Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. E... B... a demandé au tribunal administratif de Rouen d'une part, d'annuler l'arrêté du 16 juillet 2018 par lequel la préfète de la Seine Maritime a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de renvoi, d'autre part, d'enjoindre à la préfète de la Seine-Maritime de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de trente jours à compter de la date de notification du jugement à intervenir, ou, à titre subsidiaire de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans un délai d'un mois sous astreinte de 100 euros par jour de retard dans l'attente du réexamen de sa situation.
Par un jugement n° 1804182 du 7 février 2019, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 11 avril 2019, M. B..., représenté par Me D... F..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler l'arrêté du 16 juillet 2018 de la préfète de la Seine-Maritime ;
3°) d'enjoindre à la la préfète de la Seine-Maritime, à titre principal de lui délivrer une carte de séjour temporaire dans un délai de trente jours à compter de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, à titre subsidiaire de lui délivrer dans le délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir, sous astreinte, une autorisation temporaire de séjour et de procéder au réexamen de sa situation ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat, le versement d'une somme de 1 500 euros à la SELARL Mary et F... en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant, signée à New-York le 26 janvier 1990 ;
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme A... C..., première conseillère, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., ressortissant nigérian né le 1er août 1979, est, selon ses déclarations, arrivé en France en février 2013. Par arrêté du 16 juillet 2018, la préfète de la Seine-Maritime a refusé de lui délivrer le titre de séjour qu'il sollicitait sur le fondement des dispositions du 7° de l'art L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, lui a fait obligation de quitter le territoire et a fixé le pays de destination pour l'exécution de la mesure d'éloignement. M. B... relève appel du jugement du 7 février 2019 par lequel le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces décisions.
Sur la régularité du jugement :
2. En premier lieu, aux termes de l'article R. 613-3 du code de justice administrative : " Les mémoires produits après la clôture de l'instruction ne donnent pas lieu à communication, sauf réouverture de l'instruction. ". Le premier alinéa de l'article R. 613-4 du même code dispose : " Le président de la formation de jugement peut rouvrir l'instruction par une décision qui n'est pas motivée et ne peut faire l'objet d'aucun recours. Cette décision est notifiée dans les mêmes formes que l'ordonnance de clôture. ".
3. Il ressort des pièces du dossier de première instance que, par une ordonnance du 3 janvier 2019 dont le conseil du requérant a accusé réception le même jour à 17h53, le magistrat rapporteur, par délégation du président de la 3ème chambre du tribunal administratif de Rouen, a rouvert l'instruction de la demande présentée par M. B.... Alors que l'affaire été appelée -(à l'audience du 15 janvier 2019, ce qui, en application de l'article R. 613-2 du code de justice administrative, a entraîné une nouvelle clôture d'instruction trois jours francs avant cette date, soit le 11 janvier 2019 à minuit, le conseil de M. B... a disposé d'un délai de 8 jours pour répliquer au mémoire en défense du préfet dont il a accusé réception de la communication le 3 janvier 2019 à 17h53. Par suite, le moyen tiré de ce que le jugement serait irrégulier pour avoir été rendu au terme d'une procédure n'ayant pas respecté le principe du contradictoire doit être écarté.
4. En second lieu, le point 3 du jugement attaqué relève qu'" il ne ressort d'aucune pièce du dossier que M. B... aurait sollicité son admission au séjour sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ", et rejette en conséquence le moyen tiré de la méconnaissance de cet article à l'encontre du refus de titre de séjour en litige. Dès lors, le tribunal a apporté une réponse suffisamment précise au moyen, et M. B... n'est pas fondé à soutenir que le jugement est entaché d'une irrégularité à ce titre.
Sur le bien-fondé du jugement :
En ce qui concerne la motivation du refus de titre de séjour et de l'obligation de quitter le territoire français :
5. En vertu de l'article L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration, les décisions individuelles défavorables doivent comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent leur fondement. En l'espèce, l'arrêté en litige, qui n'avait pas à reprendre tous les éléments présentés par le demandeur mais seulement ceux qui fondent les décisions prises, cite les textes dont il fait application et mentionne des circonstances de fait propres à la situation personnelle de M. B.... Ainsi, et alors même que l'arrêté ne vise pas la convention internationale des droits de l'enfant et qu'il ne mentionne pas la naissance du deuxième enfant de l'appelant, la préfète de la Seine-Maritime a suffisamment motivé la décision de refus de séjour. Par ailleurs, la préfète de la Seine-Maritime a cité l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qui permet d'assortir un refus de séjour d'une obligation de quitter le territoire. Par suite, la mesure d'éloignement contestée, qui, en vertu des termes mêmes de cet article, n'a pas à faire l'objet d'une motivation en fait distincte de celle de la décision relative au séjour, est elle-même suffisamment motivée.
En ce qui concerne le refus de titre de séjour :
6. En premier lieu, il ne ressort ni de la demande d'admission au séjour présentée par l'appelant le 17 mars 2016, ni du courrier ultérieur, daté du 18 janvier 2018 adressé par l'intéressé à la préfecture de Seine-Maritime qui l'a reçu le 22 janvier 2018, ni d'aucune autre pièce du dossier, que M. B... aurait sollicité la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des articles L. 313-10 ou L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. La circonstance qu'en juillet 2013, l'administration avait indiqué à un entrepreneur du Havre la procédure à suivre pour que celui-ci puisse embaucher M. B..., et la mention de l'arrêté contesté selon laquelle l'intéressé " a sollicité une admission exceptionnelle au séjour sur le fondement de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile " sont sans incidence à cet égard. Par suite, M. B... ne peut utilement soutenir que le refus de titre de séjour en litige serait entaché d'un vice de procédure en l'absence de saisine préalable de la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi, ou serait entaché d'un défaut d'examen particulier de sa demande au regard de ces articles, alors que la préfète n'était pas tenue d'examiner d'office s'il pouvait se voir délivrer un titre de séjour sur ces fondements. Pour les mêmes raisons, l'appelant ne peut utilement soutenir que le refus de titre de séjour en litige méconnaîtrait ces dispositions, sur lesquelles la préfète de la Seine-Maritime ne s'est pas fondée pour refuser de l'admettre au séjour Enfin, la circonstance que la préfète de la Seine-Maritime, n'a pas fait état, dans l'arrêté contesté, de la naissance du second des enfants du requérant, ne suffit pas à établir, eu égard aux autres mentions décrivant de manière détaillée les éléments caractérisant sa situation personnelle, le défaut d'examen complet de sa situation qu'il fait valoir.
7. En deuxième lieu, il ressort des pièces du dossier que M. B... a eu deux enfants, nés respectivement le 23 novembre 2015 et le 27 avril 2018, avec une ressortissante nigériane titulaire d'un titre de séjour. L'intéressé, qui, dans sa demande d'admission au séjour du 17 mars 2016, se déclarait célibataire, a fait valoir dans son courrier du 18 janvier 2018, évoqué au point précédent, avoir repris une vie commune avec la mère de ses enfants. Cependant la réalité de relations stables et antérieures à la décision en litige, que ce soit avec sa compagne alléguée ou avec ses enfants, n'est pas établie par les pièces versées au dossier, qui sont constituées de rares et imprécises attestations, de photographies où l'intéressé se trouve en compagnie de ses enfants, et alors que la majorité des frais présentés par M. B... comme exposés pour ses enfants, c'est-à-dire des justificatifs d'achats de vêtements et des factures d'heures de crèche, sont postérieurs à l'arrêté en litige. Par ailleurs, en versant également au dossier un contrat de travail à temps partiel et à durée déterminée en tant que mécanicien pour la seule période du 9 octobre 2013 au 8 avril 2014, ainsi que les bulletins de salaire correspondants, M. B... n'établit pas l'insertion professionnelle dont il se prévaut. Dans ces conditions, alors que, selon ses propres déclarations, sa durée de séjour en France n'excèderait pas cinq ans et demi, et qu'il aurait vécu dans son pays d'origine jusqu'à l'âge de 34 ans, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'en lui refusant un titre de séjour, la préfète de la Seine Maritime aurait porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels cette décision a été prise et aurait ainsi méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Pour les mêmes motifs, cette décision n'est pas davantage entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de M. B....
8. En troisième lieu, aux termes de l'article 3, paragraphe 1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale. ". Pour les motifs exposés au point précédent, tenant au fait que par les pièces qu'il verse au dossier, M. B... n'établit pas la réalité des relations le liant aux enfants dont il a reconnu la paternité, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations précitées doit être écarté.
En ce qui concerne les autres moyens relatifs à la décision portant obligation de quitter le territoire français :
9. En premier lieu, l'appelant, qui n'établit pas l'illégalité du refus de titre de séjour, n'est pas fondé à invoquer, par voie d'exception, l'illégalité de cette décision à l'encontre de l'obligation de quitter le territoire français dont il fait l'objet.
10. En deuxième lieu, pour les motifs exposés aux points 7 et 8 doivent être écartés les moyens tirés, à l'encontre de la décision portant obligation de quitter le territoire français, d'une part de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, d'autre part, de la méconnaissance du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant. Pour ces mêmes motifs, le moyen tiré de l'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de cette décision sur la situation personnelle de M. B... doit être également écarté.
En ce qui concerne les moyens relatifs à la décision fixant le pays de destination :
11. En premier lieu, il est constant que M. B... a sollicité son admission au séjour. Il a ainsi été mis à même de faire valoir, avant l'intervention de l'arrêté en litige, tous éléments d'information ou arguments de nature à influer sur le contenu des mesures susceptibles d'être prises en réponse de cette demande, quand bien même les formulaires de demandes de titre de séjour ne prévoient pas de cases spécifiques relatives à des observations sur l'éventuel pays de destination. Il n'indique d'ailleurs pas quels éléments relatifs au pays de destination fixé par l'arrêté il n'aurait pas été en mesure de faire valoir préalablement à la mesure qu'il conteste. Il n'est par suite, pas fondé à soutenir qu'il aurait été privé de son droit d'être entendu, conformément au principe général du droit de l'Union européenne énoncé notamment à l'article 41 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne.
12. En deuxième lieu, l'appelant, qui n'établit pas l'illégalité du refus de titre de séjour et de la décision portant obligation de quitter le territoire français dont il fait l'objet, n'est pas fondé à invoquer, par voie d'exception, l'illégalité de ces décisions à l'encontre de la décision fixant le pays de destination.
13. En troisième et dernier lieu, en se bornant à soutenir sans l'établir, ainsi qu'il a été dit précédemment, qu'il aurait démontré sa parfaite intégration personnelle et professionnelle en France, M. B... n'établit pas qu'en fixant le pays de destination de la mesure d'éloignement, la préfète de la Seine-Maritime aurait entaché cette décision d'une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de cette mesure sur la situation personnelle de l'intéressé.
14. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande.
Sur les autres conclusions :
15. Par voie de conséquence de ce qui vient d'être dit, les conclusions accessoires de M. B... aux fins d'injonction et d'astreinte et celles qu'il présente au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. E... B..., au ministre de l'intérieur, et à Me F....
Copie en sera adressée pour information au préfet de la Seine Maritime.
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N°19DA00875