La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

26/09/2019 | FRANCE | N°18DA02555

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3ème chambre, 26 septembre 2019, 18DA02555


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... D... a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler la décision implicite par laquelle le directeur général des finances publiques a rejeté sa demande du 29 décembre 2015, reçue le 4 janvier 2016, tendant à l'attribution de la nouvelle bonification indiciaire (NBI), de condamner l'Etat à lui verser la somme de 10 850 euros à parfaire au titre de la NBI due pour la période du 3 mars 2006 au 31 décembre 2015, assortie des intérêts légaux à compter du dépôt de sa demande préalable,

et de la capitalisation des intérêts, de condamner l'Etat à lui verser la somme ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... D... a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler la décision implicite par laquelle le directeur général des finances publiques a rejeté sa demande du 29 décembre 2015, reçue le 4 janvier 2016, tendant à l'attribution de la nouvelle bonification indiciaire (NBI), de condamner l'Etat à lui verser la somme de 10 850 euros à parfaire au titre de la NBI due pour la période du 3 mars 2006 au 31 décembre 2015, assortie des intérêts légaux à compter du dépôt de sa demande préalable, et de la capitalisation des intérêts, de condamner l'Etat à lui verser la somme de 15 900 euros au titre de dommages et intérêts en raison des troubles dans les conditions d'existence occasionnés par le non-versement de la NBI et de l'atteinte portée à la dignité de ses fonctions et d'enjoindre à l'Etat de prendre toute mesure nécessaire à l'exécution du jugement sur le fondement des articles L. 911-1 et suivants du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1610327 du 17 octobre 2018, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 17 décembre 2018 et le 12 août 2019, M. A... D..., représenté par Me B... C..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler, la décision implicite par laquelle le directeur général des finances publiques a rejeté sa demande d'attribution de la nouvelle bonification indiciaire ;

3°) d'enjoindre au ministre de l'économie et des finances et au ministre de l'action et des comptes publics de reconstituer sa carrière, notamment pour les cotisations retraite ;

4°) de condamner l'Etat à lui payer la nouvelle bonification indiciaire pour la période du 3 mars 2006 au 31 décembre 2015, ou à défaut la somme de 10 850 euros, au même titre, ainsi que la somme de 15 900 euros au titre du préjudice moral et des troubles dans les conditions d'existence, le tout avec intérêts à compter de sa demande préalable et capitalisation des intérêts ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros à lui verser au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

-----------------------------------------------------------------------------------------------------------------

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la charte des droits fondamentaux de l'Union ;

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

- la loi n° 91-73 du 18 janvier 1991 ;

- le décret n° 91-1060 du 14 octobre 1991;

- l'arrêté du 14 octobre 1991 fixant les conditions d'attribution de la nouvelle bonification indiciaire au ministère de l'économie, des finances et du budget, à la Cour des comptes et dans les chambres régionales des comptes ;

- code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Denis Perrin, premier conseiller ;

- et les conclusions de M. Hervé Cassara, rapporteur public ;

- et les observations de Me B... C..., pour M. A... D....

Une note en délibéré, présentée par Me B... C..., a été enregistrée le 16 septembre 2019.

Considérant ce qui suit :

1. M. A... D..., contrôleur principal des finances publiques, affecté à la direction interrégionale des services informatiques de Lille de la direction générale des finances publiques a demandé, le 29 décembre 2015, l'attribution de la nouvelle bonification indiciaire à compter du 1er mars 2006 et l'indemnisation du préjudice résultant de cette absence d'attribution. Le tribunal administratif de Lille a rejeté sa requête dirigée contre le refus implicite opposé à cette demande, par jugement du 17 octobre 2018. M. D... relève appel de ce jugement.

Sur la régularité du jugement :

2. Aux termes de l'article R. 421-1 du code de justice administrative : " Sauf en matière de travaux publics, la juridiction ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision, et ce, dans les deux mois à partir de la notification ou de la publication de la décision attaquée." et aux termes de l''article R. 421-2 du même code, applicables à la date de la décision attaquée : "Sauf disposition législative ou réglementaire contraire, dans les cas où le silence gardé par l'autorité administrative sur une demande vaut décision de rejet, l'intéressé dispose, pour former un recours, d'un délai de deux mois à compter de la date à laquelle est née une décision implicite de rejet... ". En outre, l'article R. 421-3 dudit code, toujours dans sa rédaction alors applicable prévoit que : " Toutefois, l'intéressé n'est forclos qu'après un délai de deux mois à compter du jour de la notification d'une décision expresse de rejet : / 1° En matière de plein contentieux ; ... ". Par ailleurs, aux termes de l'article L. 112-6 du code des relations entre le public et l'administration : " Les délais de recours ne sont pas opposables à l'auteur d'une demande lorsque l'accusé de réception ne lui a pas été transmis ou ne comporte pas les indications exigées par la réglementation. ". Toutefois, l'article L. 112-2 du même code dispose que les dispositions de cet article " ne sont pas applicables aux relations entre l'administration et ses agents ".

3. Par courrier du 29 décembre 2015, adressé en recommandé avec accusé de réception et reçu le 4 janvier 2016, M. D... a demandé à son autorité d'emploi non seulement que la nouvelle bonification indiciaire lui soit attribuée pour l'avenir mais aussi que l'Etat lui verse la nouvelle bonification indiciaire non perçue à compter de son affectation, le 1er mars 2006, comme pupitreur assistant utilisateur. Sa demande se décompose donc, d'une part, en des conclusions en excès de pouvoir d'annulation du refus implicite de lui attribuer la nouvelle bonification indiciaire et, d'autre part, en conclusions de plein contentieux de réparation du préjudice né de l'absence de perception de la nouvelle bonification indiciaire pour la période antérieure à sa demande. Aucune décision expresse n'ayant été notifiée à l'intéressé, le délai de recours n'était donc pas expiré s'agissant des conclusions de plein contentieux. S'agissant des conclusions en excès de pouvoir, M. D... soutient en appel que les dispositions précitées de l'article L. 112-2 du code des relations entre le public et l'administration constituent une discrimination prohibée tant par les articles 6§1 et 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales que par l'article 21 de la charte des droits fondamentaux de l'Union. Toutefois, il est constant d'une part que les fonctionnaires qui sont employés par l'administration et se trouvent placés vis-à-vis d'elle dans une situation statutaire, ne sont pas en ce qui concerne leurs relations avec l'administration qui les emploie dans une situation analogue aux citoyens en litige avec l'administration. En conséquence les dispositions en cause ne créent pas une différence de traitement disproportionnée au regard de l'objectif poursuivi et n'imposent donc pas une règle incompatible avec le principe de non-discrimination garanti par la convention européenne précitée. D'autre part, M. D... ne saurait se prévaloir des dispositions de la charte des droits fondamentaux de l'Union qui s'applique uniquement aux institutions, organes et organismes de l'Union ainsi qu'aux Etats membres seulement lorsqu'ils mettent en oeuvre le droit de l'Union, ce qui n'est pas le cas en l'espèce.

4. Par suite, la requête ayant été enregistrée au tribunal administratif de Lille, le 30 décembre 2016 et la demande de l'intéressé, agent public, auprès de son administration, ne devant pas faire l'objet d'un accusé de réception, les conclusions de M. D... en excès de pouvoir d'annulation du refus de lui attribuer la nouvelle bonification indiciaire étaient tardives. M. D... n'est donc pas fondé à se plaindre que les conclusions précitées aient été rejetées comme irrecevables par le jugement contesté.

Sur le bien-fondé du jugement :

5. Aux termes de l'article 27 de la loi du 18 janvier 1991 : " La nouvelle bonification indiciaire des fonctionnaires et des militaires instituée à compter du 1er août 1990 est attribuée pour certains emplois comportant une responsabilité ou une technicité particulières dans des conditions fixées par décret. ". Il résulte de ces dispositions que l'attribution de la bonification est liée non au corps d'appartenance ou aux grades des fonctionnaires, mais aux emplois qu'ils occupent, compte tenu de la nature des fonctions attachées à ces emplois. Aux termes de l'article 1er du décret du 14 octobre 1991 : " Une nouvelle bonification indiciaire, prise en compte et soumise à cotisation pour le calcul de la pension de retraite, peut être versée mensuellement, dans la limite des crédits disponibles, aux fonctionnaires titulaires qui exercent au ministère de l'économie, des finances et du budget, à la Cour des comptes et dans les chambres régionales des comptes des fonctions répondant aux conditions prévues par les tableaux I à XI annexés au présent décret. ". Le tableau IV annexé au décret prévoit l'attribution de la nouvelle bonification indiciaire dans les services déconcentrés de la direction générale des finances publiques dans sa version applicable avant le 1er juillet 2014, issue du décret du 24 octobre 1997 modifiant le décret du 14 octobre 1991, au point 12 pour les " fonctions itinérantes de support et d'assistance des utilisateurs dans le domaine de la micro-informatique et de la bureautique ". Pour tous ces emplois, l'arrêté du 14 octobre 1991 précise que la bonification est attribuée aux emplois administratifs du niveau de la catégorie B ou C. Il appartient à un fonctionnaire qui demande à bénéficier d'une indemnité réservée à l'exercice de certaines fonctions d'établir les faits nécessaires au succès de ses prétentions et notamment qu'il exerce effectivement ces fonctions.

6. M. D... a été affecté à compter du 1er mars 2006 en tant que pupitreur-assistant utilisateur. Ses fiches d'évaluation démontrent qu'il avait pour principale mission la gestion des consommables informatiques, ainsi que le contrôle de gestion du parc informatique. Elles indiquent également qu'il a participé au déploiement des matériels informatiques dans l'ensemble du réseau. Toutefois, il s'agit de fonctions techniques et non administratives, exclues dès lors du bénéfice de la nouvelle bonification indiciaire par l'arrêté du 14 octobre 1991 précité. En outre si cette tâche suppose des déplacements, le demandeur ne démontre pas que la fréquence et l'ampleur de ces déplacements donnaient un caractère itinérant à ses fonctions. L'attestation de son ancien supérieur hiérarchique, pièce nouvelle produite en cause d'appel, qui se borne à indiquer que M. D... exerçait des fonctions itinérantes, sans apporter aucun élément concret au soutien de cette allégation, ou l'intitulé des ordres de mission permanents dont il disposait, ne suffisent pas à justifier de l'exercice effectif de fonctions itinérantes. M. D... n'établit donc pas qu'il avait droit à la nouvelle bonification indiciaire en raison des fonctions qu'il exerce. Par suite, M. D... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Lille a rejeté ses conclusions indemnitaires.

7. Il résulte de tout ce qui précède et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur l'irrecevabilité de la requête de première instance tirée de l'absence de moyen et de l'irrecevabilité des conclusions à fins d'injonction ainsi que sur l'exception de prescription quadriennale soulevées en défense, que M. D... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. D... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... D..., au ministre de l'économie et des finances et au ministre de l'action et des comptes publics.

N°18DA02555 4


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 18DA02555
Date de la décision : 26/09/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Fonctionnaires et agents publics - Rémunération - Indemnités et avantages divers.

Procédure - Introduction de l'instance - Délais.


Composition du Tribunal
Président : M. Albertini
Rapporteur ?: M. Denis Perrin
Rapporteur public ?: M. Cassara
Avocat(s) : MARCILLY

Origine de la décision
Date de l'import : 08/10/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2019-09-26;18da02555 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award