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30/04/2019 | FRANCE | N°18DA01004

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2ème chambre - formation à 3, 30 avril 2019, 18DA01004


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure:

M. B...A...a demandé au tribunal administratif d'Amiens d'annuler l'arrêté du 13 avril 2018 du préfet de l'Aisne ordonnant son transfert aux autorités allemandes et l'arrêté du même jour l'assignant à résidence pour une durée de quarante-cinq jours.

Par un jugement n° 1801176 du 24 avril 2018, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif d'Amiens a fait droit à sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 18 mai 2018

et le 27 novembre 2018, le préfet de l'Aisne demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°)...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure:

M. B...A...a demandé au tribunal administratif d'Amiens d'annuler l'arrêté du 13 avril 2018 du préfet de l'Aisne ordonnant son transfert aux autorités allemandes et l'arrêté du même jour l'assignant à résidence pour une durée de quarante-cinq jours.

Par un jugement n° 1801176 du 24 avril 2018, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif d'Amiens a fait droit à sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 18 mai 2018 et le 27 novembre 2018, le préfet de l'Aisne demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. A...devant le tribunal administratif d'Amiens.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Muriel Milard, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M.A..., ressortissant afghan né le 7 janvier 1995, a sollicité le bénéfice de l'asile le 14 novembre 2017. A la suite de la consultation des données de l'unité centrale Eurodac, le préfet de l'Aisne a, le 20 novembre 2017, saisi les autorités allemandes d'une demande de reprise en charge, en application de l'article 18-1 du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013, qui a fait l'objet d'un accord exprès le 24 novembre 2017. Par deux arrêtés du 13 avril 2018, le préfet de l'Aisne a, d'une part, ordonné le transfert de M. A...aux autorités allemandes et, d'autre part, l'a assigné à résidence pour une durée de quarante-cinq jours. Le préfet relève appel du jugement du 24 avril 2018 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif d'Amiens a annulé ces arrêtés.

Sur la requête du préfet de l'Aisne :

2. Aux termes de l'article 29, paragraphe 1, du règlement, le transfert du demandeur vers l'Etat membre responsable de l'examen de sa demande d'asile doit s'effectuer " dès qu'il est matériellement possible et, au plus tard, dans un délai de six mois à compter de l'acceptation par un autre Etat membre de la requête aux fins de la prise en charge ou de reprise en charge de la personne concernée ou de la décision définitive sur le recours ou la révision lorsque l'effet suspensif est accordé conformément à l'article 27, paragraphe 3 ". Aux termes du paragraphe 2 du même article : " Si le transfert n'est pas exécuté dans le délai de six mois, l'État membre responsable est libéré de son obligation de prendre en charge ou de reprendre en charge la personne concernée et la responsabilité est alors transférée à l'État membre requérant. Ce délai peut être porté à un an au maximum s'il n'a pas pu être procédé au transfert en raison d'un emprisonnement de la personne concernée ou à dix-huit mois au maximum si la personne concernée prend la fuite. ".

3. Aux termes du premier alinéa de l'article L. 742-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sous réserve du second alinéa de l'article L. 742-1, l'étranger dont l'examen de la demande d'asile relève de la responsabilité d'un autre Etat peut faire l'objet d'un transfert vers l'Etat responsable de cet examen ". Aux termes du I de l'article L. 742-4 du même code : " L'étranger qui a fait l'objet d'une décision de transfert mentionnée à l'article L. 742-3 peut, dans le délai de quinze jours à compter de la notification de cette décision, en demander l'annulation au président du tribunal administratif. / Le président ou le magistrat qu'il désigne à cette fin (...) statue dans un délai de quinze jours à compter de sa saisine (...) ". En vertu du II du même article, lorsque la décision de transfert est accompagnée d'un placement en rétention administrative ou d'une mesure d'assignation à résidence notifiée simultanément, l'étranger dispose d'un délai de quarante-huit heures pour saisir le président du tribunal administratif d'un recours et ce dernier dispose d'un délai de soixante-douze heures pour statuer. Aux termes du second alinéa de l'article L. 742-5 du même code : " La décision de transfert ne peut faire l'objet d'une exécution d'office ni avant l'expiration d'un délai de quinze jours ou, si une décision de placement en rétention prise en application de l'article L. 551-1 ou d'assignation à résidence prise en application de l'article L. 561-2 a été notifiée avec la décision de transfert, avant l'expiration d'un délai de quarante-huit heures, ni avant que le tribunal administratif ait statué, s'il a été saisi ". L'article L. 742-6 du même code prévoit que : " Si la décision de transfert est annulée, il est immédiatement mis fin aux mesures de surveillance prévues au livre V. L'autorité administrative statue à nouveau sur le cas de l'intéressé ".

4. Il résulte de la combinaison de ces dispositions que l'introduction d'un recours devant le tribunal administratif contre la décision de transfert a pour effet d'interrompre le délai de six mois fixé à l'article 29 du règlement (UE) n° 604/2013, qui courait à compter de l'acceptation du transfert par l'Etat requis, délai qui recommence à courir intégralement à la suite de la décision du tribunal administratif statuant au principal sur cette demande, quel que soit le sens de sa décision. Ni un appel, même formé par l'autorité préfectorale, ni le sursis à exécution du jugement accordé par le juge d'appel sur une demande présentée en application de l'article R. 811-15 du code de justice administrative n'ont pour effet d'interrompre ce nouveau délai. Son expiration a pour conséquence qu'en application des dispositions du paragraphe 2 de l'article 29 du règlement précité, l'Etat requérant devient responsable de l'examen de la demande de protection internationale.

5. Il ressort des pièces du dossier que l'arrêté du 13 avril 2018 par lequel le préfet de l'Aisne a ordonné le transfert de M. A...aux autorités allemandes est intervenu moins de six mois après la décision du 24 novembre 2017 par laquelle celles-ci ont explicitement donné leur accord pour sa reprise en charge, et par suite, avant l'expiration du délai d'exécution du transfert fixé par l'article 29 du règlement du 26 juin 2013. Ce délai a toutefois été interrompu le 19 avril 2018 par l'introduction du recours présenté par M. A...contre cette décision. Ce délai a recommencé à courir à la suite de la notification le 25 avril 2018 du jugement du tribunal administratif d'Amiens du 24 avril 2018 qui a annulé cet arrêté. Il ne ressort d'aucune des pièces du dossier que l'autorité préfectorale aurait décidé de porter à un an le délai de remise après avoir constaté que l'intéressé aurait été emprisonné ou de le porter à dix-huit mois après avoir constaté qu'il aurait pris la fuite. En conséquence, la décision de transfert est devenue caduque, dès lors qu'elle n'a fait l'objet d'aucune décision de prorogation et n'a pas été matériellement exécutée. La caducité de cette décision, qui est intervenue postérieurement à l'introduction de la requête du préfet de l'Aisne devant la cour, a pour effet de priver d'objet sa demande tendant à l'annulation du jugement du 24 avril 2018 du magistrat désigné par le président du tribunal administratif d'Amiens. Par suite, les conclusions du préfet de l'Aisne sont devenues sans objet et il n'y a plus lieu de statuer sur celles-ci.

Sur les frais liés à l'instance :

6. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions de M. A...présentées au titre des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

DÉCIDE :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions du préfet de l'Aisne tendant à l'annulation du jugement n° 1801176 du 24 avril 2018 du magistrat désigné par le président du tribunal administratif d'Amiens.

Article 2 : Les conclusions de M. A...présentées au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à M. B...A....

Copie en sera adressée au préfet de l'Aisne.

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N°18DA01004


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 18DA01004
Date de la décision : 30/04/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme Courault
Rapporteur ?: Mme Muriel Milard
Rapporteur public ?: Mme Leguin
Avocat(s) : GAGEY

Origine de la décision
Date de l'import : 14/05/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2019-04-30;18da01004 ?
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