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16/06/2020 | FRANCE | N°19DA01585

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 1ère chambre, 16 juin 2020, 19DA01585


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... B... a demandé au tribunal administratif d'Amiens d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 2 janvier 2019 par lequel le préfet de l'Oise a rejeté sa demande de titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1900754 du 14 mai 2019, le tribunal administratif d'Amiens a annulé cet arrêté et enjoint au préfet de l'Oise de réexaminer la demande de Mme B... dans un délai de tr

ois mois.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 11 juillet 20...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... B... a demandé au tribunal administratif d'Amiens d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 2 janvier 2019 par lequel le préfet de l'Oise a rejeté sa demande de titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1900754 du 14 mai 2019, le tribunal administratif d'Amiens a annulé cet arrêté et enjoint au préfet de l'Oise de réexaminer la demande de Mme B... dans un délai de trois mois.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 11 juillet 2019, le préfet de l'Oise demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de rejeter la demande présentée par Mme B... devant le tribunal administratif d'Amiens.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif modifiée par les ordonnances n° 2020-405 du 8 avril 2020, n° 2020-427 du 15 avril 2020 et n° 2020-558 du 13 mai 2020 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Christian Boulanger, président de chambre, a été entendu au cours de l'audience publique.

Une note en délibéré présentée par Mme B... a été enregistrée le 15 juin 2020.

Considérant ce qui suit :

1. Mme B..., ressortissante de nationalité algérienne, née le 16 mars 1980, déclare être entrée sur le territoire national le 30 novembre 2015, munie d'un visa Schengen. Elle a été mise en possession d'une carte de séjour temporaire pour raisons médicales, renouvelée jusqu'au 3 novembre 2018. Par un arrêté en date du 2 janvier 2019, le préfet de l'Oise a rejeté sa demande de renouvellement de ce titre de séjour, assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français à destination et fixé le pays de destination. Le préfet de l'Oise relève appel du jugement du 14 mai 2019 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a annulé cet arrêté.

Sur le motif d'annulation retenu par les premiers juges :

2. Aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 : " (...) / Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : / (...) / 7) au ressortissant algérien, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse pas effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays. / (...) ". Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : / (...) / 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La condition prévue à l'article L. 313-2 n'est pas exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. Les médecins de l'office accomplissent cette mission dans le respect des orientations générales fixées par le ministre chargé de la santé (...) ".

3. L'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose que : " Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour au vu d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. / L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé. / Les orientations générales mentionnées à la quatrième phrase du 11° de l'article L. 313-11 sont fixées par arrêté du ministre chargé de la santé ". Aux termes de l'article R. 313-23 du même code, dans sa version alors applicable : " Le rapport médical visé à l'article R. 313-22 est établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration à partir d'un certificat médical établi par le médecin qui le suit habituellement ou par un médecin praticien hospitalier inscrits au tableau de l'ordre (...). / Sous couvert du directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration le service médical de l'office informe le préfet qu'il a transmis au collège de médecins le rapport médical. (...) / Le collège à compétence nationale, composé de trois médecins, émet un avis dans les conditions de l'arrêté mentionné au premier alinéa du présent article. La composition du collège et, le cas échéant, de ses formations est fixée par décision du directeur général de l'office. Le médecin ayant établi le rapport médical ne siège pas au sein du collège. / (...) ". L'article 6 de l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dispose que : " Au vu du rapport médical mentionné à l'article 3, un collège de médecins désigné pour chaque dossier dans les conditions prévues à l'article 5 émet un avis, conformément au modèle figurant à l'annexe C du présent arrêté, précisant : / a) si l'état de santé de l'étranger nécessite ou non une prise en charge médicale ; / b) si le défaut de cette prise en charge peut ou non entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé ; / c) si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont le ressortissant étranger est originaire, il pourrait ou non y bénéficier effectivement d'un traitement approprié ; / d) la durée prévisible du traitement. / Dans le cas où le ressortissant étranger pourrait bénéficier effectivement d'un traitement approprié, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, le collège indique, au vu des éléments du dossier du demandeur, si l'état de santé de ce dernier lui permet de voyager sans risque vers ce pays. / Cet avis mentionne les éléments de procédure. / Le collège peut délibérer au moyen d'une conférence téléphonique ou audiovisuelle. / L'avis émis à l'issue de la délibération est signé par chacun des trois médecins membres du collège ".

4. L'avis émis le 30 novembre 2018 par le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, au regard duquel l'arrêté en litige a notamment été pris, comporte toutes les mentions requises par les dispositions ci-dessus reproduites de l'arrêté du 27 décembre 2016, et précise en particulier que, au vu des éléments du dossier, l'état de santé de Mme B... peut lui permettre de voyager sans risque vers son pays d'origine. Le préfet de l'Oise est dès lors fondé à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont retenu le moyen tiré de ce que cet avis ne comporterait pas cette mention.

5. Il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés tant en appel que devant le tribunal administratif d'Amiens.

Sur les autres moyens soulevés par Mme B... :

En ce qui concerne la compétence du signataire :

6. Par un arrêté du 27 novembre 2018, régulièrement publié au recueil spécial des actes administratifs de la préfecture du 29 novembre 2018, le préfet de l'Oise a donné à M. Dominique Lepidi, secrétaire général de la préfecture de l'Oise, délégation à l'effet de signer, notamment, tout acte, arrêté ou décision relevant des attributions de l'Etat dans le département de l'Oise, à l'exclusion de certaines mesures, limitativement énumérées, au nombre desquels ne figurent pas les actes ou décisions concernant le séjour et l'éloignement des étrangers. En conséquence, le secrétaire général de la préfecture de l'Oise, signataire de l'arrêté en litige, était compétent à cet effet. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'arrêté contesté doit être écarté.

En ce qui concerne l'offre de soins dans le pays d'origine :

7. Sous réserve des cas où la loi attribue la charge de la preuve à l'une des parties, il appartient au juge administratif, au vu des pièces du dossier, et compte tenu, le cas échéant, de l'abstention d'une des parties à produire les éléments qu'elle est seule en mesure d'apporter et qui ne sauraient être réclamés qu'à elle-même, d'apprécier si l'état de santé d'un étranger nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La partie qui justifie d'un avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration qui lui est favorable doit être regardée comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence ou l'absence d'un état de santé de nature à justifier la délivrance ou le refus d'un titre de séjour. Dans ce cas, il appartient à l'autre partie, dans le respect des règles relatives au secret médical, de produire tous éléments permettant d'apprécier l'état de santé de l'étranger et, le cas échéant, si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il pourrait ou non y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si l'état de santé d'un étranger justifie la délivrance d'un titre de séjour dans les conditions ci-dessus rappelées, se détermine au vu de ces échanges contradictoires.

8. Il ressort des pièces du dossier que, pour refuser d'accorder à Mme B... le renouvellement de la carte de séjour temporaire qui lui avait été délivrée pour raison médicale, le préfet de l'Oise s'est notamment fondé sur l'avis, mentionné au point 4, émis le 30 novembre 2018 par le collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. Il ressort des termes mêmes de cet avis que le collège médical a estimé que l'état de santé de Mme B... nécessite une prise en charge médicale, que le défaut de prise en charge médicale peut entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité mais qu'eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont elle est originaire, elle peut y bénéficier effectivement d'un traitement approprié et qu'au vu des éléments du dossier et à la date de l'avis, l'état de santé de l'intéressée peut lui permettre de voyager sans risque vers son pays d'origine. Pour contester cet avis, Mme B... indique qu'elle souffre d'une paralysie faciale, conséquence d'un adénocarcinome de la parotide détecté et soigné, notamment par chirurgie, en France. Elle verse au dossier plusieurs certificats médicaux, lesquels indiquent, pour celui établi le 27 février 2019 par le docteur Tankere, que " compte tenu du risque de récidive tardive du type histologique aussi bien local, régional que général, un suivi semble impératif (...) L'absence de diagnostic initial en Algérie prouve qu'un suivi adapté sera mieux réalisé en France ", pour celui établi le 26 février 2019 par le docteur Pieta, que " une surveillance régulière (...) doit être réalisée en France ; le défaut de celle-ci pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité ", pour celui établi le 1er mars 2019 par le docteur Bouhalida, ophtalmologue, que " devant (...) l'impossibilité d'une offre de soins de qualité dans son pays d'origine, il est nécessaire qu'elle continue à bénéficier d'une offre de soins en France " et, enfin, pour celui établi le 4 mars 2019 par le docteur Mazit, médecin généraliste, que Mme B... " présente donc un état de santé avec des pathologies graves pour lesquelles des traitements importants (...) sont indispensables (...) et qui ne peuvent être réalisés matériellement dans son pays d'origine ". Cependant, ces certificats, qui n'indiquent pas la nature exacte du traitement et du suivi rendus nécessaires par l'état de santé de l'intéressée et ne peuvent ainsi être regardés comme suffisamment circonstanciés quant à l'existence d'une offre de soins appropriés dans son pays d'origine, ne suffisent donc pas à remettre en cause l'appréciation portée sur ce point par le préfet au vu notamment de l'avis du collège des médecins du 30 novembre 2018. En outre, si le certificat du 4 mars 2019 indique que la requérante est suivie par le service gynécologique du centre hospitalier universitaire de la Pitié Salpêtrière pour des suspicions de localisations secondaires du carcinome dont elle a souffert, il est, en tout état de cause, postérieur à l'arrêté et il n'est pas établi qu'il décrit une situation qui lui serait antérieure. Par suite, la décision refusant de délivrer un titre de séjour à Mme B... n'a pas été prise en méconnaissance des dispositions ci-dessus reproduites du 7) de l'article 6 de l'accord franco-algérien.

9. Il résulte de tout ce qui précède qu'aucun des moyens soulevés par Mme B... devant le tribunal administratif d'Amiens ou devant la cour n'est fondé. Par voie de conséquence, le préfet de l'Oise est fondé à demander l'annulation du jugement du 14 mai 2019 du tribunal administratif d'Amiens ainsi que le rejet de la demande de première instance de Mme B.... Les conclusions présentées en appel par Mme B... au titre des frais de l'instance doivent être rejetées par voie de conséquence.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du 14 mai 2019 du tribunal administratif d'Amiens est annulé.

Article 2 : La demande présentée par Mme B... devant le tribunal administratif et ses conclusions d'appel sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur, à Mme A... B... et à Me C....

Copie en sera transmise pour information au préfet de l'Oise.

N°19DA01585 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 19DA01585
Date de la décision : 16/06/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. Boulanger
Rapporteur ?: M. Jimmy Robbe
Rapporteur public ?: M. Minet
Avocat(s) : SCP DELARUE - VARELA - MARRAS

Origine de la décision
Date de l'import : 28/07/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2020-06-16;19da01585 ?
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