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04/04/2019 | FRANCE | N°18DA01779

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3e chambre - formation à 3, 04 avril 2019, 18DA01779


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D...B...a demandé au tribunal administratif de Rouen de surseoir à statuer sur la recevabilité de sa demande dans l'attente de la transmission de la question prioritaire de constitutionnalité par le Conseil d'Etat au Conseil constitutionnel, d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 18 octobre 2017 par lequel la préfète de la Seine-Maritime lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office et lui a interdit

le retour sur le territoire français pour une durée de trois ans et d'enjoin...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D...B...a demandé au tribunal administratif de Rouen de surseoir à statuer sur la recevabilité de sa demande dans l'attente de la transmission de la question prioritaire de constitutionnalité par le Conseil d'Etat au Conseil constitutionnel, d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 18 octobre 2017 par lequel la préfète de la Seine-Maritime lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office et lui a interdit le retour sur le territoire français pour une durée de trois ans et d'enjoindre à la préfète de la Seine-Maritime de réexaminer sa situation et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans le délai de huit jours à compter du jugement à intervenir, sous astreinte de cent euros par jour de retard.

Par un jugement avant-dire droit n° 1800026 du 12 janvier 2018, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Rouen a jugé qu'il n'y avait pas lieu de transmettre au Conseil d'Etat la question de la conformité à la Constitution des dispositions du IV de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et a sursis à statuer sur la requête de M. B...jusqu'à ce que le Conseil d'Etat se soit prononcé ou, s'il a été saisi, jusqu'à ce que le Conseil constitutionnel ait tranché la question de constitutionnalité soulevée.

Par un jugement n° 1800026 du 5 juillet 2018, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Rouen a annulé l'arrêté du 18 octobre 2017 de la préfète de la Seine-Maritime et lui a enjoint de délivrer à M. B...une autorisation provisoire de séjour dans l'attente du réexamen de sa situation dans le délai d'un mois à compter du jugement.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 23 août 2018, la préfète de la Seine-Maritime demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 5 juillet 2018 du tribunal administratif de Rouen ;

2°) de rejeter la demande de M. B...devant ce tribunal.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Jean-Jacques Gauthé, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M.B..., ressortissant tunisien entré irrégulièrement en France en 2004, a été condamné par un jugement du 16 juin 2016 du tribunal correctionnel de Rouen à quatre ans d'emprisonnement pour des faits de blanchiment douanier, transport non autorisé de stupéfiants, détention non autorisée de stupéfiants, acquisition non autorisée de stupéfiants, offre et cession non autorisée de stupéfiants et participation à une association de malfaiteurs. M.B..., a été incarcéré à.compter du 24 août 2016 puis placé en rétention administrative du 1er janvier 2018 au 29 janvier 2018 Cette mesure prise par le juge des libertés et de la détention et confirmée par une ordonnance du premier président de la cour d'appel d'Amiens. La préfète de la Seine-Maritime relève appel du jugement du 5 juillet 2018 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Rouen a annulé son arrêté du 18 octobre 2017 faisant obligation à M. B...de quitter le territoire français sans délai, fixant le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office et lui interdisant le retour sur le territoire français pour une durée de trois ans et lui a enjoint de délivrer à M. B...une autorisation provisoire de séjour dans l'attente du réexamen de sa situation dans le délai d'un mois à compter du jugement.

2. Il ressort des pièces du dossier, qu'alors qu'il était détenu, M. B...a été auditionné 12 octobre 2017 par les services de la police aux frontières de Rouen sur les conditions de son entrée en France et sur son droit au séjour, en particulier en ce qui concerne son âge, sa nationalité, sa situation de famille, ses attaches dans son pays d'origine, les raisons et conditions de son entrée en France ainsi que ses ressources et ses conditions d'hébergement. Il a pu à cette occasion, faire valoir faire connaître des observations utiles et pertinentes de nature à influer sur la décision prise à son encontre. Par suite, la préfète de la Seine-Maritime est fondée à soutenir que, c'est à tort, que le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Rouen a annulé son arrêté du 18 octobre 2017 au motif de la méconnaissance du principe général du droit d'être entendu prévu par l'article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne.

3. Il appartient toutefois à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. B...devant la juridiction administrative

Sur la fin de non-recevoir opposée par la préfète de la Seine-Maritime :

4. En vertu du II de l'article L 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile relatif à la situation des étrangers faisant l'objet d'une obligation de quitter le territoire français sans délai, si l'étranger est placé en rétention, il est statué selon la procédure et le délai prévu au III de cet article. En vertu de ce texte, en cas de placement en rétention, l'étranger peut demander l'annulation de l'obligation de quitter le territoire français, de la décision refusant un délai de départ volontaire, de la décision fixant le pays de destination et de la décision interdisant le retour sur le territoire français dans un délai de quarante-huit heures à compter de la notification.

5. Il ressort des pièces du dossier que l'arrêté du 18 octobre 2017 de la préfète de la Seine-Maritime faisant obligation à M. B...de quitter le territoire français sans délai, fixant le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office et lui interdisant le retour sur le territoire français pour une durée de trois ans, lui a été notifié le 2 novembre 2017 à 10h 15 à la maison d'arrêt de Rouen. La demande de M. B...tendant à l'annulation de cet arrêté a été enregistrée le 2 janvier 2018 au greffe du tribunal administratif de Rouen. La décision n° 2018-709 QPC du 1er juin 2018 du Conseil constitutionnel a reconnu l'inconstitutionnalité des termes " et dans les délais " du IV de l'article L. 512-1 précité relatif aux délais de recours et de jugement pour les étrangers incarcérés. Il résulte de cette décision, éclairée de son commentaire, qu'il y a lieu, à la suite de cette censure, applicable à toutes les instances non jugées définitivement à la date de la publication de ladite décision, soit le 2 juin 2018, de faire application à la demande de M. B...du délai de droit commun, c'est-à-dire du délai de quarante-huit heures suivant la notification de l'arrêté en litige, fixé par le III de l'article L 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par suite, la fin de non-recevoir opposée devant le tribunal administratif par la préfète de la Seine-Maritime, tirée de la tardiveté de la demande de M.B..., doit être accueillie.

6. Il résulte de tout ce qui précède que la préfète de la Seine-Maritime est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a annulé son arrêté du 18 octobre 2017. Par voie de conséquence, les conclusions à fin d'injonction de M. B... et celles tendant à l'application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du 5 juillet 2018 du magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Rouen est annulé.

Article 2 : La demande présentée devant le tribunal administratif et les conclusions d'appel de M. B...sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur, à M. D...B...et à Me A...C.compter du 24 août 2016 puis placé en rétention administrative du 1er janvier 2018 au 29 janvier 2018

Copie en sera adressée pour information à la préfète de la Seine-Maritime.

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N°18DA01779

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N°"Numéro"


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3e chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 18DA01779
Date de la décision : 04/04/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. Albertini
Rapporteur ?: M. Jean-Jacques Gauthé
Rapporteur public ?: M. Arruebo-Mannier
Avocat(s) : SELARL MADELINE-LEPRINCE-MAHIEU

Origine de la décision
Date de l'import : 16/04/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2019-04-04;18da01779 ?
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