Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Par une requête du 31 janvier 2017, la société " Ferme Eolienne d'Hargicourt " a demandé au tribunal administratif d'Amiens d'annuler l'arrêté du 8 avril 2016 par lequel le préfet de la Somme a autorisé la société " Ferme éolienne du bois de la Hayette " à exploiter huit éoliennes implantées sur le territoire des communes d'Aubvillers, Braches, Hargicourt et Malpart, ainsi que la décision implicite rejetant son recours gracieux.
Par une ordonnance n° 1700199 du 31 octobre 2017, le président de la 4ème chambre du tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés le 21 novembre 2017 et le 22 août 2018, la société " Ferme Eolienne d'Hargicourt ", représentée par Me A... B..., demande à la cour :
1°) d'annuler cette ordonnance ;
2°) d'annuler, à titre principal, l'arrêté du 8 avril 2016 du préfet de la Somme et la décision implicite de rejet de son recours gracieux ;
3°) à titre subsidiaire, d'annuler l'autorisation accordée en tant qu'elle concerne les éoliennes E3 et E6 du projet et d'enjoindre au préfet de modifier l'autorisation accordée de telle sorte que le projet respecte une distance de 2 à 5 km avec les projets situés à proximité et notamment avec son parc éolien et que soient déplacées les éoliennes E8 et E9, situées à moins de 200 mètres du bois de la Hayette et du bois du Quennoy ;
4°) à titre infiniment subsidiaire, d'enjoindre au préfet de modifier l'autorisation accordée de telle sorte que les éoliennes E8 et E9 soient distantes de 950 mètres de son propre projet éolien ;
5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code l'environnement ;
- l'ordonnance n° 2014-355 du 20 mars 2014 ;
- le décret n° 2014-450 du 2 mai 2014 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Jean-Pierre Bouchut, premier conseiller ;
- et les conclusions de M. Charles-Edouard Minet, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. Par un arrêté du 8 avril 2016, le préfet de la Somme a délivré une autorisation unique à la société " Ferme éolienne du Bois de la Hayette " pour la construction de huit éoliennes sur les communes d'Hargicourt, Aubvillers, Braches et Malpart. La société " Ferme éolienne d'Hargicourt " a formé, le 3 juin 2016, un recours gracieux devant le préfet de la Somme, puis, le 3 octobre 2016, un second recours gracieux devant le préfet de de la région Hauts-de-France, préfet du Nord, tous deux restés sans réponse. Par une requête, enregistrée le 31 janvier 2017, la société " Ferme éolienne d'Hargicourt " a demandé au tribunal administratif d'Amiens d'annuler l'arrêté du 8 avril 2016 ainsi que les décisions implicites de rejet nées du silence gardé sur ses recours gracieux. Elle relève appel de l'ordonnance rendue le 31 octobre 2017 par laquelle le président de la 4ème chambre du tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande pour tardiveté.
Sur la recevabilité de la demande de la société " Ferme éolienne d'Hargicourt " devant le tribunal administratif d'Amiens :
2. Aux termes de l'article 25 du décret n° 2014-450 du 2 mai 2014, encore en vigueur au 31 janvier 2017, date de l'enregistrement de la requête de la société " Ferme éolienne d'Hargicourt " au greffe du tribunal administratif d'Amiens : " I. - Les décisions mentionnées aux articles 2 et 4 de l'ordonnance du 20 mars 2014 susvisée peuvent être déférées à la juridiction administrative ; / 1° Par les demandeurs ou exploitants, dans un délai de deux mois à compter du jour où la décision leur a été notifiée ; / 2° Par les tiers, personnes physiques ou morales, les communes intéressées ou leurs groupements, en raison des inconvénients ou des dangers pour les intérêts mentionnés à l'article 3 de l'ordonnance précitée, dans un délai de deux mois à compter de : / a) La publication au recueil des actes administratifs ; cette publication est réalisée par le représentant de l'Etat dans le département dans un délai de quinze jours à compter de l'adoption de la décision ; / b) L'affichage en mairie dans les conditions prévues à l'article R. 512-39 du code de l'environnement ; / c) La publication d'un avis, inséré par les soins du préfet et aux frais de l'exploitant, dans un journal diffusé dans le ou les départements intéressés. / Le délai court à compter de la dernière formalité accomplie. / L'affichage et la publication mentionnent également l'obligation prévue au II de notifier, à peine d'irrecevabilité, tout recours administratif ou contentieux à l'auteur de la décision et au bénéficiaire de l'autorisation unique. / II. - En cas de recours contentieux à l'encontre d'une décision mentionnée au I, l'auteur du recours est tenu, à peine d'irrecevabilité, de notifier celui-ci à l'auteur de la décision et au titulaire de l'autorisation. Cette notification doit être effectuée dans les mêmes conditions en cas de demande tendant à l'annulation ou à la réformation d'une décision juridictionnelle concernant une autorisation unique. L'auteur d'un recours administratif est également tenu de le notifier à peine d'irrecevabilité du recours contentieux qu'il pourrait intenter ultérieurement à son rejet. / La notification prévue au précédent alinéa doit intervenir par lettre recommandée avec avis de réception, dans un délai de quinze jours francs à compter du dépôt du recours. / La notification du recours à l'auteur de la décision et, s'il y a lieu, au titulaire de l'autorisation est réputée accomplie à la date d'envoi de la lettre recommandée avec avis de réception. Cette date est établie par le certificat de dépôt de la lettre recommandée auprès des services postaux. ".
3. L'arrêté attaqué du 8 avril 2016 mentionne, dans son titre V : " en cas de recours contentieux à l'encontre d'une autorisation unique, l'auteur du recours est tenu, à peine d'irrecevabilité, de notifier son recours à l'auteur de la décision et au titulaire de l'autorisation.../... La notification prévue au précédent alinéa doit intervenir par lettre recommandée avec accusé de réception, dans un délai de 15 jours francs à compter du dépôt du recours. ". Il ressort des pièces du dossier que cet arrêté comportait les mentions relatives aux voies et délais de recours, qu'il a été publié au recueil des actes administratifs de la préfecture de la Somme n° 2016-30 du 15 avril 2016, et qu'il a fait l'objet d'un avis publié dans l'édition du 22 avril 2016 du Courrier picard. Il ressort des certificats au dossier que l'affichage par les maires des communes concernées a été régulièrement réalisé en mairie dans les communes d'Hargicourt, de Braches, d'Aubvillers et de Malpart. Les dispositions de l'article 25 du décret du 2 mai 2014 précité étaient, par suite, applicables à la société " Ferme éolienne d'Hargicourt " à la date d'introduction de son recours contentieux devant le juge de première instance.
4. La société " Ferme éolienne d'Hargicourt " n'établit pas qu'elle a notifié, dans les conditions prévues par le II de l'article 25 du décret du 2 mai 2014, au préfet de la Somme et au pétitionnaire, le recours contentieux enregistré le 31 janvier 2017 devant le tribunal administratif d'Amiens. Par suite, la requête qu'elle avait formée devant le tribunal administratif d'Amiens était irrecevable pour ce motif, sans qu'elle puisse se prévaloir utilement de la circonstance que la société " Ferme éolienne du bois de la Hayette " n'aurait pas ignoré l'existence de ce recours contentieux. Il en résulte que la demande de la société " Ferme éolienne d'Hargicourt " devant le tribunal administratif d'Amiens était irrecevable et, sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir opposée en appel par la société " Ferme éolienne du bois de La Hayette ", la société " Ferme Eolienne d'Hargicourt " n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par l'ordonnance attaquée, le président de la 4ème chambre du tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande pour tardiveté.
Sur les conclusions relatives à l'amende pour recours abusif :
5. Aux termes de l'article R. 741-12 du code de justice administrative : " Le juge peut infliger à l'auteur d'une requête qu'il estime abusive une amende dont le montant ne peut excéder 10 000 euros ". La faculté prévue par ces dispositions constituant un pouvoir propre du juge, les conclusions de la société " Ferme éolienne du bois de La Hayette " tendant à ce que la société " Ferme Eolienne d'Hargicourt " soit condamnée à payer une telle amende ne sont pas recevables.
Sur les frais liés au litige :
6. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement à la société " Ferme Eolienne d'Hargicourt " de la somme qu'elle réclame au titre des frais liés au litige. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la société " Ferme Eolienne d'Hargicourt " la somme de 1 500 euros que la société " Ferme éolienne du bois de La Hayette " demande au même titre.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la SAS " Ferme Eolienne d'Hargicourt " est rejetée.
Article 2 : La société " Ferme Eolienne d'Hargicourt " versera la somme de 1 500 (mille-cinq-cents) euros à la société " Ferme éolienne du bois de La Hayette " au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le surplus des conclusions présentées par la société " Ferme éolienne du bois de La Hayette " est rejeté.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la SAS " Ferme Eolienne d'Hargicourt ", à la SAS " Ferme Eolienne du Bois de la Hayette " et au ministre de la transition écologique et solidaire.
Copie en sera adressée pour information au préfet de la Somme.
N°17DA02169 4