Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Rouen, d'une part, d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 13 février 2019 par lequel la préfète de la Seine-Maritime lui a fait obligation de quitter sans délai le territoire français, lui a fait interdiction de retour sur ce territoire avant l'expiration d'un délai de trois ans et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office, d'autre part, d'enjoindre, sous astreinte, à la préfète de la Seine-Maritime de procéder à un nouvel examen de sa situation et de lui délivrer, dans cette attente, une autorisation provisoire de séjour.
Par un jugement n° 1900801 du 19 avril 2019, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Rouen a rejeté cette demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 22 mai 2019, M. A..., représenté par Me C..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 13 février 2019 de la préfète de la Seine-Maritime ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Seine-Maritime, sous astreinte de 150 euros par jour de retard, de procéder à un nouvel examen de sa situation, dans un délai de deux mois à compter de la date de notification de l'arrêt à intervenir, et de lui délivrer, dans cette attente, une autorisation provisoire de séjour, dans un délai de quinze jours à compter de la même date, sous la même astreinte.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du royaume du Maroc en matière de séjour et d'emploi du 9 octobre 1987 ;
- la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 relative aux normes et procédures communes applicables dans les Etats membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Jean-François Papin, premier conseiller, a été entendu, au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. A..., ressortissant marocain né le 21 septembre 1993, est entré régulièrement sur le territoire français, le 26 décembre 2015, sous couvert d'un passeport revêtu d'un visa de court séjour en cours de validité. S'étant maintenu au-delà de la durée de validité de ce visa, il a exercé la profession de coiffeur en ayant recours à une carte d'identité italienne falsifiée pour obtenir son embauche dans le cadre contrat de travail à durée indéterminée. Ayant présenté ce titre à l'occasion d'un contrôle, il a été convoqué, le 13 février 2019, dans le contexte d'une enquête pénale pour faux et usage de faux et a été placé en garde à vue. Cette enquête ayant permis de confirmer le caractère falsifié du document d'identité italien présenté par lui et en l'absence de toute démarche de M. A... tendant à la régularisation de sa situation en matière de droit au séjour, la préfète de la Seine-Maritime, par un arrêté du 13 février 2019, lui a fait obligation de quitter le territoire français ainsi qu'interdiction de retour sur ce territoire avant l'expiration d'un délai de trois ans et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office. M. A... relève appel du jugement du 19 avril 2019 par lequel le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à l'annulation, pour excès de pouvoir, de cet arrêté.
Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :
2. Il ressort des motifs mêmes de l'arrêté contesté que ceux-ci comportent l'énoncé des considérations de droit et de fait sur lesquelles se fonde la décision faisant obligation à M. A... de quitter le territoire français. Ces motifs, qui précisent en particulier la date et les conditions d'entrée de l'intéressé sur le territoire français, font état de sa situation personnelle et familiale et relèvent que celui-ci s'est maintenu sur le territoire français au-delà de la durée de validité de son visa en ayant recours à un faux document d'identité et en n'effectuant aucune démarche en vue d'obtenir la régularisation de sa situation en matière de droit au séjour, ont mis M. A... à même de comprendre les raisons pour lesquelles ce refus lui était opposé et de les contester utilement. Ils constituent une motivation suffisante au regard de l'exigence posée par les dispositions de l'article L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration, isues de l'article 3 de la loi du 11 juillet 1979, alors même qu'ils ne reprennent pas l'intégralité des éléments caractérisant la situation de l'intéressé, ni ne font, en particulier, état de l'attitude coopérative qui a été la sienne au cours de l'enquête pénale.
3. M. A..., qui, ainsi qu'il a été dit au point 1, est entré régulièrement sur le territoire français le 26 décembre 2015 puis s'y est maintenu irrégulièrement après l'expiration de la durée de validité de son visa, fait état de la présence auprès de lui d'un oncle, d'une tante et de cousins, qui attestent entretenir avec lui des relations étroites. Il ajoute qu'il a exercé sans discontinuer, depuis le 4 mai 2016 et jusqu'à son placement en garde à vue, une activité professionnelle stable, dans le cadre d'un contrat de travail à durée indéterminée, en donnant entière satisfaction à son employeur, et qu'il justifie de compétences dans le domaine de la coiffure qui permettent de lui assurer une poursuite de son insertion professionnelle en France. Enfin, il fait état de l'attitude coopérative qu'il a adoptée au cours de l'enquête pénale dont il a fait l'objet et de ses efforts d'intégration, caractérisés par son engagement dans une association sportive locale et par une bonne maîtrise de la langue française. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que M. A... est célibataire et sans enfant. Il n'établit, ni d'ailleurs n'allègue, qu'il serait dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine, dans lequel il a habituellement vécu jusqu'à l'âge de vingt-deux ans. En outre, l'insertion professionnelle de M. A... en France doit être relativisée au regard du fait qu'il a obtenu une embauche sous contrat à durée indéterminée en ayant recours à une carte d'identité italienne falsifiée. Enfin, l'attitude coopérative adoptée par M. A... à l'égard des services de la police judiciaire, sa relative expérience en tant que coiffeur, la maîtrise de la langue française dont il ferait montre et son implication dans une association sportive ne peuvent suffire, même prises dans leur ensemble, à établir que la préfète de la Seine-Maritime, pour refuser de faire bénéficier M. A..., compte-tenu de la faible ancienneté et des conditions irrégulières de son séjour en France, d'une mesure de régularisation dans le cadre du pouvoir discrétionnaire qui lui est reconnu, et pour lui faire obligation de quitter le territoire français, aurait commis une erreur manifeste d'appréciation.
Sur le refus d'octroi d'un délai de départ volontaire :
4. Il résulte de ce qui a été dit aux points 2 et 3 que la décision faisant obligation à M. A... de quitter le territoire français n'est entachée d'aucune des illégalités invoquées. Par suite, le moyen tiré de ce que la décision refusant d'accorder à l'intéressé un délai de départ volontaire devrait être annulée par voie de conséquence de l'annulation de cette mesure d'éloignement doit être écarté.
5. Si, en vertu du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, l'étranger qui fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français dispose en principe d'un délai de trente jours pour y satisfaire, ce même II dispose toutefois que l'autorité administrative peut, par une décision motivée, décider que cet étranger est obligé de quitter sans délai le territoire français, lorsque notamment, selon le 3° de ce II, il existe un risque que l'intéressé se soustraie à cette obligation. Les a), b) et e) du 3° de ce paragraphe II précisent que ce risque est regardé comme établi, sauf circonstances particulières, respectivement, si le ressortissant étranger concerné, qui ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, n'a pas sollicité la délivrance d'un titre de séjour, si l'étranger s'est maintenu sur le territoire français au-delà de la durée de validité de son visa, sans avoir sollicité la délivrance d'un titre de séjour, et si l'étranger a contrefait, falsifié ou établi sous un autre nom que le sien un titre de séjour ou un document d'identité ou de voyage ou s'il a fait usage d'un tel titre ou document.
6. Les dispositions du 3° du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qui ont été prises pour la transposition du 4. de l'article 7 de la directive 2008/115/CE du 16 décembre 2008, définissent des critères objectifs permettant à l'autorité administrative d'établir l'existence d'un risque que le ressortissant étranger faisant l'objet d'une obligation de quitter le territoire français se soustraie à l'exécution de cette mesure. En outre, en prévoyant que des circonstances particulières peuvent faire obstacle à ce que le risque de fuite soit considéré comme établi dans l'hypothèse où un étranger entrerait dans un des cas ainsi définis, le législateur a imposé à l'administration un examen de la situation particulière de chaque étranger, en conformité avec le 7) de l'article 3 de la même directive, qui définit le risque de fuite comme " le fait qu'il existe des raisons, dans un cas particulier et sur la base de critères objectifs définis par la loi, de penser qu'un ressortissant d'un pays tiers faisant l'objet de procédures de retour peut prendre la fuite ". Le principe de proportionnalité, qui doit être assuré au cours de chacune des étapes de la procédure de retour, ainsi que l'a jugé la Cour de justice de l'Union européenne dans un arrêt El Dridi du 28 avril 2011, n'est pas, eu égard à ce qui précède, méconnu par les dispositions en cause. Il en résulte que M. A... n'est pas fondé à soutenir que les dispositions du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile seraient incompatibles avec les objectifs poursuivis par la directive 2008/115/CE du 16 décembre 2008.
7. Il ressort des pièces du dossier que M. A..., d'une part, s'est maintenu, comme il a été dit au point 1, sur le territoire français au-delà de la durée de validité de son visa, d'autre part, a fait usage d'un document d'identité italien falsifié afin d'obtenir indûment une embauche dans le cadre d'un contrat de travail à durée indéterminée. Il entrait ainsi dans les cas prévus au b) et au e), rappelés au point précédent, du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qui autorisaient l'autorité préfectorale à lui refuser légalement l'octroi d'un délai de départ volontaire, en dépit des circonstances qu'il était en possession d'un passeport en cours de validité, qu'il pouvait justifier d'une adresse stable et qu'il s'est montré coopératif dans le cadre de l'enquête pénale dont il avait fait l'objet. Par suite, les moyens tirés de ce que la préfète de la Seine-Maritime, en refusant de lui accorder un délai de départ volontaire, se serait méprise dans l'appréciation de sa situation au regard de ces dispositions du 3° du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et aurait méconnu ces dispositions, doivent être écartés.
Sur l'interdiction de retour sur le territoire français :
8. Il résulte de ce qui a été dit aux points 4 à 7 que la décision refusant d'accorder à M. A... un délai de départ volontaire n'est entachée d'aucune des illégalités invoquées. Par suite et en tout état de cause, le moyen tiré de ce que la décision lui faisant interdiction de retour sur le territoire français devrait être annulée par voie de conséquence de l'annulation de la décision de refus d'attribution d'un délai de départ volontaire doit être écarté.
9. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande. Ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte doivent, par voie de conséquence, être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de la Seine-Maritime.
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N°19DA01179