Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... C... a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 10 avril 2015 par laquelle le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social a annulé la décision de l'inspecteur du travail du 27 août 2014 refusant d'autoriser son licenciement et a retiré la décision implicite rejetant le recours hiérarchique de la société Akzo Nobel Packaging Coatings contre cette décision de l'inspecteur du travail.
Par un jugement n° 1501633 du 6 avril 2017, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et des mémoires, enregistrés le 2 juin 2017, le 23 mars 2018, le 27 avril 2018 et le 11 juillet 2019, M. B... C..., représenté par Me A... D..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 10 avril 2015 par laquelle le ministre du travail a autorisé son licenciement ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat et de la société Akzo Nobel, la somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code du travail;
- la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Denis Perrin, premier conseiller
- les conclusions de M. Hervé Cassara, rapporteur public,
- et les observations de Me D..., représentant M. C..., et de Me E..., substituant Me F..., représentant la société Akzo Nobel Packaging Coatings.
Considérant ce qui suit :
1. M. C... était salarié de la société Akzo Nobel Packaging Coatings, employé sur le site de Saint-Pierre-lès-Elbeuf et membre titulaire de la délégation unique du personnel. Ce site fabriquait, exclusivement, des revêtements alimentaires utilisant du bisphénol A. Son employeur a demandé l'autorisation de licencier M. C..., qui a été refusée par décision de l'inspecteur du travail du 27 août 2014. Toutefois, par décision du 10 avril 2015, le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social a retiré cette décision ainsi que le rejet implicite du recours hiérarchique formé contre celle-ci et a autorisé le licenciement de M. C.... Celui-ci relève appel du jugement du tribunal administratif de Rouen qui a rejeté sa demande d'annulation pour excès de pouvoir de cette décision ministérielle du 10 avril 2015.
2. En premier lieu, aux termes de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 alors en vigueur et désormais codifié par le code des relations entre le public et l'administration : " Exception faite des cas où il est statué sur une demande, les décisions individuelles qui doivent être motivées en application des articles 1er et 2 de la loi no 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public n'interviennent qu'après que la personne intéressée a été mise à même de présenter des observations écrites et, le cas échéant, sur sa demande, des observations orales. Cette personne peut se faire assister par un conseil ou représenter par un mandataire de son choix. L'autorité administrative n'est pas tenue de satisfaire les demandes d'audition abusives, notamment par leur nombre, leur caractère répétitif ou systématique. ". Par courrier daté du 30 mars 2015, produit pour la première fois en appel, le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social a demandé à M. C... de faire part de ses observations préalablement à la décision de retrait envisagée, conformément aux dispositions précitées, dans un délai de dix jours à compter de la réception de ce courrier. Toutefois, la seule production de cette pièce ne suffit à démontrer que ce délai n'aurait pas été respecté à la date à laquelle le ministre du travail s'est prononcé, le 10 avril 2015. M. C... n'établit pas non plus qu'il ait fait parvenir, dans ce délai, ses observations. Enfin, s'il soutient que ce délai de dix jours était insuffisant, il ne résulte pas de ce qui précède qu'il n'ait pas été mis à même de présenter des observations préalablement à la décision autorisant son licenciement. Par suite, M. C... n'a été privé d'aucune garantie et n'est donc pas fondé à soutenir que le principe du contradictoire n'aurait pas été respecté.
3. En deuxième lieu, la délégation unique du personnel a été informée, dès le 17 décembre 2014, du projet de réorganisation de la société. Le 3 mars 2014, le comité d'entreprise a émis un avis défavorable sur ce projet, alors que, le même jour, un accord majoritaire était conclu sur le plan de sauvegarde de l'emploi, qui était ensuite validé le 19 mars 2014 par le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi de Haute-Normandie. Le fait que la perspective de l'interdiction du bisphénol A ait été connue bien avant l'entrée en vigueur de la loi du 24 décembre 2012 ne suffit pas à démontrer que la fermeture du site aurait été décidée bien avant l'information et la consultation des représentants du personnel, ceux-ci ayant été au surplus informés, à de nombreuses reprises, des perspectives d'interdiction du bisphénol A. Par suite, il n'est pas établi, en tout état de cause, que la procédure d'information et de consultation des représentants des personnels était irrégulière.
4. En troisième lieu, les circonstances que la stratégie du groupe Akzo Nobel, notamment en matière de localisation des processus de fabrication sans bisphénol A, ait eu une incidence sur l'activité de la société Akzo Nobel Packaging Coatings ou que la paie de cette société soit externalisée, ne suffisent pas à démontrer que cette société ne serait pas le véritable employeur du demandeur. Au contraire, cette société apporte de nombreux éléments démontrant son autonomie de gestion, alors que l'appelant ne produit aucune pièce probante en sens inverse tendant à établir une confusion d'intérêts, d'activités et de direction se caractérisant par une immixtion du groupe dans la gestion économique et sociale de sa filiale. Par suite, le moyen tiré de ce que le groupe Akzo Nobel aurait dû, en tant que co-employeur, demander l'autorisation de licenciement de M. C... ne peut qu'être écarté.
5. Lorsque la demande d'autorisation de licenciement pour motif économique est fondée sur la cessation d'activité de l'entreprise, il appartient à l'autorité administrative de contrôler que cette cessation d'activité est totale et définitive. Il ne lui appartient pas, en revanche, de contrôler si cette cessation d'activité est justifiée par l'existence de mutations technologiques, de difficultés économiques ou de menaces pesant sur la compétitivité de l'entreprise. Il incombe ainsi à l'autorité administrative de tenir compte, à la date à laquelle elle se prononce, de tous les éléments de droit ou de fait recueillis lors de son enquête qui sont susceptibles de remettre en cause le caractère total et définitif de la cessation d'activité. Il lui incombe également de tenir compte de toute autre circonstance qui serait de nature à faire obstacle au licenciement envisagé, notamment celle tenant à une reprise, même partielle, de l'activité de l'entreprise impliquant un transfert du contrat de travail du salarié à un nouvel employeur en application de l'article L. 1224-1 du code du travail. Lorsque l'entreprise appartient à un groupe, la seule circonstance que d'autres entreprises du groupe aient poursuivi une activité de même nature ne fait pas, par elle-même, obstacle à ce que la cessation d'activité de l'entreprise soit regardée comme totale et définitive.
6. En quatrième lieu, dès la demande d'autorisation adressée à l'inspecteur du travail, la cessation d'activité avait été évoquée comme motif économique du licenciement par la société Akzo Nobel Packaging Coatings, comme le confirment les termes mêmes de la décision de l'inspecteur du travail. Il était donc loisible, au ministre du travail, après avoir retiré cette décision, de retenir comme motif de l'autorisation, la cessation totale et définitive de l'activité, un tel motif pouvant légalement fonder une décision de licenciement pour raison économique. Le moyen tiré de l'erreur de droit est, en conséquence, écarté.
7. En cinquième lieu, il n'est pas sérieusement contesté que le site de Saint-Pierre-lès-Elbeuf produisait exclusivement des revêtements de contenants alimentaires comportant du bisphénol A. Or ce produit a été interdit par la loi du 24 décembre 2012. En conséquence, toute activité de production a cessé sur ce site. Si des salariés ont été maintenus sur le site, c'est uniquement pendant la durée de la période de reclassement. Les autres salariés du site dont l'emploi n'a pas été supprimé, exercent soit en télétravail, soit ont été rattachés à d'autres entités. La seule circonstance que d'autres entreprises du même groupe aient poursuivi une activité de production de revêtements alimentaires ne fait pas, par elle-même, obstacle à ce que la cessation d'activité du site soit regardée comme totale et définitive. De même, la circonstance que la société elle-même ait poursuivi son activité, est également sans incidence sur cette appréciation, dès lors qu'il n'est ni établi, ni même soutenu que cette activité s'exerce dans le même secteur des revêtements alimentaires, que celle menée sur le site de Saint-Pierre-lès-Elbeuf. Par suite, M. C... n'est pas fondé à soutenir que le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social a fait une inexacte application des dispositions du code du travail en retenant comme motif fondant l'autorisation de licenciement la cessation totale et définitive d'activité.
8. En sixième lieu, dès lors que la cessation d'activité est totale et définitive, il n'appartient pas à l'autorité administrative d'apprécier les menaces pesant sur la compétitivité de l'entreprise. Par suite, le moyen tiré de l'erreur d'appréciation en raison de l'absence de telles menaces, est écarté comme inopérant. Au surplus, la société établit que son activité dans ce secteur au niveau du groupe a diminué de 4% entre 2012 et 2014 alors que le secteur était en croissance.
9. En septième lieu, l'activité du site de Saint-Pierre-lès-Elbeuf n'a été ni cédée, ni reprise par une autre société du groupe. Par suite, le contrat de travail de M. C... n'a pas été transféré et en conséquence, il ne peut soutenir que son licenciement devait être refusé pour ce motif. De même l'activité ayant cessé sur le site de Saint-Pierre-lès-Elbeuf et n'ayant pas été transférée, il ne peut soutenir que son emploi n'a pas été supprimé.
10. En huitième et dernier lieu, il ressort des pièces du dossier que M. C... n'a pas retourné le questionnaire sur la mobilité à l'étranger. La société a donc pu considérer qu'il ne souhaitait pas une telle mobilité. Par ailleurs, la société a proposé huit postes de reclassement à M. C.... Si quatre de ces postes avaient un coefficient inférieur de rémunération à celui de l'emploi qu'occupait M. C... et si un cinquième était un contrat à durée déterminée de deux mois, l'appelant n'établit pas que les autres postes proposés ne correspondaient ni à ses compétences, ni à son niveau de rémunération. Il fait valoir que ces postes se situaient loin de son domicile. Toutefois, compte tenu de la cessation d'activité de production sur le site et de l'ensemble des démarches entreprises, la société Akzo Nobel a effectué une recherche sérieuse de reclassement. Le moyen tiré de l'absence de respect des obligations de reclassement ne peut donc qu'être écarté.
11. Il résulte de tout ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande. Par suite, ses conclusions, y compris celles au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions de la société Akzo Nobel Packaging Coatings sur le même fondement.
D E C I D E:
Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions de la société Akzo Nobel Packaging Coatings au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... C..., à la ministre du travail et à la société Akzo Nobel Packaging Coatings.
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N° 17DA01075