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24/10/2019 | FRANCE | N°17DA01802

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3ème chambre, 24 octobre 2019, 17DA01802


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... D... a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 2 octobre 2015 par lequel le ministre de l'intérieur a mis fin à sa scolarité au sein de l'école nationale de police de Rouen-Oissel et d'enjoindre au ministre de l'intérieur de réexaminer sa situation.

Par un jugement n° 1503495 du 30 juin 2017, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés le 1

4 septembre 2017 et le 5 octobre 2019, ce dernier n'ayant pas été communiqué, M. D..., représent...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... D... a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 2 octobre 2015 par lequel le ministre de l'intérieur a mis fin à sa scolarité au sein de l'école nationale de police de Rouen-Oissel et d'enjoindre au ministre de l'intérieur de réexaminer sa situation.

Par un jugement n° 1503495 du 30 juin 2017, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés le 14 septembre 2017 et le 5 octobre 2019, ce dernier n'ayant pas été communiqué, M. D..., représenté par Me A... C..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1503495 du 30 juin 2017 par lequel le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 2 octobre 2015 par lequel le ministre de l'intérieur a mis fin à sa scolarité à l'école nationale de police ;

3°) d'enjoindre au ministre de l'intérieur de le réintégrer et de réexaminer sa situation, ainsi que de lui communiquer le dossier d'adjoint de sécurité et d'élève gardien de la paix ;

4°) de désigner un expert afin d'examiner son dossier scolaire ainsi que sa personnalité ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 600 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le décret n°2004-1439 du 23 décembre 2004 ;

- l'arrêté du 18 octobre 2005 portant organisation de la formation initiale du premier grade du corps d'encadrement et d'application de la police nationale ;

- l'arrêté du 29 juin 2009 relatif à la notation et au classement des élèves gardiens de la paix de la police nationale ;

- le code de justice administrative.

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Denis Perrin, premier conseiller,

- les conclusions de M. Hervé Cassara, rapporteur public,

- et les observations de Me A... C..., représentant M. D....

Considérant ce qui suit :

1. M. B... D... était élève gardien de la paix à l'école nationale de police de Rouen-Oissel. A l'issue de sa scolarité, le jury d'aptitude professionnelle n'a pas autorisé sa nomination comme gardien de la paix stagiaire, ni son redoublement, par une décision du 16 septembre 2015. La commission de recours, saisie par l'intéressé a confirmé cette décision, le 24 septembre 2015. Le ministre de l'intérieur a, en conséquence, mis fin à sa scolarité pour inaptitude professionnelle, par arrêté du 2 octobre 2015. M. D... relève appel du jugement du 30 juin 2017 par lequel le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande d'annulation de cette décision et d'injonction à fins de réexamen de sa situation.

Sur la compétence de la cour administrative d'appel :

2. Aux termes de l'article R. 322-1 du code de justice administrative : " La cour administrative d'appel territorialement compétente pour connaître d'un appel formé contre un jugement d'un tribunal administratif est celle dans le ressort de laquelle ce tribunal a son siège. ". Aux termes de l'article R. 312-2 du même code : " Lorsqu'il n'a pas été fait application de la procédure de renvoi prévue à l'article R. 351-3 et que le moyen tiré de l'incompétence territoriale du tribunal administratif n'a pas été invoqué par les parties avant la clôture de l'instruction de première instance, ce moyen ne peut plus être ultérieurement soulevé par les parties ou relevé d'office par le juge d'appel ou de cassation. ".

3. Il résulte de ces dispositions que la cour administrative d'appel est nécessairement compétente pour connaître des conclusions en appel contre un jugement du tribunal administratif de Rouen. Si M. D... entend contester la compétence territoriale de ce tribunal, et par voie de conséquence celle de la cour en faisant valoir que la juridiction territorialement compétente aurait dû être déterminée par son lieu de résidence dans les Hauts-de-Seine, cette exception d'incompétence territoriale est soulevée pour la première fois en appel. Par suite, elle ne peut qu'être écartée.

Sur la légalité de la décision du 2 octobre 2015 :

4. Aux termes de l'article 30 de l'arrêté précité du 18 octobre 2005, dans sa version applicable : " Le jury d'aptitude professionnelle analyse les résultats obtenus dans les différentes épreuves et le comportement des élèves pendant leur scolarité en vue d'établir le classement national des élèves. / Le jury d'aptitude statue sur : /- le cas des élèves signalés par la commission de suivi définie à l'article 27 ; /- le cas des élèves n'ayant pas obtenu la note minimum dans les matières fixées par l'arrêté portant notation et classement des élèves gardiens de la paix ; /- le cas des élèves n'ayant pas obtenu un nombre de points au moins égal à la moitié du total des notes maximales sanctionnant les épreuves comptabilisées pour le classement national. / Le jury d'aptitude professionnelle dresse la liste des élèves gardiens de la paix aptes à être nommés en qualité de stagiaire. ". L'article 31 du même arrêté dans sa version alors en vigueur dispose que : " L'élève qui conteste la décision rendue par le jury d'aptitude visé aux articles 29 et 30 du présent arrêté peut demander, dans un délai de quarante-huit heures, après en avoir reçu notification, à être entendu accompagné de la personne de son choix pour exposer ses arguments, par une commission de recours. / Cette commission de recours est présidée par le directeur général de la police nationale ou son représentant, assisté du directeur des ressources et des compétences de la police nationale ou son représentant et d'un psychologue de la sous-direction de la formation et du développement des compétences de la direction des ressources et des compétences de la police nationale. / Le président de la commission de recours peut convoquer, à titre d'expert, toute personne susceptible d'apporter un complément d'informations sur un dossier. / Elle statue après avoir entendu l'élève, dans un délai de sept jours maximum après réception du recours. ". Enfin, l'article 27 dudit arrêté précise que : " Au sein de chaque établissement est constituée, sous l'autorité du directeur qui en est le président de droit, une commission de suivi des élèves. Elle se réunit au moins à deux reprises : /-au cours de la séquence A ; /- au début de la séquence C au plus tard et en tout état de cause avant la réunion du jury d'aptitude professionnelle visé à l'article 29. / Elle étudie le cas des élèves éprouvant des difficultés. Une instruction du directeur des ressources et des compétences de la police nationale précise la composition et les modalités de fonctionnement de cette commission. ".

5. Il résulte de ces dispositions que le jury national qui se prononce à la fin de la formation initiale de gardiens de la paix, prend en compte le comportement des élèves et non leurs seuls résultats. Il ne statue explicitement que du cas des élèves ayant eu des résultats insuffisants et de ceux dont le comportement a été signalé par la commission de suivi propre à chaque centre de formation. Lorsqu'un élève gardien de la paix entend contester la décision du jury, il doit préalablement à toute action contentieuse, saisir la commission de recours dont la décision se substitue à la délibération du jury. Il résulte également des dispositions précitées que la décision du ministre de l'intérieur qui met fin à la scolarité d'un élève gardien de la paix pour inaptitude professionnelle, se borne, sans porter une quelconque appréciation, à tirer les conséquences de la décision souveraine du jury ou le cas échéant de la commission de recours. Par suite, le ministre de l'intérieur était en situation de compétence liée pour mettre fin à la scolarité de M. D... pour inaptitude professionnelle à l'issue de sa scolarité. En conséquence, les moyens soulevés à l'encontre de l'arrêté du 2 octobre 2015 et tirés du défaut de motivation, de l'erreur de droit, de l'erreur de fait et de l'erreur manifeste d'appréciation sont inopérants. Au surplus, s'agissant de la motivation, cet arrêté vise les textes dont il fait application, en particulier l'arrêté du 18 octobre 2005. Il reprend en outre les décisions du jury et de la commission de recours et rappelle leurs motifs. Le moyen tiré du défaut de motivation doit donc, en tout état de cause, être écarté.

6. L'application de la théorie de la compétence liée ne dispense pas le juge de statuer sur les moyens qui mettent en cause le bien-fondé de l'application de cette théorie aux circonstances de l'espèce.

7. M. D... soutient que le jury n'avait pas à se prononcer sur sa situation qui ne rentrait dans aucun des cas prévus par les dispositions de l'arrêté du 18 octobre 2005. Il allègue notamment qu'il n'est pas établi que sa situation aurait été évoquée par la commission de suivi prévue par l'article 27 précité. Il ressort toutefois des pièces produites en défense en première instance, que ladite commission a examiné son comportement durant sa scolarité, dans sa séance du 12 août 2015, préalablement à la réunion du jury, le 16 septembre 2015. Ce moyen doit être écarté.

8. M. D... fait aussi valoir que les droits de la défense n'ont pas été respectés dans la procédure mettant fin à sa scolarité. Ce moyen est inopérant à l'égard de l'arrêté en litige du 2 octobre 2015, compte tenu de ce qui a été dit au point 5. Si le requérant est aussi considéré comme excipant de l'illégalité de la décision du 24 septembre 2015 de la commission de recours, dont la saisine est obligatoire avant tout recours contentieux et qui, en conséquence, se substitue à la délibération du jury, il ressort du procès-verbal de cette commission que celle-ci a entendu M. D..., accompagné d'un représentant syndical, dans sa séance du 24 septembre 2015, préalablement à la décision de ladite commission. Le moyen tiré de la violation du principe général des droits de la défense et de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit donc, en tout état de cause, être écarté.

9. M. D... doit être considéré comme soutenant aussi que l'arrêté contesté est illégal par la voie de l'exception d'illégalité de la décision de la commission de recours, qui se fonderait sur des faits matériellement inexacts. Si le requérant se prévaut de ses bons résultats aux évaluations théoriques et fait état, sans les établir de l'acharnement de la hiérarchie et de certains élèves à son égard, il n'apporte aucun élément de nature à démontrer l'inexactitude des faits qui sont mentionnés lors de la réunion de la commission de suivi du 12 août 2015 et repris dans la délibération du jury, se contentant de leur donner une autre qualification. En particulier, il ne nie pas qu'il ne maîtrisait pas toujours sa force lors des séances de techniques de défense et d'interpellation, comme le note un rapport circonstancié de sa hiérarchie, en date du 2 avril 2015. Il ne conteste pas non plus la réalité du différend verbal violent qu'il a eu avec un autre élève, le 20 janvier 2015. Il ne nie pas enfin avoir aussi violemment pris à partie un élève qui lui reprochait d'avoir accidentellement causé une blessure à un autre élève avec un bâton télescopique, au cours d'une séance d'instruction.

10. Le jury d'aptitude, puis la commission de recours, doivent prendre en compte, ainsi qu'il a été dit, en application de l'article 30 de l'arrêté du 18 octobre 2005, non seulement les résultats scolaires, mais également le comportement des élèves gardiens de la paix, celui-ci s'appréciant en fonction de l'ensemble des faits avérés portés à la connaissance du jury, même ceux commis hors scolarité. Il n'appartient pas au juge administratif de contrôler l'appréciation portée par le jury et lorsqu'elle est saisie, par la commission de recours, sur l'aptitude professionnelle des élèves gardiens de la paix à l'issue de leur scolarité. Il lui appartient, en revanche, de vérifier que le jury a formé cette appréciation sans méconnaître les normes qui s'imposent à lui. En l'espèce, M. D... soutient qu'il aurait été l'objet de discrimination. Il n'apporte toutefois aucun élément laissant présumer que la décision de la commission de recours porterait atteinte au principe de non-discrimination. Il se contente en effet de faire état de l'acharnement de certains membres de sa hiérarchie ou de certains élèves, mais sans apporter aucun élément concret au soutien de ses allégations. Au contraire, il ressort des pièces du dossier, qui sont suffisamment précises et circonstanciées, sans qu'il soit besoin d'ordonner comme le demande M. D..., un supplément d'instruction, que l'hostilité d'une partie des élèves de son groupe résultait de son comportement et que pour préserver la bonne poursuite de sa scolarité, la direction de l'école a décidé de l'affecter dans un autre groupe. Par ailleurs, le seul fait qu'un autre élève, affecté dans une autre école, ait été déclaré apte à l'issue de la réunion de la commission, alors que le jury l'avait éliminé, ne saurait démontrer que M. D... ait été victime de discrimination. Il ne ressort donc pas de l'ensemble des pièces du dossier que la commission de recours ait pris en compte d'autres éléments que ceux mentionnés par l'article 30 de l'arrêté du 18 octobre 2005 précité, sans qu'il soit besoin de désigner un expert pour apprécier l'aptitude de M. D..., comme celui-ci le demande. Pour les mêmes motifs, le détournement de pouvoir allégué n'est pas établi.

11. Il résulte de tout ce qui précède que M. D... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande par le jugement contesté. Par suite, la requête de M. D... sera rejetée, y compris ses conclusions à fins d'injonction, d'expertise, de communication de documents, toutes les pièces utiles à la présente procédure étant jointes au dossier, ainsi que ses conclusions au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. D..., est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... D... et au ministre de l'intérieur.

2

N°17DA01802


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 17DA01802
Date de la décision : 24/10/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-03-04 Fonctionnaires et agents publics. Entrée en service. Stage.


Composition du Tribunal
Président : M. Albertini
Rapporteur ?: M. Denis Perrin
Rapporteur public ?: M. Cassara
Avocat(s) : METZKER

Origine de la décision
Date de l'import : 12/11/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2019-10-24;17da01802 ?
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