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18/06/2020 | FRANCE | N°18DA00613

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 4ème chambre, 18 juin 2020, 18DA00613


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société par action simplifiée (SAS) Coenmans Recyclage Industriel a demandé au tribunal administratif de Lille de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des suppléments de cotisation foncière des entreprises, de taxe spéciale d'équipement et de taxe pour frais de chambre de commerce et d'industrie auxquels elle a été assujettie au titre des années 2013 et 2014 à raison des parcelles dont elle a la disposition sur le territoire des communes de Béthune et de Beuvry. Par ailleurs, en applica

tion de l'article R. 199-1 du livre des procédures fiscales, l'administration ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société par action simplifiée (SAS) Coenmans Recyclage Industriel a demandé au tribunal administratif de Lille de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des suppléments de cotisation foncière des entreprises, de taxe spéciale d'équipement et de taxe pour frais de chambre de commerce et d'industrie auxquels elle a été assujettie au titre des années 2013 et 2014 à raison des parcelles dont elle a la disposition sur le territoire des communes de Béthune et de Beuvry. Par ailleurs, en application de l'article R. 199-1 du livre des procédures fiscales, l'administration a transmis d'office au tribunal les réclamations formées par cette société à l'encontre de la cotisation foncière des entreprises, de la taxe spéciale d'équipement et de la taxe pour frais de chambre de commerce et d'industrie mises à sa charge, au titre de l'année 2015, à raison de ces mêmes parcelles.

Par un jugement nos 1507686, 1602995, 1602996 du 19 janvier 2018, le tribunal administratif de Lille a rejeté la demande de la société Coenmans Recyclage Industriel et ses réclamations transmises d'office par l'administration.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 21 mars 2018, la société Coenmans Recyclage Industriel, représentée par Me A..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des suppléments de cotisation foncière des entreprises, de taxe spéciale d'équipement et de taxe pour frais de chambre de commerce et d'industrie auxquels elle a été assujettie au titre des années 2013 et 2014, et de la cotisation foncière des entreprises, de la taxe spéciale d'équipement et de la taxe pour frais de chambre de commerce et d'industrie assignées au titre de l'année 2015, à raison des parcelles dont elle dispose sur le territoire des communes de Béthune et de Beuvry ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la Déclaration des droits de l'homme et des citoyens de 1789 ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Binand, président-assesseur,

- et les conclusions de M. Arruebo-Mannier, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. La société Coenmans Recyclage Industriel exploite en location-gérance quatre parcelles dans l'emprise du port fluvial de Béthune-Beuvry sur le territoire des communes de Beuvry et de Béthune, situées dans le département du Pas-de-Calais, dont l'aménagement et la gestion ont été concédés par l'Etat à la chambre de commerce et d'industrie de Béthune aux termes de la convention d'outillage conclue le 8 mars 1971. Dans ce cadre, la société Coenmans Recyclage Industriel dispose d'une autorisation d'occupation du domaine public consentie par la chambre de commerce et d'industrie de Béthune. A la suite d'une vérification de comptabilité, l'administration a rehaussé la valeur relative de ces biens. Par un jugement du 19 janvier 2018, dont la société Coenmans Recyclage Industriel relève appel, le tribunal administratif de Lille a rejeté la demande de cette société et ses réclamations transmises d'office par l'administration tendant à la décharge des suppléments de cotisation foncière des entreprises, de taxe spéciale d'équipement et de taxe pour frais de chambre de commerce et d'industrie qui en ont résulté, à concurrence de la somme de 59 865 euros au titre de l'année 2013 et de 60 264 euros au titre de l'année 2014, ainsi que des mêmes cotisations et taxes qui lui ont été assignées à raison de ces biens à hauteur de la somme de 61 081 euros au titre de l'année 2015.

2. En premier lieu, aux termes de l'article 1447 du code général des impôts : " I. - La cotisation foncière des entreprises est due chaque année par les personnes physiques ou morales (...) qui exercent à titre habituel une activité professionnelle non salariée. / (...) ". Aux termes de l'article 1467 de ce code, dans sa rédaction applicable au litige : " La cotisation foncière des entreprises a pour base la valeur locative des biens passibles d'une taxe foncière situés en France, à l'exclusion des biens exonérés de taxe foncière sur les propriétés bâties en vertu des 11° et 12° de l'article 1382, dont le redevable a disposé pour les besoins de son activité professionnelle pendant la période de référence définie aux articles 1467 A et 1478, à l'exception de ceux qui ont été détruits ou cédés au cours de la même période. / (...) ".

3. Ainsi que les premiers juges l'ont relevé à juste titre, il résulte de ces dispositions que la cotisation foncière des entreprises a pour base la valeur locative des biens passibles de la taxe foncière sur les propriétés bâties, dont le redevable a disposé pour les besoins de son activité professionnelle, indépendamment de la qualité de propriétaire de ces biens. Dès lors, la société Coenmans Recyclage Industriel, qui ne conteste pas avoir eu la disposition de l'ensemble des biens en cause pour son activité professionnelle non salariée, ne peut utilement soutenir, pour demander à être déchargée des impositions en litige, qu'elle n'est ni la propriétaire des biens en cause ni la redevable de la taxe foncière sur les propriétés bâties qui les grève.

4. En deuxième lieu, si la société Coenmans Recyclage Industriel se prévaut de l'exonération de cotisation foncière des entreprises prévue par les dispositions du 2° de l'article 1449 du code général des impôts pour les ports gérés par des collectivités territoriales et les établissements publics, il résulte des travaux préparatoires de la loi du 29 juillet 1975 que le législateur, en instituant cette exonération, a notamment entendu favoriser l'investissement public dans les infrastructures portuaires en réservant le bénéfice de l'exonération aux personnes publiques assurant elles-mêmes la gestion d'un port. Dès lors, la société requérante, qui n'est titulaire que d'une autorisation d'occupation du domaine public et ne peut ainsi être regardée, à ce titre, comme étant associée à la gestion du port qui a été concédée à la chambre de commerce et d'industrie de Béthune par la convention d'outillage conclue par la chambre de commerce et d'industrie avec l'Etat le 8 mars 1971, n'entre pas, en tout état de cause, dans le champ de cette exonération.

5. En troisième lieu, aux termes de l'article 1382 du même code : " Sont exonérés de la taxe foncière sur les propriétés bâties : / (...) 11° Les outillages et autres installations et moyens matériels d'exploitation des établissements industriels à l'exclusion de ceux visés aux 1° et 2° de l'article 1381 (...) ". Aux termes de l'article 1381 du même code : " Sont également soumis à la taxe foncière sur les propriétés bâties : / 1° Les installations destinées à abriter des personnes ou des biens ou à stocker des produits ainsi que les ouvrages en maçonnerie présentant le caractère de véritables constructions tels que, notamment, les cheminées d'usine, les réfrigérants atmosphériques, les formes de radoub, les ouvrages servant de support aux moyens matériels d'exploitation (...) ". Au sens et pour l'application de ces dispositions, d'une part, les bâtiments mentionnés au 1° de l'article 1381 du code général des impôts comprennent également les aménagements faisant corps avec eux, d'autre part, les outillages, autres installations et moyens matériels d'exploitation des établissements industriels mentionnés au 11° de l'article 1382 du même code s'entendent de ceux qui participent directement à l'activité industrielle de l'établissement et sont dissociables des immeubles.

6. La société Coenmans Recyclage Industriel soutient qu'en application des dispositions du 11° de l'article 1382 du code général des impôts, doivent être exclus de la base d'imposition à la cotisation foncière des entreprises les compresseurs électricité et matériel, le dallage d'utilisation intensive ou non, le portail pompiers et le lot " VRD gros-oeuvre ". Le tribunal administratif de Lille a écarté ces différents ouvrages ou équipements du champ de l'exonération prévue par les dispositions de cet article, aux motifs tirés de ce que les dallages, ainsi, en l'absence de précisions, que l'installation d'un débourbeur/séparateur d'hydrocarbures et d'une aire de lavage, la réalisation d'un bassin de rétention et décantation et les fondations du mur d'enceinte doivent être considérés comme des ouvrages de maçonnerie au sens des dispositions de l'article 1381 du code général des impôts, de ce que la société requérante n'apportait aucune précision permettant d'établir que les compresseurs seraient dissociables des immeubles dans lesquels ils sont implantés, de ce qu'il n'est pas établi que les opérations de démolition, de désamiantage et de terrassement de certaines zones regroupées sous l'appellation " VRD gros-oeuvre " seraient dissociables des bâtiments existants, enfin, de ce que la pose de regards et grilles en fonte, l'apport de terres et de végétaux et la pose d'enrobés routiers et d'un portail pompiers ne peuvent être regardés comme concourant directement à l'activité industrielle de la société.

7. D'une part, il appartient au juge de l'impôt, au vu de l'instruction et compte tenu, le cas échéant, de l'abstention d'une des parties à produire les éléments qu'elle est seule en mesure d'apporter et qui ne sauraient être réclamés qu'à elle-même, d'apprécier si le contribuable remplit les conditions légales d'une exonération. Dès lors, la société requérante n'est pas fondée à soutenir que le tribunal, qui s'est prononcé au vu des éléments soumis au débat contradictoire devant lui sans faire peser sur elle la charge de la preuve, a méconnu les règles régissant la dévolution de la preuve de l'inclusion des éléments mentionnés au point 6 dans les bases d'assujettissement à la cotisation foncière des entreprises.

8. D'autre part, la société requérante ne peut utilement faire valoir que l'ensemble des travaux et installations concernés sont mis en oeuvre pour la satisfaction de son activité industrielle aux prescriptions de la réglementation des installations classées pour la protection de l'environnement, alors que, au regard du principe de l'indépendance des législations, cette circonstance, à la supposer établie, est sans incidence sur l'application par le juge de l'impôt des règles relatives à l'établissement des impositions en litige.

9. Il s'ensuit que, en l'absence d'éléments de droit ou de fait nouveaux apportés en cause d'appel, il y a lieu, par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges, d'inclure les travaux et installations mentionnés au point 6 du présent arrêt dans la base servant au calcul de la valeur locative pour l'établissement de la cotisation foncière des entreprises assignée à la société Coenmans Recyclage Industriel au titre des années en cause.

10. En quatrième lieu, en se bornant à soutenir que les autres entreprises présentes sur le site du port fluvial ne sont pas assujetties à la taxe foncière et ne seraient, à sa connaissance, pas davantage assujetties à la cotisation foncière des entreprises, sans apporter d'éléments factuels de nature à établir que ces entreprises seraient placées dans une situation identique à la sienne au regard des règles d'assujettissement à la cotisation foncière des entreprises, la société Coenmans Recyclage Industriel n'assortit pas le moyen tiré de la méconnaissance du principe d'égalité devant la loi, garanti par l'article 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, des précisions permettant à la cour d'en apprécier le bien-fondé. Par ailleurs, les impositions en litige étant, ainsi qu'il vient d'être dit, légalement établies, la société requérante ne peut davantage utilement prétendre que ces impositions seraient contraires au principe d'égalité devant les charges publiques garanti par l'article 13 de cette même déclaration.

11. En cinquième et dernier lieu, la société Coenmans Recyclage Industriel ne peut se prévaloir de l'instruction référencée BOI-IF-TFB-10-20-20, relative à l'imposition des titulaires de droits spéciaux de propriété à la taxe foncière sur les propriétés bâties, qui ne comporte pas une interprétation de la loi fiscale applicable au litige différente de celle dont il est fait application par le présent arrêt.

12. Il résulte de tout ce qui précède que la société Coenmans Recyclage Industriel n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande et les réclamations soumises d'office par l'administration. Par suite, sa requête doit être rejetée en toutes ses conclusions, y compris celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la société Coenmans Recyclage Industriel est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société Coenmans Recyclage Industriel et au ministre de l'action et des comptes publics.

Copie en sera transmise à l'administrateur général des finances publiques chargé de la direction spécialisée de contrôle fiscal Nord.

2

N°18DA00613


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 18DA00613
Date de la décision : 18/06/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-03-045-03-01 Contributions et taxes. Impositions locales ainsi que taxes assimilées et redevances.


Composition du Tribunal
Président : M. Heu
Rapporteur ?: M. Christophe Binand
Rapporteur public ?: M. Arruebo-Mannier
Avocat(s) : SOCIETE D'AVOCATS HEPTA

Origine de la décision
Date de l'import : 28/07/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2020-06-18;18da00613 ?
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