Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. F...D...a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 4 juillet 2017 par lequel le préfet du Pas-de-Calais lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai de départ volontaire, a fixé le pays à destination duquel il doit être reconduit et prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an.
Par un jugement n° 1706201 du 29 novembre 2017, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 25 janvier 2018, M. F...D..., représenté par Me A...C..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir cet arrêté ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de procédure pénale ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Jimmy Robbe, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M.D..., ressortissant tunisien né le 18 octobre 1970, relève appel du jugement du 29 novembre 2017 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 4 juillet 2017 par lequel le préfet du Pas-de-Calais lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai de départ volontaire, a fixé le pays à destination duquel il doit être reconduit et prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an.
Sur la régularité du jugement :
2. Il résulte des motifs du jugement attaqué que le tribunal administratif de Lille, qui n'était pas tenu de répondre à tous les arguments avancés par le requérant, a répondu au moyen soulevé devant lui et tiré de l'irrégularité de la convocation adressée à M. D...dans le cadre d'une enquête de mariage simulé diligentée par le procureur de la République. M. D...n'est donc pas fondé à soutenir que ce jugement serait irrégulier pour être insuffisamment motivé.
Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français :
3. En premier lieu, aux termes de l'article 78-2 du code de procédure pénale : " (...) Sur réquisitions écrites du procureur de la République aux fins de recherche et de poursuite d'infractions qu'il précise, l'identité de toute personne peut être également contrôlée, selon les mêmes modalités, dans les lieux et pour une période de temps déterminés par ce magistrat. Le fait que le contrôle d'identité révèle des infractions autres que celles visées dans les réquisitions du procureur de la République ne constitue pas une cause de nullité des procédures incidentes (... ". Aux termes de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I. - En dehors de tout contrôle d'identité, les personnes de nationalité étrangère doivent être en mesure de présenter les pièces ou documents sous le couvert desquels elles sont autorisées à circuler ou à séjourner en France à toute réquisition des officiers de police judiciaire et, sur l'ordre et sous la responsabilité de ceux-ci, des agents de police judiciaire et agents de police judiciaire adjoints mentionnés aux articles 20 et 21 (1°) du code de procédure pénale./ A l'issue d'un contrôle d'identité effectué en application des articles 78-1, 78-2, 78-2-1 et 78-2-2 du code de procédure pénale, les personnes de nationalité étrangère peuvent être également tenues de présenter les pièces et documents visés à l'alinéa précédent (...) ". L'article L. 611-1-1 du même code précise : " I. - Si, à l'occasion d'un contrôle effectué en application de l'article L. 611-1 du présent code, des articles 78-1, 78-2, 78-2-1 et 78-2-2 du code de procédure pénale (...), il apparaît qu'un étranger n'est pas en mesure de justifier de son droit de circuler ou de séjourner en France, il peut être conduit dans un local de police ou de gendarmerie et y être retenu par un officier de police judiciaire de la police nationale ou de la gendarmerie nationale à fin de vérification de son droit de circulation ou de séjour sur le territoire français. Dans ce cas, l'officier de police judiciaire ou, sous le contrôle de celui-ci, un agent de police judiciaire met l'étranger en mesure de fournir par tout moyen les pièces et documents requis et procède, s'il y a lieu, aux opérations de vérification nécessaires. Le procureur de la République est informé dès le début de la retenue./ L'officier de police judiciaire ou, sous le contrôle de celui-ci, un agent de police judiciaire informe aussitôt l'étranger, dans une langue qu'il comprend ou dont il est raisonnable de supposer qu'il la comprend, des motifs de son placement en retenue et de la durée maximale de la mesure ainsi que du fait qu'il bénéficie :/ 1° Du droit d'être assisté par un interprète ;/ 2° Du droit d'être assisté par un avocat (...) ".
4. Il résulte de ces dispositions que les mesures de contrôle et de retenue qu'elles prévoient sont uniquement destinées à la vérification du droit de séjour et de circulation de l'étranger qui en fait l'objet afin de permettre, lorsque celui-ci n'a pas été en mesure de justifier de son droit de circuler ou de séjourner en France, au procureur de la République, sous le contrôle duquel sont placées ces opérations, de prendre toutes mesures appropriées à cette situation. Elles ne constituent pas, ainsi, une phase de la procédure à la suite de laquelle l'autorité administrative compétente peut statuer sur la situation de l'étranger et, notamment, l'obliger à quitter le territoire français. Ces dispositions n'instituent ni n'impliquent aucune obligation pour les autorités chargées de cette vérification d'informer l'étranger de la nature et des conséquences des mesures, notamment d'éloignement, dont il pourra faire l'objet dans le cas où il n'aura pas été en mesure de justifier de son droit de circuler ou de séjourner en France. Par suite, d'éventuelles irrégularités entachant la mise en oeuvre de ces mesures ne peuvent pas être utilement invoquées pour demander au juge administratif l'annulation d'une mesure d'éloignement.
5. M. D..., convoqué le 4 juillet 2017 par les services de police dans le cadre d'une enquête relative à son mariage diligentée par le procureur de la République, ne peut ainsi utilement soutenir, à l'encontre de la décision du même jour l'obligeant à quitter le territoire français, que cette convocation visait en réalité à permettre au préfet du Pas-de-Calais de prononcer son éloignement et que la procédure suivie dans ce cadre était entachée d'irrégularité. Par suite, le moyen tiré de ce que cette décision serait entachée d'une " fraude par détournement de procédure " ne peut qu'être écarté.
6. En second lieu, M. D...se prévaut de sa communauté de vie avec Mme B...E..., ressortissante française, ainsi que de son mariage avec celle-ci, qui aurait dû être célébré le 8 novembre 2017. Toutefois, ni les attestations de proches, ni le procès-verbal de constat établi par un huissier de justice, retraçant les messages téléphoniques qui auraient été échangés entre M. D... et Mme E...et comportant une copie des photographies enregistrées sur les téléphones portables qui lui ont été présentés, ne sauraient, à eux seuls, établir la réalité et l'ancienneté de cette communauté de vie. Au demeurant, il n'est pas contesté que le procureur de la République s'est opposé, le 10 août 2017, à la célébration de ce mariage En outre, M. D...n'apporte aucune précision sur l'ancienneté de son séjour et sur l'intensité des liens personnels qu'il aurait tissés sur le territoire français. Il n'établit, ni d'ailleurs n'allègue, être dépourvu d'attaches familiales proches dans son pays d'origine. Par suite, le moyen tiré ce que la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français aurait porté une atteinte excessive à son droit au respect de la vie privée et familiale, en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, doit être écarté.
7. Il résulte de tout ce qui précède que M. D...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent, en tout état de cause, être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. D...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. F...D...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera transmise pour information au préfet du Pas-de-Calais.
N°18DA00207 2