Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Lille, sous le n° 1300416, de condamner la commune d'Hénin-Beaumont à lui verser une somme de 80 000 euros en réparation des préjudices subis du fait du harcèlement moral dont il estime avoir été victime, d'annuler la sanction conservatoire, notifiée le 7 septembre 2012, d'exclusion du comité de direction, la décision par laquelle le maire de la commune d'Hénin-Beaumont a refusé de lui accorder la protection fonctionnelle, la décision du 6 novembre 2012 par laquelle le maire de la commune l'a mis à disposition de la caisse des écoles et ses deux arrêtés n° 2012-2025 et 2012-2260 du 15 novembre 2012 et du 21 décembre 2012, portant recrutement du directeur des sports et de la vie associative.
M. C... a également demandé au tribunal administratif de Lille, sous le n° 1407008, d'annuler les décisions implicites du 25 avril 2014 et du 21 août 2014 par lesquelles le maire de la commune d'Hénin-Beaumont a rejeté ses demandes tendant à la régularisation de sa situation administrative au sein de la caisse des écoles et à l'indemnisation des conséquences de celle-ci et de condamner la commune d'Hénin-Beaumont à lui verser une somme de 85 000 euros en réparation des préjudices subis, assortie des intérêts au taux légal à compter de la réclamation indemnitaire préalable du 17 juin 2014.
Par un jugement n° 1300416, 1407008 du 7 juin 2017, le tribunal administratif de Lille a prononcé un non-lieu à statuer sur les conclusions d'annulation du refus opposé à la demande de protection fonctionnelle présentée par M. C..., a annulé les décisions du 11 octobre 2012 et 6 novembre 2012 du maire d'Hénin-Beaumont mettant M. C... à disposition de la caisse des écoles, a condamné la commune à lui verser une somme de 3 000 euros, avec intérêts au taux légal et a rejeté le surplus des conclusions de ses demandes.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 4 août 2017, M. C..., représenté par Me B... E..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement en tant que le tribunal administratif a rejeté ses conclusions indemnitaires présentées au titre du harcèlement moral ;
2°) de condamner la commune d'Hénin-Beaumont à lui verser une somme de 80 000 euros ;
3°) de mettre à la charge de la commune d'Hénin-Beaumont la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des collectivités territoriales ;
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- la loi n°84-53 du 26 janvier 1984 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Paul-Louis Albertini, président de chambre,
- les conclusions de M. Hervé Cassara, rapporteur public,
- les observations de Me B... E..., représentant M. C... et Me D... F..., représentant la commune d'Hénin-Beaumont.
Considérant ce qui suit :
1. M. C... a été recruté au cours de l'année 2002 par la commune d'Hénin-Beaumont, en tant qu'agent contractuel, afin d'occuper un emploi de directeur adjoint du centre d'animation de la jeunesse. Nommé, après sa réussite aux concours, éducateur, puis conseiller d'activités physiques et sportives, il a été affecté, au cours de l'année 2006, sur un poste de chargé de mission auprès du directeur du service des sports et a, ensuite, été nommé responsable de la piscine municipale, à compter du 24 septembre 2007. Souhaitant accéder à la filière administrative, il a occupé à compter de 2008 le poste de responsable de la commande publique, puis celui de contrôleur de gestion en novembre 2010, et a été reclassé, à compter du 1er juillet 2011, au grade d'attaché territorial. Par des décisions du 11 octobre 2012 et du 6 novembre 2012, il a été affecté à compter du novembre 2012 auprès de la caisse des écoles de la commune. A partir du 13 octobre 2014, il a été nommé sur un poste de responsable des affaires financières. M. C... a enfin, en dernier lieu, été nommé en 2016 au poste de responsable du service foncier de la commune. Par un jugement du 7 juin 2017, devenu définitif sur ce point, le tribunal administratif de Lille, à la demande de M. C..., a annulé les décisions d'octobre et novembre 2012 par lesquelles il a été affecté à la caisse des écoles et a condamné la commune à lui verser une indemnité de 3 000 euros en réparation du préjudice moral subi du fait de l'illégalité de cette affectation. Le tribunal administratif a, par ailleurs, prononcé également un non-lieu à statuer sur les conclusions de M. C... tendant à l'annulation du refus opposé à sa demande de protection fonctionnelle, la commune lui ayant accordé finalement cette protection. M. C... relève appel du jugement du 7 juin 2017 en tant seulement que le tribunal administratif de Lille a rejeté ses conclusions indemnitaires présentées à raison du harcèlement moral qu'il estime avoir subi.
2. Aux termes de l'article 6 quinquies de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, issu de la loi du 17 janvier 2002 de modernisation sociale : " Aucun fonctionnaire ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel. (...) ".
3. D'une part, il appartient à un agent public qui soutient avoir été victime d'agissements constitutifs de harcèlement moral, de soumettre au juge des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence d'un tel harcèlement. Il incombe à l'administration de produire, en sens contraire, une argumentation de nature à démontrer que les agissements en cause sont justifiés par des considérations étrangères à tout harcèlement. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si les agissements de harcèlement sont ou non établis, se détermine au vu de ces échanges contradictoires, qu'il peut compléter, en cas de doute, en ordonnant toute mesure d'instruction utile.
4. D'autre part, pour apprécier si des agissements dont il est allégué qu'ils sont constitutifs d'un harcèlement moral revêtent un tel caractère, le juge administratif doit tenir compte des comportements respectifs de l'agent auquel il est reproché d'avoir exercé de tels agissements et de l'agent qui estime avoir été victime d'un harcèlement moral. En revanche, la nature même des agissements en cause exclut, lorsque l'existence d'un harcèlement moral est établie, qu'il puisse être tenu compte du comportement de l'agent qui en a été victime pour atténuer les conséquences dommageables qui en ont résulté pour lui. Le préjudice résultant de ces agissements pour l'agent victime doit alors être intégralement réparé.
5. M. C... soutient avoir été victime de harcèlement moral à compter de 2008 de la part de sa hiérarchie. Il fait valoir avoir été en conflit ouvert avec le directeur général des services, qui l'a dénigré et accusé de manière totalement infondée et qui était déjà, auparavant, son supérieur hiérarchique, alors qu'il travaillait au service des sports. Il a été privé d'un emploi réel en 2012, lors de son affectation à la caisse des écoles de la commune, et n'a eu aucune mission à accomplir au cours de cette période. Le tribunal administratif a, d'ailleurs, annulé cette affectation. Il s'est vu également refuser, à plusieurs reprises, la protection fonctionnelle, pour les faits de harcèlement moral qu'il dénonce et pour des propos diffamatoires tenus sur un blog, dont il a été l'objet en 2013, émanant d'agents de la commune. Le maire s'est discrétionnairement opposé à l'octroi de cette protection, alors qu'une telle décision relève de la compétence du conseil municipal. L'autorité municipale n'a par ailleurs pris aucune mesure pour apaiser les tensions, ce qui a conduit à une dégradation considérable de la situation. Il fait également valoir qu'il souffre d'un état dépressif sévère.
6. Toutefois, il résulte de l'instruction, tout d'abord, que M. C... a fait l'objet, au moins à deux reprises lorsqu'il dirigeait la piscine municipale, de récriminations de la part de deux habitantes de la commune, qui souhaitaient faire suivre des cours de natation à leurs enfants. Si M. C... conteste les faits, son supérieur hiérarchique n'a pour autant pas excédé l'exercice normal de son pouvoir hiérarchique en lui demandant de fournir des explications, puis en rédigeant, les 31 janvier et 20 mars 2008, deux notes à l'attention du maire sur les difficultés rencontrées avec M. C..., dans lesquelles il a estimé que son maintien au poste de responsable de la piscine était contraire à l'intérêt du service. Il résulte par ailleurs de la dernière note de son supérieur hiérarchique que M. C... avait lui-même pour souhait d'intégrer la filière administrative de la fonction publique territoriale, compte tenu de son diplôme d'enseignement supérieur spécialisé en gestion et droit des affaires.
7. Ensuite, si le tribunal administratif a annulé les décisions par lesquelles M. C... a été affecté à la caisse des écoles, dans la mesure où il n'avait pas donné son accord à cette affectation, alors qu'il s'agissait d'une mise à disposition, il ne résulte pas de l'instruction qu'il n'aurait pas disposé du matériel nécessaire à l'accomplissement de ses missions d'analyse de gestion au sein de cet établissement public et qu'il n'aurait pas eu un emploi impliquant une activité réelle. Il lui avait ainsi été demandé, notamment, dans une note de cadrage détaillée, d'élaborer une stratégie d'intervention pour améliorer l'ensemble des points d'optimisation de la gestion et de l'organisation du service. Une telle mission d'analyse de gestion relève certainement, au regard des dispositions de l'article 2 du décret du 30 décembre 1987 portant statut particulier du cadre d'emplois des attachés territoriaux et de son diplôme cité au point 6, des tâches qui peuvent être confiées à un attaché territorial, ce qu'il était depuis septembre 2011.
8. En outre, il résulte de l'instruction que les refus explicites opposés par le maire, auquel, contrairement à ce qu'allègue M. C..., il appartenait de se prononcer sur cette demande d'octroi de protection fonctionnelle présentée par un agent de la commune, dès lors qu'il est " chargé de l'administration communale " en vertu de l'article L. 2122-18 du code général des collectivités territoriales, ont fait l'objet de motivations circonstanciées. La commune avait, au demeurant, recueilli en 2012 les conseils d'un cabinet d'avocat avant de prendre sa décision. La circonstance que la commune n'ait pas fait droit, jusqu'en 2014, aux demandes de protection fonctionnelle présentées régulièrement par M. C..., ne saurait non plus révéler, à elle-seule, dans ces conditions, un agissement constitutif de harcèlement moral.
9. Pour le reste, si les arrêts de travail de mars 2013 versés au dossier mentionnent que M. C... souffre d'un " syndrome anxio-dépressif réactionnel en lien avec une situation conflictuelle ", le médecin du travail, dans une attestation du 23 septembre 2013, relatant en outre les propos de M. C... sur ses difficultés professionnelles, il ne peut être regardé comme établi que l'origine de ses troubles serait liée à des faits de harcèlement moral.
10. Dans ces conditions, les faits et agissements ainsi relatés, pris isolément ou dans leur ensemble, ne permettent pas d'établir que M. C... a été victime de harcèlement moral de la part de sa hiérarchie.
11. Il résulte de tout de ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté ses conclusions indemnitaires fondées sur le harcèlement moral dont il estime avoir été victime. Ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent, par voie de conséquence, être rejetées. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. C... une somme à verser à la commune d'Hénin-Beaumont au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions présentées par la commune d'Hénin-Beaumont au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C... et à la commune d'Hénin-Beaumont.
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N°17DA01593
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