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13/11/2018 | FRANCE | N°18DA00891

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 4e chambre - formation à 3, 13 novembre 2018, 18DA00891


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...A...a demandé au tribunal administratif d'Amiens, d'une part, d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 5 février 2018 par lequel le préfet de l'Aisne a refusé de lui délivrer un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, d'autre part, de faire injonction, sous astreinte, au préfet de l'Aisne de lui délivrer un titre de séjour, à défaut, de procéder à un nouvel examen de sa situation.

Par un jugement n° 1800425 du 1

2 avril 2018, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté cette demande.

Procédure dev...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...A...a demandé au tribunal administratif d'Amiens, d'une part, d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 5 février 2018 par lequel le préfet de l'Aisne a refusé de lui délivrer un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, d'autre part, de faire injonction, sous astreinte, au préfet de l'Aisne de lui délivrer un titre de séjour, à défaut, de procéder à un nouvel examen de sa situation.

Par un jugement n° 1800425 du 12 avril 2018, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 2 mai 2018, M.A..., représenté par Me B..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, la décision de refus de séjour prononcée par l'arrêté du préfet de l'Aisne du 5 février 2018 ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Aisne, sous astreinte de 200 euros par jour de retard à l'expiration d'un délai de trente jours à compter de la date de notification de l'arrêt à intervenir, de lui délivrer un titre de séjour dans le cadre de l'admission exceptionnelle au séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Jean-François Papin, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M.A..., ressortissant algérien né le 26 février 1968 et qui a déclaré être entré pour la première fois sur le territoire français le 1er mars 2000, a sollicité du préfet de l'Aisne la régularisation de sa situation administrative. Par un arrêté du 5 février 2018, le préfet de l'Aisne a refusé de lui délivrer un titre de séjour et a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours. M. A...relève appel du jugement du 12 avril 2018 du tribunal administratif d'Amiens en tant qu'il a rejeté les conclusions de sa demande tendant à l'annulation, pour excès de pouvoir, de la décision de refus de séjour prononcée par l'arrêté du 5 février 2018 du préfet de l'Aisne.

2. Aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 : " (...) / Le certificat de résidence d'un an portant la mention "vie privée et familiale" est délivré de plein droit : / 1. Au ressortissant algérien, qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans (...) ". Si M. A...soutient qu'il se serait trouvé, à la date à laquelle l'arrêté du 5 février 2018 a été pris, en situation de prétendre de plein droit à la délivrance d'un certificat de résidence d'un an sur le fondement de ces stipulations, en faisant état d'une entrée en France au cours de l'année 2000, il ressort des pièces du dossier que l'intéressé avait fait l'objet, dès le 8 mars 2001, d'un arrêté d'expulsion à destination de son pays d'origine. Ces pièces révèlent, en outre, que M. A...a été condamné, par un arrêt de la Cour d'appel de Paris du 13 juin 2007, à une peine de deux mois et quinze jours d'emprisonnement, ainsi qu'à la peine complémentaire d'interdiction de territoire français durant deux années, pour s'être soustrait à cet arrêté d'expulsion, avoir usurpé le nom d'un tiers et avoir conduit un véhicule sans être titulaire d'un permis l'y autorisant. S'il ressort cependant des pièces du dossier que M. A...a pu bénéficier, le 31 août 2007, de la délivrance d'un certificat de résidence valable dix ans à la suite de son mariage avec une ressortissante française, d'une part, il est constant que l'interdiction de territoire français dont l'intéressé faisait alors l'objet n'avait pas été portée à la connaissance de l'autorité préfectorale, d'autre part, M. A...ne pouvait ignorer, à la date de la délivrance de ce titre, qu'il ne pourrait légalement s'en prévaloir pour se maintenir en France malgré la peine d'interdiction de territoire dont il faisait l'objet, cette délivrance n'ayant pu lui conférer, dans ces conditions, aucun droit. Ainsi, le maintien de l'intéressé sur le territoire français n'a été, en réalité, rendu possible qu'en conséquence de sa soustraction à l'arrêté d'expulsion pris à son encontre le 8 mars 2001 et à cette peine d'interdiction du territoire, M. A...ayant d'ailleurs été finalement éloigné le 9 avril 2009, à destination de l'Algérie, en exécution de cette peine complémentaire. Dans ces conditions, pour estimer que l'intéressé n'était pas dans la situation visée par les stipulations précitées du 1 de l'article 6 de l'accord franco-algérien qui lui aurait permis de bénéficier de plein droit de la délivrance d'un certificat de résidence d'un an, le préfet de l'Aisne ne s'est pas mépris dans l'appréciation de sa situation.

3. M. A...soutient qu'entré sur le territoire français le 1er mars 2000, il pouvait se prévaloir, à la date à laquelle l'arrêté contesté a été pris, d'un séjour habituel en France de près de dix-huit années. Il ajoute que son mariage avec une ressortissante française n'a pas été dissous, contrairement à ce que retiennent les motifs de cet arrêté, et que l'ancienneté de sa présence en France implique nécessairement qu'il y ait noué des relations amicales et sociales. Toutefois, comme il vient d'être dit au point précédent, M. A...ne peut se prévaloir de l'ancienneté alléguée de sa présence habituelle sur le territoire français, puisque celle-ci n'a été rendue possible que par sa soustraction à plusieurs mesures impliquant son éloignement. En outre, s'il ne ressort pas des pièces du dossier que le mariage de l'intéressé avec une ressortissante française aurait été dissous à la date de l'arrêté en litige, M. A...ne conteste pas qu'il est séparé de son épouse depuis le 20 octobre 2014 et qu'aucun enfant n'est né de leur union. Enfin, M.A..., qui n'apporte aucune précision ni aucun élément au soutien de ses allégations afférentes aux relations qu'il aurait nouées sur le territoire français, n'établit pas, ni d'ailleurs n'allègue, qu'il serait dépourvu d'attaches familiales proches dans son pays d'origine, où résident ses deux enfants, nés en 1999 et 2002. Dans ces conditions, et eu égard notamment aux conditions du séjour de M.A..., la décision refusant de lui délivrer un certificat de résidence n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte excessive, ni n'a méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

4. Les motifs de l'arrêté en litige mentionnent que M. A...serait divorcé depuis le 20 octobre 2014, alors que, comme il a été dit au point précédent, il ressort seulement des pièces du dossier que M. A...et son épouse sont séparés depuis cette date et que leur mariage n'a cependant pas été dissous. Cet arrêté comporte ainsi un motif erroné. Cependant, il résulte de ce qui vient d'être dit au point précédent que cette erreur n'a pas été déterminante dans l'appréciation, à laquelle s'est livré le préfet de l'Aisne, de l'intensité de la vie privée et familiale de l'intéressé en France au regard des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et que le préfet aurait pris la même décision s'il avait pris en compte la réalité de sa situation matrimoniale. Dès lors, le moyen tiré de ce que l'arrêté en litige serait affecté d'une erreur de fait de nature à en entacher la légalité doit être écarté.

5. Si l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, relatif aux conditions dans lesquelles les ressortissants étrangers peuvent bénéficier d'une admission exceptionnelle au séjour, ne s'applique pas aux ressortissants algériens, dont la situation est régie de manière exclusive par l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 et si cet accord ne prévoit pas de semblables modalités d'admission exceptionnelle au séjour, ses stipulations n'interdisent pas au préfet de délivrer un certificat de résidence à un ressortissant algérien qui ne remplit pas l'ensemble des conditions auxquelles est subordonnée sa délivrance de plein droit. Il appartient au préfet, dans l'exercice du pouvoir discrétionnaire dont il dispose sur ce point, d'apprécier, compte tenu de l'ensemble des éléments de la situation personnelle de l'intéressé, l'opportunité d'une mesure de régularisation.

6. Comme il a été dit aux points 2 et 3, l'ancienneté alléguée du séjour de M.A..., qui n'a pas noué de relations stables et anciennes en France, ne peut être tenue pour établie. Dans ces conditions, ni le fait que l'intéressé aurait travaillé au moins huit mois durant les vingt-quatre mois précédant la date à laquelle l'arrêté en litige a été pris, ni la circonstance qu'il serait bien intégré et que sa présence ne constituerait pas une menace actuelle pour l'ordre public, ni aucune des autres circonstances mentionnées aux points 2 et 3 ne sont suffisantes, à les supposer même avérées, à permettre d'établir que, pour refuser de faire usage, en faveur de l'intéressé, du pouvoir de régularisation qui lui est reconnu, le préfet de l'Aisne aurait commis une erreur manifeste d'appréciation. M. A...ne peut à cet égard utilement invoquer les énonciations de la circulaire du ministre de l'intérieur du 28 novembre 2012, relative aux conditions d'examen des demandes d'admission au séjour déposées par des ressortissants étrangers en situation irrégulière dans le cadre des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qui ne consituaient que des lignes directrices destinées à éclairer les préfets dans la mise en oeuvre de leur pouvoir de régularisation, et, par suite, ne s'imposaient pas à l'autorité préfectorale.

7. Il résulte de tout ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande. Ses conclusions à fin d'injonction assortie d'astreinte et celles qu'il présente au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent, par voie de conséquence, être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...A...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera transmise au préfet de l'Aisne.

1

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N°18DA00891


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 4e chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 18DA00891
Date de la décision : 13/11/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : Mme Grand d'Esnon
Rapporteur ?: M. Jean-François Papin
Rapporteur public ?: M. Riou
Avocat(s) : CECCATO

Origine de la décision
Date de l'import : 20/11/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2018-11-13;18da00891 ?
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