Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. C... A... a demandé au tribunal administratif de Lille :
1°) d'annuler la décision du 14 janvier 2014 par laquelle le maire d'Hervelinghen a refusé de lui délivrer un permis de construire deux bâtiments agricoles ;
2°) d'enjoindre à la commune d'Hervelinghen de procéder au réexamen de sa demande de permis de construire dans un délai d'un mois à compter de la notification du jugement à intervenir ;
3°) de condamner la commune d'Hervelinghen à lui verser la somme de 20 000 euros à titre de dommages et intérêts ;
4°) de mettre à la charge de la commune d'Hervelinghen la somme de 2 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Par un jugement n° 1404374 du 7 juin 2017, le tribunal administratif de Lille a annulé l'arrêté du 14 janvier 2014 portant refus de permis de construire, mis à la charge de la commune d'Hervelinghen la somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et rejeté le surplus des conclusions de la requête.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 28 juillet 2017, la commune d'Hervelinghen, représentée par la SCP Manuel Gros, Héloïse Hicter et associés, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 7 juin 2017 ;
2°) de rejeter les demandes de M. A... ;
3°) de mettre à la charge de M. A... une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code rural et de la pêche maritime ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Jean-Pierre Bouchut, premier conseiller ;
- les conclusions de M. Charles-Edouard Minet, rapporteur public ;
- et les observations de Me B... D..., représentant la commune d'Hervelinghen.
Considérant ce qui suit :
1. M. A... est propriétaire de parcelles cadastrées nos OA 109, OA 111 et OB 20, situées 730 rue Principale, sur le territoire de la commune d'Hervelinghen. Il a déposé, le 16 septembre 2013, une demande de permis de construire deux bâtiments agricoles pour loger 200 veaux, vaches allaitantes et génisses. Par un arrêté du 14 janvier 2014, le maire d'Hervelinghen a refusé de délivrer ce permis de construire. M. A... a formé, le 13 mars 2014, un recours gracieux qui a été implicitement rejeté. Par un jugement n° 1404374 du 7 juin 2017, le tribunal administratif de Lille a annulé l'arrêté du 14 janvier 2014 portant refus de permis de construire. La commune d'Hervelinghen relève appel de ce jugement.
Sur les conclusions en excès de pouvoir :
2. Aux termes de l'article 10NC3 du règlement annexé au plan d'occupation des sols de la commune d'Hervelinghen : " Pour être constructible, un terrain doit avoir accès à une voie publique ou privée, soit directement, soit par l'intermédiaire d'un passage aménagé sur fonds voisin éventuellement obtenu par application de l'article 682 du code civil. L'accès doit présenter les caractéristiques permettant de satisfaire aux exigences de la sécurité, de la défense contre l'incendie et de la protection civile. / La destination et l'importance des constructions ou installations doivent être compatibles avec la capacité de la voirie qui les dessert. ".
3. Pour prendre sa décision, le maire d'Hervelinghen a considéré que " l'approvisionnement et la production de cet élevage industriel entraîneront le passage de poids lourds les obligeant à emprunter un accès étroit à visibilité réduite particulièrement dangereux vu sa situation dans un virage accidentogène, bien que déjà en usage ". Il ressort toutefois des pièces du dossier que l'accès à l'exploitation existe déjà et qu'il n'est pas dangereux dès lors que la visibilité est bonne et que la vitesse des véhicules est réduite s'agissant d'un accès situé en sortie de virage au sein d'une agglomération. L'absence de trottoirs, certes peu satisfaisante pour un usage piétonnier, n'a cependant jamais entraîné d'accident alors pourtant que cet accès est déjà utilisé par M. A... pour les besoins de son exploitation. La construction de deux nouveaux bâtiments d'élevage ne devrait pas engendrer un trafic beaucoup plus important qu'actuellement. La demande de permis de construire s'est d'ailleurs appuyée sur certaines prescriptions émises par le service départemental d'incendie et de secours du Pas-de-Calais, dans son rapport du 22 octobre 2013, afin d'assurer l'accessibilité du site. Ainsi, la commune n'établit pas que l'exploitation des deux nouveaux bâtiments serait de nature à rendre l'accès actuel, qui est de dimensions suffisantes, plus dangereux.
4. Le maire s'est également fondé sur la circonstance que l'accès à l'arrière de l'exploitation, destiné à la circulation des véhicules d'évacuation des effluents de l'élevage, n'existerait pas. Il ressort toutefois des pièces du dossier, notamment des documents cartographiques et des attestations d'usagers versées au dossier, que ce chemin d'accès à l'arrière de l'exploitation existe bien et qu'il présente des dimensions suffisantes pour procéder, notamment, à l'évacuation des lisiers par des moyens appropriés. Dans ces conditions, la commune n'établit pas que le projet envisagé méconnaîtrait les dispositions de l'article 10NC3 du règlement annexé au plan d'occupation des sols.
5. Aux termes de l'article 10NC11 du même règlement : " Les constructions et installations de quelque nature qu'elles soient doivent respecter l'harmonie créée par les bâtiments existants et le site, elles doivent présenter une simplicité de volume, une unité d'aspect et de matériaux compatibles avec la bonne économie de la construction. / Les bâtiments comporteront obligatoirement des combles à deux pentes avec un angle de toiture pouvant varier entre 35° et 50° par rapport à l'horizontale. (...) ".
6. Pour rejeter la demande de permis de construire, le maire s'est fondé sur la circonstance que " sur le site, existent des bâtiments agricoles dont les pentes sont comprises entre 30° et 10° ", que " toutes les constructions voisines ont une hauteur inférieure à 8 m ", et que " les hauteurs aux faitières auront un impact important sur l'environnement paysager ". Toutefois, les dispositions précitées du règlement du plan d'occupation des sols ne fixent aucune règle de hauteur maximale. Il ressort des pièces du dossier que le village comporte déjà plusieurs ensembles bâtis de grande dimension tels que des corps de ferme, que les deux bâtiments projetés, dont les pentes des toitures sont conformes aux prescriptions de l'article 10NC11 précitées, seront implantés à l'extrémité de la surface bâtie du village, en respectant une harmonie architecturale, notamment au regard de la toiture envisagée. Par ailleurs, l'aspect extérieur des matériaux utilisés a été choisi pour s'intégrer dans le paysage et les plantations existantes masqueront le projet sur une grande partie de son linéaire, le rendant peu visible depuis la rue principale. Les documents photographiques versés au dossier n'établissent pas la réalité de l'atteinte paysagère. Dans ces conditions, le moyen tiré de l'atteinte à l'harmonie paysagère et du non-respect de l'article 10NC11 doit être écarté.
7. Selon la commune, le projet serait implanté dans la zone primaire de dégagement de la servitude PT2 interdisant les constructions d'une hauteur de plus de 8 mètres afin de ne pas gêner les transmissions radioélectriques du CROSMA du Cap Gris-Nez. Il ressort cependant des pièces du dossier, et notamment de la lettre du sous-préfet de Boulogne-sur-Mer du 27 mars 2014, qu'à la date de l'arrêté attaqué, " le projet ne se trouve pas dans la zone de servitude relative à la protection contre les obstacles des centres d'émission et de réception exploités par l'Etat (PT2) ". Malgré la mesure d'instruction diligentée en première instance, la commune ne justifie pas plus en appel les contraintes liées à une servitude qui aurait été instituée et dans le périmètre duquel se situerait le terrain d'assiette du projet. Dès lors qu'aucune démonstration n'est faite de ce que cette servitude imposerait de respecter une hauteur maximale de 8 mètres, elle ne saurait légalement fonder le refus de permis de construire.
8. Il résulte de tout ce qui précède que, sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir soulevée par M. A..., la commune d'Hervelinghen n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a annulé le refus de permis de construire du 14 janvier 2014.
Sur l'appel incident :
9. M. A... demande à la cour de condamner la commune à lui verser 20 000 euros au motif que " le refus injustifié de l'appelante lui cause un préjudice certain lié au retard à l'avancement de son projet ". Par les éléments qu'il produit, M. A... ne met pas le juge en mesure d'apprécier la nature du préjudice qu'il allègue ni de le caractériser. Dans ces conditions, les conclusions indemnitaires présentées par M. A... ne peuvent qu'être rejetées, sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir opposée sur ces conclusions par la commune.
Sur les frais liés au litige :
10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de M. A..., qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme réclamée par la commune d'Hervelinghen au titre des frais liés au litige. Il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge de la commune la somme de 1 500 euros à verser à M. A... à ce titre.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de la commune d'Hervelinghen est rejetée.
Article 2 : La commune d'Hervelinghen versera la somme de 1 500 euros à M. A... sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Les conclusions incidentes de M. A... sont rejetées.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la commune d'Hervelinghen et à M. C... A....
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N°17DA01523