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07/03/2019 | FRANCE | N°18DA01129

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 4e chambre - formation à 3, 07 mars 2019, 18DA01129


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...A...a demandé au tribunal administratif de Lille, d'une part, d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 29 juin 2017 par lequel le préfet du Nord a refusé de lui délivrer un certificat de résidence, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office, d'autre part, de faire injonction, sous astreinte, au préfet du Nord de lui délivrer ce certificat de résidence, à défaut, de procé

der à un nouvel examen de sa situation.

Par un jugement n° 1708920 du 8 mars 20...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...A...a demandé au tribunal administratif de Lille, d'une part, d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 29 juin 2017 par lequel le préfet du Nord a refusé de lui délivrer un certificat de résidence, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office, d'autre part, de faire injonction, sous astreinte, au préfet du Nord de lui délivrer ce certificat de résidence, à défaut, de procéder à un nouvel examen de sa situation.

Par un jugement n° 1708920 du 8 mars 2018, le tribunal administratif de Lille a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 1er juin 2018, M.A..., représenté par Me Rivière, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet du Nord, sous astreinte de 150 euros par jour de retard à l'expiration d'un délai de quinze jours à compter de la date de notification de l'arrêt à intervenir, de lui délivrer le certificat de résidence sollicité, à défaut, de procéder à un nouvel examen de sa demande ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Jean-François Papin, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M.A..., ressortissant algérien né le 27 janvier 1999 et qui est entré en tant que mineur non accompagné sur le territoire français le 2 novembre 2014, a été confié au service de l'aide sociale à l'enfance du département du Nord. Logé successivement dans deux foyers gérés par des associations de protection de l'enfance et d'insertion, M. A...a suivi des cours d'apprentissage de la langue française et a intégré, au titre de l'année scolaire 2015/2016, une scolarité en première année de préparation d'un certificat d'aptitude professionnelle. Toutefois, par un arrêté du 29 juin 2017, le préfet du Nord a refusé à M. A...la délivrance du certificat de résidence qu'il sollicitait, lui a fait obligation de quitter le territoire français, lui a imparti un délai de départ volontaire de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office. M. A...relève appel du jugement du 8 mars 2018 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation, pour excès de pouvoir, de cet arrêté.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Les articles L. 313-14 et L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, relatifs aux conditions dans lesquelles les ressortissants étrangers peuvent bénéficier d'une admission exceptionnelle au séjour, ne s'appliquent pas aux ressortissants algériens, dont la situation est régie de manière exclusive par l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968. Si cet accord ne prévoit pas de semblables modalités d'admission exceptionnelle au séjour, ses stipulations n'interdisent pas au préfet de délivrer un certificat de résidence à un ressortissant algérien qui ne remplit pas l'ensemble des conditions auxquelles est subordonnée sa délivrance de plein droit. Il appartient au préfet, dans l'exercice du pouvoir discrétionnaire dont il dispose sur ce point, d'apprécier, compte tenu de l'ensemble des éléments de la situation personnelle de l'intéressé, l'opportunité d'une mesure de régularisation.

3. Il ressort des pièces du dossier et notamment de deux notes émises par les associations qui l'ont accueilli, qu'admis d'abord dans des foyers, M. A...s'est fait favorablement remarquer de l'équipe éducative pour son respect des règles de vie en communauté, ainsi que pour sa capacité à gérer sa vie quotidienne et pour son autonomie, ce qui a conduit à rapidement envisager son logement en appartement. Participant aux activités collectives proposées, il est parvenu, malgré une personnalité timide et discrète, à s'insérer progressivement au sein de ses différents lieux d'accueil, tant auprès des résidents que des encadrants. Dans le même temps, il ressort des pièces du dossier et notamment des bulletins de notes et autres pièces scolaires produites, que M. A...s'est particulièrement investi dans sa scolarité en première année préparatoire au certificat d'aptitude professionnelle dans la spécialité " plomberie et installation thermique ", ce qui lui a permis d'obtenir des résultats très honorables. Il a suivi parallèlement des cours d'apprentissage de la langue française puis de soutien en Français. Il a ainsi réussi, en juin 2017, les épreuves du certificat d'aptitude professionnelle avec une moyenne générale de 15,17/20. Ses professeurs ont souligné son investissement, son sérieux et son assiduité, et ont préconisé qu'il s'oriente vers la préparation d'un baccalauréat professionnel. L'engagement de M. A...a été également souligné par les deux entreprises qui l'ont accueilli en stage, de même que sa ponctualité, l'une de ces entreprises lui ayant proposé de l'accueillir de nouveau pour des stages ultérieurs. Dans ces circonstances particulières, en refusant de faire bénéficier M. A...d'une mesure de régularisation, au risque de compromettre la concrétisation d'un projet professionnel à hauteur des aptitudes de ce jeune majeur qui s'est particulièrement investi, le préfet du Nord a commis une erreur manifeste d'appréciation. Par suite, la décision de refus de séjour prononcée par l'arrêté du 29 juin 2017 en litige doit être annulée pour ce motif. Par voie de conséquence, il y a lieu d'annuler les décisions faisant obligation à M. A...de quitter le territoire français, lui impartissant un délai de départ volontaire et fixant le pays de destination, prononcées par le même arrêté.

4. Il résulte de tout ce qui précède que M. A...est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement du 8 mars 2018, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

5. Le présent arrêt, qui annule la décision de refus de séjour prononcée par l'arrêté du préfet du Nord du 29 juin 2017 au motif qu'elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation et, par voie de conséquence, les autres décisions, faisant obligation à M. A...de quitter le territoire français, lui impartissant un délai de départ volontaire et fixant le pays de destination, prononcées par le même arrêté, implique nécessairement qu'un certificat de résidence d'un an soit délivré à l'intéressé afin qu'il soit en mesure de poursuivre sa scolarité professionnelle en France. Il y a lieu d'impartir au préfet du Nord un délai de deux mois à compter de la date de notification du présent arrêt pour procéder à cette délivrance. En revanche, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'assortir d'une astreinte l'injonction ainsi prescrite.

Sur les conclusions présentées au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :

6. M. A...a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale. Par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me Rivière, son avocate, renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à la mission d'aide juridictionnelle qui lui a été confiée, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros à ce titre.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du 8 mars 2018 du tribunal administratif de Lille et l'arrêté du 29 juin 2017 du préfet du Nord refusant de délivrer un certificat de résidence à M.A..., lui faisant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de destination de cette mesure sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet du Nord, ou à tout autre préfet qui serait devenu territorialement compétent, de délivrer à M.A..., dans un délai de deux mois à compter de la date de notification du présent arrêt, un certificat de résidence d'un an lui permettant de poursuivre sa scolarité en France.

Article 3 : L'Etat versera à Me Rivière, avocate de M.A..., la somme de 1 000 euros en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que cette avocate renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à la mission d'aide juridictionnelle qui lui a été confiée.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. A...est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...A..., au ministre de l'intérieur, au préfet du Nord et à Me B...Rivière.

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N°18DA01129


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 4e chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 18DA01129
Date de la décision : 07/03/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme Grand d'Esnon
Rapporteur ?: M. Jean-François Papin
Rapporteur public ?: M. Riou
Avocat(s) : RIVIERE

Origine de la décision
Date de l'import : 19/03/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2019-03-07;18da01129 ?
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