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09/07/2019 | FRANCE | N°18DA02236

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2ème chambre - formation à 3, 09 juillet 2019, 18DA02236


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...A...D...a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler l'arrêté du 29 août 2018 de la préfète de la Seine-Maritime lui faisant obligation de quitter le territoire français sans délai, fixant le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office et prononçant une interdiction de retour sur le territoire français de deux ans.

Par un jugement n° 1803417 du 11 septembre 2018, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande

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Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 9 novembre 2018, M. A...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...A...D...a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler l'arrêté du 29 août 2018 de la préfète de la Seine-Maritime lui faisant obligation de quitter le territoire français sans délai, fixant le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office et prononçant une interdiction de retour sur le territoire français de deux ans.

Par un jugement n° 1803417 du 11 septembre 2018, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 9 novembre 2018, M. A...D..., représenté par Me B...E..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler l'arrêté du 29 août 2018 de la préfète de la Seine-Maritime ;

3°) d'enjoindre à la préfète de la Seine-Maritime de procéder à un réexamen de sa situation et, dans l'attente, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans un délai de huit jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à son avocat sur le fondement des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ou, à défaut, de lui verser une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Muriel Milard, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A...D..., de nationalité marocaine, né le 2 février 2000 et entré en France en 2016 selon ses déclarations, a été interpellé par les services de police le 12 août 2018 et écroué à la maison d'arrêt de Rouen le 13 août 2018. Il relève appel du jugement du 11 septembre 2018 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 29 août 2018 de la préfète de la Seine-Maritime lui faisant obligation de quitter le territoire français sans délai, fixant le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office et prononçant une interdiction de retour sur le territoire français de deux ans.

Sur l'obligation de quitter le territoire français :

2. La décision du 29 août 2018 contestée comporte les considérations de fait et de droit sur lesquelles elles se fonde, exigées par les articles L. 211-2 et L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration. Par suite, la préfète de la Seine-Maritime, qui n'était pas tenue de faire état de l'ensemble des éléments caractérisant la situation personnelle et familiale du requérant a suffisamment motivé la décision en litige.

3. M. A...D...fait valoir qu'il est entré en France en 2016, que sa soeur y réside ainsi que des amis et qu'il a eu des expériences professionnelles en maçonnerie et en cuisine. Cependant, M. A...D...est célibataire, sans charge de famille et n'établit pas avoir tissé des liens d'une particulière intensité sur le territoire français. Il n'établit pas davantage être dépourvu d'attaches dans son pays d'origine quand bien même sa soeur résiderait sur le territoire français. En outre, il ne justifie d'aucune insertion professionnelle particulière sur le territoire français. Par suite, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, la décision en litige n'a pas porté au droit de M. A... D...au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels elle a été prise et n'a, ainsi, pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Pour les mêmes motifs, elle n'est pas entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressé.

Sur la décision de refus de délai de départ volontaire :

4. Il résulte de ce qui précède que M. A...D...n'est pas fondé à exciper, à l'appui de ses conclusions dirigées contre la décision refusant de lui accorder un délai de départ volontaire, de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français.

5. Aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) l'autorité administrative peut, par une décision motivée, décider que l'étranger est obligé de quitter sans délai le territoire français : (...) / II. Pour satisfaire à l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français, l'étranger dispose d'un délai de trente jours à compter de sa notification pour rejoindre le pays dont il possède la nationalité. (...) Le délai de départ volontaire accordé à l'étranger peut faire l'objet d'une prolongation par l'autorité administrative pour une durée appropriée s'il apparaît nécessaire de tenir compte de circonstances propres à chaque cas. L'étranger est informé par écrit de cette prolongation. / Toutefois, l'autorité administrative peut, par une décision motivée, décider que l'étranger est obligé de quitter sans délai le territoire français : /1° Si le comportement de l'étranger constitue une menace pour l'ordre public ; (...) 3° S'il existe un risque que l'étranger se soustraie à cette obligation. Ce risque peut être regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants : / a) Si l'étranger, qui ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, n'a pas sollicité la délivrance d'un titre de séjour (...) ".

6. La décision en litige vise le II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, cité au point précédent. En outre, elle mentionne que M. A...D...se maintient sur le territoire national sans être titulaire d'un titre de séjour et ne présente pas de document de voyage ou d'identité en cours de validité et qu'au regard de ces éléments, il convient de ne pas octroyer de délai de départ volontaire. Elle est dès lors suffisamment motivée.

7. Si, en vertu du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le ressortissant étranger qui fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français dispose en principe d'un délai de trente jours pour y satisfaire, ce même II dispose toutefois que l'autorité administrative peut, par une décision motivée, décider que ce ressortissant étranger est obligé de quitter sans délai le territoire français, lorsque notamment il existe un risque que l'intéressé se soustraie à cette obligation. Le f) du 3° de ce même paragraphe II précise que ce risque est regardé comme établi, sauf circonstance particulière, si le ressortissant étranger concerné ne présente pas de garanties de représentation suffisantes, notamment parce qu'il ne peut justifier de la possession de documents d'identité ou de voyage en cours de validité.

8. M. A... D...n'a pas été en mesure de produire un document d'identité et de voyage en cours de validité. Il entrait ainsi dans le champ d'application des dispositions du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile rappelées au point précédent qui autorisait la préfète de la Seine-Maritime à refuser de lui accorder un délai pour se soumettre volontairement à l'obligation de quitter le territoire français prononcée à son égard. Par suite, le moyen tiré de ce que, pour prendre cette décision, la préfète de la Seine-Maritime aurait commis une erreur d'appréciation doit être écarté.

Sur la décision fixant le pays de destination :

9. M. A...D...réitère son moyen tiré de l'insuffisance de motivation de la décision en litige. Cependant, il n'apporte pas en appel d'éléments nouveaux de fait ou de droit de nature à remettre en cause l'appréciation portée par le premier juge sur ce moyen. Par suite, il y a lieu, par adoption du motif retenu à bon droit par le premier juge, de l'écarter.

10. Pour les mêmes motifs que ceux retenus au point 3, les moyens tirés de ce que cette décision serait entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle et qu'elle méconnaîtrait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doivent être écartés.

Sur l'interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de deux ans :

11. Il résulte de ce qui précède que M. A...D...n'est pas fondé à exciper, à l'appui de ses conclusions dirigées contre la décision d'interdiction de retour sur le territoire français, de l'illégalité de la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français sans délai.

12. Aux termes du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative, par une décision motivée, assortit l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français, d'une durée maximale de trois ans à compter de sa notification, lorsque aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger (...). / Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative ne prononce pas d'interdiction de retour. / (...) La durée de l'interdiction de retour mentionnée au premier alinéa du présent III ainsi que le prononcé et la durée de l'interdiction de retour mentionnée au quatrième alinéa sont décidés par l'autorité administrative en tenant compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français ".

13. La décision par laquelle la préfète de la Seine-Maritime a fait interdiction à M. A... D... de revenir sur le territoire français pour une durée de deux ans vise les dispositions du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Elle indique également la durée et les conditions de son séjour, l'absence de document d'identité et de voyage, l'absence d'atteinte à sa vie privée et familiale et sa condamnation à trois mois d'emprisonnement pour des faits de vol. Dès lors, la décision comporte l'énoncé des considérations de fait et de droit sur lesquelles elle se fonde. Elle est, ainsi, suffisamment motivée.

14. La circonstance que M. A...D...n'aurait pas été destinataire de l'information prévue par l'article 42 du règlement (CE) n° 1987/2006 du Parlement européen et du Conseil du 20 décembre 2006, conformément aux exigences de la directive n° 95/46/CE du Parlement européen et du Conseil du 24 octobre 1995, alors au demeurant qu'il a été informé, aux termes de l'article 4 de l'arrêté attaqué, qu'il faisait l'objet d'un signalement aux fins de non-admission dans le système d'information Schengen, est sans incidence sur la légalité de la décision d'interdiction de retour sur le territoire français. Ce moyen doit donc être écarté.

15. Pour les mêmes motifs que ceux retenus au point 3, la décision interdisant le retour de l'intéressé pendant deux ans n'est pas entachée d'une erreur dans l'appréciation de sa situation personnelle.

16. Il résulte de tout ce qui précède que M. A...D...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande. Doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte et celles présentées au titre des dispositions combinées de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A...D...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...A...D...et au ministre de l'intérieur.

Copie sera adressée au préfet de la Seine-Maritime.

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N°18DA02236


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 18DA02236
Date de la décision : 09/07/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière. Règles de procédure contentieuse spéciales.


Composition du Tribunal
Président : Mme Courault
Rapporteur ?: Mme Muriel Milard
Rapporteur public ?: Mme Leguin
Avocat(s) : PIAUD-PEREZ

Origine de la décision
Date de l'import : 16/07/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2019-07-09;18da02236 ?
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