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31/01/2019 | FRANCE | N°16DA02456

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3e chambre - formation à 3, 31 janvier 2019, 16DA02456


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D...C...a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler l'arrêté du 14 janvier 2011 du ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat en tant qu'il le nomme dans le grade d'inspecteur départemental de première classe, 3ème échelon, à compter du 1er avril 2011 et l'arrêté ministériel du 22 août 2011 en tant qu'il le reclasse dans le grade d'inspecteur divisionnaire des finances publiques hors classe, 3ème échelon, à compter du 1er septembre 201

1.

Par une ordonnance n° 1403894 du 20 octobre 2016, la présidente de la 5ème...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D...C...a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler l'arrêté du 14 janvier 2011 du ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat en tant qu'il le nomme dans le grade d'inspecteur départemental de première classe, 3ème échelon, à compter du 1er avril 2011 et l'arrêté ministériel du 22 août 2011 en tant qu'il le reclasse dans le grade d'inspecteur divisionnaire des finances publiques hors classe, 3ème échelon, à compter du 1er septembre 2011.

Par une ordonnance n° 1403894 du 20 octobre 2016, la présidente de la 5ème chambre du tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 20 décembre 2016, et un mémoire en réplique, enregistré le 5 octobre 2017, M. D...C..., représenté par Me B...A..., demande à la cour :

1°) d'annuler cette ordonnance ;

2°) d'annuler l'arrêté du 14 janvier 2011 du ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat en tant qu'il le nomme dans le grade d'inspecteur départemental de première classe, 3ème échelon, à compter du 1er avril 2011 ;

3°) d'annuler l'arrêté ministériel du 22 août 2011 en tant qu'il le reclasse dans le grade d'inspecteur divisionnaire des finances publiques hors classe, 3ème échelon, à compter du 1er septembre 2011 ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Hervé Cassara, premier conseiller,

- et les conclusions de M. Jean-Philippe Arruebo-Mannier, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Aux termes du premier alinéa de l'article R. 421-1 du code de justice administrative dans sa rédaction applicable au présent litige : " Sauf en matière de travaux publics, la juridiction ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision, et ce, dans les deux mois à partir de la notification ou de la publication de la décision attaquée " et aux termes de l'article R. 421-5 du même code : " Les délais de recours contre une décision administrative ne sont opposables qu'à la condition d'avoir été mentionnés, ainsi que les voies de recours, dans la notification de la décision ". Il résulte de ces dispositions que lorsque la notification ne comporte pas les mentions requises, ce délai n'est pas opposable.

2. Toutefois, le principe de sécurité juridique, qui implique que ne puissent être remises en cause sans condition de délai des situations consolidées par l'effet du temps, fait obstacle à ce que puisse être contestée indéfiniment une décision administrative individuelle qui a été notifiée à son destinataire, ou dont il est établi, à défaut d'une telle notification, que celui-ci a eu connaissance. En une telle hypothèse, si le non-respect de l'obligation d'informer l'intéressé sur les voies et les délais de recours, ou l'absence de preuve qu'une telle information a bien été fournie, ne permet pas que lui soient opposés les délais de recours fixés par le code de justice administrative, le destinataire de la décision ne peut exercer de recours juridictionnel au-delà d'un délai raisonnable. En règle générale et sauf circonstances particulières dont se prévaudrait le requérant, ce délai ne saurait, sous réserve de l'exercice de recours administratifs pour lesquels les textes prévoient des délais particuliers, excéder un an à compter de la date à laquelle une décision expresse lui a été notifiée ou de la date à laquelle il est établi qu'il en a eu connaissance.

3. La règle énoncée ci-dessus, qui a pour seul objet de borner dans le temps les conséquences de la sanction attachée au défaut de mention des voies et délais de recours, ne porte pas atteinte à la substance du droit au recours, mais tend seulement à éviter que son exercice, au-delà d'un délai raisonnable, ne mette en péril la stabilité des situations juridiques et la bonne administration de la justice, en exposant les défendeurs potentiels à des recours excessivement tardifs. Il appartient dès lors au juge administratif d'en faire application au litige dont il est saisi, quelle que soit la date des faits qui lui ont donné naissance.

Sur la régularité de l'ordonnance attaquée :

4. Aux termes de l'article R. 611-7 du code de justice administrative : " Lorsque la décision lui paraît susceptible d'être fondée sur un moyen relevé d'office, le président de la formation de jugement ou, au Conseil d'Etat, la chambre chargée de l'instruction en informe les parties avant la séance de jugement et fixe le délai dans lequel elles peuvent, sans qu'y fasse obstacle la clôture éventuelle de l'instruction, présenter leurs observations sur le moyen communiqué. / Les dispositions du présent article ne sont pas applicables lorsqu'il est fait application des dispositions des articles R. 122-12, R. 222-1, R. 611-8 ou L. 822-1. ".

5. En soutenant que le tribunal administratif ne l'a pas mis à même de faire valoir des circonstances particulières, au sens de la règle énoncée au point 2, pour déroger au délai d'un an mentionné au même point, M. C...doit être regardé comme soutenant que la présidente de la 5ème chambre du tribunal administratif de Lille a relevé d'office l'irrecevabilité de son recours exercé contre une décision individuelle dont il a eu connaissance, fondée sur le fait qu'il est exercé au-delà d'un délai raisonnable, sans qu'aient été respectés ni les dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, nonobstant l'existence d'une fin de non-recevoir fondée sur la tardiveté de la requête, ni le principe du contradictoire. Toutefois, d'une part, il résulte des termes mêmes du second alinéa des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative mentionnées au point 4 que ces dispositions ne sont pas applicables lorsqu'il est fait application, comme en l'espèce, des dispositions de l'article R. 222-1 du même code. D'autre part, il ressort des pièces du dossier que les ministres ont produit, dans le cadre de l'instance devant le tribunal administratif de Lille, la décision du Conseil d'Etat n° 387763 du 13 juillet 2016 dont le premier juge a fait application, à l'appui d'un bordereau de production enregistré le 2 septembre 2016, et que cette pièce a été communiquée au conseil de M. C... par un courrier du 12 septembre 2016 dont il a accusé réception le jour même via l'application Telerecours, soit six semaines avant que l'ordonnance attaquée n'ait été prise. Dès lors, il lui appartenait de tirer toutes les conséquences de cette production, qu'il a été mis à même de contester et qui impliquait nécessairement que les ministres invitent le tribunal administratif à faire application de cette décision, notamment en produisant tout élément de nature à démontrer l'existence de circonstances particulières au sens de cette décision. Par suite, l'irrecevabilité de la requête de M. C...en application de la règle rappelée aux points 1 à 3, qu'il a été mis à même de contester, ressortait des pièces du dossier. Il suit de là que le moyen tiré de l'irrégularité de l'ordonnance attaquée doit être écarté.

Sur le bien-fondé de l'ordonnance attaquée :

6. En premier lieu, il résulte de ce qui a été énoncé au point 3 que M. C...n'est pas fondé à soutenir que l'application rétroactive de la règle énoncée au point 2 porterait atteinte à la substance du droit au recours et méconnaîtrait ainsi les stipulations des articles 6 et 13 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

7. En deuxième lieu, il ressort des pièces du dossier, notamment du courriel de M. C...du 12 octobre 2011, qu'il reconnaît avoir reçu notification de l'arrêté du 14 janvier 2011 le 15 mars 2011 et de l'arrêté du 22 août 2011 le 15 septembre 2011. Il a donc eu connaissance de ces arrêtés au plus tard à ces dates nonobstant la double circonstance, à la supposer établie, que les arrêtés eux-mêmes n'aient pas été annexés à ces lettres de notification et que ces lettres ne mentionnaient pas les délais et voies de recours.

8. En dernier lieu, si M. C...soutient qu'il a cherché à obtenir un règlement amiable de cette affaire par tout moyen, étant soucieux du devoir de loyauté envers son administration, qui constituait un " empêchement moral " d'agir en justice, et que s'agissant d'un problème touchant de nombreux agents, il souhaitait laisser place au dialogue, notamment par l'intermédiaire des associations et syndicats, ces circonstances ne sont pas de nature à ce qu'il soit dérogé au délai d'un an mentionné au point 2.

9. Il ressort de ce qui précède que la requête de M.C..., enregistrée le 18 juin 2014 par le tribunal administratif de Lille, soit près de trois ans après qu'il a eu connaissance des arrêtés dont il demandait l'annulation, a été exercée au-delà d'un délai raisonnable et était, par suite, irrecevable.

10. Il résulte de tout ce qui précède que M. C...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, la présidente de la 5ème chambre du tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. C...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D...C..., au ministre de l'économie et des finances et au ministre de l'action et des comptes publics.

N°16DA02456 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3e chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16DA02456
Date de la décision : 31/01/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

54-01-07 Procédure. Introduction de l'instance. Délais.


Composition du Tribunal
Président : M. Albertini
Rapporteur ?: M. Hervé Cassara
Rapporteur public ?: M. Arruebo-Mannier
Avocat(s) : BEGUIN

Origine de la décision
Date de l'import : 09/02/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2019-01-31;16da02456 ?
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