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16/10/2018 | FRANCE | N°16DA00793

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2ème chambre - formation à 3, 16 octobre 2018, 16DA00793


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme G...D...a demandé au tribunal administratif d'Amiens d'annuler la décision du 22 avril 2015 du directeur du centre hospitalier de Ham prononçant son licenciement, de condamner le centre hospitalier de Ham à lui verser la somme de 43 495,56 euros au titre de la perte de sa rémunération pour la période du 9 avril 2013 au 9 juin 2015 et une somme de 1 144,62 euros par mois à compter du mois de juin 2015 jusqu'à sa réintégration, d'enjoindre au centre hospitalier de la réintégrer dans le cadre d'un con

trat à durée indéterminée sur un poste équivalent à celui qu'elle occupait ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme G...D...a demandé au tribunal administratif d'Amiens d'annuler la décision du 22 avril 2015 du directeur du centre hospitalier de Ham prononçant son licenciement, de condamner le centre hospitalier de Ham à lui verser la somme de 43 495,56 euros au titre de la perte de sa rémunération pour la période du 9 avril 2013 au 9 juin 2015 et une somme de 1 144,62 euros par mois à compter du mois de juin 2015 jusqu'à sa réintégration, d'enjoindre au centre hospitalier de la réintégrer dans le cadre d'un contrat à durée indéterminée sur un poste équivalent à celui qu'elle occupait et de reconstituer sa carrière, dans un délai de sept jours à compter du jugement à intervenir sous astreinte de 500 euros par jour de retard.

Par un jugement n° 1501838 du 19 février 2016, le tribunal administratif d'Amiens a annulé la décision du 22 avril 2015 du directeur du centre hospitalier de Ham prononçant le licenciement de MmeD..., condamné cet établissement à lui verser la somme de 7 501,69 euros en indemnisation du préjudice résultant de son éviction du 9 avril 2013 au 31 août 2015, enjoint au centre hospitalier de la réintégrer sous couvert d'un contrat à durée indéterminée et de la rétablir dans ses droits à pension pendant la période d'éviction dans un délai de deux mois à compter de la date de lecture du jugement et rejeté le surplus des conclusions de sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 25 avril 2016, le centre hospitalier de Ham, représenté par Me A...F..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif d'Amiens du 19 février 2016 en tant qu'il a annulé la décision du 22 avril 2015 prononçant le licenciement de MmeD..., l'a condamné à lui verser la somme de 7 501,69 euros en indemnisation du préjudice résultant de son éviction du 9 avril 2013 au 31 août 2015, lui a enjoint de la réintégrer sous couvert d'un contrat à durée indéterminée et de la rétablir dans ses droits à pension pendant la période d'éviction dans un délai de deux mois à compter de la date de lecture du jugement ;

2°) de rejeter la demande présentée par Mme D...devant le tribunal administratif d'Amiens ;

3°) de mettre une somme de 2 000 euros à la charge de Mme D...au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 ;

- la loi n° 2012-347 du 12 mars 2012 ;

- le décret n° 91-155 du 6 février 1991 ;

- le décret n° 2015-1434 du 5 novembre 2015 ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Muriel Milard, premier conseiller,

- les conclusions de Mme Anne-Marie Leguin, rapporteur public,

- et les observations de Me B...C..., représentant le centre hospitalier de Ham et de Me E...H..., représentant MmeD....

Considérant ce qui suit :

Sur l'appel principal :

1. A la suite du jugement n° 1301977 du tribunal administratif d'Amiens du 7 novembre 2014, devenu définitif, le directeur du centre hospitalier de Ham a, par une décision du 22 avril 2015, requalifié le dernier contrat de MmeD..., agent d'entretien, qui a bénéficié au cours des huit dernières années ayant précédé l'entrée en vigueur de la loi n° 2012-347 du 12 mars 2012, de quarante-trois contrats pour assurer le remplacement momentané de fonctionnaires hospitaliers indisponibles ou exercer des fonctions occasionnelles, en contrat à durée indéterminée. Par la même décision, il l'a licenciée de ses fonctions d'agent d'entretien et lui a versé une indemnité de licenciement d'un montant de 572,31 euros correspondant à un demi-mois de salaire. Le centre hospitalier de Ham relève appel du jugement du 19 février 2016 du tribunal administratif d'Amiens en tant qu'il a annulé cette décision du 22 avril 2015, l'a condamné à verser à Mme D...la somme de 7 501,69 euros en indemnisation du préjudice résultant de son éviction du 9 avril 2013 au 31 août 2015, lui a enjoint de la réintégrer sous couvert d'un contrat à durée indéterminée et de la rétablir dans ses droits à pension pendant la période d'éviction dans un délai de deux mois à compter de la date de lecture du jugement.

2. En premier lieu, aux termes de l'article 3 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires : " Sauf dérogation prévue par une disposition législative, les emplois civils permanents de l'Etat, des régions, des départements, des communes et de leurs établissements publics à caractère administratif sont (...) occupés (...) par des fonctionnaires régis par le présent titre (...) ". Par exception à ce principe, des agents non titulaires peuvent être recrutés par des contrats à durée déterminée ou indéterminée dans les conditions prévues aux articles 9 et 9-1 de la loi du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière. Il résulte de ces dispositions que le législateur a entendu que les emplois civils permanents de l'Etat, des collectivités territoriales et de leurs établissements publics à caractère administratif soient en principe occupés par des fonctionnaires et n'a permis le recrutement d'agents contractuels qu'à titre dérogatoire et subsidiaire, dans les cas particuliers énumérés par la loi, que ce recrutement prenne la forme de contrats à durée déterminée ou, par application des dispositions issues de la loi du 26 juillet 2005, de contrats à durée indéterminée. Par suite, un agent contractuel ne peut tenir de son contrat le droit de conserver l'emploi pour lequel il a été recruté. Lorsque l'autorité administrative entend affecter un fonctionnaire sur cet emploi ou supprimer cet emploi dans le cadre d'une modification de l'organisation du service, elle peut, pour ce motif, légalement écarter l'agent contractuel de cet emploi.

3. Le centre hospitalier de Ham fait valoir qu'à la date de la décision en litige, les dispositions de l'article 41-3 du décret n° 91-155 du 6 février 1991, selon lesquelles le licenciement d'un agent contractuel recruté pour répondre à un besoin permanent doit être justifié notamment par la suppression du besoin ou de l'emploi ayant fondé le recrutement de l'agent, n'étaient pas applicables à la situation de Mme D...dès lors que ces dispositions n'ont été créées que par le décret n° 2015-1434 du 5 novembre 2015, soit postérieurement à cette décision. Si les dispositions de l'article 41-3 du décret n° 91-155 du 6 février 1991 précitées n'étaient pas applicables au licenciement de Mme D...dès lors que la procédure a été engagée antérieurement à la publication de ce décret, les premiers juges ont cependant, pour annuler la décision de licenciement en litige, entendu faire application du principe général du droit, dont s'inspirent tant les dispositions du code du travail relatives à la situation des salariés dont l'emploi est supprimé que les règles du statut général de la fonction publique qui imposent de donner, dans un délai raisonnable, aux fonctionnaires en activité dont l'emploi est supprimé une nouvelle affectation correspondant à leur grade, qu'il incombe à l'administration, avant de pouvoir prononcer le licenciement d'un agent contractuel recruté en vertu d'un contrat à durée indéterminée, motivé par la suppression de l'emploi permanent qu'il occupait dans le cadre d'une modification de l'organisation du service ou par l'affectation d'un fonctionnaire sur cet emploi, de chercher à reclasser l'intéressé. Par suite, le moyen soulevé par le centre hospitalier de Ham tiré de l'erreur de droit commise par les premiers juges doit, en tout état de cause, être écarté.

4. En second lieu, le centre hospitalier de Ham fait valoir qu'il a recherché à reclasser Mme D...mais que cette recherche a été infructueuse dès lors que l'intéressée qui exerçait les fonctions d'agent d'entretien, n'était pas titulaire d'un diplôme lui permettant d'exercer les fonctions d'aide-soignante ou d'infirmière, seules professions pour lesquelles des recrutements étaient projetés, et que la situation financière de l'établissement ne lui permet pas de créer un emploi en surnombre. Il ressort des pièces du dossier que Mme D...exerçait les fonctions d'agent d'entretien, à la blanchisserie du centre hospitalier de Ham dont l'activité a fortement diminué au 1er janvier 2013. Cependant, si le centre hospitalier fait valoir que le reclassement de Mme D...était impossible, il ne l'établit pas par le seul compte-rendu de l'entretien qui s'est tenu le 26 décembre 2014 avec l'intéressée et qui, s'il mentionne les recherches auxquelles l'établissement a procédé, ne permet pas, à lui seul, d'en établir l'exactitude matérielle des résultats, notamment à défaut de production du tableau des emplois par grade permettant de connaître précisément, à la date de la décision attaquée, le nombre exact d'agents d'entretien qualifiés employés, leur affectation et les éventuels postes vacants. Au surplus, s'il ressort de ce compte-rendu d'entretien qu'un reclassement sur des emplois ponctuels en contrat à durée déterminée ont été proposés à MmeD..., la durée indéterminée du contrat dont elle bénéficiait s'opposait à ce que des contrats d'une telle nature lui fussent proposés. Par suite, le centre hospitalier de Ham n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont annulé la décision du 22 avril 2015 en litige en tant qu'elle licencie Mme D...sans recherche de reclassement de ses fonctions d'agent contractuel titulaire d'un contrat à durée indéterminée. Le centre hospitalier a ainsi commis une faute de nature à engager sa responsabilité. Il n'est, par suite, pas fondé à soutenir que c'est à tort qu'il a été condamné à verser à Mme D...une somme de 7 501,69 euros en réparation du préjudice résultant de son éviction du 9 avril 2013 au 31 août 2015.

Sur l'appel incident :

5 Mme D...demande le versement d'une somme de 4 731,80 euros au titre de la perte de sa rémunération pour la période de septembre 2015 à février 2016. Elle justifie avoir perçu pendant cette période une somme de 4 394,65 euros alors que le montant de sa rémunération se serait élevée à la somme de 6 295, 41 euros si elle avait été employée par le centre hospitalier de Ham. Dans ces conditions, il sera fait une exacte appréciation du préjudice subi par Mme D...en lui allouant une somme de 1 900,76 euros.

6. Il résulte de tout ce qui précède que le centre hospitalier de Ham n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, qui n'est entaché d'aucune erreur de fait, le tribunal administratif d'Amiens a partiellement fait droit à la demande de MmeD.... Le centre hospitalier de Ham versera à Mme D...une somme de 1 900,76 euros au titre du préjudice subi pendant la période de septembre 2015 à février 2016. Doivent être rejetées, par voie de conséquence, les conclusions du centre hospitalier de Ham présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit à la demande présentée au titre des mêmes dispositions par Mme D...et de mettre à la charge du centre hospitalier de Ham une somme de 1 000 euros.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête du centre hospitalier de Ham est rejetée.

Article 2 : Le centre hospitalier de Ham versera à Mme D...une somme de 1 900,76 euros au titre du préjudice subi pendant la période de septembre 2015 à février 2016.

Article 3 : Le centre hospitalier de Ham versera à Mme D...une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le jugement n° 1501838 du 19 février 2016 du tribunal administratif d'Amiens est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 5 : Le surplus des conclusions de Mme D...est rejeté.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié au centre hospitalier de Ham et à Mme G...D....

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N°16DA00793


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16DA00793
Date de la décision : 16/10/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Fonctionnaires et agents publics - Agents contractuels et temporaires - Nature du contrat.

Fonctionnaires et agents publics - Agents contractuels et temporaires - Fin du contrat - Licenciement.


Composition du Tribunal
Président : M. Sorin
Rapporteur ?: Mme Muriel Milard
Rapporteur public ?: Mme Leguin
Avocat(s) : MOURNAUD

Origine de la décision
Date de l'import : 23/10/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2018-10-16;16da00793 ?
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