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16/06/2020 | FRANCE | N°19DA01608

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 1ère chambre, 16 juin 2020, 19DA01608


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... B... a demandé au tribunal administratif d'Amiens d'annuler l'arrêté du 28 juin 2018 par lequel le préfet de la Somme a refusé de lui accorder un titre de séjour et d'enjoindre au préfet de lui délivrer une carte de résident valable dix ans, sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la notification du jugement.

Par un jugement n° 1802250 du 14 mai 2019, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté la demande de M. B....

Procédure devant la cour :

Par un

e requête et un mémoire, enregistrés les 13 juillet et 19 novembre 2019, M. D... B..., représ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... B... a demandé au tribunal administratif d'Amiens d'annuler l'arrêté du 28 juin 2018 par lequel le préfet de la Somme a refusé de lui accorder un titre de séjour et d'enjoindre au préfet de lui délivrer une carte de résident valable dix ans, sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la notification du jugement.

Par un jugement n° 1802250 du 14 mai 2019, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté la demande de M. B....

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 13 juillet et 19 novembre 2019, M. D... B..., représenté par Me E... G..., demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif d'Amiens du 14 mai 2019 ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet de la Somme du 28 juin 2018 ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Somme de lui délivrer une carte de résident valable dix ans, sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la notification du présent arrêt ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif modifiée par les ordonnances n° 2020-405 du 8 avril 2020, n° 2020-427 du 15 avril 2020 et n° 2020-558 du 13 mai 2020 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Le rapport de M. Aurélien Gloux-Saliou, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Titulaire d'une carte de séjour temporaire en qualité de parent d'enfant français, M. D... B..., de nationalité turque, a demandé le 4 juillet 2017 le renouvellement de ce titre de séjour. Par un arrêté du 28 juin 2018, le préfet de la Somme a rejeté cette demande. M. B... interjette appel du jugement du 14 mai 2019 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 28 juin 2018.

Sur la légalité de l'arrêté du 28 juin 2018 :

2. En premier lieu, par un arrêté du 5 juin 2018, régulièrement publié le même jour au recueil des actes administratifs spécial de la préfecture de la Somme, le préfet a donné à M. Jean-Charles Geray, secrétaire général, délégation pour signer toutes décisions prévues en matière de police des étrangers par le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'arrêté en litige doit donc être écarté.

3. En deuxième lieu, M. B... ne saurait soutenir que l'arrêté du 28 juin 2018 ne serait pas suffisamment motivé, alors que cette décision énonce les considérations de droit et de fait qui la fondent en rappelant notamment la situation de famille du requérant ainsi que les différentes condamnations pénales dont il a fait l'objet.

4. En troisième lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet n'aurait pas examiné la situation personnelle de M. B....

5. En quatrième lieu, aux termes de l'article L. 313-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire ou la carte de séjour pluriannuelle peut, par une décision motivée, être refusée ou retirée à tout étranger dont la présence en France constitue une menace pour l'ordre public " et aux termes de l'article L. 313-11 du même code : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : / (...) 6° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France, à la condition qu'il établisse contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins deux ans, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée (...) ".

6. Il est constant que M. B... a été condamné le 1er février 2008 par le tribunal correctionnel de Laval à quatre ans d'emprisonnement, dont deux avec sursis, notamment pour des faits de violence aggravée suivie d'incapacité supérieure à huit jours, violence sans incapacité par conjoint et menaces de mort. Il n'est également pas contesté que le sursis de l'intéressé, qui avait été libéré le 12 mars 2009, a été révoqué le 4 janvier 2011 par la chambre de l'application des peines de la cour d'appel d'Angers, ce qui a conduit à une nouvelle incarcération de M. B... jusqu'au 5 janvier 2012. En outre, le requérant a été condamné le 15 décembre 2016 par le tribunal de grande instance de Laval à un mois de prison avec sursis pour des faits de violence sur un mineur de quinze ans par un ascendant ou une personne ayant autorité sur la victime. S'ajoutent deux condamnations à des amendes, la première le 7 novembre 2006 par le tribunal de grande instance de Laval pour conduite d'un véhicule sans permis, la seconde le 9 avril 2009 par le tribunal correctionnel de Tours pour outrage à personne dépositaire de l'autorité publique. Par ailleurs, alors que M. B..., exerçant à titre principal la profession de carreleur, ne conteste pas avoir été condamné le 6 décembre 2010 à l'interdiction de diriger, gérer, administrer ou contrôler toute personne morale ou toute entreprise commerciale pendant cinq ans, il ressort d'une enquête effectuée par le service départemental du renseignement territorial dans la Mayenne que l'intéressé était recherché en 2017 par des huissiers de justice pour des dettes d'entreprise. Eu égard à la répétition des condamnations pénales prononcées contre M. B... de 2006 à 2016, dont certaines pour des faits de violence contre son ancienne conjointe ou contre un mineur, et compte tenu de son parcours professionnel ponctué d'irrégularités, le préfet de la Somme a pu légalement estimer que sa présence en France constituait une menace pour l'ordre public et refuser de lui renouveler un titre de séjour en qualité de parent d'enfant français, quand bien même le requérant démontrerait contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de son fils A..., de nationalité française. Les dispositions de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile n'ont donc pas été méconnues.

7. En cinquième lieu, en vertu de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale.

8. Il ressort des pièces du dossier que M. B... s'est installé en France depuis 2005 au plus tard. S'il a eu deux filles, C... et Noélie, nées respectivement le 8 décembre 2005 et le 30 avril 2007, avec une française, le couple s'est séparé et il est constant que la mère, victime de violences pour lesquelles M. B... a été condamné à une peine d'emprisonnement en 2008, s'est vu confier l'autorité parentale exclusive sur les deux enfants, avec lesquelles le requérant n'allègue pas être resté en contact. Si M. B... a eu un autre enfant, A..., né le 20 août 2011 d'une deuxième union avec une française qui a également pris fin, et qu'un jugement du 4 décembre 2012 du tribunal de grande instance de Laval a attribué aux deux parents l'autorité conjointe sur leur fils, il ressort des pièces du dossier que l'enfant a sa résidence habituelle chez sa mère à Laval tandis que M. B... vit désormais à Amiens. Le requérant produit des photographies le montrant en compagnie de son fils à différents âges ainsi que des attestations de la mère et de voisins ou d'amis, selon lesquelles l'intéressé accueillerait son fils lors de vacances et se comporterait en père aimant, mais ces témoignages, à l'exception de ceux produits pour la première fois en appel, sont pour l'essentiel postérieurs à l'arrêté critiqué et attestent de relations ponctuelles sans établir l'existence d'une contribution effective à l'entretien et à l'éducation de l'enfant. Par ailleurs, il ressort des pièces du dossier que M. B..., qui a eu un second fils, F..., né le 16 septembre 2016, a conçu cet enfant avec une compatriote séjournant en France de façon irrégulière. Enfin, si le requérant soutient que plusieurs membres de sa famille vivraient en France, notamment son père ainsi que des frères et des cousins, il ne démontre pas qu'il entretiendrait avec eux des relations étroites et n'allègue pas être dépourvu de liens dans son pays d'origine, où pourrait être reconstituée la cellule familiale qu'il forme actuellement avec sa compagne en situation irrégulière et leur fils. Eu égard à l'ensemble de ces éléments ainsi qu'aux condamnations pénales et au parcours professionnel rappelés au point 6 du présent arrêt, le préfet ne peut être regardé comme ayant porté au droit de M. B... au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux motifs pour lesquels le renouvellement de son titre de séjour lui a été refusé. Les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales n'ont donc pas été méconnues.

9. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande d'annuler l'arrêté du préfet de la Somme refusant de lui accorder un titre de séjour en qualité de parent d'enfant français.

Sur l'injonction :

10. Le présent arrêt n'impliquant aucune mesure d'exécution, les conclusions à fin d'injonction présentées par M. B... doivent être rejetées.

Sur les frais de l'instance :

11. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soient mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, les frais exposés par M. B....

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... B... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée pour information au préfet de la Somme.

N°19DA01608 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 19DA01608
Date de la décision : 16/06/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. Boulanger
Rapporteur ?: M. Aurélien Gloux-Saliou
Rapporteur public ?: M. Minet
Avocat(s) : CABINET ABDELLATIF - BELHAOUES

Origine de la décision
Date de l'import : 28/07/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2020-06-16;19da01608 ?
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