La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

20/12/2018 | FRANCE | N°16DA00371

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3e chambre - formation à 3, 20 décembre 2018, 16DA00371


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société en nom collectif (SNC) Lidl a demandé au tribunal administratif de Lille de condamner l'Etat à lui verser une indemnité de 101 730, 81 euros, assortie des intérêts au taux légal et de leur capitalisation à compter de la date de sa demande préalable, en réparation du préjudice né de l'illégalité de la décision du 30 août 2010 de l'inspecteur du travail et de celle du 9 février 2011 du ministre du travail, de l'emploi et de la santé refusant le licenciement de M. D... B....

Par un

jugement n° 1401129 du 30 décembre 2015, le tribunal administratif de Lille a rejeté l...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société en nom collectif (SNC) Lidl a demandé au tribunal administratif de Lille de condamner l'Etat à lui verser une indemnité de 101 730, 81 euros, assortie des intérêts au taux légal et de leur capitalisation à compter de la date de sa demande préalable, en réparation du préjudice né de l'illégalité de la décision du 30 août 2010 de l'inspecteur du travail et de celle du 9 février 2011 du ministre du travail, de l'emploi et de la santé refusant le licenciement de M. D... B....

Par un jugement n° 1401129 du 30 décembre 2015, le tribunal administratif de Lille a rejeté la demande de la SNC Lidl.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 19 février 2016 et le 19 septembre 2018, la SNC Lidl, représentée par Me C...A..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 30 décembre 2015 du tribunal administratif de Lille ;

2°) de condamner l'Etat à lui verser une indemnité de 101 730, 81 euros, assortie des intérêts au taux légal et de leur capitalisation à compter du 14 mars 2011, en réparation du préjudice né de l'illégalité de la décision du 30 août 2010 de l'inspecteur du travail et de celle du 9 février 2011 du ministre du travail, de l'emploi et de la santé refusant l'autorisation de licencier M. D...B... ;

3°) de mettre la somme de 3 000 euros à la charge de l'Etat au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

---------------------------------------------------------------------------------------------------------

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code du travail ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Jean-Jacques Gauthé, premier conseiller,

- les conclusions de M. Jean-Philippe Arruebo-Mannier, rapporteur public,

- et les observations de Me C...A..., représentant la société Lidl.

Considérant ce qui suit :

1. La SNC Lidl a demandé le 22 juin 2010 à l'inspecteur du travail de Béthune l'autorisation de procéder au licenciement pour inaptitude physique de M. D...B..., directeur de son magasin de Marles-les-Mines (Pas-de-Calais) et titulaire du mandat de conseiller du salarié. Par une décision du 30 août 2010, l'inspecteur du travail a refusé de délivrer cette autorisation. Par une décision du 9 février 2011 faisant suite à un recours hiérarchique de la SNC Lidl, le ministre chargé du travail a confirmé la décision de l'inspecteur du travail et refusé l'autorisation demandée. Par un jugement n° 1101599 du 3 juillet 2013, le tribunal administratif de Lille a annulé ces décisions.

2. Le 19 septembre 2011, la SNC Lidl a demandé une nouvelle fois à l'inspecteur du travail de Béthune l'autorisation de procéder, pour le même motif d'inaptitude physique, au licenciement de M.B.... Par une décision du 21 novembre 2011, celle-ci a été refusée. Sur recours hiérarchique de la SNC Lidl, le ministre du travail, par une décision du 24 mai 2012, a annulé la décision de l'inspecteur du travail et accordé l'autorisation de licencier M.B.... Par un jugement n° 1204292 du 3 juillet 2013, le tribunal administratif de Lille a rejeté la demande de M. B...tendant à l'annulation de cette décision. La SNC Lidl relève appel du jugement du 30 décembre 2015 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande de versement de la somme de 101 730, 81 euros, assortie des intérêts au taux légal et de leur capitalisation à compter du 14 mars 2014, en réparation du préjudice né de l'illégalité des décisions du 30 août 2010 et du 9 février 2011 lui refusant l'autorisation de licencier de M.B....

3. En vertu du code du travail, les salariés protégés bénéficient, dans l'intérêt de l'ensemble des travailleurs qu'ils représentent, d'une protection exceptionnelle. Lorsque le licenciement de l'un de ces salariés est envisagé, il ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées par l'intéressé ou avec son appartenance syndicale. Dans le cas où la demande de licenciement est motivée par l'inaptitude physique, il appartient à l'inspecteur du travail et, le cas échéant, au ministre, de rechercher, sous le contrôle du juge, si cette inaptitude est telle qu'elle justifie le licenciement envisagé. La circonstance que l'avis du médecin du travail, auquel il incombe de se prononcer sur l'aptitude du salarié à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment ou à exercer d'autres tâches existantes, déclare le salarié protégé " inapte à tout emploi dans l'entreprise " ne dispense pas l'employeur, qui connaît les possibilités d'aménagement de l'entreprise et peut solliciter le groupe auquel, le cas échéant, celle-ci appartient, de rechercher toute possibilité de reclassement dans l'entreprise ou au sein du groupe, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformations des postes de travail ou aménagement du temps de travail.

4. Il résulte de l'instruction que pour annuler les décisions du 30 août 2010 de l'inspecteur du travail et du 9 février 2011 du ministre du travail refusant l'autorisation de licencier M.B..., le tribunal administratif de Lille s'est fondé, dans le jugement n° 1101599 du 3 juillet 2013, sur un vice de procédure entachant l'instruction de la demande d'autorisation. Les copies d'écran du site Internet de la société Lidl, réalisées par M.B..., établissant l'existence de postes disponibles, qui ne lui avaient pas été proposés, n'avaient en effet pas été communiquées à la partie adverse, privant ainsi la société Lidl d'une garantie.

5. L'illégalité ainsi commise par l'administration lors de l'instruction de cette demande d'autorisation de licenciement constitue une faute de nature à engager sa responsabilité. Toutefois, le préjudice financier dont se prévaut la société Lidl, constitué par le versement de ses salaires à M. B...et le paiement des charges sociales, pour la période du 1er septembre 2010 au 24 mai 2012 est sans lien avec l'illégalité commise, dès lors que le bien-fondé du refus d'autorisation n'a pas été mis en cause par le jugement n° 1101599 du 3 juillet 2013 du tribunal administratif de Lille. Par suite, et sans que la SNC Lidl puisse soutenir que ce jugement d'annulation aurait dû admettre que le licenciement était justifié sur le fond, en l'absence de lien direct et suffisant entre l'illégalité et le préjudice allégué, les conclusions indemnitaires de la SNC Lidl ne peuvent être rejetées.

6. Il résulte de tout ce qui précède que la SNC Lidl n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que par le jugement du 30 décembre 2015, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être également rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la SNC Lidl est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SNC Lidl et à la ministre du travail.

1

3

N°16DA00371


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3e chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16DA00371
Date de la décision : 20/12/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Responsabilité de la puissance publique - Faits susceptibles ou non d'ouvrir une action en responsabilité - Responsabilité et illégalité - Illégalité n'engageant pas la responsabilité de la puissance publique.

Travail et emploi - Licenciements - Autorisation administrative - Salariés protégés.


Composition du Tribunal
Président : M. Albertini
Rapporteur ?: M. Jean-Jacques Gauthé
Rapporteur public ?: M. Arruebo-Mannier
Avocat(s) : MEYER VERVA DUPONT LEZAN GUERIN

Origine de la décision
Date de l'import : 19/02/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2018-12-20;16da00371 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award