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29/05/2019 | FRANCE | N°18DA02398

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3e chambre - formation à 3, 29 mai 2019, 18DA02398


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure:

Mme C...D...a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 10 novembre 2017 par lequel la préfète de la Seine-Maritime a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, et a fixé le pays à destination duquel elle pourrait être reconduite d'office.

Par un jugement n° 1801067 du 3 juillet 2018, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande.

Procédure devant la cou

r :

Par une requête, enregistrée le 28 novembre 2018, MmeD..., représentée par Me B...A..., ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure:

Mme C...D...a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 10 novembre 2017 par lequel la préfète de la Seine-Maritime a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, et a fixé le pays à destination duquel elle pourrait être reconduite d'office.

Par un jugement n° 1801067 du 3 juillet 2018, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 28 novembre 2018, MmeD..., représentée par Me B...A..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir cet arrêté du 10 novembre 2017 ;

3°) d'enjoindre à la préfète de la Seine-Maritime de lui délivrer un titre de séjour dans un délai de trente jours à compter de la date de notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) à titre subsidiaire, de désigner un expert aux fins de déterminer si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé de son pays, elle pourrait y bénéficier effectivement d'un traitement approprié, et d'enjoindre alors à la préfète de la Seine-Maritime de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre des dispositions combinées de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n°91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Valérie Petit, président-assesseur, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. MmeD..., ressortissante congolaise (Congo-Brazzaville) née en 1976, déclare être entrée en France en mai 2015. Le 8 décembre 2015, elle a sollicité le bénéfice de l'asile, qui lui a été refusé par une décision du 12 mai 2016 de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides. Le 9 septembre 2016, elle a sollicité la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 10 novembre 2017, la préfète de la Seine-Maritime a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement. Mme D...relève appel du jugement du 3 juillet 2018 par lequel le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur le refus de titre de séjour :

2. La décision contestée énonce les considérations de fait et de droit sur lesquelles elle se fonde. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de cette décision doit être écarté.

3. Mme D...a sollicité la délivrance d'une carte de séjour temporaire en raison de son état de santé. Il ne ressort pas des pièces du dossier qu'elle aurait sollicité une admission exceptionnelle au séjour sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Dès lors, elle n'est pas fondée à soutenir que la décision en litige n'aurait pas été précédée d'un examen complet de sa situation au motif qu'elle ne se prononce pas sur son admission exceptionnelle au séjour sur le fondement de l'article L. 313-14 de ce code.

4. Aux termes de l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour au vu d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. / L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé (...) ". Aux termes de l'article R. 313-23 du même code : " (...) Le collège à compétence nationale, composé de trois médecins, émet un avis dans les conditions de l'arrêté mentionné au premier alinéa du présent article. La composition du collège et, le cas échéant, de ses formations est fixée par décision du directeur général de l'office. Le médecin ayant établi le rapport médical ne siège pas au sein du collège (...) ".

5. Il ressort des pièces du dossier, notamment d'une attestation établie par la directrice territoriale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) le 13 mars 2019, que le médecin qui, en application des dispositions de l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, citées au point précédent, a établi le rapport médical relatif à la situation de MmeD..., n'a pas siégé au sein du collège des médecins de l'OFII ayant émis l'avis du 12 août 2017 au vu duquel la préfète de la Seine-Maritime s'est prononcée sur sa demande de titre de séjour. Par ailleurs, il ne résulte d'aucun élément du dossier que le collège n'aurait pas été réuni de façon régulière, ni que les membres ne pouvaient y siéger, ni que Mme D...n'aurait pas pu demander à être convoquée et examinée par ce collège de médecins. L'appelante n'est, dès lors, pas fondée à soutenir que l'avis émis par le collège de médecins de l'OFII serait irrégulier.

6. Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : / (...) / 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La condition prévue à l'article L. 313-2 n'est pas exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat (...) ".

7. Il ressort des pièces du dossier que par un avis du 12 août 2017, le collège des médecins de l'OFII a estimé que l'état de santé de Mme D...nécessitait une prise en charge médicale dont le défaut ne devrait pas entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qu'elle pouvait voyager sans risque vers son pays d'origine. L'unique certificat de son médecin en date du 17 novembre 2017, s'il évoque un risque suicidaire en cas de retour dans son pays, ne suffit toutefois pas à infirmer l'appréciation du collège de médecins de l'OFII quant à l'absence de conséquences d'une exceptionnelle gravité. En tout état de cause, la requérante n'établit pas qu'elle ne pourrait pas bénéficier effectivement d'un traitement approprié au Congo-Brazzaville au seul motif que ses troubles trouveraient leur origine dans des violences subies dans ce pays. Dès lors, et sans qu'il soit besoin d'ordonner une mesure d'instruction sur ce point, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.

8. Mme D...n'a sollicité un titre de séjour qu'en raison de son état de santé. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est inopérant.

9. Mme D...soutient que sa vie privée se déroule désormais en France, compte tenu du traitement médical dont elle bénéficie, et qu'elle y a noué des liens personnels intenses. Toutefois, la présence en France de la requérante est récente. Elle n'est pas dépourvue d'attaches dans son pays d'origine où résident notamment ses deux enfants nés en 2000 et 2003. Par suite, la préfète de la Seine-Maritime, qui n'était pas tenue de procéder à un examen distinct du droit au séjour de l'appelante, d'une part au titre de sa vie privée et, d'autre part, au titre de sa vie familiale, n'a pas porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa privée et familiale et n'a, par suite, pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Il ne ressort pas non plus des pièces du dossier qu'en prenant cette décision, la préfète de la Seine-Maritime aurait commis une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressée.

10. Il résulte de ce qui a été dit aux points 2 à 9 que Mme D...n'est pas fondée à soutenir que la décision de refus de titre de séjour est entachée d'illégalité.

Sur l'obligation de quitter le territoire français :

11. Pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 5, le moyen tiré du vice de procédure dont serait entachée la décision contestée doit, en tout état de cause, être écarté.

12. Il résulte de ce qui a été dit au point 10 que Mme D...n'est pas fondée à invoquer, par la voie de l'exception, l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour.

13. Pour les raisons déjà énoncées au point 7, Mme D...n'est pas fondée à soutenir que son état de santé ferait obstacle à ce qu'elle soit éloignée du territoire français en application des dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

14. Pour les mêmes motifs que ceux énoncées au point 9, les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste commise dans l'appréciation des conséquences de la mesure d'éloignement sur la situation personnelle de Mme D... doivent être écartés.

Sur le pays de destination :

15. Il y a lieu, par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges, d'écarter le moyen tiré de ce que la décision contestée aurait été prise en méconnaissance du principe général du droit de l'Union européenne d'être entendu préalablement au prononcé de toute décision individuelle défavorable.

16. Si Mme D...soutient qu'elle est menacée en cas de retour dans son pays d'origine, elle n'apporte, à l'appui de ce moyen, aucun élément probant. Il ressort des pièces du dossier, au demeurant, que l'intéressée a présenté une demande d'asile qui a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et du droit d'asile. Par suite le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.

17. Il ne ressort pas davantage des pièces du dossier que la préfète de la Seine-Maritime aurait commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de cette décision sur la situation personnelle de MmeD....

18. Il résulte de tout ce qui précède que Mme D...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction, assorties d'astreinte, ainsi que celles présentées au titre des dispositions combinées de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme D...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C...D..., au ministre de l'intérieur et à Me B...A....

Copie en sera adressée pour information au préfet de la Seine-Maritime.

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N°18DA02398

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N°"Numéro"


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3e chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 18DA02398
Date de la décision : 29/05/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. Albertini
Rapporteur ?: Mme Valérie Petit
Rapporteur public ?: M. Arruebo-Mannier
Avocat(s) : SELARL ANTOINE MARY et CAROLINE INQUIMBERT

Origine de la décision
Date de l'import : 11/06/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2019-05-29;18da02398 ?
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