Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. F... H... et Mme C... A... épouse H... ont demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler les arrêtés du 12 novembre 2018 du préfet du Pas-de-Calais retirant le titre de séjour de M. H... et refusant de renouveler celui de Mme A..., leur faisant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de destination de cette mesure.
Par deux jugements n° 1811194 et n° 1811195 du 27 février 2019, le tribunal administratif de Lille a rejeté leur demande.
Procédure devant la cour :
I. Par une requête et un mémoire, enregistrés le 18 mars 2019 et le 11 juillet 2019, sous le n° 19DA00663, M. F... H..., représenté par Me E... B..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1811194 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 12 novembre 2018 du préfet du Pas-de-Calais ;
3°) d'enjoindre au préfet du Pas-de-Calais de procéder à un réexamen de sa situation dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et dans l'attente de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 800 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
-------------------------------------------------------------------------------------------------------------
II. Par une requête et un mémoire, enregistrés le 22 mars 2019 et le 11 juillet 2019, sous le n° 19DA00713, Mme C... A... épouse H..., représentée par Me E... B..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1811195 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 12 novembre 2018 du préfet du Pas-de-Calais ;
3°) d'enjoindre au préfet du Pas-de-Calais de procéder au réexamen de sa situation et dans l'attente de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 800 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
------------------------------------------------------------------------------------------------------------
Vu les autres pièces des dossiers.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Muriel Milard, premier conseiller,
- et les observations de M. G... D..., chef du bureau du contentieux des étrangers, représentant le préfet du Pas-de-Calais.
Considérant ce qui suit :
1. M. H..., se déclarant de nationalité tchèque, né le 9 février 1975 s'est vu délivrer, sur le fondement d'un passeport délivré par les autorités tchèques, un titre de séjour portant la mention " ressortissant UE ", valable du 15 décembre 2011 au 14 décembre 2021. A la suite de la demande de renouvellement du titre de séjour portant la mention " famille de ressortissant UE " de son épouse Mme H..., de nationalité marocaine née le 1er septembre 1976, entrée en France en avril 2016, le préfet du Pas-de-Calais a retiré le titre de séjour délivré à M. H... et a refusé la demande de renouvellement de titre de séjour de son épouse, par deux arrêtés du 12 novembre 2018. Ces décisions ont été assorties d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et d'une décision fixant le pays de destination de cette mesure. Les époux H... relèvent appel des jugements du 27 février 2019 par lesquels le tribunal administratif de Lille a rejeté leur demande tendant à l'annulation des arrêtés du 12 novembre 2018.
2. Les requêtes n° 19DA00663 et n° 19DA00713 présentées pour M. et Mme H... présentent à juger des questions semblables. Il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt.
Sur les décisions relatives aux titres de séjour :
3. Aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : / 1° Restreignent l'exercice des libertés publiques ou, de manière générale, constituent une mesure de police (...) ". Aux termes de l'article L. 211-5 du même code : " La motivation exigée par le présent chapitre doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision ".
4. Les décisions de refus de titre de séjour énoncent les considérations de droit et de fait sur lesquelles elles se fondent, et citent les éléments pertinents dont le préfet avait connaissance. Elles sont, dès lors, régulièrement motivées au regard des exigences des articles L. 211-2 et L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration précités, alors même que les motifs ne reprennent pas l'ensemble des éléments caractérisant la situation personnelle et familiale de M. et Mme H.... Ainsi, le moyen tiré du défaut de motivation des décisions attaquées doit être écarté.
5. Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) / 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République (...) ".
6. Il est constant que M. H... a fait usage d'un passeport tchèque falsifié pour obtenir une carte de résident " UE longue durée " dont la détention a permis à son épouse de bénéficier d'un premier titre de séjour en qualité de conjoint d'un ressortissant de l'Union européenne. M. H... fait valoir qu'il réside en France depuis 2004, que son épouse est venue le rejoindre ainsi que leurs deux premiers enfants, qu'il est également père d'un troisième enfant mineur né en France et qu'il est parfaitement intégré professionnellement dès lors qu'il a son propre commerce d'alimentation. Toutefois, il n'établit pas sa résidence habituelle en France avant 2011 par la seule production d'avis d'imposition et d'attestation d'aide médicale. Son intégration professionnelle n'a été que très ponctuelle en 2012 et 2013. Son épouse n'est entrée en France qu'en avril 2016, et leurs deux enfants aînés en avril 2017. La cellule familiale, éclatée pendant quelques années, peut se reconstituer au Maroc où leurs deux premiers enfants, arrivés respectivement à l'âge de dix-huit ans et seize ans peuvent y poursuivre leur scolarité. Leur troisième enfant, né sur le territoire français, n'est âgé que de deux ans et demi à la date des décisions en litige et peut également poursuivre sa vie hors de France avec ses parents. Enfin, si les requérants se prévalent de la présence des parents de Mme H... et de ses deux frères, ils n'établissent cependant pas être isolés dans leur pays d'origine où ils ont vécu respectivement jusqu'à l'âge de trente-six ans et quarante ans. Dans ces conditions, eu égard aux manoeuvres frauduleuses dont les intéressés ont usé pour séjourner en France, au caractère récent de la présence en France de Mme H... et malgré l'insertion professionnelle de son mari, les décisions contestées ne portent pas au droit des intéressés au respect de leur vie privée et familiale, une atteinte disproportionnée par rapport aux motifs du retrait de la carte de résident de M. H... et du refus de renouvellement du titre de séjour de son épouse et ne méconnaissent ainsi pas les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni les dispositions précitées du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Pour les mêmes motifs, ces décisions ne sont pas davantage entachées d'une erreur manifeste d'appréciation quant aux conséquences sur la situation personnelle des requérants et ne méconnaissent pas les stipulations du paragraphe 1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.
Sur les décisions faisant obligation de quitter le territoire français :
7. Il résulte de ce qui précède que les décisions de retrait et de non-renouvellement des titres de séjour ne sont pas entachées d'illégalité. Dans ces conditions, le moyen tiré de l'illégalité de ces décisions doit être écarté.
8. Pour les mêmes motifs que ceux retenus au point 6, les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, de l'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de ces décisions sur leur situation personnelle et de la méconnaissance des stipulations du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant doivent être écartés.
Sur les décisions fixant un délai de départ volontaire de trente jours :
9. Il résulte de ce qui précède que les décisions de retrait et de non-renouvellement du titre de séjour et celles faisant obligation de quitter le territoire français notifiées à M. et Mme H... ne sont pas entachées d'illégalité. Dans ces conditions, le moyen tiré de l'illégalité de ces décisions doit être écarté.
10. Le préfet du Pas-de-Calais a accordé à M. H... le délai de droit commun de trente jours pour quitter le territoire français. L'intéressé n'établit pas avoir présenté une demande afin de bénéficier d'un délai plus long en faisant état de circonstances particulières. Il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet du Pas-de-Calais, qui a procédé à un examen particulier de la situation de M. H... pour fixer le délai qu'il lui a été imparti pour quitter le territoire français, aurait ainsi entaché la décision en litige d'une erreur manifeste d'appréciation de la situation du requérant.
Sur les décisions fixant le pays de destination :
11. Il résulte de ce qui précède que les décisions obligeant M. et Mme H... à quitter le territoire français dans un délai de trente jours ne sont pas entachées d'illégalité. Dans ces conditions, le moyen tiré de l'illégalité de ces décisions doit être écarté.
12. La décision attaquée fixant, comme pays de destination, le pays dont M. H... a la nationalité ou tout autre pays vers lequel il serait légalement admissible, mentionne que l'intéressé a vécu au Maroc pendant trente-six années et qu'il possède cette nationalité. En outre, elle vise les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et relève que l'intéressé n'établit pas être exposé à des peines ou traitements contraires à cette convention en cas de retour dans son pays d'origine. Par suite, le moyen tiré du défaut de motivation de la décision fixant le pays à destination duquel sera reconduit M. H... manque en fait.
13. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme H... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par les jugements attaqués, le tribunal administratif de Lille a rejeté leur demande. Doivent être rejetées, par voie de conséquence, leurs conclusions à fin d'injonction sous astreinte ainsi que celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DÉCIDE :
Article 1er : Les requêtes de M. H... et de Mme A... épouse H... sont rejetées.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. F... H..., à Mme C... A... épouse H... et au ministre de l'intérieur.
Copie sera adressée au préfet du Pas-de-Calais.
2
N°19DA00663,19DA00713