Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Par une décision n° 402237 du 23 mars 2018, le Conseil d'Etat statuant au contentieux a, saisi d'un pourvoi présenté par Mme C... H... épouse I..., annulé partiellement l'arrêt n° 15DA00784 de la cour administrative d'appel de Douai en date du 21 juin 2016 et a renvoyé l'affaire devant la même cour, pour statuer sur les conséquences dommageables des infections contractées par Mme G... H... autres que celle survenue en janvier 2003.
Par un mémoire, enregistré le 9 juillet 2018, Mme C... H... épouse I..., agissant en son nom personnel et en sa qualité d'ayant droit de sa mère, Mme G... H..., représentée par Me O... A..., demande à la cour :
1°) de condamner le centre hospitalier intercommunal d'Elbeuf-Louviers-Val de Reuil à lui verser, en qualité d'ayant droit de sa mère, une somme totale de 59 000 euros ;
2°) de condamner le centre hospitalier intercommunal d'Elbeuf-Louviers-Val de Reuil à lui verser, en son nom propre, une somme de 20 000 euros en indemnisation de son préjudice moral ;
3°) de mettre à la charge du centre hospitalier intercommunal d'Elbeuf-Louviers-Val de Reuil les entiers dépens et le versement d'une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
----------------------------------------------------------------------------------------------------------
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de la santé publique ;
- le code de la sécurité sociale ;
- l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Julien Sorin, président-assesseur,
- et les conclusions de Mme Anne-Marie Leguin, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. Par une décision n° 402237 du 23 mars 2018, le Conseil d'Etat statuant au contentieux a, saisi d'un pourvoi présenté par Mme C... H... épouse I..., annulé partiellement l'arrêt de la cour administrative d'appel de Douai en date du 21 juin 2016 et a renvoyé l'affaire devant la même cour, pour qu'il soit statué sur les conséquences dommageables des infections contractées par Mme G... H... autres que celle survenue au mois de janvier 2003.
Sur la responsabilité du centre hospitalier intercommunal d'Elbeuf-Louviers-Val de Reuil :
2. Aux termes du second alinéa du I de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique : " Les établissements, services et organismes susmentionnés sont responsables des dommages résultant d'infections nosocomiales, sauf s'ils rapportent la preuve d'une cause étrangère ". Doit être regardée comme présentant un caractère nosocomial au sens de ces dispositions une infection survenant au cours ou au décours de la prise en charge d'un patient et qui n'était ni présente, ni en incubation au début de celle-ci, sauf s'il est établi qu'elle a une autre origine que la prise en charge.
3. Mme H... a contracté au cours de ses nombreux séjours hospitaliers, diverses infections, recensées par le rapport d'expertise déposé à la demande de la commission régionale de conciliation et d'indemnisation des accidents médicaux de Basse-Normandie le 8 juillet 2010 et par le rapport d'expertise judiciaire déposé le 23 novembre 2008, et dont il appartient à la cour d'apprécier le caractère nosocomial.
4. Il résulte, en premier lieu, de l'instruction que Mme H... a bénéficié, devant l'échec des tentatives d'alimentation par voie orale, de la mise en place d'une gastrotomie par voie endoscopique le 21 mai 2003. Retournée à son domicile sept jours plus tard, le 28 mai 2003, sans qu'aucune infection n'ait été diagnostiquée, elle y a contracté, dans le courant du mois de juin, une infection de l'orifice de gastrotomie ayant motivé son hospitalisation au centre hospitalier universitaire de Rouen à compter du 28 juin 2003. L'infection est due, selon le rapport d'expertise en date du 23 novembre 2008, " à un bacille pyocyanique de sensibilité classique ; ce germe, qui vit dans l'eau, a été acquis hors du milieu hospitalier ". Dans ces conditions, l'infection en cause, contractée à domicile et causée par un germe s'étant développé en dehors du milieu hospitalier, ne saurait être qualifiée de nosocomiale. En tout état de cause, il résulte du rapport d'expertise déposé le 8 juillet 2010 que cette infection n'était pas d'une particulière gravité et n'avait engendré aucune séquelle, et qu'elle a été traitée favorablement par des soins locaux et une antibiothérapie adaptée. Il ne résulte ainsi pas de l'instruction que cet épisode infectieux puisse être regardé, dans les circonstances de l'espèce, comme à l'origine d'un quelconque préjudice.
5. Il résulte, en deuxième lieu, de l'instruction qu'une première sonde urinaire a été installée au centre hospitalier intercommunal d'Elbeuf-Louviers-Val de Reuil au cours du séjour du 13 mars au 28 mai 2003. Une nouvelle sonde sera posée au cours du séjour du 28 juin au 4 juillet 2003 au centre hospitalier universitaire de Rouen. Si le centre hospitalier intercommunal d'Elbeuf-Louviers-Val de Reuil soutient que seul le centre hospitalier universitaire pourrait être tenu pour responsable de l'infection urinaire sur sonde contractée par Mme H... et identifiée au cours de ce séjour, il résulte de l'instruction que l'intéressée a contracté plusieurs infections urinaires sur sonde, notamment au centre hospitalier intercommunal d'Elbeuf-Louviers-Val de Reuil où elle a été à nouveau admise à compter du 14 août 2003 et où a été identifié, aux mois d'août et de septembre, le germe staphylocoque doré résistant à la méticilline responsable de ces infections. Si, en outre, cette infection, contractée à plusieurs reprises dont au moins une fois au centre hospitalier intercommunal d'Elbeuf-Louviers-Val de Reuil, doit être regardée comme présentant un caractère nosocomial, les experts relèvent qu'aucune antibiothérapie n'a été mise en oeuvre, et que l'infection a été traitée par le renforcement de la diurèse et le changement, voire l'ablation transitoire du matériel endo-urinaire. Il résulte en revanche de l'instruction, et notamment des rapports d'expertise, que ces infections bénignes, qui n'ont entraîné, par elles-mêmes, aucune séquelle et n'ont imposé aucun traitement médical particulier, n'ont pas été à l'origine de douleurs ou de troubles dans les conditions d'existence susceptibles de donner lieu à indemnisation.
6. En troisième lieu, Mme H... a été victime de plusieurs épisodes de surinfection bronchique à pseudomonas causés par l'inhalation de bactéries du contenu pharyngé provoquée par la régurgitation du liquide gastrique, qui avait pénétré dans les bronches de la patiente en raison d'un trouble de la déglutition consécutif à l'accident vasculaire cérébral dont elle avait été victime. Le rapport d'expertise déposé le 8 juillet 2010 relève que " ce type de situation correspond au même raisonnement que celui posé précédemment concernant la pneumopathie précoce ", dont le caractère nosocomial de l'infection qui en est résulté a été écarté par l'arrêt de la cour et la décision du Conseil d'Etat. Les surinfections bronchiques en cause doivent ainsi être regardées comme la conséquence non des actes pratiqués dans le cadre de la prise en charge de la patiente ou de son séjour dans l'environnement hospitalier mais de la pathologie qui a nécessité son hospitalisation, et ne sauraient par suite être qualifiées de nosocomiales au sens des dispositions citées ci-dessus du code de la santé publique.
7. En quatrième lieu, il résulte de l'instruction, et notamment du rapport d'expertise du 8 juillet 2010, que si une candidose invasive (infection fongique causée par des levures du genre Candida) a été suspectée au mois d'octobre 2003 et traitée à titre préventif " de façon probabiliste ", elle n'a jamais été documentée, ni confirmée. En l'absence d'éléments suffisants permettant d'établir qu'une infection aurait effectivement été contractée, la responsabilité du centre hospitalier intercommunal d'Elbeuf-Louviers-Val de Reuil ne saurait être engagée à ce titre à l'égard de Mme H....
8. Enfin, si un épisode de gastroentérite fébrile non documenté s'agissant de son étiologie (virale ou bactérienne) est survenu au centre de Martot au mois de mars 2005, il ne résulte pas de l'instruction que cet épisode, traité par une antibiothérapie probabiliste et qui n'a évolué vers aucune séquelle, ait pu être à l'origine de douleurs ou de troubles dans les conditions d'existence susceptibles de donner lieu à indemnisation.
9. Il résulte de ce qui précède que Mme I... n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a rejeté son recours tendant à l'indemnisation des épisodes infectieux autres que celui subi au mois de janvier 2003. Il y a, par suite, lieu de rejeter sa requête d'appel, ensemble les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative dont elle est assortie.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme I... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... H... épouse I..., au centre hospitalier intercommunal d'Elbeuf-Louviers-Val de Reuil et à l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales.
Copie sera adressée à la caisse primaire d'assurance maladie de Rouen-Elbeuf-Dieppe-Seine Maritime, à M. M... H..., à Mme D... J... née H..., à M. B... H..., à M. F... H..., à M. K... H..., à M. Q... H..., à Mme P... H..., à M. L... H..., à M. R... H... et à Mme E... N... née H....
2
N°18DA00729