du comité médical supérieur et la décision du 1er juin 2015 par laquelle il a rejeté son recours gracieux contre la décision du 6 février 2015, d'enjoindre à l'Institut national de la propriété industrielle de saisir ce comité et de mettre en œuvre une procédure de conciliation.

Par un jugement n° 1501065-1506322 du 30 janvier 2018, le tribunal administratif de Lille a annulé les décisions du 24 novembre 2014 et du 6 février 2015 et a rejeté le surplus des conclusions.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 6 avril 2018, l'Institut national de la propriété industrielle (INPI), représenté par Me D..., demande à la cour :

1°) d'annuler les articles 1er, 2, 3 et 5 du jugement du 30 janvier 2018 ;

2°) de rejeter les demandes présentées en première instance par Mme E... ;

3°) de mettre à la charge de Mme E... la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

- le décret n° 86-83 du 17 janvier 1986 ;

- le décret n° 86-442 du 14 mars 1986 ;

- le décret n° 2001-1336 du 28 décembre 2001 ;

- l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Denis Perrin, premier conseiller,

- les conclusions de M. Hervé Cassara, rapporteur public,

- et les observations de Me B... C..., représentant l'Institut national de la propriété industrielle.

Considérant ce qui suit :

1. Mme E... est agent contractuel de l'Institut national de la propriété industrielle depuis le 1er août 1993. Elle est affectée à la délégation régionale de Lille où elle exerce les fonctions de secrétaire au service financier. Elle a été placée en congé de grave maladie jusqu'au 13 décembre 2013, puis en congé de maladie ordinaire jusqu'au 10 juin 2014. Lors des visites de reprise, le médecin du travail a conclu à l'inaptitude à tous postes au sein de l'établissement. Le 24 novembre 2014, l'Institut a licencié pour inaptitude Mme E.... Le tribunal administratif de Lille a annulé, par jugement du 30 janvier 2018, cette décision de licenciement. Par ce même jugement, il a également annulé la décision du 6 février 2015 de l'Institut national de la propriété industrielle refusant de saisir le comité médical supérieur. L'Institut relève appel de ce jugement et conclut au rejet des demandes de première instance de Mme E.... Par la voie de l'appel incident, Mme E... demande l'annulation du jugement du 30 janvier 2018 en tant qu'il a rejeté ses conclusions d'annulation de la décision du 1er juin 2015 rejetant son recours gracieux contre la décision du 6 février 2015.

Sur la décision de licenciement du 24 novembre 2014 :

2. Aux termes du 3° de l'article 17 du décret du 17 janvier 1986 relatif aux dispositions générales applicables aux agents contractuels de l'Etat pris pour l'application des articles 7 et 7 bis de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat : " A l'issue d'un congé de maladie, de grave maladie, d'accident du travail, de maladie professionnelle ou de maternité, de paternité ou d'adoption, lorsqu'il a été médicalement constaté par le médecin agréé qu'un agent se trouve, de manière définitive, atteint d'une inaptitude physique à occuper son emploi, le licenciement ne peut être prononcé que lorsque le reclassement de l'agent dans un emploi que la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 autorise à pourvoir par un agent contractuel et dans le respect des dispositions légales régissant le recrutement de ces agents, n'est pas possible. " et aux termes de l'article 18 du même décret : " Si les conclusions du médecin agréé donnent lieu à contestation dans les cas prévus aux articles 3, 12, 14, 15, 16 et 17, le comité médical peut être saisi dans les conditions prévues par la réglementation en vigueur pour les fonctionnaires titulaires. Cette saisine ne proroge pas la durée du contrat à durée déterminée. ". Il résulte de ces dispositions que lorsque l'agent contractuel est considéré comme définitivement inapte à toutes fonctions par le médecin du travail lors des visites de reprise, le licenciement ne nécessite pas l'avis d'un médecin agréé et par suite, le comité médical n'a pas à se prononcer. Toutefois, lorsqu'une autorité administrative décide de suivre une procédure qui ne s'impose pas, il lui appartient de respecter strictement celle-ci. L'article 7 du décret du 14 mars 1986 relatif à la désignation des médecins agréés, à l'organisation des comités médicaux et des commissions de réforme, aux conditions d'aptitude physique pour l'admission aux emplois publics et au régime de congés de maladie des fonctionnaires dispose que : " Le secrétariat du comité médical informe le fonctionnaire : / - de la date à laquelle le comité médical examinera son dossier ; / - de ses droits concernant la communication de son dossier et la possibilité de faire entendre le médecin de son choix ; / - des voies de recours possibles devant le comité médical supérieur. ".

3. En l'espèce, il ressort des pièces du dossier que, lors de la seconde visite de reprise du 26 juin 2014, le médecin du travail a constaté, après étude du poste de travail, l'inaptitude de Mme E... à tous les postes au sein de la même structure. L'avis du médecin psychiatre du travail du 12 juin 2014 indiquait également que l'inaptitude à tous postes " au sein de l'entreprise " était indispensable. Néanmoins, l'établissement public a demandé la convocation de Mme E... par un médecin agréé et a aussi saisi le comité médical, à la suite de cet avis. Par suite, il devait respecter la procédure prévue par le décret du 14 mars 1986 précité, alors même que celle-ci n'était pas obligatoire. Or, il n'est pas contesté que l'intéressée n'a été informée, ni de la date de la séance du comité médical, ni de ses droits à communication du dossier, ni de la possibilité de faire entendre le médecin de son choix devant ce comité. En conséquence Mme E... a été privée d'une garantie. L'Institut national de la propriété industrielle n'est donc pas fondé à se plaindre que le tribunal administratif de Lille, par le jugement contesté, a annulé la décision de licenciement pour inaptitude du 24 novembre 2014.

Sur le refus de saisine du comité médical supérieur :

4. Tout d'abord, pour annuler la décision du 6 février 2015 refusant la saisine du comité médical supérieur, tiré de ce que la décision de refus du comité médical supérieur était fondée sur le motif unique résultant de ce que la demande de saisine de ce comité médical était postérieure à la décision de licenciement. Il ressort néanmoins des pièces du dossier que le comité médical supérieur a finalement rendu un avis, dans sa séance du 11 octobre 2016, avant même d'ailleurs que le tribunal administratif de Lille ne statue. Toutefois, le comité médical supérieur a été saisi par le comité médical départemental à la demande de Mme E... elle-même et non par l'Institut national de la propriété industrielle, de sorte que les conclusions tendant à l'annulation du refus de l'Institut national de la propriété industrielle de saisir ce comité, n'ont pas été privées d'objet du fait de cette saisine par une personne autre que l'établissement public en cause.

5. Ensuite, l'administration peut, en première instance comme en appel, faire valoir devant le juge de l'excès de pouvoir que la décision, dont l'annulation est demandée, est légalement justifiée par un motif, de droit ou de fait, autre que celui initialement indiqué, mais également fondé sur la situation existant à la date de cette décision. Il appartient alors au juge, après avoir mis à même l'auteur du recours de présenter ses observations sur la substitution ainsi sollicitée, de rechercher si un tel motif est de nature à fonder légalement la décision, puis d'apprécier s'il résulte de l'instruction que l'administration aurait pris la même décision si elle s'était fondée initialement sur ce motif. Dans l'affirmative il peut procéder à la substitution demandée, sous réserve toutefois qu'elle ne prive pas le requérant d'une garantie procédurale liée au motif substitué.

6. Il résulte de l'instruction que l'Institut national de la propriété industrielle aurait pris la même décision en fondant sa décision de refus sur le motif tiré de ce que le comité médical supérieur ne peut être saisi que dans le cas où est en cause un congé de grave maladie, en application des dispositions combinées de l'article 13 et du dernier alinéa de l'article 18 du décret n° 86-83 du 17 janvier 1986 relatif aux dispositions générales applicables aux agents contractuels de l'Etat, pris pour l'application des articles 7 et 7 bis de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat. En l'espèce, un congé de grave maladie n'était plus en cause, de sorte que le comité médical supérieur n'avait pas à être saisi. Ce motif fonde ainsi légalement le refus de l'Institut national de la propriété industrielle de le saisir. Cette substitution de motifs ne prive pas Mme E... d'une garantie, puisque le comité médical supérieur n'avait pas à être saisi.

Sur les conclusions d'appel incident :

7. Les premiers juges ont rejeté les conclusions de Mme E... tendant à l'annulation de la décision du 1er juin 2015 rejetant son recours gracieux formé contre la décision du 6 février 2015 et Mme E... demande encore, en cause d'appel, l'annulation de la décision du 1er juin 2015 rejetant son recours gracieux contre la décision du 6 février 2015 refusant de saisir le comité médical supérieur. Pour rejeter sa demande, le tribunal administratif de Lille s'est précisément fondé sur le motif retenu par la cour au titre de la substitution de motifs demandée dans le cadre de l'examen des conclusions dirigées contre la décision du 6 février 2015, tiré de ce que le comité médical supérieur ne peut être saisi que dans le cas où est en cause un congé de grave maladie, en application des dispositions combinées des articles 13 et 18 du décret n° 86-83 du 17 janvier 1986. Les conclusions présentées par la voie de l'appel incident par Mme E... doivent, par suite, être rejetées.

8. Il résulte de tout ce qui précède que l'Institut national de la propriété industrielle est seulement fondé à demander l'annulation de l'article 2 du jugement du tribunal administratif de Lille du 30 janvier 2018 et que l'appel incident de Mme E... doit être rejeté. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce de faire droit aux conclusions des parties au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : L'article 2 du jugement du 30 janvier 2018 est annulé.

Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de l'Institut national de la propriété industrielle est rejeté.

Article 3 : La demande de Mme E... devant le tribunal administratif de Lille d'annulation du rejet de son recours gracieux contre la décision du 6 février 2015 et ses conclusions d'appel incident à fin d'annulation de ces décisions sont rejetées.

Article 4 : Les conclusions de Mme E... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme F... A..., épouse E... et à l'Institut national de la propriété industrielle.

N° 18DA00717 5


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 18DA00717
Date de la décision : 09/07/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-12-03-01 Fonctionnaires et agents publics. - Agents contractuels et temporaires. - Fin du contrat. - Licenciement.


Composition du Tribunal
Président : M. Albertini
Rapporteur ?: M. Denis Perrin
Rapporteur public ?: M. Cassara
Avocat(s) : CABINET FGD

Origine de la décision
Date de l'import : 18/01/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2020-07-09;18da00717 ?
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