Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme B...E...épouse D...a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler l'arrêté du 31 août 2017 de la préfète de la Seine-Maritime refusant de lui délivrer un titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays à destination duquel elle pourrait être reconduite d'office.
Par un jugement n° 1800115 du 10 avril 2018, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 3 août 2018, MmeD..., représentée par Me C... A..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Rouen du 10 avril 2018 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 31 août 2017 de la préfète de la Seine-Maritime ;
3°) d'enjoindre à la préfète de la Seine-Maritime de lui délivrer une carte de séjour temporaire valable un an dans un délai de trente jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ou, à défaut, de réexaminer sa situation et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour sous la même condition de délai et d'astreinte ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à son avocat dans les conditions prévues par l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
---------------------------------------------------------------------------------------------------------
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant signée à New York le 26 janvier 1990 ;
- la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Muriel Milard, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. MmeD..., de nationalité ukrainienne, née le 30 décembre 1991, entrée en France en septembre 2014 selon ses déclarations, a demandé son admission au séjour au titre de l'asile. Sa demande a été rejetée par une décision du 30 septembre 2015 de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, confirmée par une décision du 26 juillet 2016 de la Cour nationale du droit d'asile. Elle relève appel du jugement du 10 avril 2018 par lequel le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 31 août 2017 de la préfète de la Seine-Maritime refusant de lui délivrer un titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays à destination duquel elle pourrait être reconduite d'office.
Sur le refus de titre de séjour :
2. Mme D...a sollicité son admission au séjour au titre de l'asile. Elle a donc été mise à même de faire valoir, avant l'intervention de la décision qui lui a refusé cette admission au séjour, tous éléments d'information ou arguments de nature à influer sur le contenu de cette mesure. Par suite, la garantie consistant dans le droit à être entendu préalablement à la mesure d'éloignement, telle qu'elle est notamment protégée par le droit de l'Union, n'a pas été méconnue.
3. Aux termes de l'article 12 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " Les Etats parties garantissent à l'enfant qui est capable de discernement le droit d'examiner librement son opinion sur toute question l'intéressant, les opinions de l'enfant étant dûment prises en considération eu égard à son âge et à son degré de maturité. 2. A cette fin, on donnera notamment à l'enfant la possibilité d'être entendu dans toute procédure administrative l'intéressant, soit directement, soit par l'intermédiaire d'un représentant ou d'un organisme approprié, de façon compatible avec les règles de procédure de la législation nationale ".
4. Si les stipulations du 2 de l'article 12 sont d'effet direct et peuvent, par suite, être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, la procédure administrative ayant conduit au prononcé de l'arrêté en litige, qui a pour objet de refuser un titre de séjour à Mme D... et à l'obliger à quitter le territoire français, ne constitue pas une procédure intéressant les enfants de celle-ci, au sens de ces stipulations, même si cette mesure d'éloignement est susceptible de comporter des effets sur ses enfants. Par suite, la préfète de la Seine-Maritime n'était pas tenue d'entendre l'enfant aîné de son époux, âgé de seize ans à la date de l'arrêté contesté et réputé capable de discernement. Dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations précitées doit être écarté.
5. Mme D...réitère son moyen tiré du défaut d'examen particulier de sa situation personnelle. Cependant, elle n'apporte pas en appel d'éléments nouveaux de fait ou de droit de nature à remettre en cause l'appréciation portée par les premiers juges sur ce moyen. Par suite, il y a lieu, par adoption du motif retenu à bon droit par les premiers juges, de l'écarter.
6. Mme D...est entrée irrégulièrement en France en septembre 2014 en compagnie de son époux et de son fils âgé de treize ans. Elle était présente sur le territoire français depuis moins de trois ans à la date de l'arrêté attaqué. Elle ne justifie pas d'une intégration particulière en France. Il ne ressort pas davantage des pièces du dossier que le fils de son époux, issu d'une première union, âgé de treize ans lors de son arrivée en France et qui pratique le Kung-Fu à haut niveau, ne pourrait pas reprendre sa scolarité en Ukraine. En outre, le mari de la requérante se trouve également en situation irrégulière en France et a fait l'objet d'un refus de titre de séjour et d'une obligation de quitter le territoire français le 31 août 2017. Au regard des pièces du dossier, rien ne s'oppose donc à ce que la cellule familiale puisse se reconstituer hors de France. Dès lors, compte tenu des conditions et de la durée du séjour en France de l'intéressée, la préfète de la Seine-Maritime n'a pas porté à son droit au respect de la vie privée et familiale, dont il ne ressort pas des pièces du dossier qu'elle n'aurait pas apprécié ces deux dimensions séparément, une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels la décision a été prise. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté. Pour les mêmes motifs, celui tiré de l'erreur manifeste d'appréciation qu'aurait commise le préfet quant aux conséquences de sa décision sur la situation personnelle de l'intéressée doit également être écarté.
7. Si la requérante soutient que la décision en litige méconnaît les stipulations du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant, ce moyen, qui n'est assorti d'aucune précision nouvelle en appel, a été à bon droit écarté par le jugement attaqué, dont il y a lieu d'adopter les motifs sur ce point.
Sur l'obligation de quitter le territoire français :
8. Mme D...a sollicité son admission au séjour au titre de l'asile. Elle a donc été mise à même de faire valoir, avant l'intervention de l'arrêté qui l'a également obligée à quitter le territoire français, tous éléments d'information ou arguments de nature à influer sur le contenu de ces mesures. Par suite, la garantie consistant dans le droit à être entendu préalablement à la mesure d'éloignement, telle qu'elle est notamment protégée par le droit de l'Union, n'a pas été méconnue. Pour les mêmes motifs, Mme D...n'est pas fondée à soutenir que la préfète de la Seine-Maritime n'aurait pas procédé à un examen particulier de sa situation personnelle.
9. Pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 4, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 12 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant doit être écarté.
10. Il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de l'illégalité de la décision faisant obligation à Mme D...de quitter le territoire français à raison de l'illégalité du refus de titre de séjour ne peut qu'être écarté.
11. Pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 6, les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de la décision sur sa situation personnelle doivent être écartés.
12. Si la requérante soutient que la décision en litige méconnaît les stipulations du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant, ce moyen, qui n'est assorti d'aucune précision nouvelle en appel, a été à bon droit écarté par le jugement attaqué, dont il y a lieu d'adopter les motifs sur ce point.
Sur le pays de destination :
13. Pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 8, le moyen tiré de la méconnaissance du principe du contradictoire résultant du principe général du droit de l'Union européenne d'être entendu doit être écarté.
14. Il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de l'illégalité, par voie d'exception, de la décision d'obligation de quitter le territoire français doit être écarté.
15. Aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ". Aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ".
16. Mme D...soutient qu'elle serait menacée en cas de retour dans son pays d'origine. Toutefois, elle n'établit pas, par son récit et les pièces produites au dossier, la réalité des faits allégués et l'existence de risques personnels et actuels en cas de retour dans son pays d'origine, alors, au demeurant, que sa demande d'asile a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides par une décision du 30 septembre 2015 dont la légalité a été confirmée par la Cour nationale du droit d'asile le 26 juillet 2016. Dans ces conditions, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.
17. Pour les mêmes motifs que ceux retenus précédemment, celui tiré de l'erreur manifeste d'appréciation qu'aurait commise le préfet quant aux conséquences de sa décision sur la situation personnelle de l'intéressée doit également être écarté.
18. Il résulte de tout ce qui précède que Mme D...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande. Doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte et celles présentées au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme D...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B...E...épouseD..., au ministre de l'intérieur et à Me C...A....
Copie sera adressée à la préfète de la Seine-Maritime.
5
N°18DA01634