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21/06/2018 | FRANCE | N°16DA01159

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3e chambre - formation à 3, 21 juin 2018, 16DA01159


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...A...a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 28 mai 2014 par laquelle le ministre chargé du travail, a, sur recours hiérarchique, d'une part annulé la décision du 28 novembre 2013 par laquelle l'inspecteur du travail de la 17ème section de la Seine-Maritime avait refusé l'autorisation de le licencier pour faute et d'autre part accordé cette autorisation à son employeur, la société par actions simplifiée (SAS) Pochet du Courval.

Par un j

ugement n° 1402755 du 28 avril 2016, le tribunal administratif de Rouen a annulé c...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...A...a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 28 mai 2014 par laquelle le ministre chargé du travail, a, sur recours hiérarchique, d'une part annulé la décision du 28 novembre 2013 par laquelle l'inspecteur du travail de la 17ème section de la Seine-Maritime avait refusé l'autorisation de le licencier pour faute et d'autre part accordé cette autorisation à son employeur, la société par actions simplifiée (SAS) Pochet du Courval.

Par un jugement n° 1402755 du 28 avril 2016, le tribunal administratif de Rouen a annulé cette décision.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés le 27 juin 2016 et le 18 octobre 2016, la société Pochet du Courval, représentée par Me F...E..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 28 avril 2016 du tribunal administratif de Rouen ;

2°) de rejeter la demande de M. A...devant ce tribunal ;

3°) de mettre à la charge de M. A...la somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code du travail ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Jean-Jacques Gauthé, premier conseiller,

- les conclusions de M. Jean-Philippe Arruebo-Mannier, rapporteur public,

- et les observations de Me D...B..., représentant la société Pochet du Courval.,

Considérant ce qui suit :

1. M. C...A...a été embauché le 12 octobre 1995, sous contrat à durée déterminée, au poste de relais verre froid par la société par action simplifiée Pochet du Courval, dans sa verrerie de Guimerville (Seine-Maritime). Il est titulaire d'un contrat à durée indéterminée depuis le 1er janvier 1998 comme opérateur verre chaud au secteur tri. Il exerce, depuis février 2009, le mandat de délégué syndical CGT et, depuis février 2011, celui de titulaire du 1er collège au comité d'établissement, ainsi que celui de suppléant au 1er collège au comité central d'entreprise. La société Pochet du Courval relève appel du jugement du 28 avril 2016 par lequel le tribunal administratif de Rouen a annulé la décision du 28 mai 2014 du ministre du travail, a sur recours hiérarchique de l'employeur, annulé la décision du 28 novembre 2013 de l'inspecteur du travail de la 17ème section de la Seine-Maritime refusant d'autoriser le licenciement de M. A... et a autorisé son licenciement pour faute.

2. En vertu des dispositions du code du travail, les salariés légalement investis de fonctions représentatives bénéficient, dans l'intérêt de l'ensemble des salariés qu'ils représentent, d'une protection exceptionnelle. Lorsque le licenciement d'un de ces salariés est envisagé, ce licenciement ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées ou l'appartenance syndicale de l'intéressé. Dans le cas où la demande de licenciement est motivée par un comportement fautif, il appartient à l'inspecteur du travail, et le cas échéant au ministre, de rechercher, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si les faits reprochés au salarié sont d'une gravité suffisante pour justifier son licenciement, compte tenu de l'ensemble des règles applicables au contrat de travail de l'intéressé et des exigences propres à l'exécution normale du mandat dont il est investi.

3. Il ressort, d'une part, des pièces du dossier, et particulièrement de quatre attestations de collègues de M.A..., produites en cause d'appel, que dans la nuit du 13 au 14 septembre 2013, vers 4 heures 30, celui-ci était dans un état anormal à son poste de travail sur la ligne 52, parlant de façon hésitante et peu distincte, avec l'haleine alcoolisée, et ne paraissait pas pouvoir remplir normalement ses fonctions. Il a refusé de se soumettre à l'éthylotest, de signer la fiche de constat " Comportement anormal " et a annoncé qu'il se plaçait en délégation de 4 heures à 5 heures du matin, en s'installant dans le local syndical. C'est son frère qui est venu le chercher sur son lieu de travail, vers 7 heures 50. Ce comportement est contraire à l'article 3.5 du règlement intérieur de la verrerie Pochet du Courval qui interdit l'introduction, la distribution et la consommation de toute boisson alcoolisée sur les lieux de travail. M. A...ne peut utilement contester ces faits en soutenant que la fiche de constat " Comportement anormal " qui en fait état n'avait pas été produite à l'inspecteur du travail, dès lors que le ministre chargé du travail a annulé sa décision du 28 novembre 2013, par laquelle il refusait d'autoriser le licenciement de M.A.... D'autre part, celui-ci avait, déjà fait l'objet d'une mise à pied de trois jours, le 8 mars 2012, pour des faits d'ivresse à son poste de travail intervenus le 11 février 2012. Les faits reprochés de la nuit du 13 au 14 septembre 2013, qui ne sont pas sérieusement contestés par M.A..., sont sans lien avec le conflit social intervenu entre juin et août 2013 au sein de l'entreprise, auquel il a activement participé. Ils sont également sans lien avec les fonctions représentatives qu'il exerce. Par suite, la société Pochet du Courval est fondée à soutenir que c'est à tort, que le jugement attaqué a, pour ce motif, annulé la décision du 28 mai 2014 du ministre chargé du travail, ayant d'une part annulé la décision du 28 novembre 2013 de l'inspecteur du travail refusant d'autoriser le licenciement de M.A..., et a d'autre part autorisé son licenciement pour faute.

4. Il appartient toutefois à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. A...devant la juridiction administrative.

5. Aux termes des articles R. 2421-7 et R. 2421-16 du code du travail, " L'inspecteur du travail et, en cas de recours hiérarchique, le ministre examinent notamment si la mesure de licenciement envisagée est en rapport avec le mandat détenu, sollicité ou antérieurement exercé par l'intéressé ".

6. Il ressort des pièces du dossier que si des sanctions ont été effectivement prises envers des syndicalistes de la verrerie Pochet du Courval, après le conflit social de juin-août 2013, la matérialité des faits reprochés à M. A...et leur récidive est établie. L'enquête contradictoire diligentée par le ministre du travail, suite au recours hiérarchique de l'employeur contre la décision de l'inspecteur du travail, n'a en outre fait apparaître aucun élément de discrimination. Au demeurant, dès le 24 septembre 2013, la direction confédérale de la CGT a aussi informé l'employeur de M. A...que celui-ci ne pouvait plus parler ou signer au nom de ce syndicat et ceci définitivement. Le moyen tiré du lien de la mesure de licenciement envisagée et les mandats détenus par M. A...doit, par suite, être écarté.

7. Il résulte de tout ce qui précède que la société Pochet du Courval est fondée à soutenir que c'est à tort que par le jugement du 28 avril 2016, le tribunal administratif de Rouen a annulé la décision du 28 mai 2014 par laquelle le ministre chargé du travail a d'une part annulé la décision du 28 novembre 2013 de l'inspecteur du travail ayant refusé l'autorisation de licencier M. A...et d'autre part accordé cette autorisation. Les conclusions de M.A..., partie perdante, tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent, par voie de conséquence, être rejetées. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions de la société Pochet du Courval présentées sur le fondement de ces dispositions.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du 28 avril 2016 du tribunal administratif de Rouen est annulé.

Article 2 : La demande de M. A...devant le tribunal administratif de Rouen est rejetée.

Article 3 : Les conclusions de la société Pochet du Courval présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la société Pochet du Courval, à M. C...A...et au ministre du travail.

Copie sera adressée, pour information, au directeur régional des entreprises, de la concurrence, du travail et de l'emploi de Normandie

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N°16DA01159

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N°"Numéro"


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3e chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16DA01159
Date de la décision : 21/06/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

66-07-01-04-02 Travail et emploi. Licenciements. Autorisation administrative - Salariés protégés. Conditions de fond de l'autorisation ou du refus d'autorisation. Licenciement pour faute.


Composition du Tribunal
Président : M. Albertini
Rapporteur ?: M. Jean-Jacques Gauthé
Rapporteur public ?: M. Arruebo-Mannier
Avocat(s) : CAPITAINE

Origine de la décision
Date de l'import : 03/07/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2018-06-21;16da01159 ?
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