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14/11/2019 | FRANCE | N°19DA01226

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3ème chambre, 14 novembre 2019, 19DA01226


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... C..., épouse E..., a demandé au tribunal administratif d'Amiens d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 8 février 2019 par lequel le préfet de l'Oise lui a refusé un titre de séjour et l'a obligé à quitter le territoire français.

Par un jugement n° 1900615 du 2 mai 2019, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 27 mai 2019, Mme E..., représentée par Me D... A..., demande à la cour :
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2°) d'annuler les décisions en date du 8 février 2019 lui re...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... C..., épouse E..., a demandé au tribunal administratif d'Amiens d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 8 février 2019 par lequel le préfet de l'Oise lui a refusé un titre de séjour et l'a obligé à quitter le territoire français.

Par un jugement n° 1900615 du 2 mai 2019, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 27 mai 2019, Mme E..., représentée par Me D... A..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 2 mai 2019 ;

2°) d'annuler les décisions en date du 8 février 2019 lui refusant un titre de séjour et l'obligeant à quitter le territoire français ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Perrin, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme E..., de nationalité marocaine, est entrée sur le territoire français le 1er juin 2016, selon ses déclarations. Elle s'est mariée le 9 juin 2018 à Creil avec M. E... de nationalité française. Elle a demandé, le 2 août 2018, un titre de séjour en tant que conjoint de français, qui lui a été refusé par arrêté du préfet de l'Oise du 8 février 2019 portant également obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et fixant le pays de renvoi. Elle relève appel du jugement du 2 mai 2019 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa requête.

Sur la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour :

2. D'une part, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : / (...) / 4° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, marié avec un ressortissant de nationalité française, à condition que la communauté de vie n'ait pas cessé depuis le mariage, que le conjoint ait conservé la nationalité française et, lorsque le mariage a été célébré à l'étranger, qu'il ait été transcrit préalablement sur les registres de l'état civil français ;... ". D'autre part, aux termes de l'article L. 313-2 du même code : " Sous réserve des engagements internationaux de la France et des exceptions prévues par les dispositions législatives du présent code, la première délivrance de la carte de séjour temporaire et celle de la carte de séjour pluriannuelle mentionnée aux articles L. 313-20, L. 313-21, L. 313-23 et L. 313-24 sont subordonnées à la production par l'étranger du visa de long séjour mentionné aux 1° ou 2° de l'article L. 311-1. ". L'article L. 211-2-1 du même code mentionne que : " La demande d'un visa pour un séjour d'une durée supérieure à trois mois donne lieu à la délivrance par les autorités diplomatiques et consulaires d'un récépissé indiquant la date du dépôt de la demande. / Lorsque la demande de visa de long séjour émane d'un étranger entré régulièrement en France, marié en France avec un ressortissant de nationalité française et que le demandeur séjourne en France depuis plus de six mois avec son conjoint, la demande de visa de long séjour est présentée à l'autorité administrative compétente pour la délivrance d'un titre de séjour. ". Si ces dispositions subordonnent la délivrance de la carte de séjour temporaire " vie privée et familiale " au conjoint d'un Français à certaines conditions, dont celle d'être en possession d'un visa de long séjour qui, au demeurant, ne peut être refusé que dans les cas prévus au quatrième alinéa de l'article L. 211-1-2 du code susvisé, elles n'impliquent pas que celui-ci fasse l'objet d'une demande expresse distincte de celle du titre de séjour sollicité auprès de l'autorité préfectorale, compétente pour procéder à cette double instruction.

3. Pour refuser le titre de séjour demandé, le préfet de l'Oise a considéré que Mme E... ne pouvait lui présenter une demande de visa de long séjour faute de pouvoir justifier d'une communauté de vie de plus de six mois avec son époux, et que la communauté de vie avait cessé depuis le 2 septembre 2018. En l'espèce, il n'est pas sérieusement contesté que Mme E... était dépourvue de visa de long séjour, à la date de sa demande de titre de séjour, le 2 août 2018. Celle-ci valait implicitement demande de visa de long séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 211-2-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile précité. Or, elle ne pouvait non plus justifier d'une vie commune de plus de six mois avec son conjoint en France. En effet, si Mme E... s'est mariée le 9 juin 2018 en mairie de Creil avec M. E..., elle établit seulement par les pièces produites, dont un récépissé de demande de renouvellement d'attribution de logement social, produit en cause d'appel, qu'elle est mentionnée pour la première fois comme résidant à l'adresse de son époux et appelée à bénéficier d'un tel logement à la date du 7 février 2018. Les autres pièces produites, émanant de son médecin traitant, de l'établissement bancaire auprès duquel elle a ouvert un livret d'épargne, ou d'une caisse d'allocations familiales, ne permettent pas d'établir ni même ne mentionnent une vie commune effective antérieure à cette date. Mme E... produit, par ailleurs, des attestations peu circonstanciées de son conjoint, de proches ou de responsables associatifs qui sont postérieures à la date de la décision et a fortiori à la date de sa demande de visa de long séjour. Mme E... ne justifiant pas, à la date de sa demande de titre de séjour, d'une communauté de vie en France de plus de six mois avec son époux, le préfet de l'Oise ne pouvait lui délivrer un visa de long séjour sur le fondement de l'article L. 211-1-2 précité et par suite, faute de visa de long séjour, le préfet a refusé légalement de lui délivrer un titre de séjour de plein droit en tant que conjoint de français. Les moyens tirés de la méconnaissance des dispositions des articles L. 313-11 et L. 211-2-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile citées au point 2 doivent dès lors être écartés. Dans ces conditions, le moyen tiré d'une erreur de fait commise par le préfet, en estimant que la communauté de vie n'existait plus à la date de sa décision, alors que Mme E... soutient, sans être sérieusement contestée que le couple s'est reconstitué dès novembre 2018, est sans incidence sur la légalité du refus de titre en litige.

4. Mme E... déclare être entrée en France depuis le 1er juin 2016, sans l'établir. Si elle est mariée depuis le 9 juin 2018 avec un ressortissant français, elle ne justifie pas d'une communauté de vie ancienne et stable avec son conjoint. En outre, le couple s'est séparé de septembre à novembre 2018. Si un médecin généraliste certifie que son époux, reconnu travailleur handicapé, a besoin de la présence et de l'aide de Mme E... pour la gestion de son traitement, il n'est pas démontré que cette présence soit indispensable et que le conjoint de Mme E... serait isolé et dépendant de l'aide d'une tierce personne. Par ailleurs, Mme E... n'établit pas, par les seuls éléments cités aux points 2 à 4, l'intensité et la stabilité de ses attaches en France, alors qu'elle a vécu habituellement au Maroc au moins jusqu'à l'âge de quarante-deux ans. Compte tenu de l'ensemble de ces éléments, le moyen tiré d'une violation des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales est écarté.

5. L'article L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose que : " La commission est saisie par l'autorité administrative lorsque celle-ci envisage de refuser de délivrer ou de renouveler une carte de séjour temporaire à un étranger mentionné à l'article L. 313-11 ou de délivrer une carte de résident à un étranger mentionné aux articles L. 314-11 et L. 314-12, ainsi que dans le cas prévu à l'article L. 431-3. ". Il résulte de ces dispositions que le préfet est tenu de saisir la commission du seul cas des étrangers qui remplissent effectivement les conditions prévues aux articles L. 313-11, L. 314-11 et L. 314-12 auxquels il envisage de refuser le titre de séjour sollicité et non de celui de tous les étrangers qui se prévalent de ces dispositions.

6. En l'espèce, ainsi qu'il a été dit au point 3, Mme E... ne pouvait justifier résider en France depuis plus de six mois avec son conjoint à la date de sa demande de titre de séjour et ne pouvait, dès lors, obtenir un visa de long séjour, qui est nécessaire pour l'obtention d'une carte de séjour en tant que conjoint de français. Par suite, elle ne remplissait pas les conditions pour se voir délivrer de plein droit un titre de séjour sur le fondement du 4° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et en conséquence, le préfet n'était pas tenu de saisir la commission du titre de séjour. Le moyen tiré de l'irrégularité de la procédure doit ainsi être écarté.

7. Il résulte de tout ce qui précède que la décision de refus de titre de séjour n'est pas entachée d'illégalité.

Sur la décision d'obligation de quitter le territoire français :

8. Il résulte de ce qui a été dit au point 7 que le moyen tiré de l'illégalité du refus de titre de séjour, base légale de l'obligation de quitter le territoire, ne peut qu'être écarté.

9. Compte tenu de ce qui a été dit au point 4, il y a lieu d'écarter le moyen tiré de la violation des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

10. Il résulte de tout ce qui précède que Mme E... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif d'Amiens, par le jugement attaqué, a rejeté sa demande. Par suite, ses conclusions à fins d'annulation et celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.

DECIDE:

Article 1er : La requête de Mme E... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... C..., épouse E... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée pour information au préfet de l'Oise.

4

N°19DA01226


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 19DA01226
Date de la décision : 14/11/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers - Refus de séjour.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. Albertini
Rapporteur ?: M. Denis Perrin
Rapporteur public ?: M. Cassara
Avocat(s) : AKHZAM

Origine de la décision
Date de l'import : 16/12/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2019-11-14;19da01226 ?
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